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Ibid. Cap. 14.

Sa mort fut une heureuse nouvelle pour Brunehaut, & lui donna lieu d'efperer de pouvoir établir tranquillement & à loifir fon autorité. Son premier foin fut de finir toutes les guerres, & d'en lever tous les pretextes. Elle s'ôta d'abord de deffus les bras des ennemis fâcheux à l'extremité de l'Etat d'Auftrafie; c'eftoit la Nation des Abares, qui fuivant l'exemple que leur avoient donné leurs Anceftres au temps que Clotaire I. mourut, vinrent faire après la mort de Childebert des courfes dans la France Germanique. Elle s'accommoda avec eux, & moyennant une groffe fomme d'argent qu'elle leur fit donner, ils fe retirerent. Elle confirma auffi avec le Roy des Lombards la paix que ce Prince avoit concluë quelques années auparavant avec Childebert. Le Pape Pelage s'eftoit autrefois oppofé à celle que la France avoit faite avec ce Peuple encore en partie Arien & en partie Payen. Mais S. Gregoire le Grand qui lui avoit fuccede, n'eut garde d'eftre mécontent du renouvellement de ce Traité; parce que le Roy des Lombards Agilulphe s'eftoit déja fait Catholique avec la plus grande partie de cette Nation à la perfuafion de la Reine Theodelinde, par le moyen de laquelle ce faint Pape avoit procuré la paix à l'Italie.

Les Lettres de ce grand Pontife à la Reine Brunehaut, aux deux Rois petits-fils de cette Princeffe, à Childebert leur pere, aux Evêques de France, à quelques Seigneurs François, font un des Monumens de l'Antiquité, dont nous devons faire le plus de cas. C'eft dans une de celles qu'il écrivit au Roy Childebert que l'on voit cet éloge fi glorieux à la France: Qu'autant que la dignité de ·Roy éleve au-deffus des autres hommes celui qui la poffede, autant la qualité de

Roy de France élevoit au-deffus des au tres Rois ceux qui en eftoient honorez. Cet éloge qui ne parle que des Rois, fans y renfermer les Maiftres de l'Empire encore très-puiffans alors, n'eftoit pas vain. Le Royaume François eftoit en ce temps-là le plus grand, le plus puiffant & le plus floriffant qu'il y euft en Europe. Celui des Vifigots en Efpagne, celui des Lombards en Italie, les mieux établis & les plus étendus après le Royaume de France, ne lui eftoient pas comparables.

Il y avoit encore quelques femences de divifion entre la France & l'Empire. Quelques Places que les François poffedoient en Italie du côté de Trente, le Val d'Aofte & le païs de Suze, dont le feu Roy Gontran avoit augmenté le Royaume de Bourgogne, Bourgogne, eftoient des occafions continuelles de fe broüiller avec l'Empereur ou avec les Lombards fur le fujet des limites, les Terres de tous ces differens Princes fe trouvant en certains endroits enclavées. les unes dans les autres. La Reine. Brunehaut envoya au Pape de la part M.1.1. cpt de fon petit-fils Thieri Roy de Bour- 8.9. 57. gogne, deux Ambassadeurs, pour le prier d'accommoder ces differens: & il s'en chargea d'autant plus volontiers, qu'il conçut l'importance de cet accommodement pour maintenir en Italie une paix qui eftoit fon ouvrage, & que ces divers interests pouvoient troubler à tous momens.

Gregor.

La Reine

M de Va

La maniere dont le Pape écrivoit à Brunehaut cette occafion & fur d'autres fujets à la Regence des cette Princeffe, montre clairement la Etats de fes verité que j'ai avancée, qu'elle eut la petits fils Regence des Etats de fes deux petits- lois Tom. ze fils,& fur tout du Royaume de Bour, P. 48° gogne,quoiqu'elle demeuraft d'abord en celui d'Auftrafie: & c'eft en vain qu'un de nos plus fçavans Hiftoriens en a voulu douter. Non-feulement le Pape lui donne le titre de Reine des

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An. 597.

