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MARQUIS DE RODES

(RODRIGUEZ D'EVORA Y VEGA.)

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ÉCARTELÉ: au premier et au quatrième, de gueules à l'aigle d'or; au deuxième et au troisième d'argent à trois fleurs de lys au pied coupé d'azur, qui est de VEGA; sur le tout, écartelé: au pre mier e au quatrième, d'azur au lion d'or lampassé de gueules, tenant de la patte dextre trois feuille d'or; une cottice de gueules brochant sur le tout, chargé en chef d'une comète, et en pointe d'une roche à trois coupeaux d'or; au deuxième et au troisième, d'azur à trois étoiles à six rais d'or, qu est de RODRIGUEZ D'EVORA.

SUR LE TOUT, d'or au lion de sable (armes de la terre de Rodes). L'Écu posé sur un manteau duca de gueules, doublé d'hermine, et surmonté d'une couronne ducale fermée.

Rodriguez d'Evora y Vega est plus particulièrement connu en Belgique sous la dénomination de marquis de Rodes. Ce titre de marquis, par un privilége rare à cette époque, mais justifié avec éclat, fut concédé par le roi d'Espagne, Charles II, à tous les descendants du IIIe baron de Rodes, Lopez Rodriguez, devenu 1er marquis de Rodes en 1682. Les circonstances qui déterminèrent la promulgation de ce témoignage public de gratitude royale trouveront place à la fin de ce récit.

De Vega est originaire de Castille, cette terre féconde en féaux chevaliers. Une branche de cette famille fut transplantée en Belgique, sous les archiducs Ferdinand et Isabelle; modèle d'honneur et de vertu, elle s'est fait remarquer toujours par son attachement à la foi catholique, par son patriotisme, par son dévoûment sans bornes à ses com

patriotes. C'est ce que nous allons démontrer par l'histoire succincte de cette famille distinguée.

Depuis plus d'un demi siècle, il s'est opéré dans l'ordre social une transformation complète, et rien n'est plus digne d'attention sérieuse que l'examen de la conduite des hommes dont la Belgique s'honore, dans les temps difficiles que la patrie a traversés, dans cette lutte du passé avec l'avenir. Le résultat de cet examen est une preuve nouvelle d'une vérité rappelée souvent dans ce livre, c'est à dire que la noblesse belge, si religieuse, si bienfaisante, si éclairée, s'est toujours fait un devoir, même au prix des plus durs sacrifices, de marcher en tête de la civilisation et de prendre l'initiative des améliorations sociales réellement efficaces.

Charles Joseph Marie Ghislain, marquis de Rodes, sénateur du royaume de Belgique pour l'arrondissement d'Audenaerde, né à Gand, le 10 juin 1790, est fils de Charles Antoine Rodriguez d'Evora y Vega, marquis de la terre de Rodes, baron de Berleghem, seigneur de Terweede, Ter Saelen, Cnappenaerde, Broukstraete, Lecke, etc., souverain panetier héréditaire de Flandre, gentilhomme héréditaire de la maison de Sa Majesté le roi d'Espagne. Sa mère était Marie Frédérique Ghislaine, baronne de Drack, dame de l'ordre de la Croix étoilée.

Peu d'années après la naissance du jeune marquis de Rodes, la révolution française vint abolir les distinctions et les titres de ses parents; cependant, lors de la révolution brabançonne, si bien commencée, si mal achevée faute d'une bonne direction, son père se distingua parmi les plus ardents patriotes; il sacrifia des sommes considérables pour l'organisation, l'équipement et l'entretien du régiment des Flandres; il faisait partie, à Gand, du comité de la justice, et il était député des états de Flandre aux états généraux et membre du congrès de 1790. Ce patriotisme inaltérable de

la noblesse belge, si courageuse dans les circonstances où elle a tout à perdre, rien à gagner, où elle compromet à la fois sa fortune, sa liberté, sa vie, et plus encore l'avenir de ses enfants, prouve aussi que son principe essentiel est un principe d'ordre et de conservation. Chez elle respect à ce qui existe, guerre aux perturbateurs, horreur égale pour la tyrannie d'un seul comme pour les passions démagogiques des masses.

En 1814, le marquis de Rodes dont nous parlons, commença à s'occuper des affaires publiques. Dès l'entrée des troupes alliées en Belgique, les autorités françaises s'étaient enfuies précipitamment de Bruxelles le 1er février et de Gand le 2 février. En l'absence de toute administration soit muni. cipale, soit départementale, les principaux membres de l'ancienne noblesse de Gand se réunirent spontanément aux notables de la ville pour aviser à des mesures d'urgence, et dans une de ces réunions ils désignèrent provisoirement, pour remplacer le préfet dont le nom même était devenu odieux, une commission départementale composée du comte d'Hane de Steenhuyse, président, du comte de Lens, ancien officier autrichien, maire de Gand, et de François de Kerchove, ancien capitaine aux dragons de la Tour, comman dant de la garde bourgeoise à pied et à cheval, membres. Ces choix obtinrent l'assentiment public, l'approbation du gouvernement provisoire à Bruxelles, et celle des généraux commandant les troupes alliées.

