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traits de son visage, couvert d'un épais mouchoir, à cause d'un vaste érésipèle qu'il feignait d'y avoir. Cet homme, inanimé et si malade en apparence, était le duc de Guise en pleine santé et brûlant d'amour pour Marguerite. Sa chambre communiquait à celle de la Reine par une porte dont l'écuyer du balafré avait eu soin de faire faire une clé. Nous passons sous silence les détails de l'entrevue qui eut lieu entre le duc et la belle Marguerite de Valois; on pourra les lire dans L'histoire et les amours du duc de Guise, Paris, Ve Mabre Cramoisi, 1694, in-12, page 143 et suivantes; nous nous contenterons de dire que le lendemain, avant le jour, le malade à l'érésypèle partit pour Nancy et que les personnes de l'auberge remarquè rent qu'il était plus dispos et plus leste que la veille. De son côté la Reine, un peu plus tard, prit la

route de Cambrai, où elle retrou va l'inévitable archevêque et sa suite « qui avoit, dit-elle dans ses » Mémoires, les habits et l'appa>>rence de vrais Flamands, com>> me ils sont fort grossiers en ce » quartier-là »; phrase qu'on ne doit pas prendre en mauvaise part ajoutent les commentateurs du tems, le mot grossier n'exprimant alois que la hauteur et l'épaisseur

du corps.

A. D.

ENTRÉE D'UN GOUVERNEUR DE FLANDRE. (26 février 1631). - C'était autrefois une cérémonie imposante et significative, que la réception d'un gouverneur de la

province de Lille, Douai et Orchies. Aujourd'hui, qu'on a joint à cette province la Flandre maritime, le Hainaut français et le Cambrésis, pour en faire le département du Nord, on attache beaucoup moins d'importance au céré– monial; et les préfets, les généraux de division, arrivent tout bonnement par la diligence (quand ils n'ont pas de voiture à eux), prennent possession de leur hôtel, où ils reçoivent le lendemain les visites de corps, entendent et répondent des lieux communs administratifs; le tout sert remplir une demi-colonne du journal officiel, et puis l'on n'y pense plus.

Nos bons ayeux entendaient autrement les rapports des administrateurs et des administrés. Ils rendaient plus d'honneurs aux premiers; mais en revanche ils exigeaient d'eux des garanties pour leurs libertés; car ils étaient chatouilleux sur cet article, nos bourgeois des communes de Flandre, tout ce qui touchait à leurs droits et rien n'égalait leur vigilance pour ou aux intérêts de la communauté.

Or, le 26 février 1631, on attendait à Lille Messire Alexandre de Bournonville, comte de Hénin, chevalier de la Toison-d'Or, nouvellement nommé par le roi d'Espagne gouverneur de la province de Lille, Douai et Orchies (à cette époque, le gouverneur réunissait en sa personne l'autorité civile et militaire). Huit pièces de canon avaient été placées sur le rempart, aux deux côtés de la porte de la Magdeleine. Une compagnie bour

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geoise gardait ladite porte, et les quatre compagnies du serment, à savoir les archers, les arbalêtriers, les canonniers et les escrimeurs, étaient allées au devant du seigneur comte, jusqu'à la Croix des Poissonniers, qui formait alors la limite de la banlieue (1).

Vers onze heures, le gouverneur parut avec une suite nombreuse de seigneurs et gentilshommes. Les ar

chers et arbalêtriers se mirent aussitôt en mouvement pour le précéder vers la ville, tandis que les compagnies de Ste-Barbe et de St. Michel demeurèrent pour fermer la marche.

Dès que le cortège fut à la porte, l'artillerie et la mousqueterie donnèrent joyeusement; car, ce jour là le magistrat avait délivré de la poudre à la compagnie bourgeoise ainsi qu'aux canonniers.

Arrivé devant la maison échevinale (située sur la petite place à côté des Halles), le seigneur comte mit pied à terre ; dans le même moment, sortaient de ladite maison

les députés du magistrat, précédés du hérault revêtu de sa cotte d'armes écarlate, à la belle fleur de lys en argent, devant et derrière.

Ces députés étaient Paul de la Grange, écuyer, seigneur de Nédonchel, Rewart; messire Pierre de Croix, chevalier, seigneur d'Oyembourg, Mayeur; Bauduin du Bois, écuyer, seigneur d'Heri

(1) Cette petite croix de pierre existe encore dans le faubourg de Gand, entre la campagne de M Libert de Beaumont et la maison du maréchal.

gnies, et Jean Dubéron, échevins. Avec eux marchaient Me PiatMouton, premier conseiller pensionnaire chargé de la harangue d'usage, et Allard Cuvillon, écuyer, procureur de la ville.

