SÉANCE DU 1er JUIN 1872. PRÉSIDENCE DE M. VLEMINCKX. La séance est ouverte à onze heures et un quart. I. COMMUNICATIONS DU GOUVERNEMENT. M. le Ministre de l'Intérieur informe qu'il a reçu du consul de Belgique à Guatemala deux sacs de Cundur-Angu, plante dont il a adressé un échantillon à l'Académie, le 19 janvier dernier, et à laquelle.on attribue la propriété de guérir le cancer et autres maladies du sang. En mettant ces deux sacs de Cundur-Angu à la disposition de la Compagnie, M. le Ministre demande qu'elle soit consultée sur le point de savoir s'il ne conviendrait pas d'expérimenter, sous le contrôle d'une commission de médecins désignés par l'Académie, le spécifique préconisé. M. le Président rappelle que la Compagnie a décidé que l'échantillon de cette plante, qui lui a été transmis par le Gouvernement, sera tenu, au secrétariat, à la disposition des menıbres qui désireront faire des expériences. M. le Président propose de maintenir cette résolution, une Commission ne pouvant guère étre chargée d'émettre un avis sur l'efficacité du remède, vu la longueur des traitements à instituer et la difficulté qu'une Commission aurait d'exercer un contrôle convenable. Il propose subsidiairement d'inviter les membres qui se livreront à des essais, à en faire connaitre les résultats à l'Académie. - La Compagnie décide qu'il sera répondu dans ce sens à M. le Ministre. Par une autre dépêche, M. le Ministre transmet un paquet contenant des feuilles de Boldo, recueillies par le Consul général de Belgique à Valparaiso, ct auxquelles on attribue la propriété de guérir certaines affections du foie. - Même décision, Le Gouvernement demande l'avis de la Compagnie : 1° Au sujet des mesures à prendre en commun par les di à vers gouvernements en vue d'empêcher que la peste, qui sévit en Perse, se propage en Europe ; 2. Sur les demandes qui se sont produites de voir introduire dans le traité de commerce entre la France et la Belgique une disposition ayant pour but d'établir la réciprocité à l'égard des préparations pharmaceutiques des deux pays. Sur la proposition de M. le Président, ces questions sont renvoyées à l'examen de Commissions à nommer par le Bureau. Donnant suite à la décision prise par la Compagnie dans sa dernière séance, le Bureau a désigné MM. Borlée, Michaux et Soupart pour le rapport à faire sur le mémoire de MM. Deneffe et Van Wetter, traitant de la ponction de la vessie. III. CORRESPONDANCE ET COMMUNICATIONS. M. Dèle, médecin vétérinaire du Gouvernement à Anvers, et M. Wehenkel, professeur à l'Ecole de médecine vétérinaire à Cureghem, rappellent que l'un d'eux a déposé, dans la séance de l'Académie du 30 décembre 1871, un pli cacheté relatif à une question scientifique. Dans ce pli se trouvent consignées des conclusions d'une étude sur la vaccination. Ils avaient espéré pouvoir créer une nouvelle source artificielle de vaccin en faisant pénétrer la lymphe vaccinale directement dans le torrent circulatoire de la vache. Les résultats des expériences qu'ils ont faites jusqu'à ce jour ont été négatifs. Néanmoins ils se proposent de poursuivre leurs recherches et annoncent qu'ils les feront connaître ultérieurement à l'Académie. Deux plis cachetés, indiquant les questions scientifiques qui font le sujet des écrits qu'ils contiennent, sont adressés à l'Académie par M. Ernest Lambert, avec prière d'en agréer le dépôt, l'auteur se proposant de soumettre à la Compagnie les travaux dont il s'occupe. - Le dépôt est accepté. L'université de Bonn a transmis, à titre d'échange de publications, les thèses présentées, en 1871, par les candidats au grade de docteur. Il est fait hommage à l'Académie de quelques opuscules dont les titres seront insérés au Bulletin. Remerciments aux auteurs pour l'envoi qu'ils ont bien voulu faire de leurs travaux. IV. LECTURE, RAPPORTS ET DISCUSSIONS. 