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lent la defaicte du pont a le Hayne. Les françois depuis lors n'oyent gaires volontiers parler du pont à le Hayne. Ceste defaicte fut faicte le 17o jour de juillet. »

(Extrait d'un mss. intitulé: Histoire particulière des troubles advenues en la ville de Valentienne a cause des heresies depuis l'an XVc lxij jusqu'à l'an XV et soixante dix-noef, tirée hors de plusieurs escripts à la main et mémoires de plusieurs bourgeois de ceste ville, signament de feux Joachim Goyemant et Jean Laloux, tesmoings oculaires de ces troubles et guerres civiles, l'an seize C et six. Ledit livre fut constrescript de mot à mot sur l'ori

temps après le duc d'Alve meit le camp devant, durant lequel les françois huguenots sous la charge de monsr de Jenlis vindrent pour ravitaillier et secourir ladite ville de Mons avec 7 cornettes de gens de chevaux, et 27 enseignes de piétons, pensant aller à la ducasse coe (comme) à Valentiennes, mais les paysans leur coupèrent chemin auprès de Hauteraige Hautrage) où que messieurs les françois, et gueux que le roy d'Espaigne (à les ouyr) n'estoit leur page, laisserent arme et bagage et plusieurs la vie a l'ayde de quelq. gendarmerie du camp de Mons qui survindrent avec ces paysans. Monsr de Jenlis leur chief fut prins et son beau cheval aussy; il en y eut 1150 prisonniers tous gueux françois etwallons fort courtoisement accoutrés lesquels furent menés à Atht en Haynau, on en mena aussy au camp devant Mons 300 où qu'ils furent contrains de pendre et estrangler l'ung lautre, sans ceux qui furent ramené à Valentiennes, téres: de lá, la formation de plusieurs sans mettre en nombre ceux qui se sauvèrent tout nudz, qui at esté cause qu'on at tousjours appellée ceste deffaitte, la defaicte des culz tout nulz. (1) Les autres l'appel

(1)Il existe encore aujourd'hui, dans les ar-
rondissemens de Cambrai et Valenciennes,
un long, triste et désert chemin de traverse,
coupant les territoires des villages d'Iwuy,
Avesnes le Sec, Lieu St. Amand et Noyelles,
que
l'on nomme le chemin des culs tout nus.
Cette route se dirige en droite ligne de
Cambrai sur Denain, sans entrer dans au-
cun village; elle est rase, dépourvue d'ar-
bres et d'habitations, et n'est guères fré-
quentée que par les bergers et leurs mou-
tons qui profitent de son isolement. Le

reste des habitans l'évitent et la fuient avec une certaine horreur. Voici suivant une tradition du pays, l'origine de ce chemin malencontreux Pendant les troubles des Pays-Bas, Balagny de Montluc s'était emparé du gouvernement de Cambrai ; il

avait ramassé pour fortifier son parti, une foule de vagabonds et de mécontens de tous les pays auxquels il donnait pour solde le pillage des églises et des monas

compagnies franches d'aventuriers qui prirent différentes dénominations. La compagnie des culs tout nus se distingua par le désordre de son costume et les horreurs qu'elle commettait ; un jour, il lui prit fantaisie de se porter sur la riche abbaye de Denain pour y piller l'église et le chapitre des Chanoinesses; elle partit de Cambrai, se fraya un chemin dans les terres, tirant droit sur Denain, sans passer par l'intérieur d'aucun village dont on craignait le tocsin et les fourches. On arriva à Denain à l'improviste; le pillage, le viol, l'incendie, signalèrent cette journée, puis on revint chargé de dépouilles, par la même route. Telle est l'origine du chemin des culs tout nus qui a retenu la trace et le nom que lui imprimêrent jadis une bande de vauriens. On voit que l'institution des Sans culottes n'est pas aussi moderne qu'on le croit.

