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était grave déjà sera menaçante pour la vie. Lui faudra-t-il assister désarmée aux progrès incessants du mal? Sera-t-elle condamnée à voir laisser entre ses mains, graduellement et à chaque minute perdue, la puissante vertu de l'ergot? Le remède, en effet, agit d'autant mieux qu'il est employé plus tôt. Est-il donné de bonne heure, son action est prompte et sûre; plus tard, elle devient incertaine et lente; trop tard, nulle ou presque nulle. Nous ajouterons qu'au dire de quelques praticiens, elle pouvait même cesser d'être bienfaisante. S'il devait, en effet, produire un ralentissement très-prononcé du pouls, il aggraverait, loin de l'amender, l'état d'une femme qu'une hémorrhagie abondante aurait plongée dans un grand état de faiblesse.

Les considérations qui précèdent démontrent la nécessité de laisser aux sages-femmes une grande liberté d'action dans les cas d'hémorrhagie, que ces hémorrhagies d'ailleurs succèdent à l'accouchement ou compliquent une fausse couche. Restreindre en pareil cas le droit de prescription et d'administration dont elles ont joui jusqu'à ce jour, serait exposer aux plus grands dangers les femmes confiées à leurs soins. Si, pour de tels accidents, le droit doit être entier et sans réserve, sera-t-il facile, possible même, de le limiter quand il s'agira de donner le seigle pour accélérer l'accouchement? Comment permettre dans un cas et interdire dans l'autre? Une sage-femme ne pourra-telle pas toujours arguer d'une hémorrhagie qui lui paraissait à craindre et qu'elle a voulu prévenir? Les restrictions, les entraves seraient donc presque toujours illusoires. Mais d'ailleurs seraient-elles bien légales? La loi du 19 ventôse an XI, qui n'a pas cessé d'être en vigueur, dispose, art. 32, que les sages-femmes devront être examinées sur les accidents qui peuvent précéder, accompagner ou suivre l'accouchement et sur les moyens d'y remédier, ce qui implique sans doute que le libre emploi de ces moyens leur est accordé. Si un doute pouvait exister sur le droit qui leur est conféré par cet article, le soin pris dans le suivant d'établir une exception, une exception unique relativement à l'application des instruments trancherait la question d'une manière nette et précise.

En présence d'une législation qui ne fixe point de limites aux prescriptions des sages-femmes, qui, par conséquent, leur laisse, en ce qui concerne le seigle ergoté, une si grande latitude, le devoir le plus impérieux des personnes chargées de les instruire, n'est-il pas de leur exposer de la manière la plus minutieuse l'ensemble des règles que nous avons rappelées plus haut,

de leur en faire sentir toute l'importance et de s'efforcer de les rendre prudentes et réservées? Celui des sages-femmes elles-mêmêmes n'est-il pas de se bien pénétrer de ces préceptes et de les appliquer religieusement? Si la loi est imparfaite, c'est ainsi seulement qu'on remédiera à ses imperfections. Ne laissât-elle rien à désirer, c'est encore aussi par de vives et sérieuses instructions d'une part, et la plus scrupuleuse réserve de l'autre, qu'on parviendra à neutraliser les dangers d'un médicament d'une si délicate administration.

Qu'il nous soit permis, avant de conclure, d'ajouter quelques mots sur deux points plus obscurs de son histoire, et qui se rattachent d'ailleurs à la première partie de la question qui a été posée à l'Académie, à savoir sa propriété abortive et son action toxique sur le fœtus.

