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La pièce pathologique, que j'ai fait scier en deux parties pour mieux voir ses caractères, présente l'aspect d'une masse cartilagineuse entourée d'une coque osseuse. Notre savant collègue, M. Van Kempen, a bien voulu l'examiner au microscope et a trouvé qu'elle était composée de tissu sarcomateux avec prédominance de faisceaux fibrillaires en certains points et prédominance d'éléments cellulaires en d'autres points sarcôme fibrillaire, fibro-sarcôme, tumeur fibro-plastique.

OBSERVATION (1). -Nestor M., âgé de 15 ans, d'un tempérament lymphatique, d'une constitution médiocre, domicilié à Fresmes (près de Condé, département du Nord, France), est entré à l'hôpital civil de Louvain le 21 novembre 1872, pour s'y faire traiter d'une affection qu'il porte à la joue droite.

Les parents de Nestor sont bien portants. Deux de leurs enfants ont succombé en bas-âge, le premier au croup et le second à une maladie inconnue. Les autres enfants jouissent d'une bonne santé et personne dans la famille n'a présenté d'affection analogue à celle de Nestor. A part quelques indispositions fort passagères, celui-ci n'a jamais été malade.

Il y a 28 mois, en passant la main sur sa figure, Nestor sentit par hasard dans la fosse canine droite, une toute petite tumeur peu ou point apparente à la vue, sans changement de couleur à la peau, dure, indolente à la pression mais devenant par intervalles le siége de douleurs spontanées, obtuses, rares et fugaces. Elle fut prise par le patient et par son père pour une nouvelle dent qui tendait à percer. Vers

(1) Cette observation a été recueillie par M. JANSENS, élève en médecine.

le même temps les deux dernières molaires droites et la canine du même côté étaient vacillantes. Cependant la petite tumeur se développait d'une manière lente et uniforme tandis que les dents se raffermissaient.

Cet état de choses existait depuis 4 à 5 mois quand on consulta M. le docteur Castiau qui prescrivit des frictions d'onguent mercuriel sans aucun résultat. Un autre médecin ordonna des pilules de fer qui ne parurent pas plus efficaces que l'onguent. Revenu près de M. le docteur Castiau, le malade suivit pendant six mois un traitement à l'iodure de potassium qui le fit maigrir beaucoup tandis que la tumeur marchait toujours mais d'un pas ralenti. Plusieurs médecins. furent encore consultés sans plus de succès. Enfin Nestor vint à Louvain demander sa guérison à M. le professeur Michaux.

Etat actuel. La joue droite est le siége d'une tumeur très-saillante de la grosseur d'un poing d'adulte, dont la base s'étend depuis le bord antérieur du muscle masséter et l'articulation du malaire avec l'arcade zygomatique jusqu'à la ligne médiane de la face, et depuis le rebord orbitaire du maxillaire supérieur jusqu'à la fente buccale. La saillie du nez est presque confondue avec le côté gauche de la tumeur.

La commissure droite de la bouche est abaissée ainsi que la paupière inférieure qui laisse à découvert une partie de la sclérotique au-dessous de la cornée; le malade peut néanmoins fermer l'œil complètement. Les téguments sont parfaitement sains. Au palper la tumeur est d'une dureté extrême et sans aspérités.

En examinant par la narine on trouve la cavité nasale presque obstruée par un rebord arrondi, mousse, qui s'avance vers la cloison du nez et dont la consistance est semblable à celle de la tumeur. Le malade peut encore chasser

par cette voie de l'air et des mucosités; la sensibilité olfac

tive y est très-obtuse.

En relevant la lèvre, on voit l'espace compris entre les gencives et le repli de la muqueuse buccale occupé par un autre rebord plus large, également arrondi el mousse, également dur, qui s'étend en avant jusqu'à la ligne médiane et contourne en arrière la dernière molaire. Lorsque le malade serre les mâchoires, les rangées de dents se correspondent et les dents se touchent, à part les deux incisives et la canine gauches supérieures qui laissent un espace ovalaire assez considérable entre elles et leurs homologues inférieures, Quand le malade ouvre largement la bouche on découvre la voûte palatine saillante et convexe dans toute sa moitié droite; cette saillie s'étend même jusqu'à un centimètre et demi environ au delà de la ligne médiane où elle s'arrête brusquement. La consistance est aussi considérable en ce point que dans tous les autres. La coloration n'a pas notablement changé.

