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cide azotique. Ayant répété cette expérience, il y a quelques années, je crus entrevoir la formation d'autres produits; mais je ne poussai pas plus loin cette recherche à cette époque. Le nouveau fait annoncé par M. Liebig me suggéra la pensée que, parmi ces produits, il pourrait se trouver de l'acide tartrique. La dulcine n'ayant pas d'action sur la lumière polarisée, il était extrêmement intéressant d'être fixé sur la nature des propriétés optiques de l'acide tartrique qu'on en pourrait retirer, si toutefois cet acide ou quelqu'une de ses modifications se trouvait dans les produits de l'opération.

Je repris donc l'étude de cette réaction, et, après divers tâtonnements, je suis arrivé à obtenir quelques grammes de crème de tartre. Pour cela j'ai suivi, sauf quelques modifications, le procédé employé par M. Liebig pour le traitement du sucre de lait. J'indiquerai plus tard la manière dont l'opération doit être conduite. Dans tous les cas, la quantité de crème de tartre obtenue a été minime : elle ne dépasse pas 1 1/2 à 2 pour 100 du poids de la dulcine employée. J'espère que de nouveaux essais me permettront d'augmenter ce faible rendement.

Dans cette opération, j'ai remarqué la formation d'une matière que je crois être l'intermédiaire entre la dulcine et les acides mucique, paratartrique et oxalique. Cette matière, dont je poursuis en ce moment l'étude, jouit d'une partie des propriétés des sucres représentés par la formule

C12 H12 012;

ainsi, tandis que la dulcine ne jaunit point

par les alcalis, et n'a aucune action, ni sur le tartrate de cuivre et de potasse, ni sur le sous-nitrate de bismuth, ni sur l'indigo en présence des alcalis, la nouvelle matière jaunit par les alcalis, et réduit ces trois réactifs avec la même énergie que le glucose.

La crème de tartre a été saturée par le carbonate de potasse, puis précipitée par un sel de plomb. Ce sel, traité par l'acide sulfhydrique, a donné l'acide qu'on a fait cristalliser. L'inspection attentive des cristaux permet déjà de reconnaître l'acide paratartrique ou racémique. Les propriétés chimiques conduisent au même résultat. Ainsi :

Ogr.,500 d'acide cristallisé perdent, à 140°, 0gr.,054 d'eau, soit 10,80 pour 100. La formule C'H O12 + 2HO exige 10,71 pour 100.

Ogr.,500 de crème de tartre ont donné

Ogr.,230 de sulfate de potasse, soit 20,9 pour 100 de potassium. Le calcul exige 20,76 pour 100.

Ogr.,498 d'acide cristallisé non desséché ont donné Ogr.,510 d'acide carbonique et Ogr.,224 d'eau; d'où C=27,02, H=4,99. La formule de l'acide cristallisé exige C-28,57, H=4,76.

La dissolution de l'acide précipite le chlorure de calcium; le précipité, dissous dans l'acide chlorhydrique, se reproduit immédiatement par l'addition de l'ammoniaque, en prenant un aspect chatoyant ; enfin la dissolution ne dévie pas le plan de polarisation de la lumière.

Ces caractères suffiraient, je crois, pour caractériser l'acide racémique. Le plus important cependant, dans le cas actuel, pour constater l'identité parfaite entre l'acide obtenu et l'acide naturel, est le dédoublement en acide tartrique droit en acide tartrique gauche. M. Pasteur dont les beaux travaux sur l'acide racémique sont connus de tout le monde, a bien voulu me prêter son concours éclairé pour effectuer cette séparation, et je ne puis m'empêcher de lui témoigner ici toute ma reconnaissance pour la manière obligeante avec laquelle il m'a accueilli et m'a prodigué ses précieux conseils. On a fait d'abord du racémate de cinchonicine, qui a été mis à cristalliser; au bout de quelques jours, il s'est déposé des cristaux de tartrate gauche de cinchonicine; ils ont été reconnus par la réaction suivante. Les cristaux débarrassés d'eau-mère par expression entre des papiers, donnent une dissolution qui ne précipite pas immédiaajoutant du tartrate droit d'ammoniaque tement par le chlorure de calcium; en y

