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J. B. qui, à la vérité, n'était âgé que de 22 / ans, mais était majeur d'après les lois lucernoises, et était porteur de toutes les pièces nécessaires. Ce refus était fondé sur ce que les lois bâloises ne permettent de s'établir pour son compte que lorsqu'on a atteint l'âge de 24 ans révolus. Il est généralement admis en droit, était-il dit dans le recours, que les questions d'état doivent être réglées d'après les lois du pays d'origine, aussi le Gouvernement de Bâle-Ville reconnait-il l'obligation d'accorder à J. B. un permis de séjour, seulement il veut lui interdire d'exercer sa profession pour son propre compte. Le droit de l'établissement implique cependant aussi le droit d'exercer librement son industrie.

Le recours fut écarté. Motifs :

1. La liberté d'industrie, comme conséquence de l'établissement, n'est pas absolue, mais elle est limitée par les lois et ordonnances du canton, qui doivent traiter sous tous les rapports les Suisses établis à l'égal des propres ressortissants.

2. Sans doute ces lois ne doivent pas être en contradiction avec les prescriptions fédérales, spécialement avec les conditions de l'établissement (art. 41 chiff. 1 de la Const. F.); mais ce n'est point le cas lorsqu'un canton fait de la majorité, même pour ses propres ressortissants, une condition pour pouvoir exercer une profession pour son propre compte, d'autant plus que la pleine jouissance des droits civils dépend de la majorité (art. 41 chiff. 1. c de la Const. F.).

3. La question de la capacité de contracter doit être jugée d'après les lois du canton où cette capacité doit s'exercer, attendu que l'assertion que ce sont les lois du canton d'origine qui en décident ne repose pas sur une règle de droit positive, qui restreindrait la souveraineté des cantons, car il n'existe dans ce sens ni loi fédérale ni concordat.

4. Le recourant se trouve, par l'application de ces principes, assimilé aux citoyens de Bâle-Ville, et il est dès-lors satisfait aux prescriptions de l'art. 41 de la Const. F.

F. F. 1859. I. 360.

106. A. Gehrig, de Wasen (Uri), avait acheté en 1849 l'alpe dite Zum Stein (Oberhasle-Berne), pour y exploiter l'auberge du passage de Susten et l'industrie alpestre, et pour y faire paître en été le bétail qu'il possédait à Wasen. L'acte de propriété lui fut expédié par l'autorité sans aucune restriction. Après qu'il eût joui de sa propriété pendant plusieurs années, il fut condamné en 1855 à une peine, par le Tribunal du district d'Oberhasle, pour avoir, contrairement à une ordonnance du 2 Sept. 1797, fait paître pendant l'été sur la Steinalpe son bé ail qui avait passé

l'hiver dans le canton d'Uri. Ce jugement ayant été confirmé en seconde instance, Gehrig recourut auprès du C. F. et demanda l'annulation de cette sentence, en se fondant sur les motifs suivants : La liberté d'établissement et d'industrie (art. 41 de la Const. F.) suppose l'usage des instruments et des accessoires nécessaires à l'exploitation de cette industrie, accessoires au nombre desquels se trouve le bétail, s'agissant de l'industrie alpestre. On ne peut en conséquence pas, sous prétexte d'ordonnances de police, rendre impossible l'exercice d'une industrie qui ne cause aucun préjudice au pays. C'est pourtant ce qui arrive par la défense de faire paître, même sur ses propres alpes, du bétail parfaitement sain, et ces immeubles perdent toute valeur pour le recourant, s'il ne peut pas y conduire son propre bétail, qu'il fait hiverner à Wasen. Cette restriction apportée à la propriété est d'autant plus contraire au principe de la liberté d'industrie, que la Steinalpe n'est pas un bien communal, mais une propriété privée. L'ordonnance de 1797 est aussi contraire au principe de la liberté de commerce, d'importation, d'exportation et de transit (art. 29 de la Const. F.). En effet l'importation n'est plus possible, s'il n'est pas permis de faire paître sur les alpes, pendant l'été, du bétail étranger au canton. . . . Enfin cette ordonnance est également contraire au principe de l'égalité devant la loi et de l'abolition des priviléges de lieux et de personnes, car elle constitue un privilége en faveur du bétail de l'Oberhasle ou de ses propriétaires. L'objection que l'ordonnance est aussi applicable aux citoyens du canton n'est fondée qu'en apparence. En effet, comme le Juge n'intervient que sur une plainte de la partie lésée, et que celle-ci ne porte jamais plainte contre des ressortissants du pays, il n'y a que les citoyens étrangers au Hasli qui aient à souffrir de cette restriction. .

