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LES HOMMES ET LES CROSES.

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né à Dunkerque le 16 janvier 1754, est décédé en cette ville le 11 février 1825.

EMMERY (Jean-Marie-Joseph), lente insurrection parmi les sousofficiers et soldats de ce corps; dans leur désespoir, ils voulaient massacrer l'aumônier et un lieutenant, qui ne les avaient cependant pas abandonnés. M. Emmery, instruit de cette fermentation, se rend seul à la caserne, appaise l'effervescence par son sang froid et sa présence d'esprit, fait prendre les armes à cette troupe de furieux, se fait obéir comme le ferait un chef craint ou révéré, harangue le régiment, rappelle les devoirs aux soldats, les touche par les mots de patrie et d'honneur, mots si puissans sur le cœur des Français, les console en leur remettant, en échange de celui qu'ils ont perdu, le drapeau de la garde nationale de Dunkerque, et les fait ainsi successivement du délire de l'in

Il n'avait que 22 ans lorsque son père mourut, et à 23 il était à la tête d'une des plus fortes maisons de commerce de Dunkerque. Actif, laborieux, grand dans les affaires, il acquit cette réputation qui donne la prospérité. Son nom, répété alors sur toutes les places importantes de France et de l'étranger, était écouté avec considération; sa promesse était une garantie, sa role un contrat. Un beau physique, une politesse exquise, des manières nobles, une facilité naturelle à exprimer sa pensée, une bravoure à toute épreuve, lui attiraient égale

pa

ment la bienveillance des dames, l'estime des gens de bien, l'amitié de ses égaux et le respect de ses in

férieurs.

passer

discipline, par le calme et l'obéissance, à l'enthousiasme de la reconnaissance.

Doué d'une âme ardente, ses concitoyens, qu'il aimait comme des frères, le désignèrent à l'una- la nimité pour organiser, en 1789, le corps de la garde nationale, et l'autorité l'en nomma colonel. Il exerça ces fonctions à la satisfaction de tous, en sachant concilier les intérêts du service et ceux des particuliers.

Le 24 juin 1791, les officiers du régiment Colonel-Général en garnison à Dunkerque, apprenant la fuite du Roi, passèrent furtivement de nuit en Belgique, emportant avec eux la caisse et les drapeaux. Cet événement occasionna une vio

Nommé maire en 1792, il trouva caisse municipale vide, sans cré– ances à recouvrer, et la ville sans ressources; tristes résultats des désordres et de la désorganisation du gouvernement. A sa sortie, il laissa à son successeur des fonds excédant les besoins du service, Dunkerque amplement pourvu des approvisionnemens nécessaires.

et

Le 10 août 1793, le sieur Griois, commissaire du pouvoir exécutif, en vertu de ses instructions, ordonne l'enlèvement des grains de la place, destinés pour la capitale; M. Emmery s'y oppose avec éner→

gie sans cette énergie, Dunker ́que, privé de subsistances, n'eut pu soutenir quelques jours après le glorieux siége, dont chaque année, nous célébrons l'anniversaire avec orgueil.

Ce fut le 23 août 1793 que le duc d'Yorck, à la tête d'une armée formidable composée d'Anglais et d'Autrichiens, obligea un corps de troupes françaises, retranché aux environs de Dunkerque, de se jeter dans cette place qui n'avait défense le pour de ses que courage habitans, ses remparts ruinés et dégarnis, ne pouvant offrir qu'une faible résistance à l'ennemi.

Certain du succès, le duc fit une sommation impérieuse, et ne reçut de la part du commandant d'armes et du maire interpellés individuellement, qu'une réponse uniforme, celle de ne se soumettre à aucune condition.

Le siège dura dix-sept jours, pendant lesquels la garnison, au nombre de trois mille hommes, aurait succombé malgré ses glorieux efforts, sans l'appui de quatre mille hommes de garde nationale qui s'illustrèrent par un zèle, une activité et une bravoure dont l'éloge n'est plus à faire. Pendant le siége, M. Emmery fit des avanees de ses propres deniers aux fournisseurs, établit à ses frais un hôpital supplémentaire pour les blessés. La charité des habitans le seconda dans cette louable entreprise, et chaque jour il visitait les malades qui, grâce à sa prévoyance, ne manquèrent de rien.

Le général Ferrand, qui commandait alors, plein de confiance en M. Emmery, lui laissa par acte authentique la police de la place, quoiqu'elle fût en état de siége.