Au premier rang des motifs qui ont rendu, dans le principe, le seigle suspect aux médecins et à l'autorité, il faut placer la crainte du criminel emploi que l'on pourrait en faire. N'était-ce pas un nouveau moyen abortif offert à la perversité, moyen plus redoutable encore que ceux jusqu'alors mis en usage, puisque les coupables, moins retenus par la crainte des accidents et assurés de l'impunité d'un crime qui ne devait pas laisser de traces, auraient le champ libre et ne connaîtraient plus de bornes à leurs entreprises. Ces appréhensions étaient au moins exagérées. Le seigle excite, réveille la contractilité de l'utérus, quand, fatiguée, épuisée, elle sommeille; il l'éveille difficilement; on a même cru longtemps qu'il ne pourrait l'éveiller quand elle n'a pas encore été mise en jeu. La rareté des avortements pendant les épidémies d'ergotisme n'était-elle pas un suffisant motif de sécurité! Mais, plus tard, cette propriété, qu'on avait longtemps déniée au seigle, il se trouve qu'il la possédait au moins à une époque avancée de la grossesse. C'est en la mettant à profit que, dans un assez grand nombre de cas déjà, l'accouchement a été provoqué avant terme. Ce que les maîtres de l'art ont opéré dans l'intérêt de la mère et de l'enfant, d'autres n'ont-ils pas pu le faire dans de criminelles intentions? Cette question paraît encore préoccuper l'autorité; c'est ce qu'on peut au moins inférer d'un passage de la lettre de M. le préfet, qui ne mentionne pas, à la vérité, des faits bien précis. Nous ne pensons pas que le seigle puisse, sans aucun travail commencé, sans impulsion étrangère, sans manœuvre préalable, à lui seul enfin, mettre en jeu les contractions de l'utérus dans la première moitié de la grossesse qui est celle pendant laquelle le crime d'avortement est le plus

souvent commis. Mais ce qu'il ne saurait accomplir tout seul, il peut au moins concourir à l'opérer, et nul doute que dans ces ténébreuses manœuvres, il ne fasse partie des moyens employés sinon à la destruction, du moins à l'expulsion du foetus. Combien, dès lors n'est-il pas regrettable qu'on ne puisse pas le rendre absolument inaccessible aux mains qui en font un si criminel usage? Ce regret s'accroît encore à la pensée qu'à cinq mois révolus, par exemple, et à plus forte raison à six mois, une mère coupable, spéculant sur la nonviabilité de son enfant, pourrait peut-être obtenir du seigle fourni par un complice, ce qu'elle n'oserait pas demander à des manœuvres dont elle redoute pour elle les conséquences. Les faits signalés à M. le préfet seraient-ils de ce genre?

L'ergot qui tuerait l'enfant dans ce cas, en le détachant prématurément de sa mère, ne peut-il pas lui être fatal d'une autre façon? On s'était demandé, dès l'origine, si cette substance ne serait pas toxique pour le fœtus; de tous côtés, à part quelques dissidents bientot ralliés, la réponse avait été négative, et elle reste telle encore pour la plupart des accoucheurs. Il en est quelques-uns pourtant dont les convictions ont été ébranlées par les résultats, très-peu favorables pour l'enfant, de l'accouchement prématuré provoqué à l'aide du seigle. Fr. Ramsbotham, sur 26 cas, ne sauve que 4 enfants, tandis que la rupture des membranes lui donne 19 succès sur 57 opérations. Des 22 enfants de sa première série qui n'ont pas vécu, 14 étaient nés morts; des 12 nés vivants, 1 était mort presque aussitôt, après version faite pour présentation de l'épaule, 3 une heure après sans convulsions, six, dix, quinze et trente-six heures après leur naissance. Hoffmann, produisant, en 1847, une statistique plus étendue qui comprend d'ailleurs la précédente, donne le résumé de 45 cas sur lesquels 38 fois l'état des enfants est mentionné. Sur ces 38, 15 sont nés morts, 25 vivants. Parmi ces derniers, il en est 5 dont le sort ultérieur n'est pas indiqué; des 18 autres, 12 n'ont pas vécu au delà de trente-six heures. En résumé, 27 morts au moins sur 38 cas! Quant aux mères, il y a eu absence d'accidents chez toutes celles observées par Ramsbotham, et Hoffmann assure qu'il en a été de même chez les autres, circonstance fort remarquable assurément, et d'après laquelle l'accoucheur anglais croit pouvoir conclure que le seigle pris en grande quantité peut être toxique pour le fœtus sans produire aucun symptôme d'empoisonnement chez la mère. Aussi absolue cette conclusion nous paraît au moins préma