A. D.

ginal par Pierre-joseph Leboucq, escuyer seigneur de Camcourgean l'an mil six cent quattre vingt noef, in4° sur papier (2).) H.D.

FAIRE UN BARRABAS.

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- Le

souvenir des anciens usages s'efface chaque jour; ceux même qui en ont été contemporains les oublient: c'est un des effets du mouvement extraordinaire imprimé depuis quarante ans à l'ordre social. Je suis certain que peu de personnes aujourd'hui connaissent ce que l'on appelait autrefois, dans les PaysBas, les graces du vendredi Saint: Je laisserai le soin de l'expliquer au comte de Trauttmansdorff; voici ce que ce ministre, qui était chargé à Bruxelles, sous les ordres de l'archiduchesse MarieChristine et du duc Albert de Sa

xe-Teschen, son époux, de la principale direction du gouvernement écrivait le 20 février 1788,

au

prince de Kaunitz, chancelier de cour et d'état de l'empereur Joseph II: « Il a été constamment d'usage dans ce pays-ci, de faire des grâces à l'occasion du vendredi saint: un accordoit toujours grâce de la vie à un homme condamné à mort et c'est ce qu'on appelloit faire un Barrabas; et, à cette occasion, on faisoit également grâce à quelques malfaiteurs dont les fautes n'étoient pas bien graves, on apportoit quelques adoucissemens aux punitions auxquelles ils étoient condamnés, et non-seulement le gouvernement remettoit à cette

qu'il ne trouvoit pas convenable d'accorder dans l'année, mais l'usage des grâces accordées avec plus de facilité au vendredi saint, étoit tel et si ancien et connu que les particuliers même réservoient souvent les demandes de grâce pour ne les faire qu'à ce terme, et que dans la quinzaine qui précédoit, d'avis: le conseil privé y il venoit une foule de demandes et délibé roit dans une assemblée extraordinaire, qu'il tenoit le jour même du vendredi saint, et rendoit son avis

en faisant trois listes: l'une, des Barrabas, l'autre des cas graciacas non-graciables dont on tirait bles, et la troisième des cas douteux; la plupart de cas graciables étoient suivis de la grâce; il y avoit même cette circonstance de plus présidens avoient la prérogative d'après l'usage, que les chefs et d'aller en faire rapport eux-mêmes cela passât par le canal du minisau gouverneur-général, sans que

tre. »

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[1] Il est possible que ce bisarre usage

ait été amené dans les Pays-Bas par les ducs de Bourgogne; ce qu'il y a de certain, c'est qu'il existait de toute ancienneté à Dijon, où il n'a disparu qu'à l'époque de la révolution on y délivrait tous les ans dans la semaine sainte un détenu pour dettes que

époque des concessions de grâce le peuple surnommait dès lors Barrabas.

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C'était la commune qui acquittait les dettes, les maire et échevins présidaient à la cé rémonie.

A. D.

XIV.

LES HOMMES ET LES CROSES.

209

de

MARTOREY-LE-POETE. Vous avez rencontré quelquefois, par la ville, un petit homme, à la tournure hétéroclyte, à la démarche grave et compassée comme un quaker, à l'habit rapé comme un poëte classique, une longue canne sous le bras gauche, un chapeau jadis noir et sur lequel on pouvait à peine soupçonner l'existence de quelques poils, et pardessus tout une longue pipe, le plus souvent veuve de tabac; car ce petit homme, à la tournure hétéroclyte, à la démarche grave et compassée, à l'habit rapé, était moins en compte-courant avec le marchand de tabac qu'avec le propriétaire du cabaret du coin! Si vous l'avez rencontré quelquefois, et si vous avez été assez heureux pour échapper à son éloquence poétique, remerciez Dieu, faites un voyage à Notre-Dame de Bonsecours; car il vous eût fallu entendre un ramassis de quelques centaines de vers de plus en plus bizarres, de plus en plus ridicules; car ce petit homme à l'habit rapé, était un poëte, et un poëte d'une rude trempe. Et cependant on prenait parfois plaisir à l'entendre: il récitait ses vers avec une telle emphase, il se croyait remarquable avec tant de bonne foi, que c'était pitié de l'ouïr, que c'était curiosité de le voir. J'ai souvent surpris quelques larmes dans ses yeux, quelques larmes de bonheur, lorsqu'il me voyait attentif à l'écouter: aussi, de si loin qu'il me voyait, accourait-il me faire pour part de

ses nouvelles productions, et le petit homme était content, car il avait trouvé un auditeur complaisant: tel était MARTOREY-LE-POE

TE!