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Le C. F. ne donna, à la vérité, pas suite à la plainte, cependant il fit observer au Gouvernement de Berne combien l'ordonnance sus-mentionnée de l'Oberhasle approche de ce qui est interdit par le droit fédéral, et il indiqua en même temps quelques motifs tirés du droit cantonal de Berne, pour faire voir combien il serait désirable qu'une pareille ordonnance fût abrogée. Voici les considérants de son arrêté :

1. Quant à la première partie du recours, dans laquelle il est allégué qu'à teneur des lois bernoises l'ordonnance en question de 1797 n'est plus en vigueur et n'aurait dès-lors pas dû être appliquée, il n'y a pas lieu à entrer en matière, attendu que les Tribunaux bernois sont, sans aucun doute, seuls compétents pour statuer sur cette question.

2. En ce qui concerne l'allégué que cette ordonnance et l'application

qui en est faite constituent une violation de divers articles de la Const. F., le recours ne parait également pas suffisamment fondé :

a) à mesure que l'art. 41 chiff. 4 ne garantit expressément la liberté d'industrie et le droit d'acquérir des immeubles que conformément aux lois existantes, et qu'il exige uniquement que celles-ci traitent le Suisse établi à l'égal du citoyen du canton, ce qui est évidemment le cas de l'ordonnance dont il s'agit; qu'en outre cette ordonnance ne rend point l'établissement impossible au recourant, puisque, abstraction faite d'un autre mode de jouissance de son alpe, p. ex. par voie d'amodiation, il peut obtenir la faculté d'en jouir d'une manière illimitée, précisément au moyen de l'établissement dans le sens absolu du mot, c. à. d. en venant se fixer avec tout son avoir et son bétail dans l'Oberhasle;

b) en ce que l'art. 29 de la Const. F. ne se rapporte pas à l'établis sement ou au séjour permanent, mais qu'il a aboli aussi bien les dispositions qui interdisaient l'importation, l'exportation et le transit, que la perception de droits de péage cantonaux, et en ce que l'ordonnance de 1797 n'est point en contradiction avec cet article, puisqu'elle ne défend que de faire paître pendant l'été du bétail étranger, mais non de se procurer le fourrage nécessaire pour permettre au bétail de traverser la frontière ;

c) en ce qu'enfin l'art. 4 n'est également pas applicable ici, parce qu'il ne s'agit pas dans l'espèce d'un privilége de lieu ou de personne dans le sens de cet article, dont le but n'est certainement pas d'abolir tous les droits particuliers de certaines parties du pays, qu'au contraire tous les habitants de la contrée sont soumis à ce même réglement, auquel le recourant voudrait se soustraire.

3. enfin, quant à l'assertion que cette égalité devant la loi n'est qu'apparente, à mesure que celle-ci n'est appliquée que vis-à-vis des étrangers, d'un côté elle est contredite par les actes, et d'un autre côté elle n'est pas de nature à motiver une intervention de la Confédération parce que, même à supposer que l'inconvénient dont on se plaint existât, la raison en serait, en partie dans la rédaction défectueuse de l'ordonnance, en partie dans l'exécution vicieuse de la loi, et que dans l'une comme dans l'autre de ces alternatives, c'est aux Autorités cantonales supérieures compétentes qu'il appartiendrait d'y porter remède. F. F. 1857. I. 201.

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107. F. et D., à Lucerne, avaient acheté d'un Argovien une pièce

de terre située dans la commune de Stansstad (Nidwalden). Les Autorités de Nidwalden leur refusèrent l'expédition de l'acte de vente, parce qu'à teneur des lois de ce canton on ne peut pas y acquérir de biens-fonds sans avoir un permis d'établissement. Ils demandèrent alors un permis en produisant les pièces nécessaires, mais ils ne l'obtinrent que sous la condition qu'ils prendraient réellement leur domicile dans le canton de Nidwalden.

F. et D. recoururent alors auprès du C. F., en demandant que le Gouvernement de Nidwalden fût tenu de laisser passer acte de vente de l'immeuble sans autres conditions.