turée. Elle ne nous semble pas suffisamment motivée et ne pourrait prendre place dans la science que basée sur des faits plus nombreux et surtout plus complets; dans tous ces cas, la part des influences étrangères n'est pas faite, et en particulier, il est difficile de démêler ce qui est produit par l'action toxique de ce qui peut ne tenir qu'à l'effet ordinaire du sujet. Ramsbotham donnait sans doute de fortes doses; il est allé jusqu'à 36 grammes. Mais ces fortes doses qu'Hoffmann condamne vivement, et de plus considérables encore, sont souvent nécessaires pour amener les contractions utérines à un degré d'énergie tel, que le travail franchement déclaré ne se suspende plus et s'accomplise régulièrement. Quelle que soit l'explication qu'on cherche aux résultats fâcheux communiqués par Ramsbotham, les faits sont trop graves pour ne pas faire naître de sérieuses réflexions et même quelques doutes. Les observations de Beatty, qui signale la raideur particulière des membres des enfants morts après l'administration du seigle pendant le travail; les remarquables expériences de Wright sur des femelles pleines dont les portées ont été plus ou moins fâcheusement atteintes par l'ergot à haute dose, sans que l'action de l'utérus ait été mise en jeu, montrent que la question doit être reprise. L'étude de l'action des médicaments et des poisons sur le fœtus à travers l'organisme maternel, est un des plus importants sujets de la pathologie et de la thérapeutique intra-utérine. Ce qui concerne l'ergot ne pourrait manquer d'y trouver place. Mais les matériaux d'une telle histoire sont malheureusement épars, peu nombreux et tout est encore doute et incertitude dans le chapitre qui devrait être consacré au seigle. Nous nous contentons donc, pour ne rien omettre de ce qui a trait aux effets de ce médicament sur le fœtus, de la simple mention d'une action toxique qui, tour à tour admise et rejetée, sera peut-être reconnue un jour, mais est encore loin, quant à présent, d'être démontrée.

Nous avons l'honneur de proposer à l'Académie de répondre à M. le préfet de la Seine.

1o Que le seigle ergoté, quels que soient d'ailleurs les avantages attachés à ce précieux médicament, peut, quand il est imprudemment administré, déterminer la mort de l'enfant et des lésions plus on moins graves chez la mère.

2o Que, dans l'état actuel de la législation, il n'est pas possible d'interdire aux sages femmes le droit que la loi leur donne d'administrer le seigle ergoté, et que cette

interdiction aurait d'ailleurs de graves inconvénients dans certains cas.

3° Qu'il serait à désirer que la nouvelle législation, si impatiemment attendue, en même temps qu'elle élèverait le degré d'instruction exigé des sages-femmes, fixât leurs droits d'une manière plus précise, et vit s'il y a lieu d'assigner des limites aux prescriptions qu'elles sont appelées à faire.

4° Que l'Académie, ne disposant pas des journaux de médecine, ne peut donner satisfaction à M. le préfet au sujet de la publication par laquelle il voudrait qu'on rappelât aux jeunes médecins et aux sagesfemmes la réserve dont ils ne devraient jamais se départir, et qu'elle doit, en conséquence, se borner à exprimer le désir de voir reproduire, par les principaux organes de la presse médicale, les parties de ce rapport qui leur paraitront les plus propres à remplir le but que l'autorité se propose d'atteindre.

M. GIBERT désirerait que M. le rapporteur voulût bien modifier la dernière conclusion, en répondant au préfet que, conformément au vœu qu'il exprime, l'Académie donnera à ce rapport la publicité dont elle dispose dans son Bulletin.

M. VELPEAU : Il nous semble avoir entendu autrefois M. Moreau s'élever contre les abus du seigle ergoté; je m'attendais à le voir prendre la parole aujourd'hui à l'occasion de ce rapport. Puisqu'il ne le fait pas, je demande à présenter quelques réflexions.

Dans le rapport de M. Danyau, j'ai entendu ceci : que le seigle ergoté, entre les mains des sages-femmes, pouvait causer ou même avait causé la mort de beaucoup d'enfants. Je partage cette opinion. Il a été publié en Belgique une statistique d'après laquelle la mortalité des enfants nouveaunés serait d'un tiers plus élevée depuis qu'on fait usage du seigle ergoté. Il en est de même enfin en France, où l'on fait aussi un grand abus de seigle ergoté. Mais il faudrait ajouter encore que par malheur cet abus n'existe pas moins dans la pratique des médecins que dans celle des sages-femmes. J'ai vu employer le seigle ergoté lorsque le col était à peine entr'ouvert et dans des cas où l'on n'avait pu s'assurer encore de la présentation de l'enfant. Je crois qu'il eût été utile d'insister sur ce point. Dans les cas même où le seigle ergoté est donné dans de bonnes conditions d'ailleurs, si le travail doit durer plus d'une heure après son administration, il y a du danger. Si l'on insistait sur ces règles ainsi que sur celles qu'a formulées M. Danyau, il arriverait à l'avenir beaucoup moins d'accidents.

