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bas et humides, peu exposés au soleil, parce que son bois est plus compacte, son écorce couverte de mousse; le charbon qu'on en retire impressionne désagréablement la bouche et irrite l'estomac. Le moment le plus favorable pour la récolte est celui où la séve monte. Les branches de peuplier coupées, et dépouillées de leur écorce, sont mises dans des vases en fonte, bien clos, que l'on fait chauffer jusqu'au rouge blanc. On en retire un charbon léger et brillant, sans formation de cendres. Ce charbon est maintenu, pendant trois ou quatre jours, dans des vases remplis d'une eau que l'on renouvelle fréquemment. On le fait ensuite sécher et on le réduit en poudre, sans attendre, toutefois, qu'il soit réduit à un état de sécheresse extrême. M. Belloc engage les pharmaciens à ne négliger aucune de ces précautions, tant dans le choix du bois que dans le mode de préparation. Ce n'est que par leur réunion que l'auteur est parvenu à se procurer un produit toujours identique, d'une efficacité ou, tout au moins, d'une innocuité constante. Pour faire ressortir toute l'importance de ces précautions, en apparence si minutieuses, signalons les mauvais résultats obtenus de charbons préparés dans des conditions tout opposées.

M. Belloc s'est servi du charbon de bois ordinaire, préparé en vases clos et réduit en poudre humide, comme le précédent. Il en a pris et en a également fait prendre à quelques personnes. Tous ont éprouvé un goût tantôt sulfureux, tantôt ammoniacal extrêmement désagréable, une vive chaleur à la bouche avec altération, quelquefois un pincement à la région épigastrique, et la digestion s'est accomplie plus lentement qu'à l'ordinaire. Ils ont eu, enfin, des excoriations très-douloureuses de la membrane buccale, qui n'ont cédé qu'à l'emploi des gargarismes adoucissants.

(Ibid.)

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autres cités, et l'agriculture qui pourvoit aux besoins de tous.

Le pain, comme on l'a dit, est l'aliment principal et presque unique du soldat, c'est le symbole trop réel de la vie du pauvre; tout ce qui se rapporte à la manutention et à la distribution de cet aliment type a donc une importance considérable.

M. Millon que, depuis plusieurs années, l'administration de la guerre a fait participer aux travaux des commissions auxquelles étaient soumises les questions les plus importantes du régime manutentionnaire de l'armée, a publié, dans le numéro de mai 1849 des Annales de chimie et de physique, un mémoire qui renferme de nombreux et précieux documents sur la question que nous allons traiter (1).

Après avoir établi, par des analyses irréprochables, que le son était une matière essentiellement alimentaire, il ajoute : « Si l'on annonçait tout à coup qu'on est parvenu à enrichir la France de plusieurs millions d'hectolitres d'une substance trèsalimentaire, sans aucun frais de culture et sans ôter à d'autres productions un seul pouce du sol; si l'on déclarait que cette substance contient plus de gluten que le blé, qu'elle est deux fois plus abondante que lui en matière grasse, et qu'à part 10 pour 100 de ligneux, le reste de ses principes est très-assimilable, on croirait assister à quelque rêverie. Cette substance existe cependant; elle réside dans le ble; d'où on l'expulse à grands frais. On appauvrit le blé dans son azote, dans sa fécule, dans ses sels, dans ses principes aromatiques et sapides, pour se débarrasser de quelques millièmes de ligneux.

D'ailleurs, est-il conforme aux principes de l'hygiène et de la physiologie d'éloigner de l'estomac de l'homme tout ce qui peut y laisser un résidu? Le bol alimentaire ne doit-il pas cheminer dans toute la longueur du tube instestinal, et porter jusqu'à son extrémité une partie réfractaire? Si notre régime s'améliore indéfiniment à mesure que nous absorbons d'une manière plus complète les matières ingérées, supprimons le règne végétal, ou bien mettonsnous à vivre de l'extrait des plantes. Il n'y a probablement pas de légume qui contienne aussi peu de ligneux que le blé.

Quant à la blancheur que l'on communique au pain en éloignant le son, c'est une qualité purement idéale, dans laquelle on poursuit, par préjugé, l'essence alimentaire du blé. C'est, dans le fait, une élimination très-avancée de son condiment naturel.