Le Gouvernement de Nidwalden répondit: Ensuite de la disposition de l'art. 41 chiff. 4 de la Const. F., on ajouta à la loi de Nidwalden, qui auparavant interdisait à tout citoyen étranger au canton d'y acquérir des immeubles, la disposition suivante: « Les citoyens suisses de confession chrétienne seront, aux termes de l'art. 48 de la Const. F., traités à l'égal des citoyens du canton, pour autant qu'ils y seront établis et domiciliés, conformément à l'art. 41 de la Const. F., et à l'ordonnance du 1 Février 1854. » En revanche, les dispositions antérieures de la législation cantonale restent en vigueur à l'égard des citoyens suisses qui ne veulent pas remplir cette dernière condition, parce que l'art. 3 de la Const. F. garantit la souveraineté des cantons en tant que celle-ci ne la limite pas elle-même. Si donc les recourants veulent acquérir des immeubles dans le canton de Nidwalden, ils doivent le faire conformément à l'art. 44; ils ne peuvent pas se borner à revendiquer les droits que leur donne cet article, ils doivent aussi en remplir les obligations et s'établir dans le canton, s'ils veulent pouvoir prétendre au droit d'y acquérir des immeubles. Le droit d'établissement et celui d'acquérir des biens-fonds sont, même envisagés au point de vue du droit fédéral, inséparables l'un de l'autre.

Le C. F. trouva le recours fondé et invita le Gouvernement de Nidwalden à autoriser la passation de l'acte de vente des immeubles acquis par les recourants. Motifs:

1. Le droit des citoyens suisses d'acquérir des immeubles dans d'autres cantons que le leur, sans être tenus d'y avoir domicile, découle du principe du libre échange, qui ne peut être limité par des dispositions de police des cantons qu'à la condition que les propres ressortissants soient traités sur le même pied que les citoyens suisses. (Art. 29 litt. d de la Const. F.)

2. Cette assimilation des citoyens suisses quant à la liberté de commerce découle aussi de l'art. 48 de la Const. F*.

3. En conséquence, si l'art. 41 de la Const. F. met la faculté d'acheter des immeubles au nombre des droits que confère l'établissement, on ne peut pas en conclure que l'établissement doive être considéré comme une obligation et une condition que les citoyens suisses étrangers au canton doivent remplir, pour pouvoir y acquérir des immeubles.

F. F. 1861. I. 329. v. aussi C. F. 10 Mai 1860. No 2118.

d) Autres droits des Suisses établis.

108. Des Suisses établis dans les Grisons réclamaient contre la loi sur la chasse en vigueur dans ce canton, loi qui autorisait les ressortissants du canton à chasser librement partout, tandis que les Suisses établis devaient se procurer et payer une patente qui excluait complètement en outre la chasse au gros gibier. De son côté, le Gouvernement des Grisons représentait le droit de chasse comme une propriété privée des communes. Le recours fut trouvé bien fondé par les motifs suivants :

Le droit de chasse peut être envisagé de trois manières différentes : a) Ou bien c'est, sous le nom de régale, un droit réservé à l'Etat. On est d'accord que ce n'est pas le cas ici;

b) Ou bien le droit de chasser dans un certain territoire repose sur un titre de propriété privée, qu'il soit un droit attaché à un certain domaine, ou qu'il ait été acquis personnellement par achat ou d'une autre manière. Mais il n'y a rien de pareil dans l'espèce; au contraire ce qui prouve que le droit de chasse ne peut pas être un droit privé des communes, c'est la circonstance que ce ne sont pas elles qui délivrent des patentes ou afferment la chasse, mais que c'est le Gouvernement qui accorde des patentes aux étrangers, et plus particulièrement encore qu'un citoyen grison peut, sans payer patente, chasser non-seulement dans sa commune, mais encore dans tout le canton;

c) Le droit de chasse est régi, quant aux différents modes de l'acquérir, par les principes généraux du droit civil, d'après lesquels les choses sans maître sont la propriété du premier occupant, pour autant que ce

* D'après une donnée de M. Trachsler, ce considérant est ainsi conçu dans le protocole du C. F.: « La défense aux personnes qui n'habitent pas le canton d'y acquérir des immeubles ne peut pas être envisagée comme une disposition de police dans le sens de l'art. 29 de la Const. F. »

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