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déjà marqués à Feluy et dans ses environs par des fièvres intermittentes comme suite de ces travaux. Sur la fin de l'automne de cette dernière année, la fièvre périodique fit place au typhus épidémique qui cessa au printemps suivant, pour laisser cours de nouveau aux pyrexies intermittentes pendant la belle saison de 1830. L'hiver de 1830 à 1881 fut remarquable par le développement d'un typhus varioleux grave où l'on vit se produire le caractère ataxique. Cette affection disparut à son tour au printemps de 1831 pour faire place encore une bonne fois aux maladies intermittentes. Ces dernières cessèrent encore pendant l'automne, et l'hiver de 1831-32 nous présenta le règne d'une violente scarlatine de mauvais caractère.

Pendant ces années toutes les autres affections pathologiques étaient empreintes d'un cachet spécial de nature nerveuse. On observa cependant en dehors de l'année du cours du typhus épidémique, quelques typhus sporadiques où des gastro-entérites revêtissant les formes ataxiques. Il se présenta même un cas de l'interminable fièvre lente d'Huxham.

Les bords du canal de Charleroy que j'habite furent atteints cà et là au commencement du printemps de 1849, de pyrexies intermittentes qui firent place successivement aux cholérines et à quelques cas du fléau épidémique. Les maladies de l'automne de cette année, rares à la vérité, à moins de donner ce nom à de légères affections pour lesquelles nos robustes campagnards ne vont guère chez le docteur, furent marquées par des symptômes nerveux, tels que vive sensibilité, sentiment de faiblesse, trouble inexprimable de la région épigastrique, irrégularité de la circulation et fréquemment intermittence du pouls. Aussi la fin de l'automne et l'hiver présentèrent des cas de varioles des plus malignes, des varioloïdes vraies, d'un caractère ataxique non équivoque. Le printemps de 1850 nous ramena encore quelques cas de pyrexies intermittentes dans certaines localités voisines et dans d'autres de vrais typhus sporadiques. J'observai même au printemps un érysipèle gangréneux : ces faits confirment encore la longue durée de l'intoxication. Un sujet que je connais particulièrement éprouva, pendant la période des chaleurs que nous venons de parcourir, ces troubles de l'estomac, de la circulation, de la lassitude: cet état céda immédiatement après les dernières pluies diluviennes.

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Conclusions. Les fièvres intermittentes, le typhus, les phlegmasies alaxiques ou gangréneuses comme le choléra asiatique, ont leur source dans l'intoxication ammoniacale ou miasmatique paludéenne. La peste, la fièvre jaune, comme les épidémies de dyssenterie, ont la même origine. Les effets de l'intoxication durent plusieurs années sans être éliminés par la chimie vivante de l'économie animale. Le choléra est peut-être le maximum de cette infection. Ce poison est dû particulièrement aux longues sécheresses ou à la rareté des pluies orageuses. Les pluies accompagnées de fortes décharges électriques y mettent fin en formant de l'acide nitrique dans l'air atmosphérique.

Serait-ce pousser trop loin nos espérances que de considérer l'emploi sur le sol des acides minéraux très-dilués, comme le préservatif le plus certain de tous ces fléaux qui nous déciment alternativement!

Et notamment l'emploi de l'acide hydrochlorique qui est à si bon marché et dont l'agriculture retirerait des bénéfices usuriers.

RECHERCHES HISTORIQUES SUR LA MÉDECINE ET EN PARTICULIER SUR LES FIÈVRES; par J. F. DOUVILLÉ, Docteur en médecine à Laneuville-Roy, membre correspond. de la Société, etc. (Suite et fin. V. notre cahier d'octobre, p. 300.)

