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Mort de Da

gobert.

An.638.

Dagobert ne jouit pas long-temps de cette paix qu'il avoit procurée à tout fon Eftat. Il tomba malade fur la fin de l'année fuivante, & mourut d'une diffenterie le dix-neuviéme de Janvier de l'an 638. à Epinay, Maifon de plaifance fur la riviere de Seine auprès de Paris.Il fut enterré à l'Abbaye de S. Denis, qu'il avoit enrichie pendant fon Regne de quantité de Terres, & ornée de prefens magnifiques, dont on en voit encore quelques-uns aujourd'hui dans le Trefor de cette Abbaye. Il n'avoit au plus que trentecinq à trente-fix ans. Il fut d'abord adoré de fes Sujets, enfuite les impofts dont il les chargea pour fournir à fes dépenfes & à fes débauches exTom. 3. P. ceffives l'en firent haïr, il en fut neanmoins regretté & pleuré après fa mort. Il travailla & fit travailler à l'exemple de fes prédeceffeurs, à la correction des Loix des diverfes Nations foumises à l'Empire de France. Les grandes aumônes qu'il faifoit,même au milieu de fes déreglemens, me paroiffent un plus folide fondement de croire que Dieu lui fit mifericorde, que les vifions dont parle le Moine Anonime de S. Denis, qui ne véberti Regis c. cut & n'écrivit que long-temps après. La datte de la mort de Dagobert fixée par noftre ancien Hiftorien à la feizième année de fon Regne, rend ici

118.

Gefta Dago

45.

fort incertaine la Chronologie de l'Hiftoire de France. La raison de cette incertitude & des differens qu'elle a caufez entre les Sçavansa, eft que Dagobert ayant efte fait Roy d'Auftrafie du vivant de fon pere Clotaire,

on doute fi cette feizième année doit fe compter depuis le commencement de fon Regne en Auftrafie, ou depuis la mort de Clotaire, lorfqu'il fut reconnu pour Roy de prefque tout l'Empire François. Il y a de fortes raifons de part & d'autre qui ont fait le fujet de plufieurs Differtations, dont les uns mettent la mort de Dagobert fix ans plus tard que les autres, parce qu'il regna fix ans en Auftrafie du vivant de fon pere. Je fuis la fupputation de ceux qui comptent les feize ans à commencer depuis qu'il fut fait Roy d'Auftrafie, & qui ne lui en donnent que dix depuis la mort de Clotaire fon pere & fon prédeceffeur. Ce fentiment me paroift affez bien eftabli, & c'est en le fuivant que je place en 638.la premiere année de Clovis II. fon fucceffeur dans le Royaume de Neuftrie & dans celui de Bourgogne, & pareillement la fixiéme de Sigebert dans le Royaume d'Auftrafie, où fon pere Dagobert l'avoit fait proclamer Roy dès l'an 632.

« Henschenius de tribus Dagobertis, Chifflet de Annis Dagoberti, Mabillon in Sæcul. Benedi&

292

SOMMAIRE

E

DES

REGNES

DE CLOVIS II. ET DE SIGEBERT II.

Tat florissant de la France fous les Regnes de Clotaire & de Dagobert. Sa Decadence. Clovis eft reconnu Roy de Neuftrie & de Bourgogne. Mort de Pepin le Vieux. Revolte de Radulfe Duc de Turinge. Son Armée est défaite. Il bat une partie de celle de Sigebert, &fait fa paix. Mort de Sigebert & de Clovis. Leur caractere. Grimoald fait enlever Dagobert fils de Sigebert, & éleve le fien fur le Trône.

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A France comme tous les autres Etats a eu fes viciffitudes, fes periodes d'élevation & fes décadences. Sous les deux Regnes precedens elle fe vit à

un point de grandeur & de puiffance où elle n'avoit jamais efté jufqu'alors, tranquille au dedans, redoutée au

dehors & dans l'affluence de toutes fortes de biens. Rien n'eftoit plus brillant que les Cours de Clotaire & de Dagobert. L'or & les pierres précicufes y eftoient en abondance, & l'on ne parle dans les Histoires de ce temps-là que de la magnificence,pour ne pas dire du luxe de la Cour de France.

