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toit dans l'Eglife, mais qu'il avoit encore la jambe dehors, lors qu'il lui avoit donné le coup, & qu'ainfi il n'avoit point violé le droit d'afile. Cette fubtilité de la réponse du Soldat fit rire Charles, qui ne jugea pas à propos d'examiner le fait plus à fond. Les vainqueurs firent un prodigicux butin, & s'en retournerent en AuftraAn. 716. fie. Ainfi finit la Campagne de l'année fept cens feize.

An. 717.

Anna'es Metentes, ad an. 717.

Il eft battu

Cette victoire acquit beaucoup de réputation à Charles, ranima le courage des Auftraliens, qui vinrent en foule groffir fon Armée, & il fe trouva en eftat au commencement de la Campagne fuivante,de porter la guerre dans le Royaume de Chilperic. Il paffa la Foreft Charbonniere, & mit tout le païs au pillage jufqu'à Cambray, où Chilperic vint au devant de lui. Ils fe trouverent campez fort près l'un de l'autre en un lieu nommé Vinci, qui eft peut - eftre le Village appellé aujourd'hui Inchi à 3. lieuës de Cambray entre Arras & cette Ville. Charles envoya un Heraut à Chilperic pour lui propofer la paix, à condition qu'on le remettroit en poffeffion du rang & des emplois, que le Duc Pepin fon pere avoit eu dans le Royaume de Neuftrie, qu'il avoit gouverné avec tant de bonheur, de fageffe & d'approbation de toute la

Nation.

Chilperic & le Maire du Palais Rainfroy reçûrent ces propofitions avec indignation, & lui répondirent qu'on n'en eftoit pas là; que s'il vouloit la paix, il falloit qu'il rendift l'Auftralie que fon pere avoit ufurpée fur la Famille Royale de Clovis,, & que devant qu'il fuft vingt-quatre heures, on efperoit le mettre en eftat de n'avoir plus de fi hautes préten

tions.

Chilperic parloit de la forte ; parce feconde qu'il avoit une Armée très-fuperieu

re en nombre à celle d'Auftrafie:mais foir pès dé Cambray: Charles, felon la maxime de fon pere, comptoit moins fur le nombre, que fur la bonté de fes Troupes dont il eftoit feur; car il n'avoit pris avec. lui pour cette expedition que l'élite de fes Soldats, fans fe charger d'une multitude peu difciplinée & plus propre à piller qu'à combattre. Ainfi le lendemain qui eftoit un Dimanche de Carefme & le dix-neuviéme de Mars, la bataille fe donna auprès de Cambray. Elle fut très-opiniaftre & très - fanglante: mais enfin la victoire demeura à Charles, qui après un grand carnage des ennemis, alla ravageant jufqu'à Paris ; & de là retournant fur fes pas marcha droit à Cologne, pour y afflieger Plectrude fa belle-mere, & l'obliger à lui remettre. entre les mains cette Capitale d'Auftrafie.

La reputation que Charles venoit Charles fait de s'acquerir par cette feconde victoi--Clotaire Roy d'Außrafie. re, & l'ardeur d'une Armée victo- Gefta Reg. rieufe qui ne demandoit qu'à com--Franc, c.55battre, déconcerta Plectrude. Elle propofa de s'accommoder, & Charles le voulut bien. Il fut admis dans là Place avec quelques Troupes: mais durant qu'on traitoit, foit par hazard,., foit par les ordres fecrets de Charles, fes Soldats y exciterent une fédition, pendant laquelle s'eftant rendus Maiftres de la Ville, il faliut que Plectrude la lui cedaft avec tous les Trefors du feu Duc Pepin : après quoi il fut. proclamé de nouveau Duc d'Auftralie, & prit ainfi le rang & le titre poffedez par fon pere, avec le Gouvernement de tout le Royaume. Nean-moins par politique, ayant apparemment connu l'inclination des Sei-. gneurs Auftrafiens, & pour avoir le temps d'affermir fon autorité, il leur propofa lui-même de faire un Roy d'Auftrafie, & éleva fur le Trône un Prince de la Famille Merovingienne

dont les anciens Hiftoriens ne marquent point le pere, ni en quel degré de parenté il touchoit aux derniers Rois d'Auftrafie. Il s'appelloit Clotaire. Ce rétablissement fe fit après trente- fept ans d'interregne, à compter depuis la mort de Dagobert, que -nous avons vû regner quelque temps en Auftrafie, depuis fon retour d'Écoffe ou d'Hibernie.

