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fa Vitâ S. Vilfridi,

Quelques années après fon rétabliffement, il eût occafion de faire paroître la reconnoiffance qu'il confervoit pour fon bienfaiteur. Saint Wilfrid avoit efté fait Evêque d'York: Egfrid Roy de cette partie d'Angleterre,l'avoit toûjours fort honoré & fort écouté; mais la Reine Ermenburge, dont le faint Evêque reprenoit quel quefois la conduite avec beaucoup de liberté, le lui rendit odieux, l'engagea à le chaffer de fon Eglife, & à le perfecuter avec tant d'acharnement,qu'il fut obligé de fe fauver au-delà de la mer. Il n'y fut pas en fûreté; car le Roy d'Angleterre envoya des Ambaffadeurs à la Cour de Thieri avec de grands prefens, pour engager Ebroin à ne pas laiffer paffer Wilfrid qui vouloit fe refugier à Rome, & à le faire affaffiner en chemin : mais le Saint n'aborda pas en Neuftrie, les vents l'ayant pouffé en Frife alors gouvernée par Adalgife Duc des Frifons. Ebroin écrivit au Duc fuivant les intentions du Roy d'Angleterre: mais ce Prince, tout Payen qu'il eftoit, & qui dès-lors apparemment avoit fecoué le joug de la domination Françoife, eût horreur du crime qu'on lui propofoit, jetta la lettre au feu, & renvoya fans autre réponse ceux qui la lui avoient apportée. Le Saint prit fa route par le Royaume d'Auftrafie, & vint à la Cour de Dagobert. Ce Prince qui lui devoit tout, le reçût avec tous les honneurs & toute la tendreffe poffible, fit tout ce qu'il put pour l'arrêter dans fes Etats, lui offrit des maifons, des terres, & enfin l'Evêché de Strasbourg. Il refufa toutes ces offres,& continua fon voyage vers Rome, toujours défrayé & honoré

dans tout l'Etat de Dagobert.Ce Prin ce écrivit à toutes les Villes de fa domination, qu'il vouloit qu'on y reçût Wilfrid comme celui qui lui avoit fauvé la vie, & à qui il eftoit redevable de fa Couronne.

Dagobert eft alainé à la chaffe.

In Vita S.

Vers l'an

Dagobert, après un regne de fept à huit ans, la guerre s'eftant allumée entre Thieri & lui, fut affaffiné à la chaffe dans la Foreft de Voivre par une Salaberge. troupe de factieux, du nombre de ceux qui compofoient le parti qu'Ebroin avoit toûjours fomenté dans ce Royaume-là. C'eftoit un refte de la faction du Maire Grimoald * par qui ce Prince avoit efté autrefois relegué en Ecoffe.

Quelques anciens monumens donnent à ce Dagobert un fils nommé Sigebert,que l'on fuppofe avoir efté tué avec lui, & ainfi le trône d'Auftrafie demeura vacant. Le Duc Pepin & le Duc Martin coufins germains, qui eftoient de la famille du feu Maire Grimoald, furent declarez Ducs ou Gouverneurs du Royaume par les Auftrafiens; & la crainte de tomber fous la tyrannie d'Ebroin, fit que ces peuples ne voulurent point reconnoître Thieri pour Roy d'Auftrafie.

679.

Ce fut là une dangereufe atteinte Pepin le Gras que l'on donna aux droits de la Famil- fe rend maitre de l'Auf le Royale, en démembrant de la Mo- trafic. narchie, une partie aufli confiderable

que
celle-là. La guerre à cette occa-
fion s'alluma entre les deux Etats.D'a-

bord les Ducs ou Gouverneurs furent

Chronica Fredegar.

défaits, & Martin y périt par la perfi-
die d'Ebroin. Pepin par la mort de
Martin devint l'unique Duc ou Gou-
verneur d'Auftrafie, & employa dans
la fuite à ruiner l'autorité Royale, Fredegar
tous les grands talens d'efprit, de
pru-