Saint Eloy qui n'y vint qu'avec la Vita S. Eliqualité d'Orfevre & d'excellent ou- 6 per S. Au

vrier en or & en argent, y portoit, avant que de fe donner entierement à Dieu, des ceintures d'or garnies de pierreries. Il fit à Clotaire un fauteuil d'or maffif; & Dagobert dans une Affemblée generale des Seigneurs de fon Etat qu'il tint dans une de fes Maifons de plaifance, † eftoit aflis fur In Palatio Bigargin. un Trône d'or. Dans nos Hiftoires Getta Dago- Ecclefiaftiques il eft fait mention de Temples magnifiques & de Monafteres bastis alors par les Rois & par les particuliers & en très-grand nombre. Tout cela fuppofoit de grandes richeffes & dans le Trefor du Prince & dans tout l'Etat.

berti. c.40.

Sa decadense.

Maire du Palais.

Mais cet éclat d'une fi floriffante Monarchie va commencer infenfiblement à s'obscurcir par la foibleffe des Princes que nous allons voir fur le Trône, qui laifferent prendre trop d'autorité à ceux qui les gouvernoient, & qui gouvernoient en même temps leur Etat, en ne leur laiffant que le nom de Roy. De-là on vit renaiftre les guerres civiles & les revoltes des Frontieres: il fe fit des démembremens de Provinces entieres, qui fecoüerent le joug, & tout cela aboutit enfin avec le temps à une révolution, où la Couronne enlevée de deffus la tefte du Souverain fut mife fur celle d'un Sujet affez ambitieux pour la recevoir, d'un affez grand merite pour la porter avec dignité, affez heureux pour fe la conferver fans envie, & pour la rendre hereditaire dans fa Maison à une longue pofterité.

Les Maires du Palais furent ceux dont le pouvoir parvint jufqu'à ce point au préjudice de l'autorité Roïale. Le nom de cette Charge ne paroift point dans l'Hiftoire de Gregoire de Tours fous le Regne de Clovis, ni fous les Regnes de fes fils, mais feulement fous celui de fes petits-fils. Il me femble neanmoins qu'elle n'eft

gueres moins ancienne, que l'établiffement de la Monarchie dans les Gaules. Quand il en eft fait mention fous le Regne de Sigebert Roy d'Auftrafie & petit - fils de Clovis, ce n'est point pour en marquer l'inftitution ; mais il y en eft parlé comme d'une Charge déja établie, que l'on fongeoit Turon. 16, à remplir d'un Sujet qui le meritast, & elle eftoit dans le Royaume de Hift. epit. Bourgogne dès le temps du Roy 89. Gondebaud, c'eft-à-dire au temps de gundionum. Clovis même.

Le pouvoir du Maire du Palais ne fut pas toûjours le même, mais il augmenta avec le temps. Sous Clotaire II. & fous fes coufins les Rois de Bourgogne & d'Auftrafie petitsfils de Brunehaut, on commence à les voir à la tefte des Armées. Après la mort de Dagobert ils gouvernerent en Neuftrie & en Auftrafie durant la minorité des deux fils de ce Prince,& depuis ce temps - là le Miniftere demeura attaché à cette dignité. Ils eurent enfuite affez de credit pour la rendre comme hereditaire dans leurs familles. Enfin ils gouvernerent feuls, fourniffant aux Princes des plaifirs pour les occuper, tandis qu'ils s'attiroient toutes les affaires de l'Etat, à peu près comme nous avons vû de nos jours les Grands Vifirs à Conftantinople gouverner fous le nom de quelques Empereurs Turcs, qui n'avoient prefque nulle connoiffance des affaires de leur Empire, & cette autorité des Maires dura jufqu'au temps que l'un d'eux eftant monté fur le Trône, fe garda bien de laiffer prendre à fes Miniftres, une autorité dont il connoiffoit par experience les dangereufes fuites. Voilà ce que c'eftoit que ces Maires du Palais, dont nous allons fouvent faire mention dans la fuite de cette Histoire jufqu'à la fin de la premiere Race des Rois Frauçois.

c.y.

Gregor.

Fredeg. in

Lex Bur

Clovis eft reconnu Roy de Neuftrie & de Bourgogne.