Le professeur Broussais, avons-nous dit, considère toutes les fièvres comme symptomatiques d'une gastro-entérite, et nie, par conséquent l'existence de celles admises comme primitives ou essentielles. Cette proposition nous paraît trop exclusive; et bientôt nous en donnerons les motifs. La plupart des causes qui leur donnent naissance, objecte-t-on, agissent sur l'économie tout entière; donc il doit en résulter un effet général. Les prodromes d'un grand nombre d'entre elles décèlent réellement une maladie de tous les systèmes. Et à l'appui de cette opinion, on dit: voyez comme toutes les fonctions sont troublées, sans que l'on puisse prouver, voici tel organe, voilà telle partie uniquement et essentiellement lésée. Puis on nous fait voir l'accélération et la force des pulsations artérielles, la calorification augmentée, l'altération des traits, les différentes attitudes du malade, ce malaise indéfinissable, cette langueur des facultés intellectuelles et sensitives, ce trouble des fonctions des appareils digestif et respiratoire, la suspension, l'exaspération et la dépravation des sécréteurs et des excréteurs. Tous ces phénomènes morbides ne prouvent-ils pas surabondamment que l'affection est universelle, et qu'il serait insensé de les attribuer à tel organe plutôt qu'à tel autre. Quand bien même la fièvre affecterait une partie circonscrite, on ne pourrait pas pour cela en conclure que ce point constitue le foyer morbifique unique, puisque le principe contagieux de la variole, de la rougeole et de la scarlatine lui-même attaque d'abord toute l'économie pour se rejeter ensuite sur la surface cutanée. Voici assurément de sérieuses objections en faveur de l'existence de l'essentialité des fièvres, et cependant on ne peut admettre de semblables propositions ainsi formulées; car en examinant attentivement un fébricitant, on ne tarde pas à s'apercevoir, au moins dans l'immense majorité des cas et au bout de quelques jours, qu'un organe est plus spécialement affecté; les exanthèmes cutanés que nous venons de citer, ne font pas exception à cette règle. La variole fomentée par un levain dont nous ne connaissons pas l'origine débute et a pour prodromes une irritation plus ou moins intense de la partie supérieure de la muqueuse digestive; et les deux autres ont pour invasion une bronchite souvent fort bien caractérisée et qui parfois persiste, même après la disparition de la phlegmasie de la peau. C'est toujours l'organe primitivement lésé, lésion excitée, par je ne sais quoi, qui tient aux causes occultes, qui a éveillé tous les phénomènes sympathiques et secondaires offerts à l'observation.

Pendant le cours d'une seule et même fièvre, rien d'extraordinaire qu'un organe, aujourd'hui fortement surexcité, décharge son excès de superstimulation sur une autre partie, et cela par la voie des sympathies qu'il met en jeu, et que celle-ci finisse même par s'approprier la plus grande dose d'irritation et même la dose entière. Mais alors la maladie change de siége et les symptômes propres qu'elle fait naître la font de nouveau reconnaître. Rien ne doit surprendre non plus, si dans le cours d'une longue pratique, on ne rencontre pas deux groupes de symptômes absolument semblables. Ces différences tiennent, comme chacun le sait, à ce que les organes, dont les signes morbides expriment la douleur ne sont pas ou presque pas affectés au même degré ; et, de ce que la susceptibilité de chaque sujet présente des variétés infinies. Au reste, lorsque l'on a à combattre l'affection principale de la partie souffrante, et que néanmoins la fièvre persiste et poursuit la marche qui lui est propre, c'est qu'alors il existe deux ou un plus grand nombre de foyers phlegmasiques qu'il n'a pas toujours été au pouvoir de l'art de juguler. La crise qui souvent termine les fièvres est un mouvement spontané de tout le corps, fort bien; mais il est excité par l'organe souffrant. L'essence de ces maladies n'est pas seulement dans les solides, mais encore dans les fluides. Avouons plutôt que nous n'en savons rien. Lorsque vous dites que les fièvres graves réclament un traitement général et que vous vous fondez sur cela pour les considérer comme idiopathiques, vous avancez une assertion purement gratuite, puisque tous les jours vous appliquez cette thérapeutique à des maladies reconnues essentiellement locales. Et si les moyens locaux, non précédés d'une médication générale, près le siége du mal, l'accroissent dans certains cas, cela tient à des considérations tout à fait indépendantes de la nature des fièvres, et qui peuvent s'appliquer à toute autre maladie que vous avouez être bien et clairement localisée. De ce qu'un état pathologique est survenu tout à coup, a persisté un certain nombre de jours et a cessé insensiblement ou brusquement, on ne peut pour cela en inférer qu'aucun organe en particulier n'ait été atteint, ou que tous aient souffert en même temps. Ici évidemment, a existé une irritation locale, qui fort souvent s'est dérobée à l'œil de l'observateur. Est-ce à dire, toutefois, que toutes les fièvres sont symptomatiques d'une phlegmasie des voies digestives? oh! non, et la suite fera voir les raisons qui s'opposent à l'adoption de cette proposition que l'expérience journalière repousse.