additionné de chlorure de calcium, on a obtenu immédiatement un abondant précipité, qui, vu au microscope, est formé d'aiguilles allongées qui distinguent le racémate de chaux, tandis que le précipité obtenu à la longue par le tartrate gauche de cinchonicine et le sel de chaux est formé d'octaèdres de tartrate de chaux. Cette expérience, faite au laboratoire de M. Pasteur, ne laisse plus aucun doute sur la nature de l'acide racémique examiné; il se dédouble comme l'acide naturel.

Ainsi donc on obtient, comme produit dérivant de la dulcine inactive, l'acide racémique, corps également inactif sur la lumière polarisée, mais pouvant se dédoubler en deux corps possédant chacun un pouvoir rotatoire moléculaire d'égale intensité et de sens contraire. De ce fait on peut tirer deux conséquences: l'une, peu probable et en désaccord avec tous les faits

connus jusqu'à ce jour, c'est qu'on pourrait obtenir une substance active au moyen d'une substance inactive; l'autre, plus probable, c'est que la dulcine elle-même n'est inactive qu'en apparence, qu'elle est formée de deux matières douées du pouvoir rotatoire moléculaire et dont l'action sur la lumière polarisée se neutralise.

Dans ce cas, on peut présumer avec vraisemblance qu'un grand nombre de substances organiques, considérées jusqu'à présent comme réellement inactives sur la lumière polarisée, ainsi qu'on le croyait pour l'acide racémique, jusqu'à ce que M. Pasteur eût prouvé le contraire, ne sont, comme la dulcine, inactives que par compensation; et l'on voit tout de suite quel intérêt s'attache à un fait qui semble ne pas devoir être une exception dans l'ordre des phénomènes naturels.

Il reste à démontrer par une expérience directe la possibilité du dédoublement de la dulcine en deux matières actives: c'est le but vers lequel tendent à présent mes efforts. Je ne me dissimule pas les difficultés que j'aurai peut-être à vaincre; mais la sympathie que j'ai rencontrée autour de moi, et particulièrement chez MM. Biot et Pasteur, et la certitude que leurs excellents conseils ne me manqueront pas, me font une loi de persévérer dans la voie où j'ai été assez heureux pour réussir en commençant.

(Journ. de pharm. et de chim., sept. 1860.)

NOTE CONFIRmative des rÉSULTATS ANNONCÉS PAR M. CARLET; par M. BIOT. - En exposant devant l'Académie, dans sa dernière séance, la formation artificielle de l'acide paratartrique, dérivé de la dulcine, par M. Carlet, j'ai mentionné deux procédés mis en œuvre par M. Pasteur, pour éprouver si ce produit était effectivement résoluble en acide tartrique droit et en acide tartrique gauche, comme l'acide paratartrique naturel. L'un de ces procédés est le même que M. Pasteur avait employé en 1848, devant les commissaires de l'Académie, lorsqu'il nous fit voir ce remarquable phénomène de dédoublement. Il consiste à mettre en présence, dans l'eau distillée, les éléments consécutifs du paratartrate neutre de soude et d'ammoniaque que la cristallisation sépare en tartrates droit et gauche des mêmes bases, distincts par leurs formes et exerçant sur la lumière polarisée des pouvoirs rotatoires moléculaires égaux, de sens contraires, qui se compensaient mutuellement dans leur ensemble. L'autre procédé, découvert plus