Il y aurait eu aussi un autre point important à faire ressortir. Les sages-femmes, aux termes de la loi, ont le droit de traiter les suites de couches. On ne peut pas leur enlever ce droit-là; mais il est évident qu'il a de graves dangers, car il s'ensuit qu'une sage-femme peut avoir à traiter une métro-péritonite, un trumbus. Saura-t-elle saisir le moment où il conviendra d'appeler un médecin?

Autre chose encore. Les sages-femmes se croient le droit de traiter les maladies des organes génito-urinaires. On comprend les graves inconvénients qui peuvent en résulter. Mais comment faire pour les en empêcher? Elle croient être dans leur droit en traitant ces maladies comme des suites de couches. Ce sont là des points de pratique délicats que je voudrais voir signaler à l'administration, en spécifiant ce qu'il faut entendre par suites de couches; sans quoi les modifications que l'on introduirait dans la loi, relativement à l'emploi du seigle ergoté dans les accouchements, seraient sans avantage.

M. MOREAU : Il y a longtemps, effective ment, ainsi que vient de le rappeler M. Velpeau, que je me suis expliqué très-catégoriquement à l'égard du sujet en discussion, et tous les ans j'ai l'occasion de rappeler mon opinion sur cette question dans mes cours. Je ne puis donc qu'approuver le rapport de M. Danyau. Cependant j'ajouterai que je ne suis pas aussi partisan que lui du seigle ergoté. Depuis plus de quarante ans que je pratique exclusivement les accouchements, je n'ai pas employé peutêtre dix fois le seigle ergoté pendant le travail. Est-ce que je le considère comme inefficace? Non, certainement; mais c'est à cause de ses dangers.

J'ai fait remarquer, dans le temps, que la mort du fœtus n'est pas due à une action toxique, mais bien à une action mécanique. La mort, dans ce cas, est la conséquence du mode d'action du seigle ergoté sur les contractions utérines qui diffèrent des contractions normales en ce que, tandis que celles-ci ont lieu par intervalles, les premières sont presque permanentes avec exacerbations; de là, arrêt de la circulation fœtale, syncope et la mort. Voilà les opinions que j'ai émises, il y a plus de vingt ans, et je ne crois pas que les faits soient venus les infirmer.

J'ai toujours le soin de recommander de n'employer jamais le scigle ergoté dans les accouchements primipares; car c'est surtout dans ces accouchements que le seigle exerce la plus funeste influence.

Sous le rapport des hémorrhagies, c'est assurément un bon médicament; mais en

core faut-il en être sobre et ne le réserver que pour les cas d'insertion du placenta sur le col, ou pour les hémorrhagies qui ont lieu après l'accouchement. Encore parvienton presque toujours à les prévenir en désemplissant immédiatement la matrice des portions de placenta ou des caillots qu'elle peut contenir.

M. GERDY: je suis étonné des calomnies que je viens d'entendre proférer contre le seigle ergoté. Jamais je ne l'ai vu produire d'accidents; c'est, à mes yeux, le remède le plus souverain qui existe. Sur cent fois qu'on l'emploie, il réussit cent fois. Qu'on me cite, parmi les autres drogues, une scule qui jouisse d'une pareille efficacité. Ce médicament est d'autant plus utile, qu'il y a un grand nombre de cas où l'on ne peut pas attendre plus longtemps sans s'exposer à voir survenir des fistules génitourinaires (M. MOREAU je n'ai jamais vu cela!...) Tout en convenant qu'il faut l'astreind re à de certaines conditions, je maintiens que le seigle ergoté est un excellent remède et qu'on l'a calomnié. J'approuve, du reste, toutes les mesures qui tendraient à faire exiger plus d'instruction de la part des sages-femmes.

M. MOREAU cite des faits de sa pratique qui lui semblent établir d'une manière incontestable, que la mort des enfants a été occasionnée par le seigle ergoté. Dans un de ces cas, en particulier, le seigle avait déterminé de fortes contractions, la tête n'avait pas marché et l'enfant était venu mort, tandis qu'un instant auparavant on avait pu constater, par l'auscultation, qu'il était plein de vie. Le seigle ergoté peut être sans danger lorsque la femme est multipare, que le col est dilaté et la présentation bonne; encore dans ces cas on peut s'en passer; mais chez les femmes primipares, 8 fois sur 40, on déterminera la mort de l'enfant.