François à la tefte de fa Lettre; mais encore il lui rend compte de toute cette negociation, & de plufieurs autres points qui concernoient les affai res de France. Il dit qu'il a conferé avec fes Ambaffadeurs; qu'il leur a donné audience, & qu'ils l'ont informé de toutes les chofes dont elle les avoit chargez dans leurs inftructions. Il s'adreffe à elle dans plufieurs Lettres fur tout ce qui regarde les Eglifes de France & les interefts du S. Siege, & il lui parle comme à celle qui difpofoit de tout dans l'Etat. Il écrivit auffi au jeune Roy de Bourgogne, au fujet de ce qui fe paffoit en Italie, mais d'une maniere generale, & tout le détail des affaires eft dans la Lettre qu'il

adreffa à la Reine.

Une des plus importantes qui foit traitée dans ces diverfes Lettres dont je parle,eft celle de la converfion d'un des Royaumes d'Angleterre au Chriftianifme, fur laquelle Saint Gregoire écrivit à la Reine Brunehaut,aux trois Rois François, & aux plus confideraL. 9. epift, bles des Evêques de France ; & cette Reine y contribua tellement, qu'elle merita de ce faint Pape ce bel éloge: Qu'après Dieu c'eftoit à elle que l'Angiegleterre eftoit redevable de ce bonheur. Mais ce qui eft encore de plus remarquable, c'eft que la perfonne qui travailla le plus immediatement à cette Gregor. Tur. converfion en Angleterre même, fut une Princeffe Françoife.

I. 9. 6. 26. Beda, l. 1. Hift. Angl. cap. 21,

Cette Princeffe s'appelloit Berthe, & eftoit fille du Roy Caribert, coufine germaine de Clotaire Roy de Soiffons, & du feu Roy d'Auftrafie Childebert pere des deux Princes actuellement regnans en Bourgogne & en Auftrafie; elle avoit efté mariée en Angleterre à Edbert Roy du Royaume de Kent,dont la Capitale qui s'appelloit alors Doroverne, fe nomme aujourd'hui Cantorberi.Une des conditions du Traité de mariage avoit

efté qu'on lui laifferqit une entiere liberté de confcience, l'exercice de fa Religion,& un Evêque avec elle pour l'y entretenir cet Evêque s'appelloit Lieudard; elle avoit auffi une Eglife à fon ufage dédiée à S. Martin, hors de la Ville de Cantorberi: cette Eglife avoit efté bastie lorsque les Romains eftoient encore maiftres de la Grande Bretagne.

Brunechil,

19.

La pieté & la regularité de la Prin ceffe, & les entretiens que l'Evêque avoit avec les Anglois fur la Religion, fit venir à plufieurs d'entre eux la penfée de fe faire inftruire. Le Pape le Epift. a fçut, & voyant, comme il le dit, que les Evêques François, que ce foin regardoit plus que les autres à caufe du voifinage, ne fongeoient point à profiter de ces bonnes difpofitions, il y penfa efficacement lui-même,& y deftina des Miffionnaires : ce furent de faints Moines, à la tefte defquels il mit le faint Abbé Augustin, depuis Evêque de Cantorberi.

Le Pape donna avis de leur départ à toutes les Cours de France,afin qu'ils fuffent reçûs dans les trois Royaumes avec charité, & qu'on leur y fournit des lumicres & des expediens pour faciliter l'execution d'un fi faint & fi loüable deffein. On répondit parfaitement aux bonnes intentions du faint Pontife, & fur tout on leur donna pour les accompagner quelques François qui fçavoient l'Anglois,afin qu'ils pûflent leur fervir d'Interprètes. Ils pafferent donc dans le Royaume de Kent,& avec un peu de patience dont Beda, c.25 ils eurent befoin pour diffiper quelques foupçons mal fondez que le Roy des Anglois avoit conçû de ce voyage, ils curent permiffion de prêcher & d'inftruire ceux qui voudroient les écouter;& enfin la Reine avec le temps. fit fi bien auprès du Roy, que lui-même embraffa le Chriftianifme, & fut imité de prefque tous fes Sujets.

