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La peau a sa coloration et sa chaleur normales. L'appareil locomoteur n'est point affecté. Les urines ne présentent rien de particulier; leur émission détermine, dans le canal de l'urèthre, un sentiment de cuisson. La menstruation est régulière, mais la malade a des pertes blanches abondantes. Les fonctions digestives sont intactes.

D'après l'ensemble de ces phénomènes, on pouvait conclure à une affection chronique intéressant les organes de la génération. Mais comme la malade avait ses règles, le jour de son entrée, et qu'elles ne se sont arrêtées que le 22 janvier (5 jours après), on ne la visita que le 23. Voici ce que M. Pigeolet put alors constater. Le col, un peu allongé, est indolore, de même que le segment inférieur de l'utérus. Dans le point correspondant au cul-de-sac recto-vaginal, on rencontre une tumeur, plus dure que ne le serait un amas de matières fécales accumulées dans le rectum, et dont la pression détermine une douleur assez vive. L'utérus est porté en haut et un peu déjeté à droite.

D'après ces signes objectifs, d'après le caractère et le trajet des douleurs signalées par la malade, M. le professeur Pigeolet pensa que la tumeur était constituée par un caillot, résultant d'une hémorrhagie extra-péritonéale qui se serait produite à l'une des dernières époques menstruelles, et il diagnostiqua une hématocèle rétro-utérine.

Il prescrivit à la malade un régime sévère, le repos au lit, des bains répétés de jour à autre, et une potion renfermant: Bicarb. sod. 2 gr.; Syr. s. 45gr.; Aq. sambuc. 200 gr. Sous l'influence de ces moyens, la tumeur diminua peu peu de volume, et elle avait complètement disparu, ainsi que les phénomènes sympathiques qu'elle déterminait, lorsque M. V... sortit le 2 mars.

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Phlegmon du ligament large. C. L..., couturière, d'un tempérament lym phatique, née d'une mère phthisique, a été traitée, à l'âge de dix-neuf à vingt ans, pour une anasarque, survenue alors sous l'influence d'une cause que nous ignorons, et elle a été guérie de ce symptôme, sinon de son affection principale. Arrivée à l'âge de vingt-quatre ans, elle devint enceinte pour la première fois, et accoucha, le 15 décembre, d'un enfant à terme. Il s'était écoulé 24 heures entre la rupture de la poche amniotique et l'accouchement; il est probable que des symptômes de métrite apparurent, car on appliqua 24 sangsues à l'hypogastre de la nouvelle accouchée, et on la maintint à la diète absolue. D'après les renseignements fournis par la malade, elle n'avait eu précédemment ni vomissements ni constipation; ce qui suffit, pensons-nous, pour exclure l'idee d'une péritonite. Elle resta quelques jours à l'hôpital Saint-Jean, puis retourna chez elle où, suivant son expression, elle commença par changer de régime et se mit à se fortifier; si bien que, trois jours après, son état s'était aggravé à tel point qu'elle fut forcée de se rendre à l'hôpital Saint-Pierre. Elle y entra le 51 décembre 1861 et s'offrit à nous avec les symptômes suivants :

Douleurs abdominales gravatives, principalement localisées à la région hypogastrique, où existe une tumeur très-sensible à la pression, dure, constituée par l'utérus, dont le fond s'élève jusqu'à deux travers de doigt du nombril ; ces dou

leurs augmentent par la percussion et la position assise. La malade paraît affectionner le décubitus sur le côté gauche; elle est très-abattue, attribue sa faiblesse à un excès de diète, et accuse de l'appétit ; elle dit qu'elle digère bien tout ce qu'elle mange et qu'elle a par jour une ou deux selles normales; la soif est vive; la langue est blanche au centre, rouge à la pointe et sur les bords. Dyspnée habituelle, qui a encore augmenté depuis quelques jours; toux ancienne, quinteuse, humide, suivie de l'expectoration de crachats aérés, jaunâtres. Matité dans la fosse sus-épineuse gauche; respiration rude à l'endroit correspondant. Râles crépitants et sous-crépitants disséminés dans les deux poumons, en avant et en arrière, audibles à la fin de l'inspiration. Râles ronflants, en avant, des deux côtés, dans le temps de l'expiration. Cœur souffle au premier temps, dur, råpeux, audible surtout à la base, se continuant jusqu'au second temps, se propageant dans l'aorte et jusque dans les carotides. Bruit de souffle dans les artères fémorales. Pouls petit, dur; 108 pulsations par minute. Peau chaude. Pas de céphalalgie. Régime diète absolue. Prescription: saignée

de 500 grammes.

Le 2 janvier, le souffle au cœur est moins intense. La tumeur hypogastrique semble s'étendre des deux côtés. Pertes blanches par le vagin. - Prescription: frictions d'onguent mercuriel belladoné, et cataplasmes sur le ventre.

Le 3, lochies peu abondantes et peu odorantes; trois selles liquides.-Régime: une soupe au lait.