tard par M. Pasteur, consiste à former une solution aqueuse de paratartrate acide de cinchonicine, d'où la cristallisation, lentement ménagée, sépare d'abord des cristaux de tartrate gauche parfaitement purs, et plus tard, les cristaux également purs de tartrate droit, qui en forment le complé ment, ce qui dispense du triage manuel. Le même phénomène de séparation spontanée se produit aussi avec le tartrate acide de quinicine. Seulement, l'ordre dans lequel les deux dépôts s'opèrent est inverse. Celui des tartrates droits précède celui des tartrates gauches. M. Pasteur a soumis l'acide paratartrique artificiel de M. Carlet aux deux premières épreuves. Mais la séparation par la cinchonicine s'étant seule effectuée d'abord, M. Carlet a dû ne mentionner que celle-là dans sa note. Depuis lors, la solution de paratartrate neutre de soude et d'ammoniaque a aussi déposé ses cristaux, que l'on a trouvés spontanément séparés en tartrates droits et en tartrates gauches, comme on pouvait le prévoir. Toutefois, je n'ai pas cru inutile d'annoncer ce complément de vérification; car, dans l'étude de phénomènes si nouveaux et si imprévus, la concordance des preuves, même surabondantes, n'est jamais de trop pour établir irrécusablement la vérité. (Ibid.)

RECHERCHES SUR LA MATIÈRE COLORANTE DES SUPPURATIONS BLEUES: PYOCYANINE; par

M. FORDOS. Le pus présente dans certains cas, assez rares, la propriété trèsremarquable de colorer en bleu les linges à pansement. La cause de ce phénomène a déjà été étudiée par les chimistes, et des opinions très-diverses ont été émises pour l'expliquer. J'ai été conduit dès le début de mes recherches, qui datent de quelques années, à considérer comme une matière colorante spéciale la substance qui produit cette coloration, et j'ai proposé de la désigner sous le nom de pyocyanine. J'ai réussi depuis lors à l'obtenir cristallisée, mais en quantité trop faible pour l'étudier convenablement. Je crois néanmoins utile de publier dès à présent les résultats que j'ai obtenus, en attendant que je puisse me procurer de la matière pour en continuer l'étude.

Pour isoler la pyocyanine, j'emploie le procédé suivant: Je fais macérer les linges à pansement, pendant quelques heures, dans de l'eau additionnée de quelques gouttes d'ammoniaque. La dissolution bleue un peu verdâtre que j'obtiens est agitée avec du chloroforme; celui-ci en

lève à l'eau la matière bleue, des matières grasses et des matières colorantes jaunâtres qui donnent à la dissolution bleue une teinte verdâtre. Je sépare la dissolution chloroformique à l'aide d'un entonnoir à robinet; je la filtre et la laisse évaporer à l'air. Je traite le produit de l'évaporation par de l'eau distillée qui dissout la pyocyanine et quelques corps étrangers, sans toucher aux matières grasses. La dissolution aqueuse est agitée avec du chloroforme. Je sépare comme précédemment la dissolution chloroformique à l'aide de l'entonnoir à robinet; je laisse cette dissolution s'évaporer à l'air, après l'avoir filtrée. J'obtiens pour résidu de la pyocyanine contenant encore un peu de matières étrangères jaunâtres. J'ajoute sur ce résidu quelques gouttes d'acide chlorhydrique étendu qui transforme la pyocyanine en une substance rouge, que je considère comme une combinaison de pyocyanine avec l'acide employé; je laisse sécher à l'air; je traite alors par le chloroforme qui dissout les matières étrangères et n'exerce aucune action dissolvante sur la substance rouge. Quand cette dernière est suffisamment purifiée, je la triture avec un peu de carbonate de baryte en présence du chloroforme. Le carbonate de baryte s'empare de l'acide, et la pyocyanine, mise en liberté, se dissout dans le chloroforme. Je filtre la dissolution chloroformique et j'obtiens, par l'évaporation spontanée, des cristaux de pyocyanine.

La pyocyanine est d'une couleur bleue plus ou moins foncée; examinée au microscope, elle présente des cristaux prismatiques bleus. Elle est soluble dans l'eau, l'alcool, l'éther et le chloroforme. La dissolution aqueuse est décolorée par le chlore; les acides la rougissent et les alcalis lui rendent sa couleur bleue. La liqueur bleue, agitée avec du chloroforme, lui cède la pyocyanine; le chloroforme est sans action sur la liqueur rougie par les acides.