Elle eft exi

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Fredeg. in

Brunehaut ne put maintenir que lie. deux ou trois ans dans le Royaume Chronic.c, d'Auftrafie, la tranquillité qu'elle lui avoit procurée auffi - bien qu'au Royaume de Bourgogne. L'inquietude des Grands qui portoient impatiemment de fe voir gouvernez par une femme, la troubla bien-toft: la fuite, ou peut-eftre la caufe de ces mouvemens fut la mort du Duc Vintrion, un des plus confiderables Seigneurs de ce Royaume, dont la Reine ne s'accommodoit pas, & dont elle jugea à propos de fe défaire. Les chofes en vinrent jufqu'à la revolte, & les Seigneurs s'eftant rendus maiftres de la perfonne, & enfuite de l'efprit du jeune Roy Theodebert, l'engage rent à confentir à l'exil de fa mere. Cette Princeffe craignant pour fa vie, fut obligée de s'enfuir fecretement de la Cour, & abandonnée de tous fes gens, elle fe fauva dans la petite Ville d'Arci-fur-Aube, aux Frontieres de Champagne du cofté du Royaume de Bourgogne.

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Y eftant arrivée toute feule, elle y trouva un homme de qualité nommé Didier natif d'Aquitaine, & allié à la Famille Royale, qui s'y eftoit rendu déguifé en pauvre de concert avec elle, pour la conduire depuis là jufqu'à la Cour de Bourgogne. Elle y arriva fans courir aucun rifque. Son arrivée furprit agreablement le Roy qui l'aimoit tendrement, & qui fçachant la revolte des Auftrafiens, eftoit fort en peine d'elle. Il la reçut d'une maniere capable de la confoler de fon malheur, & pour premiere marque de fa tendreffe, l'Évêché d'Auxerre eftant venu à vaquer quelque temps

après, il le donna fur la priere qu'elle
lui en fit, à ce guide fidele, à qui elle
eftoit obligée de fa liberté, & peut-
eftre de fa vie. Cependant la guerre fe
ralluma plus vivement que jamais en-
tre les Princes François.

An. 600.

Clotaire Roy de Soiffons né en 584. l'année même de la mort de fon pere Chilperic, avoit alors feize ans ; il eftoit demeuré en poffeffion de plufieurs Villes fur la riviere de Seine dont la conquefte fut la fuite de la victoire qu'il avoit remportée l'année d'auparavant fur les deux Rois fes coufins. Ces deux Princes tout jeunes; car ils n'avoient que treize à quatorze ans, vinrent l'un & l'autre à la tefte d'une puiffante Armée, pour avoir Regum Franleur revanche. Ce fut par le confeil cor. 37: de Brunehaut que le jeune Thierri Bertharii ERoy de Bourgogne entreprit cette pifc. Carnot, expedition. Elle engagea Recarede Roy des Gots à lui envoyer un secours de Soldats, & Theodebert outre les Troupes Françoifes qui compofoient fon Armée, la fortifia de cclles des Nations de delà le Rhin.

Fredegar. cap.20 Gefta

Ex vitâ S.

Défaite de

Darmeille.

↑ Aroanna.

Clotaire fans s'étonner vint audevant d'eux jufques dans le Royau- Clotaire à me de Bourgogne, & les rencontra dans le Senonois fur la petite riviere d'Ouaine t qui fe jette dans le Loin au-deffus de Moret; la bataille se don- Val:fius Nona auprès du Village de Dormeille, tit. Gall. elle fut infiniment fanglante de part & d'autre; mais la victoire demeura aux deux Rois. Clotaire entierement défait, gagna Melun avec beaucoup de peine, & de-là vint fe refugier à Paris, & même, felon quelques-uns, il s'enfuit jufqu'à Arelaune aujourd'hui la Foreft de Bretonne,vers l'em

* Fredegaire dit que celui qui conduifit Brunehaut à la Cour de Bourgogne, eftoit un pauvre qu'elle trouva par hazard, & à qui elle fit donner en récompente l'Evêché d'Auxerre. Cette circonftance d'un gueux fait Evêque d'Auxerre pour un tel fujet, a quelque chofe de bizarre. Mais la Relation que j'ai faite de cet incident eft appuyée fur l'Hiftoire des Evêques d'Auxerre, rapportée dans le premier Tomé de la nouvelle Bibliotheque des Manufcrits du P. Labbe, felon laquelle Didier qui fucceda à l'Evêque d'Auxerre, mort vers ce temps-là, citoit parent de la Reine Brunehaut, & le plus riche Prélat qu'il y eult en France. Cujus fæcularia dignitas tanta extitit, ut ei nemo fuo tempore, quamvis potentiffimus, ex aquo feconferre potuerit,

T

Betharii.

cap.20.

bouchûre de la Seine.