Après la harangue et le baisement de mains, on fit entrer le seigneur Comte dans la chambre des Etats, où il fut requis par le Reward de produire sa patente de gouverneur, laquelle ayant été trouvée bien en règle, le sieur de Nédonchel conduisit le comte dans

la salle du conclave où tout le corps

du magistrat était assemblé. Il alla d'abord se reposer, en une chayère enrichie de velours cramoisi qui était au-devant du bureau, et au milieu y avait sur un coussin de velours rouge le missel ouvert. Là, toutes les portes étant ouvertes, All ard Cuvillon donna publiquement lecture de la patente du gouverneur et requit celui-ci de faire serment à la ville, ce qui fut fait en cette façon : Le gouverneur, debout, chef nud, la main sur l'Evangile; les magistrats assis, également découverts. « Vous fian cez et jurez, dit Allard-Cuvillon, comme gouverneur et bailli souverain de Lille, que par vous ni par autrui, ne irez, ni aller ferez, ne souffrirez à faire aucune chose qui soit contre la loy, les coutumes, libertés et franchises de la ville de Lille, et que icelles tenerez, garderez, tenir et garder ferez loyalement et à la bonne foi sans enfreindre ou venir encontre en aucune manière. » — « Je le jure, répondit le gouverneur ; et aussitôt il alla s'as

seoir au banc des échevins à la première place, où lui fut fait présent de deux pièces de vin en na

ture.

Après cette cérémonie, usitée de tems immémorial, le gouverneur, duement installé, descendit dans la grande salette. Cinq tables servies avec profusion, attendaient l'illustre compagnie, à laquelle vinrent s'adjoindre les prélats de Loos et de Cysoing, le doyen du chapitre saint Pierre, les baillis des quatre seigneurs hauts-justiciers; les commissaires au renouvellement de la loi, le bailli de Lille, les deux lieutenans de la gouvernance, les gentils-hommes qui avaient accompagné le gouverneur, les capitaines et connétables des compagnies bourgeoises les capitaines réformés ; et les lieutenans et alfiers de la compagnie de garde ce jour-là.

Y eut-il de la bonne et franche gaité dans une pareille réunion? c'est ce dont on ne pourrait douter. Les mœurs du temps permettaient à la gravité échevinale le s'oublier parfois dans la joie des festins, sans rien ôter de la haute considération qui environnait cette magistrature bourgeoise, gardienne fidèle des droits du peuple, dont elle savait toutefois réprimer les écarts quand il voulait abuser de ses libertés.

des, et que l'on employait avant qu'on fit usage de tonneaux.

Quelques historiens ont prétendu qu'Orchies était un château de l'empereur Louis--le-Débonnaire, et que le tour de ses murailles était plus grand que ne le sont aujourd'hui ceux des villes de Lille et Douai; mais ils n'ont donné aucune preuve à l'appui de cette assertion; ils n'ont point indiqué les causes de la décadence, et n'ont pas expliqué le silence que les anciens écrivains ont gardé sur ce point.

Orchies ne fut d'abord qu'un village, donné à l'abbaye de Marchiennes, par Sainte-Rictrude, sa fondatrice. Gualbert, moine de cette abbaye, qui écrivait en 1103, est le premier qui ait parlé de cette ville. Il rapporte que Marchiennes avait perdu Orchies, par la donation qu'une abbesse en avait faite cent ans auparavant, un seigneur. C'est à Bauduin à la belle barbe, que ce don avait été fait, parcequ'il avait été le restaurateur de l'abbaye de Marchiennes. Ce prince fit bâtir à Orchies un château, qu'il habita quelquefois, ainsi que d'autres comtes ou comtesses de Flandre.

les villes de Tournai, Douai et VaOrchies, placé au centre entre lenciennes, qui se peuplaient et s'agrandissaient, trouva un grand

(Gazette de Flandre et d'Artois). débit des poteries, tuiles, pannes

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de terre, qu'il fabriquait. Grand nombre d'ouvriers vinrent s'y établir, et son accroissemeut devint. considérable. Sa position qui le

Marguerite de Flandre, son épou-
se, au mois de juillet 1225, confir-
mèrent ces priviléges. Au moment
où Philippe accorda une commu-
ne à Orchies, il y établit aussi un
mais com-
mayeur et un châtelain;
me le produit de leurs offices ne
les eût point indemnisés de leurs
charges, il y joignit différens droits
que l'un et l'autre tinrent de lui
en fief. Le châtelain obtint en ou-
tre un fief, qui passa ensuite aux
Templiers de Douai. La châtelenie
fut possédée par les seigneurs de
Singhin, de Pont-à-Vendin et de
Raches.