4 Mucil.
Syr. diac.

120 gramm.

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Le 4, lochies portant une odeur ammoniacale assez sensible; ventre moins dur et moins douloureux. Crachats muqueux, aérés, adhérents de la bronchite capillaire. Pouls petit, fréquent, dépressible. Insomnie passagère occasionnée par le besoin d'aller souvent à la garde-robe. Langue bonne. - Continuation. Le 5, une selle liquide.-Régime: 2 soupes au lait.

Le 6, pas de selles. - Régime: 3 soupes au lait.

Le 7, la peau a sa chaleur normale. Douleur à la pression dans l'hypogastre, et la région des ovaires. L'utérus a diminué de volume; son fond est à trois travers de doigts de l'ombilic. Écoulement vaginal moins abondant et moins fétide. Un peu de fièvre le soir.

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Le 14, œdème des extrémités inférieures et commencement d'œdème des extrémités supérieures; la peau blanche, lisse, tendue se laisse déprimer difficilement.

Le 15, prescription: acétate de potasse, 1 gramme.

Le 18, on pratique le toucher vaginal: la matrice est élevée; le col dur; pas de tumeur dans le vagin. Le corps de l'utérus paraît dur, se prolonge vers la région iliaque droite, où la malade accuse une vive douleur augmentée par la pression. La tumeur, que l'on avait considérée jusqu'ici comme constituée par la matrice seule, semble se diviser en deux parties, l'une, plus rapprochée de l'axe du corps, dure, qui est sans doute l'utérus même; l'autre plus molle, très-douloureuse, plus externe, qui est probablement le résultat d'un phlegmon déve loppé dans l'épaisseur du ligament large. Il n'y a pas encore là de fluctuation manifeste.

Le 21, globules de pus dans les urines. Régime 1/2 portion.

Le 25, acétate de potasse supprimé. Le souffle constaté au cœur existe toujours au même degré. - 3/4 de portion.

Le 25, matité complète dans la fosse iliaque droite. Langue bonne; dyspnée forte; ascite et hydrothorax.

Le 28, incisions aux jambes pour faciliter l'écoulement de la sérosité.

Du 29 janvier au 3 février, grâce aux incisions pratiquées, l'anasarque diminue considérablement; la dyspnée est moins intense et, à ce point de vue, la malade éprouve un soulagement notable; mais la douleur dans la fosse iliaque droite ne cesse pas; elle est tantôt lancinante, tantôt pulsative. Par suite de l'accumulation de sérosité dans les parois de l'abdomen et dans le péritoine, il est devenu impossible depuis longtemps de déterminer, par la fluc tuation, s'il existe, dans le ligament large, un phlegmon suppuré. Tout porte à le croire. En effet, depuis quelques jours la fièvre, qui avait laissé un moment de répit à la malade, s'est rallumée; des frissons irréguliers se manifes tent; le pouls est petit; il y a des selles liquides assez abondantes.

Le 4 février, pendant la nuit, après un sommeil tranquille, précédé d'une fièvre violente, douleur abdominale intense, subite, déchirante; peu après l'apparition de cette douleur, qui persiste et augmente par le moindre contact, surviennent des vomissements; le pouls est petit, filant; le facies devient hippocratique; la malade tombe dans un abattement profond qui dure jusqu'à la mort, le lendemain, à dix heures du soir.

A l'autopsie, nous trouvâmes un abcès du ligament large, à droite, ouvert dans la cavité du péritoine. Celle-ci était remplie d'une sérosité granuleuse, rendue trouble et jaunâtre par la présence du pus. Des fausses membranes unissaient les viscères entre eux et aux parois abdominales. L'utérus, tuméfié et congestionné, avait un peu plus que le volume normal. Les reins présentaient une hyperémie de la substance corticale. Au cœur, il y avait adhérence intime des deux feuillets du péricarde et un épaississement avec induration de la base de la valvule auriculo-ventriculaire du côté droit. (La suite au prochain No.)

SARCOME OSSIFIANT DE L'HUMERUS;

AMPUTATION DC BRAS;

RÉSECTION;

RÉCIDIVE SUR PLACE;

par M. le docteur EMILE ALLIX.

M. le professeur Deroubaix a offert à la Société anatomo-pathologique, dans la séance du 12 novembre 1860, deux ostéoïdes qui étaient bien dignes d'attirer l'attention de la Société. Nous avons été chargé d'en faire l'examen et la description.

D'après les renseignements que M. Deroubaix nous a communiqués, avec son obligeance ordinaire, ces productions pathologiques se sont développées au bras droit d'un jeune garçon de onze ans, M. de P..., de Namur, dont le tempérament est bilieux et la constitution solide. Vers la fin du mois de janvier 1860, des douleurs vagues ont commencé à être ressenties dans l'épaule et le bras, sans que leur cause pût être reconnue. On considéra cependant ces douleurs comme rhumatismales et, à la suite d'une consultation médicale, on les combattit par des vésicatoires volants, l'application de sangsues quatre fois répétée, etc.