Si l'on trouve ces conclusions bien arrê

(1) Voir le travail de M. Millon dans notre tome X, page 270.

tées, si l'on en appelle à la physiologie, je dirai que celle-ci a déjà fait connaître ses résultats « Un chien mangeant à discrétion du pain blanc de froment pur, et > buvant à volonté de l'eau commune, ne vit pas au delà de cinquante jours. Un chien mangeant exclusivement du pain bis militaire ou de munition vit très-bien, » et sa santé ne s'altère en aucune façon. (Précis élémentaire de physiologie, par Magendie, t. II, page 504, 4° édit., 1856.)

En résumé, remoudre finement le son et les gruaux, et les mélanger à la fleur, ou bien perfectionner nos moyens de mouture dans une direction précisément opposée à celle qu'on a suivie jusqu'ici, de façon qu'ils donnent du premier coup une farine fine et homogène, tel est le progrès désormais facile à réaliser. On y trouvera immédiatement une conciliation bien précieuse, celle de l'hygiène et de l'économie. »

Les expériences de M. Millon sembleraient conduire à une solution évidente et rationnelle; mais une question aussi grave doit être envisagée sous toutes ses faces. Nous allons voir qu'on peut opposer de très-sérieuses objections à la distribution du pain bis : les principales se rapportent à la digestion du son, aux habitudes de la population et aux difficultés que présente la vérification rigoureuse de la qualité du pain bis; nous allons successivement les passer en revue.

1° Sans aucun doute, comme le démontre M. Millon, le son est une matière essentiellement alimentaire, mais à une condition, c'est qu'il soit digéré. Lorsqu'on le donne au bœuf, à la vache, il est, pour ainsi dire, complétement utilisé; mais lorsque le son est introduit dans l'alimentation de l'homme sous forme de pain, il s'en faut qu'il soit suffisamment désagrégé pour que les matières nutritives qui le composent soient dissoutes et absorbées en totalité. Dans la suite des recherches sur la digestion que nous poursuivons depuis plusieurs années avec M. Sandras, ce problème a dû nous préoccuper. Nous avons vu que, pour l'homme de la campagne, travaillant au grand air, au soleil, endurant des fatigues continuelles, la digestion des aliments, résistant à la dissolution, est beaucoup plus complète que pour le vieillard des hospices ou des grandes villes que le défaut de forces condamne à l'oisiveté. Le labourear,

le vigneron, continuellement exercés par de rudes travaux, digèrent complétement leur pain bis: le son qu'il renferme est utilisé; mais si vous donnez ce même pain bis au vieillard indigent, le son tra

versera l'appareil digestif sans être attaqué, les matières alibiles qu'il renferme seront défendues de la dissolution par leur grande cohérence et par la couche de ligneux qui les revêt.

N'est-il pas alors de bonne économie de donner le pain blanc aux vieillards et de faire utiliser complétement le son et les recoupes aux ruminants, qui nous le rendent sous forme de lait et de viande, aliments qui conviennent si bien aux personnes dont la digestion n'est pas active?

2o La population de Paris est habituée à consommer du pain blanc; le plus grand nombre de cartes de pain bis qui étaient distribuées aux indigents étaient transformées par eux en pain blanc; moyennant une rétribution souvent arbitrairement fixée qu'ils payaient aux boulangers : on peut être sûr que la nouvelle distribution sera accueillie avec reconnaissance par les indigents et les nécessiteux.

3. L'argument le plus fort qu'on puisse faire valoir contre la distribution du pain bis, c'est l'extrême difficulté que présente la vérification de sa qualité. Ce sont des nuances que des hommes exercés traduisent avec difficulté en faits précis; comment veut-on alors que le militaire, l'indigent, qui manquent de connaissances spéciales, évitent la fraude? Avec le pain blanc, la vérification sommaire au moins est très-facile.

Des farines de blés avariés peuvent être introduites dans le pain bis; mais voici la fraude la plus commune au lieu de confectionner du pain avec des farines blutées à 8 ou 10 pour 100, qui donnent encore, quand le froment est bon, du pain d'un goût agréable, on emploie des farines composées de farines blutées à 15 ou 20 pour 100, et des recoupes, remoulages ou petites farines en quantité suffisante pour atteindre la nuance du pain bis, c'est-à-dire souvent 30 à 50 pour 100. Le pain obtenu avec cette farine mélangée est loin d'être aussi agréable à manger que celui que donne la farine blutée directement à 10 pour 100.

Ainsi, prenant en considération les habitudes de la population indigente de Paris, les difficultés que présente la vérification rigoureuse de la qualité de pain bis, l'incomplète digestion du son par les vieillards des grandes villes, nous concluons: La substitution du pain blanc au pain bis pour les indigents est une opération utile et rationnelle, en tant que la confection du pain est confiée aux boulangers de la ville.