La dissolution de pyocyanine, contenant encore du pus, perd sa couleur d'un jour à l'autre, si on la conserve dans un flacon bouché; mais il suffit de l'agiter à l'air pour lui rendre sa couleur primitive. Le même phénomène de décoloration se produit, si l'on chauffe, dans un tube à essai, la dissolution bleue avec quelques gouttes de solution de sulfure de sodium, et l'on reproduit la coloration bleue en agitant la liqueur à l'air. Ces faits prouvent que la pyocyanine peut, de même que plusieurs matières colorantes, devenir incolore, sous l'influence des désoxydants, pour reprendre ensuite sa couleur bleue

au contact de l'oxygène de l'air, et expliquent comment un pus incolore peut néanmoins colorer en bleu les linges à panse

ment.

L'ammoniaque m'a paru faciliter le développement de la pyocyanine; et c'est pour ce motif que, dans le procédé d'extraction, je traite les linges à pansement par de l'eau légèrement ammoniacale.

La pyocyanine me parait devoir être considérée comme une base organique pouvant produire avec les acides des combinaisons rouges. J'ai obtenu, en ajoutant sur de la pyocyanine quelques gouttes d'acide chlorhydrique étendu et laissant évaporer, un produit rouge cristallisé en prismes à quatre pans, insoluble dans le chloroforme, et qu'il a suffi de traiter par le carbonate de baryte pour reproduire la pyocyanine.

La même expérience faite avec l'acide acétique fournit une combinaison rouge peu stable; par l'évaporation spontanée, l'acide se dégage et les cristaux bleus de pyocyanine reparaissent.

La pyocyanine diffère complétement de la biliverdine que l'on a considérée comme le principe colorant des suppurations bleues; elle diffère aussi de la cyanourine trouvée dans un dépôt urinaire bleu par Braconnot ainsi que de la matière bleue rencontrée dans la bile par M. Chevreul et dans le sang par M. Lecanu. (Journ. de pharm. et de chim., sept. 1860.)

DE L'EMPLOI DE L'INDIGO COMME MOYEN DE DÉCOUVRIR le glucose et le sUCRE DE FRUITS; par M. E. MULDER. Le glucose, et le sucre de fruits possèdent la propriété de transformer l'indigo bleu en indigo blanc en présence des alcalis. L'auteur fonde'sur cette réaction un procédé très-propre, selon lui, à découvrir de petites quantités de ces sucres. Il opère de la manière suivante :

Il ajoute à la liqueur dans laquelle il veut rechercher la présence du glucose du sulfate d'indigo préalablement additionné d'un excès de carbonate de potasse ou de soude. L'addition de ce sel alcalin au sulfate d'indigo en modifie à peine la couleur bleue, même à l'ébullition, et la présence de l'alcali est nécessaire pour que la réduction de l'indigo ait lieu. Si la liqueur renferme du glucose ou du sucre de fruits, la couleur bleue du réactif disparaît à la température ordinaire, et plus rapidement si l'on chauffe.

Il est à remarquer qu'on peut faire bouillir cette liqueur bleue avec du sucre de canne sans qu'il y ait décomposition;

celle-ci s'effectue immédiatement si l'on ajoute à la liqueur une trace de glucose. (Journ. de pharm. et de chim., sept. 1860.)

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SUR LES ACIDES DE LA RÉSINE DE BENJOIN; par MM. KOLBE et LAUTEMANN. MM. Kolbe et Lautemann ont reconnu que les diverses variétés de résine de benjoin ne renferment pas toutes de l'acide benzoïque. D'une résine de première qualité, provenant de Sumatra, ils ont extrait un acide complétement différent du benzoïque, fusible dans l'eau chaude et donnant de l'essence d'amandes amères lorsqu'on l'oxyde par le permanganate de potasse. Les auteurs pensent que cet acide est identique avec l'acide alphatoluglique, homologue de l'acide benzoïque et que MM. Moeller et Strecker ont tout récemment obtenu en décomposant l'acide vulpique par la potasse et s'étonnent, non sans raison, qu'on n'ait pas remarqué depuis longtemps ce fait si curieux de la nonidentité des acides dans les diverses espèces de résines de benjoin.