Quand Saint Vvilfrid revenant du Concile de Rome repafla par les Etats de Dagobert qui venoit d'estre
affafiné, il penfa lui-mefme eftre tué par les mefmes aflaffins, qui lui dirent en le menaçant, que c'eftoit
lui qui leur avoit ramené d'Ecofle Dagobert qu'ils avoient chaflé du Royaume. In vita S. Vvilfridi, cap. 4.
De plus Pepin d'Herittal eftoit fils de la fœur de Grimoald, qui avoit relegué Dagobert, & il eftoit vers ce
temps là tout-puiffant en Auftrafie. Tout cela verifie la circonstance que j'ai marquée, que Dagobert avoit
efté tué par un refte de la faction de Maire Grimoald,

continuat cap. 97.

cap. 97

1

683:

Continuar.

dence, d'adreffe, de courage, qu'il poffedoit au fouverain degré. Ce ne fut pas par l'avantage de fa taille qu'il fçut impofer aux François. Il eftoit fort replet, d'où lui vint le furnom de Pepin le Gros: on l'appella auffi Pepin d'Heristal, du nom d'un Palais qui lui appartenoit, & que porte encore aujourd'hui le Bourg où eftoit ce Palais fur le bord de la Meufe à une lieue au-deffus de Liege; on l'appelle auffi quelquefois dans l'Hiftoire Pepin le Jeune, par rapport à fon ayeul autrefois Maire du Palais d'Auftrafie, & quelquefois Pepin leVieux,par rapport à fon petit-fils qui fut enfin Roy. Pepin d'Heristal le fut lui-mefme en effet, & fans en vouloir porter le nom, il en eut toute l'autorité, non feulement en Auftrafie, mais encore avec le temps dans tout l'Empire François.Il s'en attira tout le pouvoir, non pas comme Ebroin par la terreur & par une conduite tyrannique, mais par la douceur & fous le nom de Pere des Peuples. Pour arriver jufques-là, la fortune lui prefenta des conjonctures heureufes dont il profita.

Le Maire du Palais Ebroin, après. Vers l'an avoir pendant plus de vingt-cinq ans maiftrifé la France, eut enfin le fort Fredeg c.8 ordinaire aux hommes de ce caractere qui abusent de leur autorité; il fut affaffiné par un Seigneur nommé Ermenfroy qu'il perfecutoit, & qui le prévint. Après fa mort Thieri eut en peu d'années plufieurs Maires du Pa-lais les uns après les autres, un def quels nommé Giflemar fit à diverfes reprises la guerre au Duc Pepin ; & la maniere dont ce Duc la foûtint, ne fervit qu'à affermir fon autorité en Auftrafie lui-même peu de temps après prit la refolution d'aller attaquer fes ennemis; il eut une raifon de le faire qu'il crut bonne, ou du moins qui lui fervit d'un pretexte fort plauGible..

La perfecution qu'Ebroin avoit faite aux Grands de l'Etat en avoit obligé plufieurs à fe refugier en Auftrafie. Dans l'élection du dernier Cap.994Maire nommé Bertaire, les fuffrages avoient efté fort partagez, & la brigue pluftoft que le merite l'avoit emporté. Quelques-uns de ceux qui s'étoient oppofez à l'élection de Bertaire, apprehendant fa vengeance, s'eftoient aufli venus jetter entre les bras de Pepin. Tous ces exilez, qui ne pouvoient efperer de changement dans leur fortune, que par celui du Gouvernement, follicitoient continuellement Pepin de faire la guerre à Thieri. Il fe rendit enfin à leurs in-ftances tant de fois réïterées, & leur promit de leur faire faire juftice par les armes, fi on refufoit de la leur faire autrement. Il envoya une Ambaffade à Thieri, le priant de recevoir en grace ceux que la perfecution d'Ebroin avoit obligez à quitter leur pa-trie, & de les remettre en poffeffion des biens qu'on leur avoit injuftement enlevez. Ce Roy, par le confeil_de Bertaire, reçût fort mal ces Envoyez, & leur répondit avec hauteur, que Pepin euft un peu de pa-tience; qu'il n'auroit pas la peine de renvoyer les rebelles, dont il fe declaroit fi hautement le Protecteur; tentes ad an que devant qu'il fuft que devant qu'il fuft peu de temps on 689. iroit les lui demander, & les prendre jufques chez lui..