A la pression, la tumeur est indolente dans toute son étendue, excepté en un point assez circonscrit vers la racine du nez. Les douleurs spontanées sont rares et passagères; quelquefois ce sont des élancements dans la direction du nerf sous-orbitaire.

Il n'y a guère de gène fonctionnelle.

Les grandes fonctions de l'économie s'accomplissent régulièrement. Il y a, de chaque côté du cou des ganglions lymphatiques tuméfiés.

Diagnostic. - Le diagnostic fut porté à la clinique du 23 novembre. La consistance uniformément dure de la tumeur, de même que l'absence de fluctuation et de crépitation de parchemin écartaient l'idée d'une collection liquide ou solide développée dans le sinus maxillaire. Les affections

carcinomateuses, outre qu'elles sont rares dans la jeunesse, n'auraient pas atteint un pareil volume sans occasionner des douleurs caractéristiques, sans se ramollir, sans envahir la muqueuse ou la peau, sans amener enfin un état cachectique. Restait à se prononcer entre l'exostose, le sarcome et l'enchondrome. M. le professeur Michaux opina pour cette dernière affection. La conduite à tenir était du reste la même dans les trois cas, vu la marche rapide et incessante du mal, malgré l'emploi des moyens pharmaceutiques les plus puissants. Pour confirmer le diagnostic, une ponction exploratrice fut faite au niveau de la fosse canine et on reconnut que la tumeur était solide dans toute son étendue. L'ablation de la mâchoire supérieure était dès lors indiquée..

M. le professeur Michaux modifiant son procédé habituel, ne pratiqua qu'une incision qui, commençant à 3 centimètres au-dessus de la racine du nez et comprenant toute l'épaisseur des parties molles, se terminait au bord libre de la lèvre supérieure. Le lambeau fut disséqué de bas en haut et de gauche à droite jusque sur les articulations temporo-zygomatique et fronto-malaire qui furent ainsi mises à découyert de même que le plancher de l'orbite. Alors commença le second temps de l'opération. La gouge fut appliquée à l'articulation frontomalaire et à l'articulation de l'apophyse montante avec le frontal; l'arcade zygomatique fut coupée avec le sécateur de Liston; la dent incisive fut arrachée et la gouge fit encore la séparation des os maxillaires. M. le professeur Michaux détacha le voile mobile du palais, puis saisissant la tumeur avec la main, il la fit basculer et l'enleva facilement. L'opération avait duré 8 à 10 minutes. Il suffit pour arrêter tout écoulement de sang d'éteindre dans la plaie deux cautères olivaires chauffés à blanc. En inspectant la plaie, M. Michaux crut

reconnaître sur ce qui restait de la voûte palatine un point suspect dont il fit la résection avec la gouge.

Après quelques injections détersives et quelques instants de repos accordés au patient, M. Michaux fit la réunion des lambeaux par 14 points de suture métallique.

La réaction s'établit au bout de quelques heures. La nuit fut bonne, le jeune opéré dormit même trois heures consécutives.

On fait constamment des fomentations tièdes avec une infusion de fleurs de camomille. Le malade n'éprouve qu'un léger mal de tête. L'œil droit est un peu sensible à la lumière.

2. CONSIDÉRATIONS pratiques sur le typhus bovin et charbonneux; par M. PÉTRY, membre honoraire.

Messieurs,

Il vous souvient qu'à l'époque de l'invasion de la peste en Belgique, en 1865, alors qu'on se décida à sacrifier les animaux malades et les suspects, nous fìmes, dans cette enceinte, la proposition de nommer une Commission qui serait chargée de se rendre partout où les foyers de contagion pourraient se produire, tant pour chercher à reconnaître les signes caractéristiques de cette grave affection que personne de nous n'avait encore vue, que pour la distinguer du typhus charbonneux, avec lequel on l'avait confondue en maintes occasions dans le Limbourg et ailleurs.

Cette proposition fut vivement combattue par l'honorable M. Bellefroid, qui, partisan et promoteur de l'abatage, soutint que cette mesure était la seule efficace pour se rendre maître de l'épizootie, et finit par donner à la Compagnie l'assurance que, sous peu de temps, ce sacrifice aurait raison du fléau.

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