1. COJI MONICATION sur l'état de la santé publique dans la ville de Bruxelles; par M. JANSSENS, correspondant de l'Académie. Messieurs, Avant d'aborder son ordre du jour, l'Académie voudra bien me permettre de l'entretenir pendant quelques instants d'un sujet qui ne peut manquer d'éveiller toutes ses sympathies : je ve'ıx parler de l'état de la santé publique. Il y a un an, messieurs (le 27 mai 1871), qu'une discussion assez vive surgi incidemment dans cette enceinte à propos des conditions prétendûment anti-hygiéniques de la ville de Bruxelles et des mesures que semblait nécessiter cet état de choses. L'intérêt que vous avez tous paru prendre à ce débat, dans lequel ont été effleurées de graves questions hygiéniques et humanitaires, me porte à croire que vous accueillerez aujourd'hui avec une bien vive satisfaction le document dont j'ai l'honneur de déposer sur le Bureau un certain nombre d'exemplaires pour être soumis à l'inspection de chacun des membres de cette Assemblée. Ce document consiste en un diagramme qui résume graphiquement de longues colonnes de chiffres et qui démontre, à toute évidence, que l'état de la santé publique a été exceptionnellement favorable à Bruxelles, pendant les cinq mois qui viennent de s'ecouler. On y constate, en effet, que depuis le 1er janvier 1872 jusqu'à ce jour, la mortalité de notre ville a été constamment inférieure, le plus souvent avec des écarts très-considérables, à la moyenne normale, basée sur les relevés statistiques de la période décennale 1862-71. Pour bien apprécier la signification du fait mis en relief par les courbes graphiques de mon diagramme, il convient de faire remarquer : Que la population de la ville de Bruxelles n'a cessé de s'accroître depuis dix ans, et que l'écart existant entre le nombre actuel et le chiffre moyen des habitants de la période 1862-74 peut être évalué de quinze à vingt mille âmes : par conséquent, la mortalité de 1872 aurait même pu dépasser quelque peu la moyenne décennale sans sortir pour cela de ses limites normales. Que les circonstances météorologiques constatées pendant les sis derniers mois, n'ont pas toujours été de nature à favoriser la santé publique : je me bornerai à vous rappeler sommairement qu'à un hiver doux et humide ont succédé des chaleurs très-précoces, suivies d'un abaissement brusque et très-sensible de la température; or, des circonstances analogues ont été considérées comme favorables à l'apparition de certaines épidémies. Enfin, que les travaux d'assainissement de la Senne, le grand remuement des terres, le curage à vif fond des différents bras de la rivière, n'ont pas discontinué un seul jour pendant l'année que nous venons de traverser. Je laisse à chacun d'entre vous, messieurs, le soin de tirer des faits que je viens de produire les conclusions légitimes qui en découlent. J'ai pour principe de me conformer au précepte très-judicieux émis par un des plus savants statisticiens dont s'honore la Belgique, à savoir qu'il faut laisser parler et non pas faire parler les chiffres. Permettez-moi cependant, messieurs, de vous faire part de la réflexion qui m'est venue tout naturellement à l'esprit pendant que je terminais mon tableau graphique. Ceux qui, en dehors de cette enceinte, ont fait jadis à l'administration locale un grief sérieux de la mortalité exuberante des premiers mois de l'année 1871 (mortalité dont j'ai d'ailleurs fourni ici même l'explication toute naturelle), ceux-là, dis-je, doivent, pour rester logiques, ou bien reconnaitre que leur argumentation tombait complètement à faux, ou bien, s'ils persistent dans les conclusions qui incriminaient nos édiles, ils doivent équitablement faire remonter aujourd'hui à l'autorité communale ainsi qu'à la Commission médicale qui lui vient en aide par ses conseils, le mérite de la situation sanitaire exceptionnelle dont nous jouissons en ce moment. J'ai la satisfaction de vous apprendre, messieurs, que grace à ces conditions persistantes, notre belle capitale occupe depuis |