Le marquis de Rodes, un des plus jeunes membres de ces réunions, fut souvent mêlé à toutes les affaires, à toutes les difficultés du moment.

Au mois de mai 1814, il fut désigné par la noblesse de Flandre pour faire partie des délégués de toutes les provinces belges, qui furent envoyés à Paris pour sonder les souverains alliés sur leurs intentions relativement au sort

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de la Belgique. Il rejoignit ses collègues à Paris. C'étaient : pour le Brabant, le baron de Godin et le baron Emmanuel van der Linden d'Hooghvorst, mort en avril 1866, général en chef des gardes civiques de la Belgique; pour le Hainaut, le comte d'Auxy et le comte van der Burch, depuis aide de camp de Sa Majesté le roi des Pays-Bas; pour la province de Namur, le comte de Quarré, mort sénateur de Belgique; pour la province de Liége, le comte Constantin de Geloës et le baron de Stockem, mort sénateur de Belgique.

Le 30 mars 1815, Guillaume Ier fut proclamé roi des Pays Bas et la cour fut immédiatement organisée sur le même pied que sous le gouvernement autrichien. A cette occasion le marquis de Rodes fut investi de la dignité de chambellan. Il est curieux de rappeler de quelle manière se fit l'organisation de la cour du roi Guillaume Ier. Peu de jours avant son inauguration, il dit au ministre qu'il avait chargé de ce soin, qu'il voulait que toutes les nominations fussent faites à son arrivée à Bruxelles. Le ministre ayant demandé quelles étaient ses intentions, le roi lui dit qu'il n'avait qu'à se conformer à ce qui était établi à la cour de Bruxelles, sous Marie Thérèse, et de nommer les anciens chambellans vivants, les fils, ou bien les petits fils de ces dignitaires.

C'est ainsi que le marquis de Rodes fut investi d'une dignité qui lui fut retirée en 1816 pour un motif qui l'honore. Il était un des notables chargés de l'examen et de l'acceptation de la loi fondamentale et il fut du petit nombre des opposants. Voilà son crime. Cependant, ayant été élu membre des états provinciaux en 1822, et ayant prêté le serment à la loi fondamentale, il fut nommé de nouveau chambellan, ce qui ne put l'empêcher de prendre, en 1829, une part active au pétitionnement, et d'être le premier en Flandre qui eût signé la pétition qui réclamait la liberté de la presse.

Immédiatement après les journées de septembre 1830, le

1er octobre, le gouverneur de Gand, M. Van Doorn et le duc de Saxe Weimar, commandant militaire, abandonnèrent subitement leur poste. Les principaux notables de la province se réunirent, comme en 1814, pour parer au besoin du moment. Le 7 octobre, le marquis de Rodes parvint à déterminer les membres des états provinciaux résidant à Gand de se joindre à lui pour convoquer extraordinairement leurs collègues. La réunion, fixée au 11 octobre, fut très nombreuse. Elle eut lieu en présence du comte Félix de Merode, membre du gouvernement provisoire de la Belgique. Dans cette séance le gouvernement provisoire fut reconnu par cinquante suffrages et le mandat de la députation fut consideré comme révoqué; mais avant de se séparer, les membres de l'assemblée désignèrent, à l'unanimité, le marquis de Rodes, le comte d'Hane de Steenhuyse et le comte Hippolyte Vilain XIIII pour faire partie, avec quinze autres membres, d'un comité qui remplaçât les états députés de la province. Le marquis de Rodes, en signant le premier les lettres d'appel, en prenant l'initiative de cette grande résolution, représente ici le patriotisme de la noblesse belge, le sentiment si profondément national qui l'anime.

Lors des élections au Congrès national, en novembre 1830, le marquis de Rodes fut élu membre de cette grande assemblée. Il s'associa énergiquement à toutes les mesures concernant l'indépendance de la patrie et l'organisation des libertés publiques. Les faits suivants, extraits des procès verbaux des séances du congrès constituant, l'attestent pleinement, en même temps qu'ils rappellent les principaux actes d'une assemblée souveraine qui fera toujours l'orgueil de la Belgique et qu'entoura, dans tant de circonstances, l'admiration du monde.

« Le marquis de Rodes, l'un des membres les plus influents du comité dirigeant l'administration de la province

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