Les Envoyez revenus en Auftrafie, ayant rendu compte à Pepin de la reponfe de Thieri, ce Duc fit une Affemblée des principaux Seigneurs de l'Etat, leur expofa la conduite qu'il avoit tenue dans cette affaire, la fierté & les menaces des Neuftriens, l'op preffion où fe trouvoient tant de perfonnes de qualité par l'infolence & par la dureté,des Maires du Palais, & enfin le peril d'une invafion où fe trouvoit l'Auftrafie, fi on ne préve

Annales Mee

Ibid.

Il affemble The Armée.

Ibid.

noit l'ennemi.Les Seigneurs ayant de-
liberé fur l'expofé du Duc, conclu-
rent à la guerre, & qu'il eftoit plus à
de la porter dans le pais enne-

propos
mi, que de l'attendre en Auftrafie.

Pepin ravi de cette refolution fort conforme à fes grands deffeins, eut bien-toft affemble une groffe Armée, à la tefte de laquelle il marcha jufqu'à la Foreft Charbonniere, qui féparoit le Domaine de Thieri d'avec l'Auftrafie. J'ai dit ailleurs, que cette Forest eftoit une partie de la Foreft d'Ardennes entre la Meufe & l'Efcaut, dont le Bois de Soignies dans le Brabant eft encore un refte. Eftant arrivé là il affembla les principaux Officiers de fon Armée en pleine campagne ; toutes les troupes eftant fous les armes, il leur protesta tout de nouveau, que ce n'étoit point l'ambition qui lui faifoit entreprendre cette guerre; qu'il y eftoit follicité non-feulement par les plus grands Seigneurs de Bourgogne & de Neuftrie, qu'ils voyoient parmi eux, & qui avoient efté obligez de s'enfuir & d'abandonner leur patrie & leurs biens pour fauver leur vie ; mais encore par les Evêques & par le Clergé de ces deux Royaumes, dont on avoit dépouillé les Eglifes, pillé les terres. & les maifons, fans qu'ils euffent pû jufqu'alors obtenir juftice; qu'ils alloient combattre pour la défenfe de plufieurs innocens, & en faveur de plufieurs Saints, qui attireroient fur eux la protection du Ciel. Il fit en même-temps faire une priere publique, pour invoquer le fecours du Dieu tout puiffant, & fe mit en marche pour paffer la Foreft. Quand ils F'eurent paffée, fans que l'ennemi paruft pour leur difputer l'entrée dans le païs, l'Armée s'y répandit de tous coitez, fit par tout le ravage, s'avança jufqu'à la Riviere de Somme, & fe Textticum. Campa à Teftri Village entre faint Quentin & Peronne fur la petite Ri

Tome I.

viere de Daumignon.

Thieri s'eftoit déja avancé jufqu'à la Somme avec une Armée beaucoup plus nombreuse que celle de Pepin, & pour ne pas laiffer entrer les Auftrafiens plus avant, il avoit paffé cette Riviere. Il fe vint pofter vis-à-vis d'eux fur l'autre bord de la Riviere de Daumignon, qui toute petite qu'elle eft, eftoit difficile à paffer à Teftri. Les Auftrafiens eftoient campez fur le bord du cofté du Nort, & les Neuftriens fur le rivage oppofé.

Pepin pour paroiftre avoir mis Thieri entierement dans fon tort, lui envoya encore demander la paix; mais toûjours à condition que l'on fatisferoit les Evêques, & qu'on rétabliroit dans fes biens la Noblesse exilée. Il lui fit même offrir une groffe fomme d'argent pour les frais de la guerre, & pour le dommage caufé par fes Troupes: preft, difoit-il, à fe retirer pour épargner à la France une guerre civile, & le fang de tant de braves gens d'une même Nation, qui eftoient fur le point de s'égorger les

uns les autres.