M. GERDY persiste à ne voir, dans tout ce qui a été dit, aucune preuve, aucun fait qui établisse incontestablement l'influence du seigle ergoté sur la mort des enfants.

M. MOREAU ne comprend pas comment M. Gerdy peut nier l'influence du seigle ergoté sur la circulation de l'enfant. Le seigle ergoté arrête les hémorrhagies et il ne voudrait pas qu'il eût d'action sur la circulation!

M. DANYAU résume en quelques mots les objections ou observations faites à l'occasion de son rapport, et termine en disant qu'il consent à introduire dans la dernière conclusion la modification demandée par M. Gibert,

Les conclusions, avec cette modification, sont mises aux voix et adoptées.

CHOLERA. M. BONNAFONT, chirurgien de l'hôpital militaire d'Arras, envoie un mémoire sur la nécessité de réunir un congrès sanitaire universel pour aviser aux moyens d'arrêter ou de détruire la cause du choléra.

L'auteur propose dans ce mémoire l'application de quelques mesures hygiéniques propres à atteindre le choléra dans son origine, ou du moins dans celle que lui assignent tous les médecins qui se sont occupés de la marche de ce fléau. (Comm. du cholera.)

Séance du 8 octobre.

PILULES DE BLAUD. M. BLAUD (de Beaucaire) adresse une lettre dans laquelle il se plaint du rejet qui a été fait par l'Académie de sa demande d'insertion dans le bulletin de ses pilules antichlorotiques. Entre autres considérations qu'il présente à cette occasion, M. Blaud combat comme une erreur capitale l'opinion émise par l'Académie, que les pilules s'altèrent avec le temps, et ne peuvent, par conséquent, constituer un médicament officinal. Pour convaincre l'Académie que ses pilules, lorsqu'elles sont bien préparées, sont inaltérables, M. Blaud envoie un échantillon de ces pilules, faites il y a neuf mois, et qui ont conservé toute leur pureté.

VACCINE. M. DELFRAYSSÉ, de Cahors (Lot), adresse une lettre sur la vaccine, dans laquelle il dit que, depuis que les vertus prophylactiques du virus ont été mises en doute, sa pratique lui a fourni quelques observations qui tendent à élueider cette question. L'expérience m'a convaincu, ditil, que le fluide vaccin est le préservatif infaillible de la variole dans tous les cas où les boutons sont assez multipliés pour produire une certaine réaction, et qu'il manque assez souvent son effet si cette réaction est trop faible, et surtout si elle n'a pas lieu. Il propose en conséquence, au lieu de pratiquer trois ou quatre piqûres à chaque bras, comme on le fait généralement, d'en pratiquer vingt-cinq à trente sur les diverses parties du corps. Il affirme que tous les enfants qu'il a soumis à ce mode de vaccination ont pu braver ensuite impunément l'infection variolique dans tout ce qu'elle peut avoir de plus actif et de plus dangereux, sans contracter une seule fois la maladie.

FONCTIONS DU Bulbe de l'urÈthRE. — M. GUERIN (de Vannes), chirurgien du burcau central, donne lecture d'un mémoire dont nous extrayons les passages suivants :

Dans une note précédente, j'ai décrit une valvule située sur la paroi supérieure

du canal de l'urèthre, derrière la fosse naviculaire, et j'ai établi qu'elle constitue un état normal qui avait été pris à tort par les urologistes, pour une lésion pathologique. La découverte de cette valvule, regardée par M. Serres comme l'analogue de l'hymen de la femme, ayant fixé mon attention sur les fonctions de la portion spongieuse du canal de l'urèthre, je n'ai pas tardé à trouver insuffisante l'explication donnée jusqu'à ce jour du mécanisme de l'excrétion de l'urine, et à me demander quelles pouvaient être les fonctions du bulbe de l'urè thre.

Puisqu'il appartient au canal de l'urèthre, le bulbe doit avoir une destination relative à l'excrétion de l'urine.