(Ibid.)

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III. BIBLIOGRAPHIE.

DICTIONNAIRE DES ALTÉRATIONS ET FALSIFICATIONS DES SUBSTANCES ALIMENTAIRES MÉDICAMENTEUSES ET COMMERCIALES AVEC L'IN

DICATION DES MOYENS DE LES RECONNAÎTRE; par M. A. CHEVALLIER, professeur-adjoint à l'École de pharmacie, membre de l'Académie de médecine, du Conseil de salubrité, etc., etc. (1) - Peu d'ouvrages nous paraissent offrir autant d'éléments de succès que celui dont nous annonçons le premier volume. La falsification des substances livrées à la pharmacie et au commerce a été pratiquée de tout temps et dans toutes les contrées, mais depuis quelques années, elle a été portée à un tel point qu'il est devenu absolument indispensable de mettre un frein aux manœuvres frauduleuses des falsificateurs. Quelques personnes paraissent craindre qu'en dévoilant les fraudes dont les substances médicamenteuses, commerciales et alimentaires sont l'objet, on n'offre un nouvel appât à la cupidité, et que des hommes qui exerceraient peut-être loyalement leur profession, ne dévient de la bonne route par la facilité qu'on leur offre de s'en écarter. Nous ne pouvons partager cette opinion. Placer auprès de l'exposé des moyens employés pour adultérer les substances, les procédés qui permettent d'en établir la pureté, c'est donner au commerce à la fois un enseignement utile et d'impor tantes garanties, c'est frapper la fraude en donnant à ceux qui en deviendraient les victimes, des moyens certains de s'en garantir. De pareilles recherches doivent être accueillies avec faveur et reconnaissance.

Déjà plusieurs ouvrages importants ont été publiés sur les falsifications. Nous devons citer surtout ceux de Richter, de Vandersande, de Bouillon Lagrange, de Christison et ceux plus récents de Desmarest, d'Ebermayer, traduit par MM. Kapeler et Caventou, de MM. Bussy et Boutron-Chalard, etc., etc. Ces derniers, très-remar quables et très-complets à l'époque où ils ont été publiés, sont devenus insuffisants aujourd'hui par suite de l'extension de la fraude et des procédés nouveaux inventés pour la reconnaître. L'ouvrage de M. Chevallier vient combler cette lacune. En publiant son Dictionnaire des falsifications, il s'est proposé pour but et je me sers ici de ses propres expressions : 1° « de mettre

(1) Premier vol., Paris, chez Bechet; Bruxelles, chez J.-B. Tircher. 8 fr.

» les pharmaciens à même de repousser de leurs officines les substances altérées ou » les médicaments qui auraient été sophis» tiqués, et de donner leur avis, lorsqu'ils » sont consultés par l'administration, sur la valeur soit des substances alimentai»res, soit des substances commerciales; » 2o de faire connaître aux négociants et à » tous ceux qui achètent des substances ali» mentaires et commerciales, les moyens » de reconnaître celles qui sont sophisti» quées et de se soustraire à ces fraudes. »

Une lecture attentive de ce premier volume nous a prouvé que l'exécution, dans son ensemble, répondait pleinement au programme. Profitant avec habileté de toutes les recherches anciennes, discutant avec sagacité les opinions émises par ses prédécesseurs, ajoutant à toutes ces indications le résultat de ses propres travaux, M. Chevallier établit dans ce livre, de la manière la plus complète, l'état de la science à notre époque.

Deux plans se présentaient à l'esprit dans un travail de ce genre. Classer les substances d'après un ordre scientifique ou se contenter de les placer par ordre alphabétique. M. Chevallier a suivi cette dernière forme plus simple et selon nous plus utile. Il en résulte cet avantage inappréciable que sans recherches pénibles, on arrive de suite à l'examen de la substance dont on veut connaître l'histoire. Les descriptions de M. Chevallier sont de véritables monographies. Le nom vulgaire, chimique, commercial de chaque substance, sa synonymie, sa provenance, sa composition, ses usages, ses caractères physiques et chimiques, sa description à l'état de pureté, ses altérations spontanées servent de base à son étude; puis viennent les sophistications variées qu'elle subit, les inconvénients plus ou moins grands qui en peuvent résulter, les caractères de ces fraudes et les procédés au moyen desquels on peut en reconnaître l'existence.

On lira avec intérêt les articles aloès, beurre de cacao, cachou, castoréum, chloroforme, eau de fleurs d'oranger, ether, estagnons, fer, iode, iodure de potassium, kermès minéral, etc., etc.