La conduite que le Duc Charles avoit tenuë jufqu'alors, la prudence & le courage avec lequel il avoit furmonté fa mauvaise fortune, fit comprendre à Chilperic & au Maire du Palais quel dangereux ennemi ils avoient dans fa perfonne: car n'ayant pû venir à bout de lui avec toutes les forces des Royaumes de Neuftrie & de Bourgogne, tandis qu'ils eftoient fecourus de celles de Frife, & lors même qu'il n'eftoit pas encore reconnu folemnellement Duc d'Auftrafie, ils conçûrent bien qu'eftant devenu maiftre paisible de tout cet Eftat, ce feroit tout ce qu'ils pourroient faire que de lui refifter. Ils ne pouvoient plus faire fond fur le fecours du Duc de Frife, obligé deformais à vivre en paix avec Charles, dont il avoit tout à craindre, à cause du voisinage, & contre lequel on ne voit pas en effet qu'il euft repris les armes depuis la victoire d'Amblef. Ils fongerent donc à lui fufciter un autre ennemi, qu'ils avoient eux-mêmes jufqu'alors confideré comme tel à leur égard. Mais on a vû des Souverains dans tous les fiecles oublier les plus fenfibles injures, pour en venger d'autres, qui ne leur paroiffoient plus grandes, que parce qu'elles eftoient plus nouvelles.

Sous les Regnes précedens, les Gafcons quittant leurs Montagnes, & ne fe contentant plus de faire des courses fur les Terres de France, s'ef toient rendus maistres du païs & des Villes entre la Mer, la Garonne & les

Pyrenées. Ce païs s'appelloit auparavant la Novempopulanie, à caufe des neuf Peuples ou neuf Cantons qu'il renfermoit. Il a porté depuis le nom de Gascogne, du nom de fes vainqueurs, & ce n'eft que vers le temps dont je parle, que noftre Hiftoire commence à l'appeller ainfi. Les Gafcons avoient alors à leur tefte un Duc nommé Eude, que les uns font François, & les autres Efpagnol. Quel qu'il fuft, c'eftoit un très-habile homme, qui avoit profité des guerres civiles de France, & du mauvais estat du Gouvernement, pour fe faire non feulement Duc des Gafcons, abfolu & indépendant, mais même Duc d'Aquitaine, c'eft-à-dire d'une très- Annales Me grande partie des païs de delà la Loi- Liber Mire re: car nos anciens Hiftoriens lui don- cul. S.Auftregefil. nent cette qualité. Il poufla fes conqueftes jufques dans le Berri du temps du Duc Pepin, & fe rendit maistre de Bourges. Il poffeda le Poitou, la Xaintonge, le Limoufin, l'Albigeois, l'Auvergne, & excepté Tours, il laiffa très-peu de chofe aux François

au-delà de la Loire.

tenfes.

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Franc.

$7.

cap.

grande partie du chemin. Il vint au devant d'eux jufqu'en deça de Reims, dont l'Evêque lui refufa l'entrée, & ils furent fort furpris d'apprendre que Charles eftoit campé entre cette Ville-là & Soiffons. Cette nouvelle confterna leur Armée, & à peine Charles parut avec fes Troupes, que fans rendre prefque de combat, elle fe débanda. Il profita de cette terreur: il les pourfuivit jufqu'à la Seine, & Chilperic ne fe croyant pas en fureté à Paris, en partit avec ce qu'il put emporter de fes-Trefors, & fe fauva avec Eude au-delà de la Loire.

