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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

Lettre de Barras et Fréron, représentants du peuple, près l'armée sous Toulon

A leurs collegues composant le comité de salut public.

Marseille, 11 frimaire, l'an II de la république française, une et indivisible. (1793.)

CITOYENS nos collègues, dans ce moment, nous renonçons à tout autre objet, pour vous entretenir exclusivement de notre position dans les départements du Var et des Bouches-du-Rhône; vous qui êtes au timon de la république, vous avez reconnu que l'arme la plus meurtrière des despotes coalisés contre notre liberté, c'est l'espoir de nous affamer. Malheureusement nos greniers, dans l'intérieur, ne nous laissent pas sans inquiétudes; nos efforts, depuis long-temps, se sont réunis ainsi que ceux de tous les députés dans les départements, au zèle des bons citoyens, pour trouver des mesures qui nous procurassent du blé. Depuis l'entrée des troupes de la république dans le pays rebelle, nous vivons au jour le jour, et c'est avec une peine excessive que nous faisons vivre et notre Mémoires.-Tome 1.

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armée en Italie, et celle sous Toulon. Ces deux départements étaient déja affamés par la longue présence des escadres combinées, avant même que la ville sacrilège tombât en leur pouvoir; nous nous flattions de parvenir à tirer considérablement des grains de l'Italie et du Levant; il faut y renoncer depuis que Naples et la Toscane sont entrés dans la ligue. Tunis, selon toutes les apparences, vient d'être gagnée par les forces et l'or des Anglais; tout annonce que le Dey devient notre ennemi; le convoi immense qui s'y trouvait est perdu pour la république, trois frégates seulement ont échappé et ont pu se refugier en Corse; mais y seront-elles long-temps en sûreté, et de quels secours pour nous?

D'un autre côté, les esclaves s'accumulent à Toulon; d'après le rapport de tous nos espions, il y sont en force de trente-cinq mille hommes, et en attendent encore trente mille; les Portugais y paraissent fournir. Il est certain que s'ils se déployaient, ils forceraient nos lignes; mais ils craignent l'armée de Nice, qui pourrait les mettre entre deux feux, et il y a un plan de la couper. La valeur de nos troupes et la surveillance de nos généraux déjoueront sans doute ces combinaisons; mais nos défenseurs courent risque d'être affamés. Le mauvais temps dégrade les chemins, les greniers y sont vides, tout y est transporté à dos de mulet; avec les pluies, ces braves gens sont exposés. Robespierre jeune est ici, et nous confirme ces tristes détails. Quinze jours de pluies pourraient nous jeter dans le plus grand malheur. Dès le second, la rivière

de la Durance déborde et nous tue; elle nous retient des bestiaux depuis long-temps.

Il faut observer en outre que le vent d'Est, qui nous prive de tout secours par mer, soit d'Arles, soit de Cette, est presque continuel, et ce même vent mène tout à nos ennemis. Enfin, ne recevraient-ils pas d'autres forces, avec la position de Toulon, ils sont plus que suffisants pour ne pas craindre nos attaques. Il faudrait mieux de la moitié de monde que nous sommes; faire des tentatives avec ce nombre, c'est sacrifier inutilement nos frères; attendre d'être renforcés, nos ennemis peuvent l'être proportionnellement, et la famine est certaine.

Qu'est-ce qui fait la force de la ci-devant Provence? c'est exclusivement Toulon. Pourquoi ne leur abandonnerions-nous pas tout le terrain stérile jusqu'à la Durance, après avoir enlevé les provisions en tout genre? Les égoïstes de Marseille ont déja payé de leur bourse; alors il se forme un boulevard immense sur les bords de cette rivière; vous y accumulez deux cent mille hommes, et les y nourrissez avec aisance; vous laissez aux infâmes Anglais le soin de nourrir toute la Provence. La belle saison revient, le temps des moissons approche, les végétaux rendent déja; comme torrent les républicains repoussent la horde esclave, et les rendent à la mer qui les vomit. Ce serait la façon de penser des généraux; la crainte de manquer de vivres enlève le courage aux soldats. Pesez ces réflexions en comité, et délibérez, Nous ferons exécuter les ordres

un

qui nous seront donnés; mais il n'y a pas un instant

à perdre. Salut et fraternité.

Vos coopérateurs, BARRAS, FRÉRON.

Séance du 7 nivose.

Carnot, au nom du comité de salut public, donne lecture des lettres suivantes :

Fréron et Paul Barras, représentants du peuple près l'armée sous Toulon,

A leurs collègues composant le comité de salut public..

Au quartier-général de Toulon, ce 30 frimaire, l'an II de la république, une et indivisible.

Nous avons lu avec indignation, citoyens collègues, la lettre fausse qui nous était attribuée, et dont le comité n'a pas été la dupe. Ce trait est parti de Marseille, dans le même temps que cette ville a tenté de produire un mouvement contre-révolutionnaire que nous avons étouffé.

Remarquez que c'est au moment que nous allions nous réunir à Ollioule, avec nos collègues, pour frapper le grand coup, que l'on a voulu nous perdre ; que nos calomniateurs, que nos dénonciateurs continuaient à nous noircir, à nous prêter des crimes.

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