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AU ROI

APRÈS L'ATTENTAT DE MEUNIER

Prince, les assassins consacrent ta puissance;
Ils forcent Dieu lui-même à nous montrer sa main.
Par droit d'élection tu régnais sur la France;
La balle et le poignard te font un droit divin.

De ceux dont le hasard couronna la naissance,
Nous en savons plusieurs qui sont sacrés en vain ;
Toi, tu l'es par le peuple et par la Providence;
Souris au parricide et poursuis ton chemin.

Mais sois prudent, Philippe, et songe à la patrie.
Ta pensée est son bien, ton corps son bouclier;
Sur toi, comme sur elle, il est temps de veiller.

Ferme un immense abîme et conserve ta vie.
Défendons-nous ensemble, et laissons-nous le temps
De vieillir, toi pour nous, et nous pour tes enfants.

Décembre 1836.

SUR UN

A SAINTE-BEUVE

PASSAGE D'UN ARTICLE INSÉRÉ
LA REVUE DES DEUX MONDES

DANS

Ami, tu l'as bien dif: en nous tant que nous sommes Il existe souvent une certaine fleur,

Qui s'en va dans la vie et s'effeuille du cœur.

<«< Il existe, en un mot, chez les trois quarts des hommes, Un poëte mort jeune à qui l'homme survit. »

Tu l'as bien dit, ami, mais tu l'as trop bien dit.

Tu ne prenais pas garde, en traçant ta pensée,
Que ta plume en faisait un vers harmonieux,
Et que tu blasphémais dans la langue des dieux.
Relis-toi, je te rends à ta Muse offensée;
Et souviens-toi qu'en nous il existe souvent
Un poëte endormi toujours jeune et vivant.

Juin 1837.

A LYDIE

TRADUIT D'HORACE (ODE IX, LIVRE III)

HORACE.

Lorsque je t'avais pour amie,
Quand nul jeune garçon, plus robuste que moi
N'entourait de ses bras ton épaule arrondie,
Auprès de toi, blanche Lydie,

J'ai vécu plus joyeux et plus heureux qu'un roi.

LYDIE.

Quand pour toi j'étais la plus chère,

Quand Chloé pâlissait auprès de Lydia,
Lydia, qu'on vantait dans l'Italie entière,
Vécut plus heureuse et plus fière

Que dans les bras d'un dieu la Romaine Ilia.

HORACE.

Chloé me gouverne à présent,

Chloé, savante au luth, habile en l'art du chant; Le doux son de sa voix de volupté m'enivre.

Je suis prêt à cesser de vivre,

Si, pour la préserver, les dieux voulaient mon sang.

LYDIE.

Je me consume maintenant

D'une amoureuse ardeur que rien ne peut éteindre,

Pour le fils d'Ornithus, ce bel adolescent.

Je mourrais deux fois sans me plaindre,

Si, pour le préserver, les dieux voulaient mon sang.

HORACE.

Eh quoi! si dans notre pensée
L'ancien amour se rallumait ?

Si, la blonde Chloé de ma maison chassée,
Ma porte se rouvrait? si Vénus offensée
Au joug d'airain nous ramenait ?

LYDIE.

Calaïs, ma richesse unique,

Est plus beau qu'un soleil levant,
Et toi plus léger que le vent,

Plus prompt à t'irriter que l'âpre Adriatique;
Cependant près de toi, si c'était ton plaisir,
Volontiers j'irais vivre, et volontiers mourir.

1S37.

A LYDIE

IMITATION

HORACE.

Du temps où tu m'aimais, Lydie,
De ses bras nul autre que moi
N'entourait la gorge arrondie;
J'ai vécu plus heureux qu'un roi.

LYDIE.

Du temps où j'étais ta maîtresse,
Tu me préférais à Chloé;
Je m'endormais à ton côté,

Plus heureuse qu'une déesse.

HORACE.

Chloé me gouverne à présent
Savante au luth, habile au chant;
La douceur de sa voix m'enivre
Je suis prêt à cesser de vivre,
S'il fallait lui donner mon sang

LYDIE.

Je me consume maintenant

Pour Calaïs, mon jeune amant,
Qui dans mon cœur a pris ta place.
Je mourrais deux fois, cher Horace,
S'il fallait lui donner mon sang.

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