Les deux Rois pourfuivant leur viatoire, reprirent la plupart des Villes Ex vita S. fituées fur cette Riviere,qui s'eftoient foumises à Clotaire l'année precedente. Elles furent pillées, & un grand Fredegar. nombre des Habitans du païs menez en esclavage: Chartres fut auffi prife & abandonnée à la fureur du Soldat. Enfin comme l'Armée victorieufe continuoit fes progrès par tout fans refiftance, le Roy de Soiffons fut contraint de demander la paix, qu'il n'obtint qu'à des conditions très-rudes; fçavoir, qu'il cederoit au Roy de Bourgogne tout ce qu'il poffedoit de Villes entre la Seine, la Loire, l'Ocean & les Frontieres de Bretagne, & au Roy d'Auftrafie une grande partie du païs entre la Seine, l'Oife & la mer, qu'on appelloit le Duché de Dentelenus a, nom qu'il tiroit apparemment de quelque Duc qui l'avoit gouverné;de forte que leRoyaume de Soiffons fut prefque reduit à rien.C'eft ainfi que finit en France le fixiéme fiecle, & la cent quatorziéme année depuis l'établiffement de la Monarchie dans les Gaules.

An.600.

Theodebert envy 7766

Ces victoires encouragerent les deux jeunes Princes qui laifferent Clotaire en repos après l'avoir mis hors d'eftat de leur nuire, & fongerent à pouffer plus loin les bornes de l'Empire François, à l'exemple de leurs anceftres.

Le Roy d'Auftrafie b envoya une Am aflade à Ambassade à Conftantinople, pour offrir à l'Empereur Maurice de faire

Empercur

Maurice,

avec lui une Ligue offenfive contre les Abares, qui incommodoient fort l'Empire du cofté du Danube par leurs excurfions, l'affûrant qu'il les attaqueroit avec toutes les forces de fon Eftat, pourvû que l'Empereur vouluft lui payer une bonne penfion: le mot Grec fignifie un tribut c; mais j'ai peine à croire que les François euffent ofé le demander fous ce nom à l'Empereur. En effet, ce Prince les reçut avec trop d'honnefteté, pour laiffer croire qu'ils lui euffent fait une demande fi incivile. Il leur fit même

des prefens; mais jugeant par le peu de fecours que lui & fes predeceffeurs avoient reçû d'eux dans les guerres d'Italie, où les François avoient toûjours bien moins agi pour l'Empire que pour leurs interefts propres, it n'accepta point leur propofition. Il voulut neanmoins les picquer d'honneur, en leur difant qu'une Nation auffi genereufe que la Françoife devoit faire paroiftre plus de defintereffement; qu'il leur feroit très-obligé s'ils vouloient bien attaquer les Abares de leur cofté, tandis qu'il les attaqueroit du fien, mais qu'il ne vouloit pas acheter fi cher cette diverfion; de forte que la chofe n'eut aucune fuite.

Fredegar.c

20.

Theodebert voyant qu'il n'y avoit Theodeberte rien à faire de ce cofté-là, propofa au guent les Gaf Thieri fubju Roy de Bourgogne d'aller fubjuguer cons. les Gafcons. Cette brave Nation ne s'eftoit pas encore eftablie en deçà des Pyrenées, dans le païs auquel elle a depuis donné fon nom, & il eft impoffible de marquer bien fûrement le

Je croi que c'eft de ce nom, mais corrompu, qu'une partie de ce pars s'appelloit encore du temps de Charles le Chauve & fous les premiers Rois de la troifiéme Race, le Comté de Tello ou de Talou. Il comprenoit alors Diepe, Arques, la Ville d'Eu, & les environs de ces Places.

b Je fai que Theophilate Simocatte dans fon Hiftoire de l'Empereur Maurice, où il parle de cette Ambaffade, dit qu elle fut envoyée par Thieri Roy des François: mais fans doute il s'eft mépris,& a pris Thieri pout Theodebert, & cette mép fe n'est pas fort extraordinaire dans les Auteurs Grecs, quand ils parlent des Rois François de ce temps à Thietti ne pouvoit faire la guerre aux Abares, dont il eftoit fort éloigné; mais c'eftoit Tr codebert Roy d'Auftrafie, dont les Sujets dans la Germanie, & les Peuples les plus voifins du Danub. qui lui estoient oumis, fouffrirent beaucoup des incurfions de ces Barbares lous fon regne & fous cqui de Childebert ion pere.