Le 5 décembre 1794, jaloux de sa réputation, quelques ennemis essayèrent de le perdre. Un jacobin forcéné le dénonça au tribunal révolutionnaire. Pendant sa captivité, fort de sa conscience, il attendait avec résignation le sort qu'il supposait lui être réservé, lorsqu'il fut heureusement rendu à la liberté. Le 50 mai 1795, ce même jacobin, assailli par une multitude immense, et sur le point d'être massacré, ne dut son salut qu'à M. Emmery, qui le sauva de la fureur du peuple.

Le 5 juillet 1795, nommé de nouveau commandant de la garde nationale, il apaisa une sédition fomentée sous prétexte de grains qu'on trouva enfouis. Ces grains, reconnus gâtés, n'avaient été enterrés que par mesure de salubrité. Les municipaux, accueillis à coups de pierres, s'enfuirent. L'un d'eux, réfugié dans un corps-de-garde, n'espérait plus rien de la protection des soldats du poste, qu'on menaçait et maltraitait également, lorsque M. Emmery, à la tête de deux compagnies de grenadiers, dispersa le rassemblement, sans être obligé d'employer la force, fit entendre raison au peuple toujours confiant dans les paroles d'un homme qu'il aimait et respectait, et qu'il aida même à faire arrêter les provocateurs de la sédition.

Désigné le 7 décembre 1800, par le gouvernement consulaire, pour l'organisation de la nouvelle administration du département du Nord, il ne put accepter pour cause de maladie; mais ceux qu'il jugea dignes d'en faire partie, et qu'il indiqua comme tels, furent presque tous nommés, et plusieurs ont parcouru depuis une brillante car

rière.

Le 12 janvier 1800, le conseil d'agriculture et du commerce du département du Nord admit M. Emmery en qualité de membre.

Le 25 mars 1801, il partit à ses frais pour Paris, afin de rappeler

au

nouveau gouvernement les droits que la ville de Dunkerque avait à sa protection et à la réparation des pertes qu'elle avait éprouvées pendant les guerres depuis la Révolution.

Le 13 août 1801, il est réélu maire de la ville de Dunkerque, et le 22 avril 1802, nommé membre du conseil-géneral du commerce près du ministre de l'intérieur.

Le 13 août 1803, il profita de l'arrivée du premier consul à Dunkerque, pour solliciter et obtenir la translation en cette ville de la sous-préfecture dont le siége était précédemment établi à Ber

gues.

Le 26 novembre 1803, au camp de Boulogne, en présence de l'armée, il est le premier maire de France décoré de l'ordre de la Légion d'Honneur; et, en 1804, il obtient à Dunkerque la translation du tribunal de première ins

tance dont le siége était établi précédemment à Bergues.

Le 27 septembre 1806, élu membre du corps législatif, il en fut nommé l'un des vice-présidens le 2 février 1810.

Le 9 juillet 1811, M. Emmery, en qualité de membre de la commission de l'intérieur, présente un rapport qui a pour objet l'établissement à Cherbourg d'une souspréfecture et d'un tribunal de première instance, soutient la discussion, et obtient à cette ville ces

deux administrations. Le maire de Cherbourg, au nom de ses concitoyens, s'empressa d'écrire une lettre de remerciemens des plus honorables au député qui avait si bien défendu leurs intérêts.

Le 17 mars 1811, le conseil de la fabrique paroissiale de St.-Eloi le nomma son président.

Ici se termine la carrière politique et administrative de M. Emmery. Dans toutes les fonctions qu'il a exercées, l'amour du bien, le desir désintéressé d'être utile

aux Dunkerquois, la prospérité de Dunkerque, ont tonjours occupé sa pensée toute entière. Il a traversé les orages révolutionnaires sans avoir à craindre que la moindre tache vienne ternir sa mémoire. Lorsqu'il était maire, un émigré condamné à mort, sur sa seule réputation, se réfugia chez lui de préférence; M. Emmery l'accueillit avec intérêt, et, sans s'inquiéter de ce qui pouvait en résulter, lui facilita les moyens de passer à l'étranger, en lui donnant

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des secours et un sauf-conduit. Sourd aux cris de l'esprit de parti, il ne le fut jamais à ceux de l'infortune.

par la position où se trouvait alors son pays. Là aussi, le pouvoir se débattait dans une longue agonie, et n'avait pas même l'espoir de trouver une mort honorable dans les sordides discussions où il se trouvait engagé. Sous des questions d'un intérêt secondaire, l'évêque de Liége cachait des vues ambitieuses, et cherchait à priver les citoyens des droits que leur accordait la Constitution; la violation manifeste des lois fondamentales du suscita heureusement pays

Ici nous terminerons cette notice, nous bornant à l'énumération simple des diverses fonctions auxquelles M. Emmery a été appelé à la satisfaction générale. C'est à ceux qu'il a obligés particulièrement dans l'exercice de ces différentes places, à se rappeler de lui, à donner une larme à son souvenir, et à prier pour le repos l'âme de leur père et de leur bien- quelques hommes capables de sacrifier leurs propres intérêts aux intérêts généraux. Brixhe fut de ce nombre.

faiteur.