(Ibid.)

PRÉSENCE DE L'ACIDE QUINIQUE DANS LES FEUILLES DE MYRTILLE; par M. ZWENGER.

-

Les feuilles de la myrtille (vaccinium myrtillus) contiennent de l'acide quinique; on peut l'extraire de la manière suivante: les feuilles récoltées au mois de mai sont soumises à l'ébullition avec un lait de chaux et la dissolution tirée au clair est précipitée par de l'alcool; il en résulte un dépot gluant que l'on fait dissoudre dans l'eau; on ajoute un peu d'acide acétique puis de l'acétate de plomb neutre afin de précipiter la matière colorante et les autres substances étrangères. Après avoir éliminé le plomb par l'hydrogène sulfuré, on évapore à consistance sirupeuse; le quinate se dépose au bout de quelques jours de repos; on le reprend par l'eau, on ajoute de l'acide sulfurique pour enlever la chaux et on évapore au bain-marie; le résidu sirupeux ayant été repris par l'alcool, il se forme, à la longue, des prismes obliques offrant tous les caractères de l'acide quinique.

(Ann. der Chem. und Pharm. et Journ. de pharm. et de chim., août 1860.)

Hist. nat. médicale et pharm.

NOTE SUR LES OPIUMS de perse, par M. le docteur O. REVEIL, professeur agrégé à la Faculté de médecine et à l'École de phar

macie. L'opium de Perse était à peine connu dans le commerce en France; depuis quelque temps il devient assez abondant; il importe, par conséquent, de rechercher quelle est sa valeur comme médicament et la place qu'il doit occuper en thérapeuti ainsi que, que l'emploi qui pourrait en être fait en pharmacie; divers échantillons de ces opiums m'ayant été remis par différents droguistes, j'ai obtenu, à l'analyse, des résultats qui s'éloignent notablement de ceux que l'on trouve lorsqu'on examine les opiums employés en pharmacie, soit qu'ils proviennent de Smyrne, de Constantinople

ou de tout autre lieu.

Le procédé de détermination de la morphine et de la narcotine que nous avons employé est celui qui a été indiqué par M. Guillermond fils, tel qu'il a été modifié par M. Fordos et par moi.

Dans son Traité des drogues simples (t. III, p. 656), M. Guibourt décrit, sous le nom d'opium de Perse, un échantillon qui lui avait été remis par M. Morson, de Londres; cet opium, qui paraissait venir par la voie de Trébizonde, se présentait sous la forme de bâtons cylindriques ou devenus carrés par leur pression réciproque. Leur poids est environ de vingt grammes; ils sont enveloppés d'un papier lustré maintenu par un fil de coton. M. Guibourt fait remarquer que la pâte, quoique fine et bomogène, offre à la coupe l'aspect de petites larmes agglutinées, mais bien plus petites et plus atténuées que dans l'opium de Smyrne; la couleur est hépatique, l'odeur est vireuse, la saveur est très-amère; il se ramollit au contact de l'air, il fournit par l'eau froide 80,55 d'extrait qui se réduit à 78,76 par une seconde solution par l'eau.

Les opiums dont nous allons parler diffèrent, sous plusieurs rapports, de celui qui est décrit par M. Guibourt; ils se rapprochent par la propriété qu'ils ont d'attirer l'humidité de l'air, par leur saveur amère et leur odeur vireuse.

Opium de Perse en cylindres.

Je dois à l'obligeance de M. Menier divers échantillons de cet opium; tous sont enveloppés de papier lustré, tantôt blanc, tantôt rose, maintenu par un fil de coton. Chaque cylindre pèse assez exactement quinze grammes, leur couleur est brun rougeâtre ou café au lait foncé ; la pàte en est très-fine, compacte, leur odeur est for tement vireuse, surtout lorsqu'on les délaye dans l'eau, il est un peu hygrométrique; leur saveur est très-amère. J'ai vu le même opium chez M. Dorvault, mais celuici était plus foncé en couleur.