Theophylact, L. 6. c. 3. Qojus,

semps

Hift. de Bearn. l. 1. chap. 24.

1. Hiftor. Franc.

temps où cet établiffement s'eft fait. An. 601. M. de Marca & quelques-uns de nos plus fçavans Ecrivains, le mettent vers l'an 586. peu de temps après la mort Valef Tom. de Chilperic, fondez fur un paffage de Gregoire de Tours, qui ne prouve rien.Il n'y eft fait mention que des excurfions des Gafcons, qui defcendirent des Pyrenées pour venir piller dans la plaine, & nullement de la perte d'aucune des Villes que les François y poffedoient, fans quoi les Gafcons ne pouvoient pas demeurer dans le païs. Ainfi l'expedition des deux Rois ne fut point pour reconquerir cette partie de la France que leurs prédeceffeurs n'avoient pas perdue; mais pour faire une nouvelle conquête de ce qu'on appelloit alors la Gafcogne ou la Vafcogne au-delà des Pyrenées, c'est-à-dire, Pampelune, Calahorre, & les païs qui en dépendoient. Ils défirent & fubjuguerent les Gafcons, les firent leurs Tributaires, & leur donnerent un Duc nommé Genialis, qui les maintint dans la foumiffion tandis qu'il les gouverna. C'eft là au moins An. 601. la feconde fois que cette ancienne Gafcogne fut fous l'obéïffance de la France: car fi nous en croyons un de nos anciens Auteurs, non-feulement les Gafcons, mais encore les Cantabres leurs voifins avoient eu autrefois un Duc François, qui faifoit porter les tributs levez fur ces Peuples, à l'Epargne des Rois de France."

Fredegar. cap. 33.

Fredegar. cap. 24.

Čette humeur martiale & cette ardeur que le jeune Thieri faifoit paroiftre pour la gloire, retraçoit à fes Sujets l'idée de fon ayeul Sigebert,qui environ au mefme âge que lui, s'eftoit fignalé par plufieurs victoires à la tefte de fes Armées; mais il lui eftoit fort peu femblable par un autre endroit: je veux dire par fon incontinence. I avoit déja à l'âge de dix-huit ans trois fils naturels d'une ou de plufieurs Maiftreffes, & c'eftoit la malheureufe

Tome L..

politique de la Reine Brunehaut, qui le plongeoit & l'entretenoit dans ces débauches. Cette Princeffe jufqu'à fa retraite dans le Royaume de Bourgogne, paroift d'ordinaire dans nos Hif toires avec un caractere de fageffe, & mefme de probité & de pieté, qui lui fait beaucoup d'honneur ; mais elle changea dès que l'ambition & une autre paffion plus indigne d'une Reine, commencerent à la dominer.

Se voyant excluë de la Regence du Royaume d'Auftrafie, & reduite à celle du Royaume de Bourgogne,elle fe regarda comme dépouillée d'un Etat qui lui appartenoit,& qu'elle devoit un jour reconquerir; elle apprehenda que celui qu'elle tenoit encore ne lui échappaft; elle n'oublia ni crimes ni artifices pour fe maintenir dans l'un, & pour rentrer dans l'autre. Ce deffein formé & toûjours conduit par cette Princeffe, fut la fource de bien des maux que je développerai dans la fuite; mais il fut principalement la caufe de celui dont je parle, je veux dire des débauches du jeune Roy fon petit-fils.

Fredegar.

Elle craignit que fi ce Prince s'engageoit dans un mariage legitime en époufant une Princeffe de la Famille de quelqu'un des Rois voifins de la France, il ne perdift l'attachement & le respect qu'il avoit eû jufqu'alors cap. ¿6. pour elle, & qu'une Reine qui fe rendroit maiftreffe de fon efprit, ne l'empêchaft elle-même de l'eftre toûjours des affaires. C'eft pour cela qu'elle fit enforte tant qu'elle puft, qu'il n'écoû taft aucune propofition fur ce fujet. Le faint Abbé Columban ayant quelquefois parlé au Roy avec liberté làdeffus, elle ne ceffa point de le perfecuter depuis, & l'obligea à fortir de France, & enfin toute fon application: fut à fournir toûjours à ce jeune Prin- bid ce de nouveaux objets capables d'oc cuper fa paffion..

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