Martorey, 'pendant la révolution de Qu'importe de savoir ce que fit 93, ce qu'il avait fait avant, ce qu'il fit depuis ; qu'importe de connaître son père, ses ayeux : c'est l'homme et non l'arbre généalogique que nous avons connu c'est le poëte que nous avons vu : ne parlons que de l'homme-poëte.

Un goût tout particulier pour la solitude, la manie de réciter des vers, quelques plaisanteries sur sa burlesque tournure, telles furent probablement les causes primitives du dérangement progressif de son cerveau. La folie de Martorey n'avait rien de méchant: c'était un mélange de sérieux et de comique qui faisait mal à voir : ce pauvre fou était si content lorsqu'il trouvait un auditeur bénévole, un auditeur qui parût satisfait de ses vers! Il se croyait un Racine! lui misérable avorton ! lui, Pygmée, à côté du géant de la poésie! Il ne laissait passer aucune fête, aucun saint révéré, aucune solennité sans que sa muse n'accouchât de quelque pièce de vers, aussi grotesque que son auteur! Un personnage éminent arrivait-il à Valenciennes ? vite, Martorey enfourchait son Pégase étique, écrivassait, rimaillait, rimaillait encore, et présentait bientôt une ode, voire même un poëme,

au

personnage éminent, et toujours avec une gravité vraiment comique. Quelque pitoyables que soient ses vers, je ne puis résister à la tentation d'en citer quelques uns. Le lecteur pourra juger jusqu'où peut aller la fureur de versifier:

Bouquet offert avec respect à la gloire céleste du grand Saint-Martin:

Vénérant Saint-Martin, muse à ma voix [propice

A cet élu du ciel offre ton sacrifice;

Il fut de son vivant preux et franc cavalier

A qui l'audacieux n'osait trop se fier.
Ainsi dans les combats, en sa franche car-

[rière

Ne cessa de briller son ardeur guerrière! Et son air martial primant à son aspect, Saisissant l'ennemi, le tenait en respect. Son cœur sensible aussi; dans le cours de [sa vie, De soulager le pauvre il eut toujours l'en[vie :

En ce, l'histoire dit qu'un jour, de son [manteau, Séparant la moitié, de l'autre il fit cadeau;

Mais à qui s'appliqua ce fait si charitable,

Si rare dans ce tems? ce fut dit-on le diable Qui d'un moderne Job prit l'air humble [et contrit,]

Le suppliant langage et le minable habit.

Le suprême bonheur de Martorey eût été de faire imprimer ses productions poétiques ; c'était sa marotte: mais on ne poussa point la complaisance jusqu'à ce point.

Ajoutez maintenant à cette manie de rimailler, un amour propre d'auteur fort susceptible, une conviction étonnante de son talent, et vous ne serez pas surpris d'apprendre que Martorey se croyait supérieur à Voltaire. Les vers de ce dernier, gravés anciennement sur la pyramide de Denain, étaient surtout l'objet d'une critique con

tinuelle de la part de notre poëte ; il fit vingt inscriptions pour remplacer celle de Voltaire, vingt fois par jour il les récitait, et chaque fois il en était plus satisfait; il s'arrêtait, s'extasiait sur chaque mot, chaque pensée, puis, revenant à son idée fixe, il les comparaît à l'inscription de Voltaire... Il fit plus, il en présenta une au préfet, qui se trouvait alors dans nos murs, c'était en 1823, au moment où l'on allait restaurer la pyramide... Comme on peut bien le penser, l'inscription de Martorey n'y figura pas; mais il dut se consoler en voyant qu'on avait aussi supprimé les deux vers de Voltaire: en revanche le nom de M. de Murat y figurait en grosses lettres! Le nom de M. de Murat sur l'obélisde Denain! ! ! . . . . que

