Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

ron qui coupe du bois! Mais c'est un mal inévi– table: sans ce bruit on ne pourroit sentir la mesure; la musique par elle-même ne la marque pas: aussi les étrangers n'aperçoivent-ils point le mouvement de nos airs. Si l'on y fait attention, l'on trouvera que c'est ici l'une des différences spécifiques de la musique françoise à l'italienne. En Italie la mesure est l'ame de la musique; c'est la mesure bien sentie qui lui donne cet accent qui la rend si charmante; c'est la mesure aussi qui gouverne le musicien dans l'exécution. En France, au contraire, c'est le musicien qui gouverne la mesure; il l'énerve et la défigure sans scrupule. Que dis-je? le bon goût même consiste à ne la pas laisser sentir; précaution dont au reste elle n'a pas grand besoin. L'Opéra de Paris est le seul théâtre de l'Europe où l'on batte la mesure sans la suivre, par-tout ailleurs on la suit sans la battre.

Il régne là-dessus une erreur populaire qu'un peu de réflexion détruit aisément. On s'imagine qu'un auditeur ne bat par instinct la mesure d'un air qu'il entend que parcequ'il la sent vivement; et c'est, au contraire, parcequ'elle n'est pas assez sensible ou qu'il ne la sent pas assez, qu'il tâche, à force de mouvement des mains et des pieds, de suppléer ce qui manque en ce point à son oreille. Pour peu qu'une musique donne prise à la cadence, on voit la plupart des François qui l'écoutent faire

mille contorsions et un bruit terrible, pour aider la mesure à marcher ou leur oreille à la sentir. Substituez des Italiens ou des, Allemands, vous n'entendrez pas le moindre bruit, et ne verrez pas le moindre geste qui s'accorde avec la mesure. Seroit-ce peut-être que les Allemands, les Allemands, les Italiens, sont moins sensibles à la mesure que les François? Il y a tel de mes lecteurs qui ne se feroit guère presser pour le dire; mais dira-t-il aussi que les musiciens les plus habiles sont ceux qui sentent le moins la mesure? il est incontestable que ce sont ceux qui la battent le moins; et quand, à force d'exercice, ils ont acquis l'habitude de la sentir continuellement, ils ne la battent plus du tout: c'est un fait d'expérience qui est sous les yeux de tout le monde. L'on pourra dire encore que les mêmes gens à qui je reproche de ne battre la mesure que parcequ'ils ne la sentent pas assez, ne la battent plus dans les airs où elle n'est point sensible, et je répondrai que c'est parcequ'alors ils ne la sentent point du tout. Il faut que l'oreille soit frappée au moins d'un foible sentiment de mesure pour que l'instinct cherche à le renforcer.

Les anciens, dit M. Burette, battoient la mesure en plusieurs façons: la plus ordinaire consistoit dans le mouvement du pied qui s'élevoit de terre, et la frappoit alternativement selon la mesure des

DICT. DE MUSIQUE. T. I.

7

deux temps égaux ou inégaux. (Voyez RHYTHME.) C'étoit ordinairement la fonction du maître de musique appelé coryphée, xopupatos, parcequ'il κορυφαῖος, étoit placé au milieu du chœur des musiciens, et dans une situation élevée pour être plus facilement vu et entendu de toute la troupe. Ces batteurs de mesure se nommoient en grec πodóжTUTOι Et ποδόψοφοι, à cause du bruit de leurs pieds, συντονάριοι, à cause de l'uniformité du geste, et, si l'on peut parler ainsi, de la monotonie du rhythme, qu'ils battoient toujours à deux temps. Ils s'appeloient en latin pedarii, podarii, pedicularii. Ils garnissoient ordinairement leurs pieds de certaines chaussures ou sandales de bois ou de fer, destinées à rendre la percussion rhythmique plus éclatante, nommées en grec, κρουπέζια, κορύπαλα, ¿роúñɛa, et en latin, pedicula, scabella ou scabilla, à cause qu'elles ressembloient à de petits marchepieds ou de petites escabelles.

Ils battoient la mesure, non seulement du pied, mais aussi de la main droite, dont ils réunissoient tous les doigts pour frapper dans le creux de la main gauche, et celui qui marquoit ainsi le rhythme s'appeloit manuductor. Outre ce claquement de mains et le bruit des sandales, les anciens avoient encore, pour battre la mesure, celui des coquilles, des écailles d'huîtres et des ossements d'animaux qu'on frappoit l'un contre l'autre,

[blocks in formation]

comme on fait aujourd'hui les castagnettes, le triangle, et autres pareils instruments.

Tout ce bruit, si désagréable et si superflu parmi nous à cause de l'égalité constante de la mesure, ne l'étoit pas de même chez eux, où les fréquents changements de pieds et de rhythmes exigeoient un accord plus difficile, et donnoient au bruit même une variété plus harmonieuse et plus piquante. Encore peut-on dire que l'usage de battre ainsi ne s'introduisit qu'à mesure que la mélodie devint plus languissante, et perdit de son accent et de son énergie. Plus on remonte, moins on trouve d'exemples de ces batteurs de mesure, et dans la musique de la plus haute antiquité l'on n'en trouve plus du tout.

BÉMOL Ou B mol, s. m. Caractère de musique auquel on donne à-peu-près la figure d'un b, et qui fait abaisser d'un semi-ton mineur la note à laquelle il est joint. (Voyez SEMI-TON.)

Gui d'Arezzo ayant autrefois donné des noms à six des notes de l'octave, desquelles il fit son célèbre hexacorde, laissa la septième sans autre nom que celui de la lettre b, qui lui est propre, comme le c à l'ut, le d au re, etc. Or, ce b se chantoit de deux manières; savoir, à un ton au-dessus du la, selon l'ordre naturel de la gamme, ou seulement à un semi-ton du même la, lorsqu'on vouloit conjoindre les tétracordes; car il n'étoit

pas encore question de nos modes ou tons modernes. Dans le premier cas, le si sonnant assez durement à cause des trois tons consécutifs, on jugea qu'il faisoit à l'oreille un effet semblable à celui que les corps anguleux et durs font à la main; c'est pourquoi on l'appela b dur ou b carré, en italien b quadro. Dans le second cas, au contraire, on trouva que le si étoit extrêmement doux; c'est pourquoi on l'appela b mol; par la même analogie, on auroit pu l'appeler aussi b rond, et en effet les Italiens le nomment quelquefois b tondo.

Il y a deux manières d'employer le bémol; l'une accidentelle, quand dans le cours du chant on le place à la gauche d'une note. Cette note est presque toujours la note sensible dans les tons majeurs, et quelquefois la sixième note dans les tons mineurs, quand la clef n'est pas correctement armée. Le bémol accidentel n'altère que la note qu'il touche et celles qui la rabattent immédiatement, ou tout au plus celles qui, dans la même mesure, se trouvent sous le même degré sans aucun signe contraire.

L'autre manière est d'employer le bémol à la clef, et alors il la modifie, il agit dans toute la suite de l'air et sur toutes les notes placées sur le même degré, à moins que ce bémol ne soit détruit accidentellement par quelque dièse ou bécarre, ouque la clef ne vienne à changer.

« VorigeDoorgaan »