Il s'attendoit bien à eftre refufé, connoiffant Bertaire Maire du Palais,. homme fier & inflexible,qui ne manqueroit pas de tourner cette propofition à fon avantage. En effet Thieri ayant mis l'affaire en deliberation, Bertaire foûtint qu'il n'eftoit ni de l'honneur du Roy, ni du bien de l'Etat de l'écouter; que c'eftoit une infolence à Pepin de prendre en main les interefts des rebelles contre leur Souverain legitime; que lui-même eftoit coupable du crime de félonnie par fon ufurpation du Royaume: d'Auftrafie ; qu'il avoit peur fur le point de s'en voir châtié ; qu'engagé dans un mauvais pas il vouloit recu-ler en arriere; qu'on avoit fur lui l'a-vantage du nombre, & que ce feroit trahir l'Etat de le laiffer échapper..

Rr

Ibid

Ilid

Il met en déroute celle de Thieri.

Ce fentiment fut fuivi, & l'on renvoya avec fierté les Deputez des Auftraliens. Ainfi l'on ne fongea plus de part & d'autre qu'à fe préparer à la bataille.

Pepin ayant efté reconnoiftre le terrain, réfolut de fe faifir d'une colline qui eftoit au-delà de la Riviere, à la droite & du cofté des ennemis, & d'y ranger fon Armée. Ce pofte eftoit d'affez difficile accès, & avantageux pour attendre l'attaque comme il prétendoit le faire, à moins que le fuccès du ftratagême qu'il preparoit, ne lui fift changer de deffein. Il fit decamper pendant la nuit fon Armée fans trompette, la mena en remontant la Riviere à un gué par où il la fit paffer. Il laiffa dans le Camp quelques Troupes jufqu'à la fin de la nuit, pour entretenir les feux, & leur ordonna qu'en decampant pour venir joindre le refte de l'Armée, ils miffent le feu à quelques tentes, à quelques chariots, & à de mechans bagages qu'on avoit laiffez -là exprès. Dès le grand matin, vers le temps qu'on laiffoit éteindre les feux, les Efpions de Thieri s'eftant approchez du Camp, n'y entendirent aucun bruit ; & s'eftant avancez ne virent perfonne, mais feulement des chariots qui brûloient. Ils retournerent auffi-toft donner avis de ce qu'ils avoient vû, & dirent que les Auftrafiens s'eftoient retirez pendant la nuit, & avec tant de precipitation, qu'ils avoient abandonné une partie de leurs bagages, où ils avoient mis le feu.

Sur cela on fait lever le Camp avec beaucoup de precipitation, pour faire paffer la Riviere à l'Armée, & se mettre aux trouffes de l'ennemi. La chofe s'executoit avec très-peu d'ordre, par la trop grande ardeur des Soldats & des Generaux, qui craignoient que leur proye ne leur ne leur

bid.

échapaft; lors que l'on commença voir paroiftre fur le haut de la colline les premieres Troupes des Auftrafiens, qui s'avançoient en bataille, & qui en mefme-temps occuperent toute l'etendue du terrain en defcendant. Cette vûë furprit Bertaire, qui envoya auffi - toft ordre à ceux qui avoient paffé la Riviere, de la repaffer promptement. Mais Pepin profitant de la confufion, vint fur le champ ad an. 690. charger les ennemis avec tant de furie & de fuccès, qu'après quelque refiftance il les mit entierement en deroute. Quantité de Seigneurs des Royaumes de Neuftrie & de Bourgogne qui firent ferme au premier choc, demeurerent fur la place; on fit un grand carnage des Soldats, & tout le refte s'abandonna à la fuite. Bertaire fut tué par des Soldats même de fon Armée. Pepin fuivant toûjours, & diffipant tout ce qui se rallioit, vint fe prefenter devant Paris, qui lui ouvrit fes portes: les Bourgeois lui livrerent le Roy mefme & toutes fes finances, & Pepin maiftre de la perfonne du Roy, le devint de tout l'Etat.

te Victoire,

Annales Metenfes.

L'ancien Auteur de qui nous ap- Suiterdecer prenons ce détail, ne fait point de difficulté d'attribuer dès-lors à Pepin la qualité de Prince, & lui tient grand compte de ce qu'il voulut bien laiffer à Thieri, le nom de Roy : c'estoit fans doute plûtoft un effet de fa politique, que de fa modeftie. Un autre ajoûte, que depuis ce temps - là les Rois Merovingiens ne conferverent pas mefme avec le nom de Roy les honneurs qui eftoient dûs à ce rang. Du temps du premier Pepin, nom fatal à la famille de Clovis, toute l'autorité Royale paffa aux Maires du Palais; ce qui n'empefchoit pas que tout ne fe fift au nom des Rois. Ils recevoient les Ambaffadeurs des autres Rois, ils afliftoient au Confeil

Erchamber

tus.