Le mois de juin suivant, on constata à la partie postérieure de l'épaule vers le bord axillaire de l'omoplate, l'existence d'une tumeur que l'on prit pour un abcès au début, et que l'on traita par des emplâtres résolutifs.

En juillet, un nouveau praticien est appelé à donner ses soins au malade. Il croit pouvoir diagnostiquer une tumeur blanche et, dans cette pensée, prescrit l'huile de foie de morue et un régime tonique. Il pratique en même temps sur l'épaule la cautérisation transcurrente qu'il renouvela lorsque les brûlures furent cicatrisées.

Malgré ce traitement actif, la tumeur augmenta progressivement de volume; son développement se fit surtout avec force pendant le courant du mois d'août. M. Deroubaix est alors appelé en consultation pour donner son avis. On reconnaît que l'affection siége en dehors de l'articulation de l'épaule. Les mouvements du bras sont possibles, quoique devenus difficiles. En cherchant à s'assurer de leur étendue, sans pour cela employer une grande force, l'humérus se brise immédiatement en dessous de la tumeur. Celle-ci a le volume d'une tête de fœtus, est allongée dans le sens vertical, de forme conique, à base supérieure, s'étendant surtout vers l'aisselle où elle est accolée aux vaisseaux axillaires et aux branches terminales du plexus brachial. Elle est rénitente, profondément fixée sur l'humérus. Le malade y accuse une douleur habituelle, que la pression augmente, et qui est d'une nature particulière, analogue à de l'engourdissement. Il n'y a pas d'injection des veines superficielles et pas d'engorgement des ganglions voisins. Le membre n'est pas dématié. Enfin, sur aucune autre partie du corps, on ne trouve d'autre production accidentelle, et l'état général est excellent.

Contre cette affection, qui paraît tout à fait locale et que l'on pense être un ostéo-sarcome de l'extrémité supérieure de l'humérus, la résection est décidée.

M. Deroubaix pratique cette opération le 29 août, après avoir fait chloroformer le malade.

L'incision verticale de la peau et des couches sous-jacentes est étendue, à partir de l'acromion, jusqu'aux attaches inférieures du deltoïde, puis continuée en dehors et en bas, pour former au besoin un lambeau. Après une dissection longue et minutieuse des muscles, des vaisseaux et des nerfs accolés à la tumeur, celle-ci est isolée, l'humérus désarticulé en haut et réséqué vers son tiers moyen. Plusieurs ligatures ont dû être faites.

Toute hémorrhagie ayant cessé, le membre est placé dans un bandage plåtré additionné d'une attelle externe en zinc. Une ouverture est ménagée dans le bandage à la hauteur de la plaie.

Aucun accident ne survient pendant la durée du travail de réparation. Les fils des ligatures tombent le dix-huitième jour. Au bout de six semaines la cicatrisation est achevée; alors l'opéré est envoyé à la campagne. On ne remarque pas de saillie anormale, la cicatrice est parfaite, rien ne fait soupçonner une récidive du mal. Mais quinze jours après, un nouvel examen fait découvrir dans l'épaisseur du bras une production irrégulière que l'on pouvait encore attribuer à la restauration simple de l'os.

Au commencement du mois d'octobre, M. Deroubaix ne peut plus douter de la nature pathologique de la tumeur nouvelle, dont le volume a beaucoup augmenté, qui est très-dure, bosselée et mal limitée.

Il propose de tenter une seconde résection, en se tenant prêt à amputer le membre si, pendant l'opération, il reconnaît l'impossibilité complète de le conserver. Il opère le 4 novembre.

Un lambeau est taillé en arrière sur le deltoïde, de manière à permettre de découvrir la tumeur et à servir à la réunion si l'amputation est jugée nécessaire. La tumeur est disséquée, puis on en trouve une seconde, puis une troisième au milieu des parties molles, dans le tissu de nouvelle formation. Le bras doit être forcément sacrifié.

Les ganglions axillaires sont reconnus parfaitement sains, mais la cavité glenoïde de l'omoplate paraissant malade est réséquée avec la scie à chaînette. Tous les muscles excédants, tous les tissus autres que la peau du lambeau destiné à recouvrir la plaie, tout ce qui semble être une racine de la production morbide est enlevé à coups de ciseaux. Les ligatures et le lambeau étant ensuite assujettis, la plaie est pansée simplement.

Le 10 novembre, survient un érysipèle, partant des bords de la plaie, pour gagner les parties voisines. Il amène un peu de fièvre, mais n'enlève pas l'appétit. Enfin, le 19 novembre, après avoir fait le tour du tronc, l'érysipele a disparu.

Le 22 novembre, les ligatures tombent. La plaie ne suppure plus, car elle a été en grande partie réunie par première intention. L'état général est très-bon et tout fait espérer une guérison prochaine. La cicatrisation est complète vers le 8 décembre. La santé de l'opéré est parfaite.

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