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SECTION 2e. RELATIONS AVEC L'EPISCOPAT CHAMPENOIS.

Nos comtes eurent souvent avec l'épiscopat des rapports beaucoup moins courtois qu'avec le SaintSiége. Nous avons déjà parlé de la sentence d'excommunication lancée contre Thibaut IV par l'évêque de Pampelune (a). Nous nous bornerons à indiquer la menace d'excommunication adressée à Thibaut V par les évêques de la province d'Auch pendant la guerre de Bigorre (3393); mais nous donnerons quelques détails sur les relations de Blanche de Navarre et de Thibaut IV avec les évêques dont relevaient spirituellement diverses parties de la Champagne.

On se rappelle la résistance d'Hervé, évêque de Troyes, aux ordres du pape dans la lutte de Blanche de Navarre contre Erard de Brienne (b). Hervé se plaignit au Saint-Siége des priviléges conférés à Blanche, qui, disait-il, se croyait permis de mépriser l'épiscopat (1235). Vers la fin de l'année 1219 ou le commencement de l'année 1220, mécontent de saisies faites sur ses hommes par ordre de la comtesse, il mit la ville de Troyes en interdit. Le cardinal-légat Conrad, évêque de Porto et de Sainte-Rufine, qui passait à Troyes, offrit sa médiation; mais l'évêque ne consentit à lever l'interdit qu'après la restitution des objets saisis (1256). Hervé était alors

(a) Voir plus haut, p. 330. (b) Voir plus haut, p. 146.

ou venait d'être en procès avec Blanche au sujet des droits seigneuriaux que le comte de Champagne et les évêques de Troyes possédaient concurremment à Méry-sur-Seine (1236, 1237, 1243). Plus tard une maison à Troyes fut l'objet d'une contestation entre Thibaut IV et Robert, successeur d'Hervé (1814); mais cette contestation ne paraît pas avoir produit des résultats aussi violents.

A Meaux comme à Troyes, le comte de Champagne était seigneur, et son autorité n'y était pas plus redoutée du clergé qu'à Troyes. On y vit une affaire semblable à la principale de celles que nous venons d'indiquer. Une difficulté entre Blanche et le chapitre de Meaux eut pour conséquence une saisie opérée sur les hommes du chapitre. Cette saisie provoqua une sentence d'interdit. La médiation de l'évêque de Noyon amena la levée de l'interdit; mais la comtesse dut préalablement, comme à Troyes, faire restituer les objets saisis (905). Quelques années après, un autre évêque de Meaux, dont quelques hommes avaient été incarcérés par ordre des officiers de Blanche, invita le chapitre à faire cesser dans la cathédrale le son de l'orgue, suspendu dans les autres églises de la ville, en attendant l'arrivée de la comtesse dont il espérait justice (1350). Un troisième évêque de Meaux voulant contraindre Thibaut IV à reconnaître les hommes de l'évêché et du clergé du diocèse exempts d'un droit de péage, lança en 1231 une sentence d'interdit contre ce prince et contre les hommes de ce prince (2129), et il la renouvela en 1235 (2358). Le comte de Champagne et l'évêque de Meaux avaient des rapports continuels. Ils étaient, par exemple, associés pour la fa

brication de la monnaie (695, 862, 1639), et ils eurent entre eux des procès sans fin (a) que nous passerons sous silence pour ne parler que d'affaires plus importantes.

Sous la régence de Blanche de Navarre, un évêque d'Auxerre voulut contraindre le comte de cette ville à lui faire hommage de deux châteaux qui, jusque-là, avaient été tenus des comtes de Champagne. Il lança contre lui une sentence d'excommunication, et le comte d'Auxerre, pour se faire relever de cette censure dut faire hommage à l'évêque (882).

Un évêque d'Autun frappa d'interdit trois bourgs que le comte de Nevers tenait de Blanche de Navarre, et dont cet évêque prétendait exiger l'hommage (912).

Nous connaissons donc sept sentences d'excommunication ou d'interdit lancées par des évêques de Champagne ou des provinces voisines, soit contre Blanche de Navarre, soit contre Thibaut IV, soit contre certains de leurs vassaux ou de leurs fiefs, à cause de contestations où Blanche et Thibaut étaient parties.