rendait, pour ainsi dire, l'entrepôt des villes que nous venons de nommer, dont le commerce consistait en draperies et étoffes de laine, lui procura bientôt des manufactures de ce genre, qui lui donnèrent une grande aisance. Philippe d'Alsace, comte de Flandre, comptant sur les revenus certains qu'il lui produisait, le donna à Mathilde, son épouse, pour partie de son douaire. Les habitans d'Orchies profitèrent de cette circonstance, pour demander à Philippe une commune (1) et autres priviléges. Ce prince les leur accorda, par diplôme du mois de mai 1188. Dans cet acte, il déclare qu'il veut que la Orchies eut même quelqu'éclat, commune d'Orchies soit absolu- par les fondations et le séjour qu'y ment la même que celle existante firent Guillaume de Dampierre et alors à Douai; que les habitans sa femme Marguerite, à qui cette d'Orchies, ne puissent être traduits ville avait été donnée en dot avec en justice dans le pays de Pévèle, l'Ostrevent, Crêvecœur et Arleux. ailleurs que dans leur ville, que Cette princesse, comme comtesse celui qui aura demeuré à Orchies de Flandre, confirma les priviléun an et un jour, sans réclamation, ges de la draperie d'Orchies, et soit reconnu libre; et, il permet établit des réglemens à ce sujet. aux mêmes habitans, d'établir des Ils furent exécutés jusqu'en 1393, fours, brasseries et des moulins à que Charles VI, roi de France, déchevaux. Philippe - Auguste, en fendit que toute manufacture de 1207, Guillaume de Dampierre et draps existât en cette ville; permettant, néanmoins, aux habitans de fabriquer des sayes et autres étoffes légères. L'empereur Charles V, les autorisa, en 1529, à laire des tapis et des étoffes à fleurs, dans le genre des damas ; mais Or

(1) La commune formait une confédéra tion entre les citoyens; elle leur accordait un échevinage, un srel particulier, différent de celui dont se servirent, dans la suite, les échevins des villes. Celui de Douai s'appelait Martinet, parcequ'il représentait

un St -Martin, vêtu d'une cotte de mailles, chies, déjà appauvri par les incen

courant à cheval, l'épée en l'air, avec cette inscription: SIGILLUM DUACENS: COMMUNIE. Les communes avaient, en outre, une bancloque ou cloche de ban, pour assembler les citoyens; un beffroi ou clocher, pour la placer et faire le guet; et une juridiction sur les habitans et le territoire de la commune.

dies, les pillages et les émigrations ne put soutenir la concurrence avec Lille et Tournai, et même avec Roubaix et Tourcoing. Sou commerce se perdit peu peu, et il n'en restait plus au moment de

la révolution française pour mémoire, que la nomination anzuelle des égards de draps, de damas, de hautelisse.

Cette ville fut prise après un rude assaut, par Philippe-le-Bel, à la fin de juillet 1304, dans la guerre qu'il fit aux enfans de Gui de Dampierre; elle fut cédée à la France, comme faisant partie des châtelenies de Lille et Douai, par le traité d'Orchies du mois de juin 1305. Elle ne fut reprise nominativement, dans les actes relatifs au transport de Flandre, qu'en 1351, lorsque Béthune, qui faisait la troisième ville de ce transport, en eut été distraite. Elle rentra au pouvoir des comtes de Flandre, en 1370, par le mariage de Philippe, duc de Bourgogne, avec Marguerite, fille du comte Louis Lemâle, conclu l'année précédente. Philip pe et Marguerite, par traité du 23 janvier 1586, ayant consenti au rachat futur de Lille, Douai et Orchies, il fut stipulé, entre autres conditions, que si le comté de Ponthieu ne suffisait pas pour procurer à leurs héritiers dix mille livres de rente, la ville et chatelenie d'Orchies, pourraient leur être rendues. Ce fut ce traité que Louis XIV fit valoir dans sa première guerre de Flandre contre l'Espagne, quoique Louis XI eut renoncé au rachat, par celui qu'il fit avec Maximilien, archiduc d'Autriche, et ses enfans, le 23 décembre 1482; comme avait aussi fait François Ier, par l'article 9 du traité de Madrid, du 14 janvier 1526; par l'article 8 de celui de

Cambrai, du 3 août 1529; et plus particulièrement encore, par celui de Crespi, du 18 septembre 1544.

Le 1er août 1340, pendant le siége de Tournai, par le roi d'Angleterre, le comte de Hainaut, son brûla en entier, sous le prétexte allié, prit Orchies, qu'il pillá et

que cette ville n'était point encore fermée, toute résistance, pour la défendre, en cas de nouvelle attaeut été vaine. que,

Un incendie, qui se manifesta le 30 avril 1414 (avant Pasques), brûla encore toute la ville, sauf dix-neuf maisons. Ce nouveau désastre ne découragea pas les habitans d'Orchies, non-seulement ils rebâtirent leur ville, mais ils l'entourèrent de murailles, dont ils défendirent l'approche, en creusant de profonds fossés, qui existent encore en partie ; et ils formèrent des compagnies d'archers et d'arbalétriers, pour sa défense. Ces compagnies furent d'un grand secours en 1556 et 1558; elles préservèrent Orchies du pillage, dont le menaçait la présence des Huguenots dans le pays.

En 1423, un vent violent renversa un grand nombre de bâtimens, et la flèche du clocher de l'église paroissiale, qui était trèshaute, avec la galerie qui lui servait de base.

Successivement divers malheurs firent décheoir Orchies de la prospérité qu'elle avait atteinte. En 1474, Louis XI ayant attaqué les possessions de Marie de Bourgogne, les Flamands le brûlèrent en

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