An. 638. Fredegar. Chronic. c. 79.

Cap. 80.

Dagobert avant que de mourir avoit fait venir à Epinay un de fes Miniftres nommé Aga, dont il avoit depuis long-temps éprouvé la prudence, la fidelité & l'attachement pour la Famille Royale. Il lui recommanda la Reine Nantilde & le Prince Clovis fon fils, & le chargea du Gouvernement des Royaumes de Neuftrie & de Bourgogne conjointement avec la Reine pendant la minorité de ce Prince. Aga, s'il n'eftoit pas dès lors Maire du Palais, le fut peu de temps après. Il convoqua auffi-toft les Seigneurs du Royaume de Neuftrie & de celui de Bourgogne à Mafolac, Maifon de plaifance du Royaume de Bourgogne, où Clovis II. du nom fut falué Roy des deux Royaumes. Plufieurs de fes Sujets lui prefenterent là des Requêtes pour rentrer dans leurs biens, qu'ils prétendoient que le feu Roy avoit injuftement ufurpez ou confifquez. Le Maire du Palais qui jugea qu'il falloit dans ce commencement de Regne, contenter tout le monde autant qu'il feroit poffible, les en remit en poffeffion.

Le Duc Pepin eftoit Maire du Palais d'Auftrafie, & Dagobert l'avoit toûjours retenu pendant fon Regne auprès de lui en Neuftrie, auffi-bien que plufieurs autres Ducs d'Auftrafie; foit qu'il les cruft utiles dans fon Confeil, foit qu'il apprehendaft la trop grande autorité qu'ils avoient en leur païs. Ce Duc & les autres ne virent pas pluftoft le Roy mort, qu'ils retournerent en Auftrafie, & rendirent tous hommage à Sigebert fils aîné de Dagobert comme au maiftre du au maistre du Royaume, dont fon pere l'avoit mis en poffeffion depuis quelques années. Pepin avoit toûjours efté fort uni d'intereft avec Cunibert Evêque de Cologne, que Dagobert avoit donné pour Miniftre au jeune Roy Sigebert; de forte qu'il fut admis au Gouverne

ment de l'Etat conjointement avec l'Evêque,& aux fonctions de fa Charge de Maire du Palais d'Auftrafie, qui femble avoir efté jufqu'alors exercée comme par Commiffion par le Duc Adalgife. Sigebert avoit alors environ

onze ans.

Peu de temps après des Ambaffadeurs d'Auftralie vinrent à la Cour de Clovis, pour lui demander & à la Rei ne Nantilde, la part qui appartenoit à leur Maiftre, des biens meubles & des Trefors que le feu Roy avoit laissez en mourant: c'eftoit apparemment fuivant la difpofition qu'il en avoit faite dans fon Teftament; car les Miniftres de Clovis regarderent cette demande comme jufte, & l'on convint de part & d'autre d'une conference fur ce fujet: elle fe tintà Compiegne. L'Evêque de Cologne & Pepin s'y trouverent avec plufieurs Seigneurs Auftrafiens. Les lots furent faits: la troifiéme partie de ce que Dagobert avoit mis dans fes Trefors depuis fon mariage avec Nantilde, fut accordé à cette Princeffe.Le refte fut partagé en deux parts égales, & ce qui appartenoit au Roy d'Auftrafie fut conduit à Metz.

Gefta Dago

berti. c. 47

Mort de Pen

An. 640. Fre-legas,

Pepin mourut l'année suivante, regretté de tous les François Auftrafiens, pin le vieux. a caufe de fa douceur & de fon équité. C'est ce Pepin qu'on appelle ordinairement Pepin le vieux, pour le dif- cap. 85, tinguer de fon petit-fils dit Pepin le jeune pere de Charles-Martel,& ayeul d'un troifiéme Pepin Roy de France, qui fut la Souche de la feconde Lignée de nos Rois. On appelle encore celui dont je parle, Pepin de Landen, du nom d'un Bourg fitué fur les confins du Brabant & du païs de Liege, devenu fameux de nos jours par la fanglante bataille appellée autrement en France la bataille de Nerwinde, & par la. victoire fignalée,que l'Armée du Roy commandée par le Maréchal Duc de

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