Une douleur fugistive, mobile, une faible altération des sécrétions d'un ou de plusieurs organes, ne constituent pas une phlegmasie; et nul n'a une pareille prétention. Mais d'un autre côté, on ne peut nier que la rougeur de la langue, la soif, la chaleur âcre de la peau, la sensibilité épigastrique ne soient les signes de la gastrite. Si ces symptômes ne décelaient pas cette phlegmasie, qu'indiqueraient-ils alors? Sans affirmer que toujours quelques exanthèmes cutanés, un vaste abcès, une brûlure profonde ou étendue, une fracture compliquée ou comminutive, un panaris, etc., donnent naissance à la gastro-entérite; au moins, est-il constant que souvent ces maladies la déterminent. De ce que l'on observe tous les symptômes de la synoque, par exem

ple, pendant quelques jours, et qu'ensuite se manifeste un érysipèle, une an gine ou une pleurite, etc., en conclura-t-on que l'on a eu affaire à une fièvre essentielle, parce que l'appareil fébrile s'est dissipé?

Dans les fièvres graves fatalement terminées, quelquefois, il est vrai, on ne rencontre aucune altération appréciable; mais s'il est constant que, dans ces maladies, les symptômes locaux sont plus faiblement dessinés, les organes qui les font surgir, doivent présenter des lésions moins profondes; lésions qui peuvent même se dissiper au moment de la mort, ainsi que cela a lieu pour les inflammations du tissu dermoïde. Pourquoi se refuser d'admettre une semblable analogie entre l'extérieur et l'intérieur? Ne sommes-nous pas tous les jours à même d'observer qu'une légère rougeur circonscrite a été seule cause de l'extinction de la vie? On objecte qu'il est impossible qu'une lésion aussi peu étendue puisse déterminer des symptômes mortels, attendu que souvent des désordres bien autrement graves se rencontrent dans des organes d'une haute importance, sans que pour cela, ils aient été suivis de la mort. Voudrait-on, ainsi qu'on l'a prétendu pendant des siècles, trouver dans nos tissus des altérations aussi manifestes à la suite des fièvres, que celles que l'on rencontre dans le tissu cellulaire, à la suite du phlegmon, dans les poumons à la suite de la phthisie, dans le foie, la rate, les reins, etc., à la suite de maladies organiques de ces organes? Or, on sait que les membranes muqueuses et séreuses sont loin d'offrir des caractères aussi tranchés. Si on reconnait que la pneumonie ne laisse parfois après elle qu'une simple injection de sang; si on peut ajouter foi aux observations d'hommes éminents qui ont vu la pleurésie, le croup devenir mortels, et pourtant ne laisser pour toute lésion anatomique qu'une simple rougeur; si l'angine gutturale a fait de nombreuses victimes dans quelques épidémies en ne laissant comme traces de son passage qu'une coloration encore plus pâle que celle de l'état de santé, on cessera d'être surpris quequelques points enflammés de la muqueuse digestive, soient les seules marques que cette membrane laisse à la suite des fièvres qui ont entraîné la perte du malade.