Charles paffa la Seine fans oppofition, tout fuyant devant lui, & s'avança jufqu'à Orleans. De là il envoya au Duc Eude, lui dire que s'il ne lui remettoit le Roy entre les mains, il l'iroit chercher jufques dans l'Aquitaine & dans la Gafcogne, & y mettroit tout à feu & à fang. Eude Gefta Reg. n'ayant point de meilleur parti à prendre que celui de la paix, répondit aux Envoyez de Charles, qu'il le An. 719. prioit de ne point entrer plus avant dans le païs, & qu'il eftoit refolu de lui donner toute la fatisfaction qu'il fouhaiteroit. En effet, après quelques délais & quelques negociations, Eude au commencement de l'année fuivante remit Chilperic entre les mains de Charles, avec toutes les richeffes que ce Prince avoit emportées de Paris dans fa fuite, & acheta à ce prix l'amitié de ce redoutable ennemi & la paix. Charles fe trouva par là à peu près dans le même eftat & avec la même puiflance, que le Duc Pepin

fon pere avoit eue dans fa plus haute élevation. Le Maire du Palais Rainfroy ne laiffa pas d'avoir encore pendant quatre où cinq ans, un parti affez confiderable pour lui: mais enfin Charles l'avant affiegé dans Angers, l'obligea à capituler, & à fe contenter du Comté d'Angers, qu'il lui laiffa pour le refte de fa vie. Charles traita Chilperic avec beaucoup. d'honnefteté & de refpect, & toûjours en Roy de France, mais à condition que lui-même auroit toute l'autorité du Gouvernement, qu'il avoit regardée auparavant comme un heritage, & qu'il regardoit alors comme une conquefte.

taire

& de Chilperu.

Vers l'an

Labbe, Mé

Sur ces entrefaites Clotaire qui fai- Mort de Clo foit le perfonnage de Roy d'Auftrafie, mourut : & Chilperic eftant auffr mort à Noyon quelque temps après, Charles mit en leur place un Prince 721 de la Maifon Royale, appellé Thieri langes Cude Chelles; parce qu'il avoit efté éle- rieur, p.439° vé en ce lieu-là. Deux Chartes anciennes faites au nom de ce Prince l'une à Heristal, & l'autre à Zulpic dans le Royaume d'Auftrafie, montrent que Charles - Martel reconnut Thieri non-feulement pour Roy de Bourgogne & de Neuftrie, mais encore pour Roy d'Auftrafie. Une autre Charte de l'Abbaye de S. Bertin fait Thieri fils de Dagobert I I. Il eftoit encore au berceau quand fon pere mourut, & ainfi après la mort de Chilperic, qui ne regna que cinq ou fix ans, il n'en pouvoit pas avoir plus de fept ou huit.

SOMMAIRE

D

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Iverfes expeditions de Charles. Il défait Eude Duc d'Aquitaine. Les Sarrazins passent en Espagne & s'en rendent les maiftres. Ils font défaits par Eude auprès de Touloufe. L'Armée du Duc d'Aquitaine eft taillée en pieces par Abderame. Charles défait entierement celle des Sarrazins entre Tours & Poitiers. C'eft de cette victoire que Charles a tiré fon nom de Martel. Il défait les Frifons. Mort du Duc d'Aquitaine. Mort de Thieri. Charles bat encore les Frifons. Soulevement en Provence contre Charles. Il prend Avignon. Il met en déroute les Sarrazins proche de Narbonne. Il défait les Saxons. Premiere occafion de la puissance temporelle des Papes. L'Empereur Leon fait publier un Edit contre les Images. Conciles assemblez à Rome fur ce fujet. Le Pape Gregoire demande du fecours à Charles-Martel. Il lui envoye une Ambaffade. Mort du Pape, de l'Empereur & de Charles-Martel. Caractere de Charles-Martel. Il partage

Tome I.

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l'Etat entre Carloman & Pepin fes fils. Soulevement dans le Royaume. Fin de l'Interregne. Childeric eft créé Roy d'une partie de l'Empire François. Concile des Eftines. Odilon Duc de Baviere eft battu par Carloman & par Pepin. Carloman entre dans la Saxe, il cede fes Eftats à Pepin, & fe retire dans un Monaftere. Grippon frere de Pepin de Carloman fe refugie en Saxe. Il fe fait proclamer Duc de Baviere. Il eft pris par Pepin qui lui donne un appanage.

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