Le pape Innocent III n'approuvait pas l'emploi si fréquent de peines aussi graves dans des questions souvent douteuses, et, en tout cas, d'importance secondaire. Il notifia son blâme à la plupart des évêques dont la Champagne relevait spirituellement, et il les menaça eux-mêmes des censures ecclésiastiques s'ils continuaient à commettre de pareils abus

(a) Catalogue, nos 1189, 1321, 1565, 1641, 1754-1756, 3221, 3232, 3258, 3281, 3291, 3346, 3347, 3426.

d'autorité (753, 884). Enfin ses successeurs, comme nous l'avons vu, décidèrent que personne ne pourrait, sans mandat spécial du siége apostolique, lancer l'excommunication contre la personne de nos comtes, ni l'interdit contre leurs terres. La cour de Rome, plus prudente que les juridictions ecclésiastiques secondaires, réservait les grands moyens pour les grandes causes. Nous ne trouvons dans notre histoire qu'une sentence d'excommunication prononcée directement par elle, c'est celle dont elle frappa Erard de Brienne et ses partisans ; mais le principe de l'indissolubilité du mariage était mis en question par les prétentions d'Erard de Brienne, et ce principe est la base même de la société chrétienne (a).

SECTION 3e.

LIBÉRALITÉS DES COMTES DE CHAMPAGNE ENVERS DES ÉTABLISSEMENTS RELIGIEUX.

Les successeurs d'Henri Ier n'eurent pas le même zèle que ce prince pour la fondation de chapitres séculiers. Cependant Henri II accorda son concours à l'établissement de la collégiale que le zèle de quelques clercs fit ériger dans la chapelle de son château de Vertus (368 ter). Marie de France et Blanche de Navarre donnèrent une coopération analogue à l'érection des chapitres de Notre-Dame-du-Val de Provins(445) et de Notre-Dame de Vitry (801) (b).

(a) L'interdit levé en 1258, et dont il est question dans Bourquelot, l'Italie aux foires de Champagne, p. 15, n'émanait pas immédiatement du pape, mais de juges délégués.

(b) Le chapitre de Saint-Nicolas-du-Martroy, établi en 1218 à

Blanche et ses successeurs fondèrent un prieuré de femmes de l'ordre de Saint-Benoît, le Meix, près d'Allibaudières (Aube), 1235-1236 (a); l'abbaye de femmes d'Argensolles, 1221-1224 (b), ordre de Citeaux; le monastère de la Trinité de Troyes, ordre de la Rédemption des captifs, 1260 (3187); le prieuré du Val-Dieu, près de Lachy, ordre du Val-des-Choux, 1269 (3546); le prieuré des ermites de Vassy, ordre du Val-des-Ecoliers, 1216 (975); deux monastères de Dominicains, Jacobins ou Frères-Prêcheurs, l'un à Troyes, 1232 (2198) (c), l'autre à Provins, 1270 (d); un de Franciscains ou Cordeliers, à Troyes, 1259 (e); deux de Cordelières, l'un à Provins, 1248 (2849) (f), l'autre près de Troyes, à la Chapelle-Saint-Luc,

Provins, avec le consentement de la comtesse Blanche, ne peut être considéré comme une fondation de cette princesse; Bourquelot, Hist. de Provins, I, 161-162.

(a) Catalogue, nos 2400, 2404, 2415, 2423.

(b) Catalogue, nos 1537, 1650, 1667, 1668.

(e) Voir Courtalon, Topographie historique de la ville et du diocèse de Troyes, II, 184.

(d) Catalogue, nos 3598, 3610, 3658. Suivant M. Bourquelot, Hist. de Provins, 1, 367, ce monastère date de l'année 1269.

(e) Catalogue, nos 3164, 5172, 3187, 3323. Les Franciscains avaient une maison à Troyes avant les dates que nous indiquons. Il est question de cette maison dès l'année 1236 (2416), mais cette résidence présentait des inconvénients qui la leur fit abandonner, et ils durent à la libéralité de Thibaut V un monastère plus commode, placé au centre de la ville, et qu'ils ont conservé jusqu'à la Révolution. Suivant Desguerrois, Sainctelé chrestienne, fo 353 r°, et Courtalon, II, 249, la première maison occupée à Troyes par les Franciscains leur aurait été donnée par Thibaut IV.

(f) Bourquelot, Hist. de Provins, tome I, pages 369 et suiv.

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