Citer les titres alcool, beurre, bière, cidre, cire, café, charbon, chocolat, cochenille, eaux minérales, eau de Seltz, indigo, garance, huiles fixes, huiles volatiles, etc.,

c'est montrer assez combien d'importantes questions se sont offertes à M. Chevallier. Il les a traitées avec un soin, un talent qui ne laissent rien à désirer.

Les experts appelés devant la justice trouveront dans les articles bonbons coloriés, étoffes, farines, faux en écriture publique et privée toutes les lumières qui peuvent les diriger dans leurs laborieuses investigations.

Il est facile de voir que l'auteur n'a reculé devant aucune recherche, devant aucune expérience qui pût éclairer son jugement sur les questions encore douteuses ou nouvelles. En résumé, toutes les parties de ce premier volume nous ont paru traitées avec une clarté et une précision qui laissent bien peu de prise à la critique.

Nous regrettons que la nature de ce recueil ne nous ait pas permis d'entrer dans plus de détails. L'analyse succincte que

nous venons de présenter, tout incomplète qu'elle est, suffira pour donner une idée de l'importance et de l'intérêt de l'ouvrage que nous annonçons. C'est à la fois un livre d'étude et un guide pratique indispensable aux pharmaciens, et qui sera toujours consulté avec fruit par les magistrats, les médecins, les vétérinaires, les négociants et les manufacturiers.

Nous ne terminerons pas sans nous associer à un vœu exprimé depuis longtemps par l'auteur sur l'insuffisance de la loi contre les falsificateurs. Nous ne doutons nullement que l'autorité, comprenant enfin combien il est urgent de mettre un terme à des fraudes si nuisibles à la santé publique et au commerce, ne prenne des mesures sévères contre ceux qui mettent les fraudes en pratique et contre ceux qui vendent les produits fraudés. T. G.

IV. VARIÉTÉS.

Société des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles.

Bulletin de la séance du 3 juin 1850.

La séance est ouverte à 6 heures et demie.

Président : M. NOLLET.
Secrétaire: M. HENRIETTE.

Sont présents: MM. Mouremans, Marlin, Dieudonné, Puttaert, Gripekoven, Van den Corput, Pigeolet, Joly et Delstanche.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

Ouvrages présentés :

1. Du croup, par le docteur Helin dit Colson. Br. in-8°.

2. Beobachtungen über das quantitative Verhältniss der Nagel- und Haarbildung beim Menschen; von Arnold Berthold. Göttingen, 1850, in-4°.

3. Über den Aufenthalt lebender Amphibien im Menschen; von Arnold Berthold. Göttingen, 1850, in-4o.

4 à 29. Divers journaux de médecine et recueils scientifiques périodiques.

Les ouvrages du docteur Berthold sont renvoyés à l'examen de M. Rieken, et celui de M. Helin dit Colson, à l'examen d'une

commission composée de MM. Mouremans, rapporteur, Martin et Dieudonné, commissaires.

L'ordre du jour appelle la lecture d'un rapport de M. Martin, sur un travail de M. Puttaert, intitulé: Observations de médecine pratique. Les conclusions, tendant à voter des remercîments à l'auteur et à insérer son travail dans le Journal de la Société, sont adoptées.

Le second objet à l'ordre du jour est la discussion du rapport de M. Puttaert sur un travail de M. Van Hoeter, portant pour titre: Observation de stomatite gangréneuse. La santé de cet honorable membre ne lui permettant point de prendre part à la discussion que son travail paraît devoir soulever, et n'ayant du reste aucune réclamation à faire, ainsi qu'il l'a déclaré au Secrétaire, la discussion s'engage en son absence. Après quelques explications échangées entre M. Delstanche, qui demande de légers changements à la rédaction du rapport, et M. le rapporteur qui donne son consentement à la modification demandée par M. Delstanche, les conclusions tendant à voter des remerciments à M. Van Hoeter, et à déposer son mémoire dans les archives, sont adoptées.

La séance est levée.

Académie de médecine de Paris.

Séance du 22 janvier 1850.

ENGORGEMENTS ET DÉVIATIONS DE L'UTE

RUS.

