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JEAN DU GAUGUIER. Ce e personnage avait jadis une réputation qui balançait au moins celles deJean de Nivelles et de Martin de Cambrai: ses fonctions étaient les mêmes; elles consistaient à battre les heures sur un timbre de bronze exposé à l'extérieur, comme on en voit à, maintes horloges publiques des villes de la Flandre. Jean du Gauguier fut d'abord plus modeste que tous ses pareils; en 1377, dix jours avant la procession, il fut installé sur son petit clocher au dessus de la halle de Valenciennes, mais il n'était alors que de bois de noyer et c'est de là qu'il tire son nom; on sait que dans nos contrées les noix se nomment gaugues et le noyer, gauguier. Maître Jean ne se contenta pas de dominer toute la ville, l'ambition le gagna bientôt, ou, pour parler plus juste, elle s'empara de ses patrons; on le renouvela en bronze, peu après on le dora, puis enfin on l'habilla. Cette dernière circonstance inspira une pièce de poésie à Jean Molinet, poète du XVe siècle, mort à Valenciennes, où il était chanoine de la Salle-le-Comte. Dans ces vers, l'auteur fait parler Jean du Gau

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Prevost, Massarts et Eschevins
Remercions de nos deux cottes,
Tous ceux qui boivent les bons vins
Et font valoir les maletostes.
Elles sont gente et fort mignottes.
Jamais ne les verrez boudrées,
Si les corbeaux et les hulottes
Ne leur donnent de leurs livrées.

Maître Jean du Gauguier, outre le confrère qui sonnait les heures avec lui, avait aussi pour société, au haut de son clocher, un ange de cuivre doré, tenant une trompette, « laquelle estoit si artistement et si «< ingénieusement faite, dit l'histo«rien d'Oultreman, qu'elle don«noit un son comme de trom«pette, lorsque le vent si engoul«<froit.» Cet ensemble formait un petit monument fort joli, qui frappa à son passage Marguerite de Navarre, première femme de Henri IV; aussi dit-elle dans ses Mémoires : « qu'étant arrivée à << Valenciennes, les fontaines et ho«rologes, avec industrie propre aux «allemans, ne donnoient peu de << merveille à nos françois ne leur «<estant commun de voir des horo«loges représenter une agréable «<musique de voix avec autant de «sortes de personnes que le petit << chasteau l'on alloit voir au que « faux-bourg St.-Germain. » Le trio de bronze fut misbas, en avril 1781, au grand regret des habitans, lorsqu'il fut question de bâtir la façade actuelle de la salle de spectacle.Jean

du Gauguier, ce plus ancien des bourgeois de Valenciennes, resta longtems gisant dans les greniers de l'hôtel-de-ville, et fut enfin donné à celui qui voulut bien à ce prix entourer d'un mur le cimetière de la ville. Un siège vint, et le murluimême fut détruit.

A. D.

LE FAUX CARDINAL DE BOURBON.

En 1813, un dépôt de prisonniers espagnols arrive à Souillac, petite ville du département du Lot; en parcourant l'escalier du bâtiment qui lui servait d'asyle, un de ces captifs laisse tomber une lettre ouverte; elle est aussitôt relevée par une femme âgée qui y lit ces mots : Monseigneur, il est encore des cœurs fidèles dévoués à V. A. S.; je suis par venu à rassembler quelques centaines de francs, j'espère bientôt en avoir davantage pour tirer V. 4. S. de l'état, si peu digne de son rang, où elle se trouve réduite, etc. L'enveloppe portait: A son Altesse Sérénissime Monseigneur le Cardinal de Bourbon, Archevêque de Tolède. Malgré le poids de ses ans, celle qui trouva cette lettre courut en informer toute la ville de Souillac en moins de cinq minutes, et les bonnes femmes de l'endroit vinrent en masse visiter respectueusement le captif soi-disant illustre, au domicile duquel on vit bientôt pleuvoir fruits, vins fins, confitures, sucreries et louis d'or qu'il payait en bénédictions. Ce rôle durait depuis quelque tems lorsqu'un soir un officier espagnol, également prisonnier, arrive à Souillac, entend parler du prétendu Cardinal et court

chez lui au moment où une troupe de femmes était agenouillée à ses pieds; une vertueuse indignation s'empare de lui, il traite cette altesse improvisée plus que cavalièrement et accompagne ses reproches de gestes très-significatifs qui impriment sur la face du prélat un sacrement dont il se serait volontiers passé. Cette scène pensa coûter cher au redresseur des torts; dans le midi le peuple prend les choses chaudement; les habitans de Souillac ne voulaient rien moins qu'écarteler vif l'officier espagnol; le maire, la gendarmerie et les gens raisonnables de l'endroit, tout cela fesait une minorité incapable de défendre ses jours: on le mit au cachot pour lui sauver lavie et on le fit évader dans

la nuit, non sans un notable danger pour lui.