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La solution aqueuse de cet opium, traitée par l'alcool anhydre, donne un préci pité floconneux; essayée par le tartrate de potasse et de cuivre, elle donne lieu à une réduction du sel cuivrique qui décèle la présence du sucre dont on peut d'ailleurs constater la présence par le contact de la levure de bière lavée qui détermine la fermentation alcoolique. La détermination de la quantité de sucre a été faite au moyen de la liqueur cupropotassique titrée; nous avons trouvé par ce procédé que les opiums de Perse en cylindres renfermaient en moyenne 15 pour 100 de glycose.

La présence du sucre dans ces opiums, la propriété qu'ils possèdent d'attirer fortement l'humidité de l'air, le poids de chaque cylindre qui est assez exactement de quinze grammes, nous paraissent des preuves suffisantes pour que nous puissions affirmer que ces opiums sont des produits fabriqués et non le résultat de l'évaporation du suc de l'opium; on peut se demander, en effet, quel serait le poids usité en Perse qui répondrait assez exactement à quinze grammes de notre système de poids et mesures. D'un autre côté, nous avons en vain recherché la présence du sucre dans les opiums de Constantinople; dans les opiums de Smyrne, au contraire, nous avons trouvé quelquefois des proportions notables de glycose. La présence de ce corps dans les opiums nous parait être une indication de falsification, car nous n'avons pas trouvé de sucre dans les opiums indigènes extraits du pavot à œillette par MM. Bénard, d’Amiens, Renard, de Puchevilliers, et par nous; ni dans celui préparé avec le pavot blanc à graines pourpres obtenu par M. Aubergier et par M. Collas.

Trois autres échantillons d'opium de Perse nous ont été remis par MM. C. Faure et Darrasse, droguistes à Paris. Ces opiums, indiqués comme d'origine persane, présentaient toutefois des formes différentes; nous rapporterons ici le résultat des analyses que nous en avons faites.

Le premier échantillon était sous forme de pains sphériques, sans enveloppe ni feuille de pavot; on ne remarque pas non plus des fruits de rumex comme cela se voit sur les opiums de Smyrne. Les caractères

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Alcalis organiq. 12= { Morphine. 6,4 P. 100

Narcotine.

5,6

été

Le second échantillon qui nous donné également par MM. C. Faure et Darrasse, est en masses irrégulières d'une couleur hépatique, son odeur est vireuse, sa saveur amère; il est cassant, lisse, compacte, très-hygrométrique; aucune matière étrangère ne l'accompagne; sa solution aqueuse brunit fortement par la potasse et réduit le tartrate cupropotassique; la proportion de sucre trouvée est de 13,9 pour 100.

Lorsqu'on verse de l'ammoniaque dans une solution de cet opium, on obtient un précipité blanc jaunâtre gélatineux trèsabondant; l'alcool y détermine également un précipité floconneux. L'alcool dissout presque en entier cet opium en donnant un liquide visqueux épais, qui, exprimé à travers un linge, laisse un faible résidu; par la filtration au papier, on obtient un résidu plus abondant. Cet opium donne à l'analyse les résultats suivants :

Mat, solub. dans l'eau froide dans l'alcool à 850

Alcalis organiques. 16,15= {

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76,5 93,7 Morphine. 7,1 Narcotine. 9.05

Le troisième échantillon d'opium diffère essentiellement des précédents; il est sous forme de pains plats entourés d'une feuille dont je n'ai pu déterminer l'origine; on y remarque quelques fruits de rumex accompagnés de leur calice; sa couleur est brun rougeâtre, sa saveur et son odeur sont semblables à celles des précédents, il se délaye moins facilement dans l'alcool et dans l'eau; sa structure est d'ailleurs lisse et compacte; sa solution aqueuse noircit fortement par la potasse, et réduit abondamment le tartrate cupropotassique; il réduit en effet une proportion de sel cuivrique correspondant à 31,6 pour 100 de glycose.

Il donne à l'analyse les résultats suivants :

Matières solubles dans l'eau dans l'alcool à 850 Alcalis organiques. 15=

79,20 75,60 Morphine. 5,10 Narcotine. 9,90

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