M. DUBOIS continue: L'utérus est fixé aux parois du bassin par des liens qui lui laissent encore une assez grande mobilité; d'autre part il est placé au-dessous d'organes nombreux et mobiles eux-mêmes; enfin il est rapproché des parois solides et résistantes de la cavité qui le renferme. Mobile, il se déplace dans tous les mouvements du corps et dans ceux des organes qui le surmontent ou qui l'avoisinent; dominé ou environné par des organes nombreux, pesants et expansibles, il en supporte nécessairement dans certaines attitudes le poids ou la compression. Rapproché des parois osseuses, il peut, grâce à la laxité de ses liens contentifs, s'en rapprocher plus encore ou s'y appliquer même. Or, ces effets naturels de la mobilité, de la situation et des rapports de l'utérus sont inaperçus dans l'état normal. Les pressions qu'il subit, les frottements qui se produisent contre les parois pelviennes ou les organes voisins, les tiraillements auxquels ses liens contentifs sont exposés, tous ces phénomènes sont inoffensifs, parce que l'organisme ainsi agité ou comprimé est indolore; mais ils cessent de l'être dès que la sensibilité de l'utérus et de ses annexes est pathologiquement accrue, et de là naissent des sensations douloureuses dont la cause réelle est trop souvent méconnue, et presque toujours attribuée à des déviations qui n'existent pas ou qui leur sont tout à fait étrangères.

Après avoir ainsi exposé ma pensée relativement aux inflexions et aux déviations utérines non exagérées, j'ai à peine besoin de dire que les moyens contentifs artificiels, pessaires ou autres, qui leur sont si banalement appliqués, me paraissent presque toujours inutiles et trop souvent nuisibles. Je ne prétends pas, cependant, que tous les déplacements de l'utérus soient exempts de souffrances, et doivent être abandonnés à eux-mêmes, bien qu'ils ne soient pas trèsprononcés.

Trois espèces de déplacements peuvent requérir les secours de l'art : l'antéversion, la rétroversion, et surtout le prolapsus ou la chute de l'utérus. A ce dernier, presque seul, me semble réellement applicable la pénible mission d'un moyen contentif efficace, et ce moyen, c'est l'emploi d'un pessaire. Le pessaire en bilboquet, et fabriqué en ivoire, m'a toujours paru préférable à

tous les autres; mais je ne veux pas qu'ît substitue une infirmité à une autre, qu'il soit une cause de gêne et de dégoût, qu'il rompe les habitudes ni qu'il relâche les liens du mariage. Or, pour qu'il en soit ainsi, il faut que le pessaire soit d'un volume tel qu'il puisse être retiré chaque soir et replacé chaque matin par la malade ellemême; et comme les dimensions nécessaires alors sont moindres que celles qui en assureraient le maintien dans les voies génitales, il faut que la tige en soit adaptée à un support artificiel. J'ai, par expérience, la certitude que ces avantages peuvent être ob

tenus.

Ce procédé conviendrait-il de même au traitement de l'antéversion et de la rétroversion, lorsque ces déplacements paraissent donner lieu à des souffrances réelles, et pourrait-on en espérer les mêmes avantages? Un examen comparatif de ces états anormaux, considérés au point de vue anatomique, éclairera probablement cette ques

tion.

Dans les cas de prolapsus utérin, dont je viens de m'occuper, les conditions les plus favorables à la réduction et au maintien de l'organe sont heureusement réunies. L'utérus, conservant sa forme et sa direction, s'est déplacé de haut en bas par un mouvement de totalité; il peut être réintégré dans sa situation normale par la propulsion la plus simple de bas en haut; ajoutez que cette action s'exerce sans intermédiaire sur l'organe abaissé, et que le mouvement ascensionnel qui lui est imprimé n'a de limite que celle qui résulte de la longueur du vagin. Il s'en faut de beaucoup que les mêmes facilités se rencontrent dans l'antéversion et la rétroversion, lorsqu'accidentellement elles réclament des secours de cette nature; dans ces cas, en effet, c'est essentiellement la région supérieure de l'utérus qui s'est déviée; c'est donc sur cette partie qu'il faut agir pour la remettre dans la situation naturelle. Je vais démontrer que cette action est rendue nécessairement insuffisante par la nature de la déviation et les rapports anatomiques de la partie déplacée. Ce que je vais dire s'applique d'abord à la rétroversion.

Lorsque le corps de l'utérus s'incline en arrière, le premier effet de cette déviation, c'est qu'il se rapproche de la face antérieure. du rectum et qu'il s'y appuie. Si l'inclinaison s'accroît, la partie déviée descend par degrés vers le cul-de-sac péritonéal postérieur, et finit par l'atteindre et s'y appli

quer; alors le fond de l'utérus est déjà placé sur un plan plus déclive que l'insertion du vagin à cet organe, et cette déclivité peut s'accroitre encore si l'utérus, pressé par les viscères qui le dominent, déprime à soa

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