Ce n'est point ainsi que se termina à Valenciennes un événement du même genre arrivé aussi en 1813. Au mois d'août, des prisonniers espagnols se trouvent dans cette ville; soit que l'intriguant de Souillac en fit partie, soit que ce fut un de ses imitateurs, le bruit se répand sourdement que le Cardinal de Bourbon se trouve parmi les captifs : chacun veut le voir; les dames surtout s'empressent et volent en foule à la maison d'arrêt qui recèle l'illustre personnage; on les introduit dans la chapelle où le prélat dit une messe-basse à la suite de laquelle chacune de ces dames est admise à la faveur de lui baiser la main. Cet événement fait l'objet de toutes les conversations; pour s'assurer de l'identité

du prélat, on cherche dans le pays quelques gentilhommes qui aient fait partie des anciennes gardes Wallonnes et qui, en cette qualité, ont approché de la cour d'Espagne; ceux-ci rappellent leurs souvenirs, et, soit qu'ils ne voulussent point avoir l'air de ne pas connaître le Cardinal de Bourbon, soit que celui qui prenait ce titre ressemblât véritablement au prince, ils appuyèrent sa prétention de leur témoignage, et dès lors, toutes les bourses furent ouvertes au prisonnier de guerre. Des sommes assez considérables furent levées en son nom et un lieutenantcolonel espagnol ne rougit pas de

mettre son nom au bas des reconnaissances de tels emprunts. Les habitans de Valenciennes possèdent encore aujourd'hui ces billets, bons billets qu'a La Châtre à la vérité, mais qui témoignent de leur attachement pour une famille illustre et alors dans le malheur. Cette pensée dominait tellement ceux qui furent dupes de cette supercherie que l'idée ne leur vint pas qu'un personnage comme le Cardinal de Bourbon, fût-il captif, ne serait pas mené de ville en ville avec un dépôt de prisonniers. Napoléon n'était pas homme à faire une telle bévue politique. Quoi qu'il en soit, des magistrats, des hommes sensés, y furent pris. L'autorité supérieure apprit enfin ce qui se passait à Valenciennes, elle fit enlever le prétendu prince de l'église qu'on enferma dans la citadelle de Lille; les officiers qui l'entouraient et qui avaient si bien joué la comédie, peu sévères à ce qu'il parait sur l'honneur, emportèrent

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BLAREAU, juge-de-paix à Bouchain, homme qui met tous ses soins à concilier les parties qui se présentent devant lui; aussi trouvet-on peu de cantons où on plaide moins dans celui-là. Beaucoup que nimés de cet esprit pacificateur; de ses collègues sont sans doute amais peut-être le zèle charitable de ce magistrat est-il mieux secondé l'hupar qu'il ne le serait ailleurs meur anti-normande de la plupart de ses justiciables. Cette circonstance admise, il lui resterait toujours l'honneur de savoir entretenir leurs bonnes dispositions, et chasser ainsi

Join d'eux la discorde. On rend un double service aux hommes en les conciliant: les procès n'entament pas seulement leur fortune, ils rompent leur union en les aigrissant les

uns contre les autres.

A. L.

TURENNE A SOLRE-LE-CHATEAU. Lors que Louis XIII, ou pour mieux dire Richelieu, envoya en 1637, le cardinal de la Valette, avec 18,000 hommes, pour prendre La Capelle, Landrecies et le Câteau, sur les troupes d'un autre cardinal, in

fant d'Espagne, Turenne, alors maréchal de camp, s'empara de Solrele-Château, où se trouvait un petit fort appartenant à la maison de Croy. Quelques soldats ayant trouvé dans ce bourg une femme d'une rare beauté, l'amenèrent à leur jeune général comme la plus précieuse part du butin qu'ils venaient de faire. Turenne n'avait alors que 26 ans et il était loin d'être insensible

auprès des belles; cependant il foignit de ne pas comprendre le motif de la démarche de ses soldats et il loua beaucoup leur retenue, comme s'ils n'avaient songé, e lui amenant cette jeune femme, qu'à la soustraire aux violentes entreprises de leurs compagnons. Il fit chercher sur-le-champ son mari et la remettant entre ses mains, il lui dit avec cette modestie qu'il mettait dans toutes ses actions, que c'était à la discrétion de ses soldats qu'il devait l'honneur de sa femme. Cette continence, qui rappelle celle de Scipion l'Africain, n'a pas toujours été imitée, depuis même que les progrès de la civilisation ont rendu les droits de la guerre moins exigeans.

A. D.

AMAND (DOMINIQUE), ex-oratorien, né à Mons, et mort curé à Thulin en 1817 à l'âge de 60 ans. Il a publié un Mémoire historique sur les différens (sic) qui s'élevèrent entre Jean et Bauduin d'Avesnes, et Marguerite de Constantinople, comtesse de Flandre et de Hainaut, leur mère. Maestrichtet Bruxelles, 1794 in-8°. 50 pages.