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Ibid.

Ibid.

d'Etat, les Grands du Royaume leur faifoient encore la cour. Čes Princes alloient encore à la tefte des Armées : mais depuis la victoire de ce fecond Pepin, Thieri ne tira plus guere d'autre avantage de fon nom & de fa qualité de Roy, qu'une bonne table, une oifiveté & un repos apparemment auffi conforme à fon naturel, qu'indigne de fon rang & de fa naiffance. Depuis lui les Rois ne parurent plus en public, que certains jours de l'année, traifnez dans un chariot attelé de bœufs pour aller plus doucement. Ils eûrent des Gardes moins par honneur, que pour empêcher que perfonne n'approchât d'eux fans la permilion du Maire du Palais. Enfin Pepin à la faveur de fa victoire, & de l'attachement que les Auftrariens avoient pour lui, & par fa douceur & par fes manieres engageantes, par le zele qu'il fit dès-lors paroiftre pour le bien de l'Etat & de l'Eglife, accoûtuma les François à un joug, qu'ils avoient regardé jufqu'alors comme indigne d'eux.

Après qu'il eut tiré un fruit fi important de fa victoire, il se fit grand honneur de fa moderation dans tout le refte. Il fe referva peu de chofes du grand butin qui avoit efté fait après la bataille, & en fit liberalement la diftribution à toute l'Armée. Un grand nombre d'ennemis s'eftoient refugiez en divers afiles, & fur-tout à S. Quentin dans l'Eglife dediée à ce Saint, & à Peronne dans celle de 5. Fourci. Les Abbez de ces lieux vinrent lui demander grace pour tous ces refugiez. Il la leur accorda avec bonté, & mefme après leur avoir fait faire à tous ferment de ne jamais rien faire contre fes interefts, il les remit en poffeffion de leurs biens.

Quand il vit tout foumis, il entra avec beaucoup d'application dans le détail du Gouvernement & de la Po

lice du Royaume, mit de l'ordre dans les finances, & de la difcipline parmi les Troupes,& reforma quantité d'abus dans tous les differens Etats. En peu de temps la France changea de face, & on n'y vit jamais plus d'ordre & plus de tranquillité.

Tant de belles chofes faites en fi peu de temps lui attirerent l'admiration & le refpect de tous les François, & les benedictions des peuples opprimez depuis tant d'années par les Maires du Palais, vexez par les Gouverneurs des Villes & des Provinces, expofez au pillage pour les querelles particulieres, que les Seigneurs avoient fans ceffe les uns contre les autres mais il vit bien qu'il falloit quelque chofe de plus vif & de plus éclatant, pour entretenir & augmenter l'eftime qu'on avoit de lui par-tout, pour occuper les efprits inquiets de la Nation, & leur ofter le loifir de faire certaines reflexions dan gereuses à une nouvelle domination telle que la fienne.

Depuis le regne de Clovis II. en Neuftrie & en Bourgogne, & celui de Sigebert en Auftrafie, une grande partie des Nations frontieres de la France foumifes de tout temps au Tribut & à l'Hommage, avoient fecoüé le joug, & prenant occafion de la foi blefle du Gouvernement, s'eftoient remifes en poffeffion de leur liberté toute entiere. C'eft ce qu'avoient fait les Saxons, les Frifons, les Allemans, les Sueves, les Bavarois, les Bretons & fur-tout les Gafcons, qui s'eftoient emparez d'une partie de l'Aquitaine.

Tandis que Pepin n'eftoit encore que Duc d'Auftrafie, il avoit dompté les Saxons, les Bavarois, & les Sueves: mais il n'avoit pû encore venir à bout des autres fur cette frontiere. Il reprefenta fortement aux Seigneurs François le deshonneur que cela faifoit à la Nation, & leur déclara que

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