V. S.

de

BRIXHE (Jean-Guillaume) naquit le 27 juillet 1758 à Spa, bourg célèbre de la province de Liége. Dès sa plus tendre jeunesse, il manifesta un goût passionné pour la littérature, mais la jurisprudence devint l'objet spécial de ses études; dès l'âge de 19 ans, il fut admis procureur à la cour de justice de Spa, et en février 1780, immatricule notaire public au pays de Liège. A cette époque, les grandes doctrines libérales se propageaient et ce lut sans doute alors que germèrent en lui les semences du vif patriotisme dont il fit preuve par la suite.

Au moment où s'opéra la Révolution française, tout son être tressailkt, en voyant s'accomplir tout ce qui avait souvent été l'objet de ses pensées, et la lutte qui allait s'engager en France entre la liberté et le despotisme, devait encore avoir pour lui un nouvel attrait

La révolution Liégeoise éclata le 18 août 1789; quelques jours après, Brixhe fut choisi par acclamation Bourgmestre de la commune de Spa; ensuite il fut nommé membre et secrétaire-perpétuel de l'assemblée représentative de Franchimont; c'est en cette dernière qualité qu'il a publié : Journal des séances du congrès du marquisat de Franchimont, tenu au village de Polleur, commencé le 26 août 1789. Liége, J. J. Tutot, 1789, in-4°, avec les suites, inséré aussi dans le Journal patriotique qui se publiait à cette époque à Liège. Ce congrès du marquisat de Franchimont, sous la présidence de M. de Thier, se distinguait par le vif patriotisme et les opinions ultra-libérales de tous ses membres.

En 1790, Brixhe fut élu députésuppléant à l'Etat-tiers du de pays Liége; cette même année, il publia: Plan de municipalité pour le

bourg et la communauté de Spa, à suivre provisoirement à la prochaine élection, et dont la rectification finale est laissée aux cinq sections. Spa, Badon, 1790, in-4o de 20 pages. En 1791, le PrinceEvêque fut réintégré dans ses états par les bayonnettes autrichiennes, et Brixhe, proscrit par la commission impériale comme étant l'un des quatorze premiers chefs de la révolution Liégeoise; il se réfugia en France avec J. N. Bassenge et quelques autres, et y devint membre du comité-général des Belges et des Liégeois unis.

Lors de l'invasion de la Belgique

et du

pays

pays de Liége par l'armée républicaine, il fut réintégré dans la municipalité de Spa, et nommé par le peuple député à l'administration générale du pays de Liége; il s'y montra l'un des plus chauds partisans de la révolution française et de la réunion pure et simple du à la France. A la retraite de Dumouriez, ses opinions bien connues l'obligèrent à se retirer de nouveau en France; il fut employé à Paris dans les bureaux de la vérification générale des assignats; en prairial an 2, le comité de salut public réuni à celui des finances et des assignats, le nomma vérificateur dans les départemens du Nord et des Ardennes. Par divers arrêtés des Représentans du peuple, il fut envoyé en cette même qualité à la suite des armées dans les pays conquis, emploi qu'il a rempli jusqu'à la suppression des assignats.

A cette époque, il commença à

exercer les fonctions de défenseurofficieux près les tribunaux civils et criminels des départemens de l'Ourte, Sambre- et - Meuse, et Meuse-inférieure; une âme passionnée, une éloquence vive jointe à une logique serrée, une connaissance approfondie des lois, lui firent obtenir dans cette carrière les succès les plus brillans. En l'an VI, l'assemblée électorale scission-. naire le nomma administrateur du département; en l'an VII, il fut envoyé au conseil des Cinq-cents, et il en fut exclu par la loi du 19 brumaire an VIII. Il revint à Lié

ge et y continua la profession de défenseur officieux. Le 27 frimaire

an IX, il fut nommé par le premier consul, avoué près le tribunal d'appel séant à Liége, et le 18 fructidor an XIII, les professeurs de l'école de droit de Paris lui délivrèrent un diplôme de licencié. Les agitations continuelles qu'il n'avait presque jamais cessé d'éprouver avaient considérablement altéré sa santé; il mourut le 25 février 1807.

On a de Brixhe quelques plaidoyers remarquables par les questions importantes qu'il a su y soulever et par le talent qu'il a déployé en les traitant; il a aussi travaillé à la rédaction de plusieurs journaux, entre autres, la Tribune publique du département de l'Ourte. Liége, Latour, an V, in-8°, dont il n'a paru que 18 numéros formant 312 pages.

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