Il avait aussi composé un Dictionnaire de géographie ancienne

des Pays-Pas, qui est resté manuscrit. J'ignore en quelles mains ce manuscrit est tombé.

Là se bornent les renseignements que j'ai pu obtenir sur cet homme; ils m'ont été donnés par M. Hécart, de Valenciennes. Si quelqu'un de nos lecteurs avait l'obligeance de nous en fournir d'autres plus étendus,nous pourrions peut-êtreplacer Dominique Amand dans la partie biographique de ce recueil.

A. L.

LE COUSIN-JACQUES. Tout le monde connait ce surnom par

lequel l'écrivain Beffroy de Reigny

était connu au commencement de

amoureux

la Révolution et qu'il mit lui-même en tête de presque toutes ses promais ductions, de peu personnes savent où et comment il adopta ce pseudonyme. Louis-Abel-Beffroy de Reigny, né à Laon, le 6 novembre 1757, demeura dans les collèges, tant comme écolier que comme professeur, jusqu'à l'âge de 22 ans. Vers ce tems, il fréquenta les eaux de St.-Amand, devint y d'une demoiselle Virlet, qui y tenait l'Etablissement Thermal, et se maria avec elle pendant un des séjours qu'il y fit. Il eut occasion d'y voir souvent un pauvre paysan, imbécille, toujours affublé de six ou sept habits de couleurs différentes, du reste plein de santé et de gaité. Par suite d'une plaisanterie de quelques dames qui comparèrent cette variété d'habits avec l'imagination féconde et un peu déréglée de Beffroy de Reigny, celuici prit de lui-même le nom du paysan. Ce dernier n'était connu dans

le pays que sous le sobriquet de Cousin-Jacques, par la raison que son nom de baptême était Jacques et qu'il était parent à tout le village dont les habitans l'appelaient leur cousin. Son vrai nom était Jacques Joseph Leclercq; il était né à Nivelles-lez-St.-Amand, le 4 février 1720; il mourut à St.-Amand, le 6 janvier 1785, dans l'année même où l'usurpateur de son nom fesait le plus de bruit à Paris, par la publication

de ses Lunes dont aucun des 24 volumes peut-être n'a pénétré jusqu'au lieu de naissance du véritable Cousin-Jacques.

A. D.

HERGNIES, village du canton de Condé, près de la frontière de la Belgique.

Il y a loin du Capitole à Hergnies mais on ne parle pas de l'un, sans songer aux oies qui le sauvèrent; de l'autre, aux oies qui paissent dans ses pâturages. Ces animaux ne forment point à eux seuls la richesse de ce village; l'honnête aisance de la presque totalité des individus qui l'habitent, prend sa principale source dans des vertus privées. Elle procède de l'ordre et de l'économie qui les distinguent, et qui méritent d'ètre signalés.

Le riche ignore souvent ce qui se passe sous le chaume; il n'y a pas vu ces hommes de la campagne, à la plupart desquels le sort a donné deux bras pour tout trésor. Dans cette vie de privation, de peine, que de courage et d'efforts ces malheureux ne doivent-ils pas déployer pour conquérir leur chétive subsistance et rester vainqueurs de la misère? Il faut élever

une famille, et ces pauvres diables sont toujours si riches en enfants : n'importe, s'ils ont la force de bien vouloir, de fuir les mauvaises habitudes et le vice, si la cherté du grain, les maladies, le ravage de leurs petits champs n'amènent pas leur ruine, ils parviennent à manger du pain; ils vivent heureux et remercient le ciel.

à

la longue, ils peuvent entasser, Leur joie augmente surtout si,

les uns sur les autres, quelques deniers, joie aussi louable que le délire de l'opulent avare contemplant son coffre fort, est honteux! Ce pécule, prix des fatigues et des sueurs, grossissant peu à peu, on finit par acheter quelques verges de terre, une vache, un cheval; et l'on fait alors la nique à la fortune.

Or, voici comment les habitants d'Hergnies ont acquis le droit de se moquer de la capricieuse déesse: l'argent qu'on épargne est le premier amassé, ils sont économes; l'ivresse épuise la bourse et la santé, ils sont sobres; la fainéantise ne produit rien que de mauvaises pensées, ils sont laborieux; aussi la triste indigence apparaît rarement au milieu d'eux, les calamités ne sauraient guère les saisir au dépourvu, et lorsque l'hiver arrive avec ses rigueurs, presque tous ces bons villageois, grâce à leur activité, à des précautions bien prises, peuvent braver les frimas et s'endormir, au bruit des tempêtes, sous leurs paisibles toits.Combien cette prévoyante sagesse est précieuse et digne d'éloges! pourquoi faut-il qu'elle soit plus rare encore?

A. L.

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