Martorey conserva dans ses der-` niers momens la fureur de faire des vers : je le vois encore dans un misérable grenier, sur un mauvais grabat; la mort était épandue sur tous ses traits, et cependant il composait.... le malheureux ! il mettait la dernière main au septième acte d'une tragédie !!! à côté était une ode qu'il m'avait adressée et que je conserve bien c'est un souvenir précieusement; de Martorey-le-poète !

Sa vue me rappela le proverbe : « Gueux comme un poète. »

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fléau destructeur; la mort marquait du doigt sa victime, et son aveugle rigueur, aussi prompte que le désir, aussi affreuse que sa pensée, portait les coups les plus funestes et les plus inattendus. Si terrible fut ce fléau, qu'au rapport de l'historien d'Outreman, qui donne quelques détails sur cette peste, le nombre des jeunes filles qui moururent, sur la seule paroisse de Saint-Nicolas, s'éleva à quatre cents!

Mais, chose étonnante, cette peste si cruelle, si affreuse que chacun, dans ces tems des superstition, ne manquait pas d'attribuer à la colère divine, et de regarder comme une punition d'en haut, cette peste dit d'Outreman, avait cela de particulier, qu'elle s'attachait principalement aux jeunes personnes du sexe! ce qui ne donnerait pas une idée bien favorable de la sainteté de la jeunesse du seizième siècle. Cependant selon la tradition, au milieu de ce spectacle de désolation, au milieu de cette foule de victimes qu'enlevait cette terrible maladie, une jeune fille de la rue des Anges, qui avait passé ses premières années dans le recueillement et la piété, et voué un culte sincère à la SainteVierge, fut seule préservée de ce fléau destructeur. Un miracle tel que celui-là (car dans ce bon tems là on voyait encore des miracles), ne pouvait passer inaperçu, aussi fit-on dès lors des fêtes, processions et remercîmems auTrès-Haut, et pour conserver la mémoire de ce fait remarquable, le magistrat or

donna que tous les ans, à pareille époque, une procession en rappellerait le souvenir, ce qui donna naissance à une fête dans laquelle la plus jeune personne, la plus ver tueuse de la rue représentait cette vierge.

Le dimanche qui précédait la fè-
te de l'Assomption était consacré à
été choisie par les confrères de
cette cérémonie. Celle qui avait
Notre-Dame de Miracles, surnom-
més les Damoiseaux, se revêtis-
sait d'un habillement blanc, går-
ni de rubans bleus,
couleur adop-
tée par
la confrérie. On formait à
chaque extrémité de la rue des An-
ges des portiques de verdure, ain-
si qu'à la porte de la jeune fille.

matin, une députation de confrè-
Ce jour là, à neuf heures du
res arrivait, avec la croix et les
drapeaux déployés à la demeure de
la vierge choisie; on la conduisait
à l'église, où, au milieu d'une
office en actions de grâces et en mé-
foule nombreuse, on chantait un
moire du miracle de 1515 ! La jeu-
ne fille, tenant à la main un grand
cierge, marchait à la procession
au milieu des confrères qui for-
maient son escorte. Après cette cé-
rémonie, la même députation la
reconduisait chez elle avec les
mêmes honneurs ; elle recevait en
s;
cadeau une corbeille ornée de
fleurs et remplie des fruits les plus
beaux et les meilleurs de la saison.
La fête se terminait des danses.
par

Cette pieuse et touchante cérémonie, dans laquelle on rendait un hommage si éclatant à la piété

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