Les maladies générales sont on ne peut plus difficiles à déterminer. Dans celles réputées telles, on observe bien des signes qui paraissent universels; c'est ce qui arrive quand la totalité des nerfs est surexcitée, et encore y a-t-il certains points plus fortement stimulés. Dans la fièvre proprement dite, il n'y a de général que l'accélération du cours du sang, qui même diffère dans quelques endroits. Mais la douleur, le désordre entier du système nerveux, la force et la vitesse des battements du pouls, communément ne forment pas la maladie qui nous occupe. Dans tout état pathologique, lorsque l'inflammation se fixe sur les organes parenchymateux, les séreuses en sont épargnées, et si celles-ci s'affectent, les muqueuses n'y participent pas. - Envahit-elle toute la surface de la peau, beaucoup d'autres parties en sont exemptes. Certes, si l'inflammation ou tout autre état anormal violent occupait à la fois tous nos organes, la vie, le principe vital, l'innervation si l'on veut ne pourrait résister longtemps à un pareil orage et succomberait bientôt

-sous un poids aussi écrasant. Par la fièvre, tous les tissus reçoivent une plus grande quantité de sang; la respiration s'accélère, et cela doit être puisque l'oxygénation sanguine est plus pressante. S'il se trouve des parties disposées, le sang y séjourne, forme des congestions qui les irritent. Par la fièvre, le système musculaire s'endolorit, les fonctions sécrétoires se troublent, et donnent des produits plus ou moins dénaturés, d'où l'idée des anciens qui, dans cette maladie, voyaient la corruption du sang, parce qu'alors ils observaient un trouble considérable dans les lois de la chimie vivante. En effet, tout change dans l'organisme soumis à l'action d'une forte inflammation. L'organe irrité voit bientôt sa nutrition augmentée, puis des altérations y ont lieu; la nutrition se ralentit ou cesse tout à fait. Et si l'organe est important, il affecte tous les autres. Les matériaux réparateurs n'y arrivent plus, et toute la machine languit. Il y a donc décomposition toutes les fois que la stimulation est exagérée, des évacuations surabondantes et des viscères de premier ordre violemment ébranlés.

Mais est-ce à dire que la lésion soit générale? quelle est, nous le demandons, la propre signification du mot fièvre? Ne serait-elle donc purement qu'un mot? Qu'est-ce qu'une maladie générale sans irritation locale? Nous ne parlons pas de sa nature intime que pendant longtemps encore on cherchera vainement. Elle détermine des symptômes, dit-on, mais comment, puisqu'ellemème n'est qu'un symptôme? Quand on aura prouvé qu'elle n'est pas l'effet manifeste d'une lésion locale d'un ou de plusieurs organes, et qu'on l'aura prouvé d'une manière irréfragable, alors, mais alors seulement, nous nous rangerons à l'avis de ceux qui exclusivement la considèrent comme provenant de l'infection de toute l'économie. Jusque-là nous garderons notre conviction et nous ne verrons comme telle que le cas où l'homme privé subitement d'un air vivifiant, succombe promptement; ou encore, lorsque le calorique nous fait défaut; quand écrasé sous un rocher la vie s'éteint; quand l'électricité nous foudroie; quand des miasmes délétères nous privent vite d'un fluide indispensable à notre existence et, par leur nature, déterminent un empoisonnement de toute la masse organique, etc. Mais alors, nous le demandons, tous ces cas sont-ils du domaine de la pathologie ?

Lorsque les signes qui préludent à l'explosion d'une fièvre, surgissent d'un endroit déterminé, doivent-ils être attribués aux effets d'une maladie universelle qui affecte tous les fluides et tous les solides? A la rigueur, une semblable dénomination pourrait tout au plus convenir aux fièvres produites par l'absorption d'un miasme, d'un virus, par l'ingestion d'une substance vénéneuse, par la fièvre jaune, le typhus, la variole, la rougeole et les maladies pestilentielles. On voit que nous accordons largement aux partisans de l'essentialité. Encore pourrait-on objecter que quel que soit le mode d'intoxication, toujours est-il que la maladie est loin de résider dans les fluides. Si ceux-ci sont uniquement lésés, pourquoi donc cette lésion ne se manifeste-t-elle par aucun signe appréciable? Le sujet dont toutes les fonctions s'exécutent normalement, quoiqu'il y ait absorption d'un virus, s'en imprègne tout aussi forte

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