Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

ils écrivirent, une autorité politique considérable. Au centre de la constituante nous trouvons les disciples de Montesquieu, et à l'extrême gauche ceux de Rousseau. Cet empire des théories et des livres a été remarqué par Napoléon, qui s'étonnait, à Sainte-Hélène', de la facilité de l'opinion au xvïï* siècle. << Voltaire et Jean-Jacques, disait-il, avaient gouverné l'opinion à leur gré; ils seraient bien moins heureux aujourd'hui. »

Revenons à la Grèce. Il importe de restituer à Platon le caractère d'utopiste, et celui de théoricien à Aristote, pour ne pas conclure de ce qu'on lit dans ces grands hommes à ce que faisaient les Grecs. Montesquieu n'a pas évité cet écueil. S'il a établi comme un axiome que le principe du gouvernement démocratique était la vertu, en ajoutant que ce qu'il disait était confirmé par le corps entier de l'histoire, et était très-conforme à la nature des choses',

1 Mémorial de Sainte-Hélène, t. IV, p. 161, édit. 1824.

[blocks in formation]

c'est que souvent il a pris pour des réalités les idées et les préceptes de Platon et d'Aris

tote.

L'étude des faits ne nous a point conduit à décerner le privilége de la vertu aux gouvernements démocratiques. Au contraire, la démocratie grecque nous a paru n'avoir que de trop courtes lueurs de justice et de bon sens. Si nous exceptons quelques élans d'héroïsme et de magnanimité, nous l'avons trouvée presque toujours mentant à son principe, si ce principe était la vertu.

La vérité des choses a été le constant objet de notre poursuite. Sans esprit de système ou de parti, sans théories bâties d'avance, nous n'avons aspiré qu'à comprendre et à peindre la réalité. La lumière de l'histoire doit éclairer toutes les actions, toutes les tendances de l'homme, bonnes et mauvaises, généreuses et funestes. L'histoire montre la vérité à tous, pour tous et contre tous. C'est l'image de l'hu

manité qu'il ne faut défigurer ni par faiblesse accès de misanthropie.

ni par

Dans notre recherche de la vérité, nous n'avons pas prétendu la trouver toujours. Cette ambition n'eût pas été raisonnable surtout en ayant à faire aux Grecs. Je me suis rappelé, d'ailleurs, ce qu'avait dit Pausanias, un des hommes qui a le plus exploré leurs traditions : c'est que presque tous les points de l'histoire de la Grèce offraient matière à controverse1. Il faut, dans l'étude du passé, se résigner à certaines ignorances, pour porter toutes ses forces sur ce qu'il est le plus nécessaire, et sur ce qu'il est possible de savoir.

La curiosité outrecuidante, qui se pique de tout connaître, a été gourmandée assez rudement par un personnage auquel nous devons d'admirables tableaux du monde politique, le cardinal de Retz. «Ne doit-on pas

1 κει γὰρ δὴ ἐς ἀμφιςβήτησιν τῶν ἐν τῇ Ἑλλάδι τὰ πλείω. Pausan., t. II, p. 234. Éd. Clavier.

admirer, dit-il, l'insolence des historiens vulgaires, qui croiraient se faire tort s'ils laissaient un seul événement, dans leurs ouvrages, dont ils ne démêlassent pas tous les ressorts, qu'ils montent et qu'ils relâchent presque toujours sur des cadrans de collége1. » N'y auraitil pas encore plus d'impertinence à vouloir tout expliquer chez les anciens?

Néanmoins, nous n'avons rien négligé pour pénétrer, autant que possible, dans les origines et la nature des choses essentielles. Ainsi, sans oublier que la Grèce politique était surtout le sujet de cette histoire, nous avons assigné à la religion antique une place, une importance que personne, sans doute, ne trouvera trop considérable, si l'on songe qu'il faut toujours remonter à la religion pour dominer le spectacle des choses humaines. L'empire que la religion, cet indestructible besoin de l'homme, a exercé sur les Grecs, et l'essor qu'a

1 Mémoires du cardinal de Retz, t. II, p. 325. Édit. 1827.

pris leur génie pour s'élever à la Divinité; le fait universel et le caractère national, les premiers législateurs se confondant avec les dieux, la science et l'art avec le culte, voilà les commencements à la fois certains et obscurs de la nation des Hellènes.

Comment aurions-nous pu méconnaître l'autorité de la religion sur les Grecs, en étudiant les origines de la Crète et de Sparte? Toutefois, nous n'avons pas oublié les contrastes et les nuances qui distinguent les deux peuples de Minos et de Lycurgue. Sparte est, dès son début, plus politique, mais toujours elle s'élève sous l'invocation d'Apollon, le dieu des Doriens.

C'est encore la religion que nous retrouvons près du berceau d'Athènes, mais avec quelque chose d'étranger qui rappelle l'Égypte et Memphis. Entre les bords de l'Attique et les rives du Nil, la mer rapprocha les distances. Si nous ajoutons à la présence de quelques

« VorigeDoorgaan »