Voilà, me dis-je, un organe auquel les physiologistes n'ont attribué aucune fonc tion; d'un autre côté, ils n'ont pas trouvé d'explication suffisante de l'impulsion de l'urine abandonnée dans la portion spongieuse de l'urèthre; ne serait-ce pas à cette excrétion qu'est destiné le bulbe uréthral?

Je commençai alors à examiner ce qui se passe chez un homme qui, comme on le dit assez vulgairement, donne le dernier coup de piston pour chasser les dernières gouttes d'urine contenues dans le canal de l'urèthre; je vis aussitôt que les parois de ce canal se gonflent en ce moment, et que le gland subit un mouvement de propulsion en avant, qu'il est impossible de ne pas reconnaître. Je constatai aussitôt que ce phénomène est d'autant plus sensible que la contraction du muscle bulbo-caverneux a été plus vive, et qu'en outre la turgescence des parois de l'urethre et du gland est consécutive et liée intimement à la contraction de ce muscle.

Mais comment le muscle bulbo-caverneux peut-il avoir une pareille influence sur le gland et sur les parois du canal de l'uréthre? Voilà ce qui a échappé aux physiologistes, quoique bien simple assurément; lorsque le muscle bulbo-caverneux entre en contraction, il presse le bulbe et tend à l'aplanir sur les corps caverneux, où naît une impulsion du bulbe vers le gland, qui pousse l'ondée sanguine en ce sens, et détermine la turgescence signalée plus haut.

Cette propulsion du sang accumulé dans le bulbe, étant admise, il est clair qu'elle tendra à rapprocher la paroi inférieure du canal de l'urèthre de sa paroi supérieure, et que le liquide contenu dans la paroi spongieuse sera ainsi lancé plus ou moins loin à l'extérieur.

Si cette théorie est vraie, le muscle bulbocaverneux reste bien comme par le passé, un accélérateur de l'urine; mais lorsque

ce liquide, arrivé dans la partie antérieure de l'urèthre, ne subit plus l'influence des contractions de la vessie et des parois abdominales, il ne peut plus être expulsé par le muscle bulbo-caverneux qu'à la condition qu'une colonne sanguine, placée au-dessous de ce muscle, viendra presser l'urine d'arrière en avant tout le long de cette portion du canal, qui est dépourvue d'appareil musculaire.

Ainsi, pour que l'action du muscle bulbocaverneux s'exerce sur l'excrétion de l'urine, il faut un intermédiaire qui est le bulbe urethral, réservoir sanguin d'où le sang est expulsé vers le gland toutes les fois que le muscle accélérateur de l'urine entre en contraction.

Une pareille opinion sur le rôle du sang dans l'excrétion de l'urine était trop neuve pour qu'elle n'eût pas besoin d'être démontrée expérimentalement ; aussi n'ai-je voulu en entretenir l'Académie qu'après avoir fait l'expérience suivante, qui, je l'espère, est de nature à satisfaire les esprits les plus exigeants.

Ayant ouvert la vessie d'un cadavre, j'y introduisis la canule par laquelle j'injectai une grande quantité d'eau qui, bientôt, commença à couler par le méat urinaire; et ayant incisé le bulbe, je fixai dans une ouverture une petite canule au moyen d'une suture entortillée, et puis injecter du liquide dans le tissu caverneux du canal de l'urèthre.

Je constatai alors que le jet de l'eau poussée par la seringue de la vessie était manifestement accéléré, chaque fois que je poussais le piston de la seringue adaptée au bulbe.

Puis, ayant cessé d'injecter avec la première seringue, je vis que l'injection faite alors dans le bulbe, expulsait au dehors, et avec assez de force, le liquide resté dans le canal de l'urèthre.

Cette expérience, répétée six ou huit fois, m'ayant toujours donné le même résultat, il n'y a plus pour moi de doute possible sur les fonctions du bulbe: c'est un annexe du canal de l'urèthre destiné à l'excrétion de l'urine contenu dans la partie de ce canal qui est au-devant de la portion membraneuse, el ce n'est que par cet organe que le muscle bulbo-caverneux est accélérateur de l'intermédiaire de l'urine.

La découverte des fonctions du bulbe de l'urèthre et du sang qui remplit les mailles du tissu caverneux uréthral, donne l'explication de plus d'un phénomène incompris jusqu'ici.

Ainsi, par exemple, tous les chirurgiens ont remarqué que le gland du pénis se gonfle et devient turgide chez les hommes

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