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Soulève les voiles du monde,

Et montre-toi, Dieu juste et bon!

Tu n'apercevras sur la terre
Qu'un ardent amour de la foi,
Et l'humanité tout entière
Se prosternera devant toi.

Les larmes qui l'ont épuisée
Et qui ruisselaient de ses yeux,
Comme une légère rosée
S'évanouiront dans les cieux.

Tu n'entendras que tes louanges,
Qu'un concert de joie et d'amour,
Pareil à celui dont tes anges
Remplissent l'éternel séjour ;

Et dans cet hosanna suprême,
Tu verras, au bruit de nos chants,
S'enfuir le doute et le blasphème,
Tandis que la Mort elle-même
Y joindra ses derniers accents.

Février 1838.

A LA MI-CARÊME

I

Le carnaval s'en va, les roses vont éclore;
Sur les flancs des coteaux déjà court le gazon.
Cependant du plaisir la frileuse saison

Sous ses grelots légers rit et voltige encore,
Tandis que, soulevant les voiles de l'aurore,
Le Printemps inquiet paraît à l'horizon.

II

Du pauvre mois de mars il ne faut pas médire,
Bien que le laboureur le craigne justement :
L'univers y renaît; il est vrai que le vent,

La pluie et le soleil s'y disputent l'empire.

Qu'y faire? Au temps des fleurs, le monde est un enfant; C'est sa première larme et son premier sourire.

III

C'est dans le mois de mars que tente de s'ouvrir
L'anémone sauvage aux corolles tremblantes.

Les femmes et les fleurs appellent le zéphir;
Et du fond des boudoirs les belles indolentes,
Balançant mollement leurs tailles nonchalantes,
Sous les vieux marronniers commencent à venir.

IV

C'est alors que les bals, plus joyeux et plus rares,
Prolongent plus longtemps leurs dernières fanfares;
A ce bruit qui nous quitte, on court avec ardeur;
La valseuse se livre avec plus de langueur :
Les yeux sont plus hardis, les lèvres moins avares;
La lassitude enivre, et l'amour vient au cœur.

V

S'il est vrai qu'ici-bas l'adieu de ce qu'on aime
Soit un si doux chagrin qu'on en voudrait mourir,
C'est dans le mois de mars, c'est à la mi-carême
Qu'au sortir d'un souper, un enfant du plaisir
Sur la valse et l'amour devrait faire un poëme,
Et saluer gaîment ses dieux prèis à partir.

VI

Mais qui saura chanter tes pas pleins d'harmonie,
Et tes secrets divins, du vulgaire ignorés,

Belle Nymphe allemande aux brodequins dorés?
O Muse de la valse! ô fleur de poésie!

Où sont, de notre temps, les buveurs d'ambroisic
Dignes de s'étourdir dans tes bras adorés?

VII

Quand, sur le Cithéron, la Bacchanale antique
Des filles de Cadmus dénouait les cheveux,
On laissait la beauté danser devant les dieux;
Et si quelque profane, au son de la musique,
S'élançait dans les chœurs, la prêtresse impudique
De son thyrse de fer frappait l'audacieux.

VIII

Il n'en est pas ainsi dans nos fêtes grossières;
Les vierges aujourd'hui se montrent moins sévères,
Et se laissent toucher sans grâce et sans fierté.
Nous ouvrons à qui veut nos quadrilles vulgaires;
Nous perdons le respect qu'on doit à la beauté,
Et nos plaisirs bruyants font fuir la volupté.

IX

Tant que régna chez nous le menuet gothique,
D'observer la mesure on se souvint encor.

Nos pères la gardaient aux jours de thermidor,
Lorsqu'au bruit des canons dansait la République,
Lorsque la Tallien, soulevant sa tunique,

Faisait de ses pieds nus craquer ses anneaux d'or.

X

Autres temps, autres mœurs; le rhythme et la cadence
Ont suivi les hasards et la commune loi.

Pendant que l'univers ligué contre la France
S'épuisait de fatigue à lui donner un roi,

La valse d'un coup d'aile a détrôné la danse.

Si quelqu'un s'en est plaint, certes ce n'est pas moi.

ΧΙ

Je voudrais seulement, puisqu'elle est notre hôtesse,
Qu'on sût mieux honorer cette jeune déesse.

Je voudrais qu'à sa voix on pût régler nos pas,
Ne pas voir profaner une si douce ivresse,
.Froisser d'un si beau sein les contours délicats,
Et le premier venu l'emporter dans ses bras.

XII

C'est notre barbarie et notre indifférence

Qu'il nous faut accuser: notre esprit inconstant

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