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AU ROY

S..

IRE,

Le Sujet de l'Ouvrage que j'ai l'honneur de presenter à VOSTRE MAJESTE, mérite par lui-même que vous daigniez lui accorder vostre protection Royale, & autorise la liberté que je prens de le faire paroiftre fous voftre augufle Nom. C'est

l'Hiftoire de France, c'est-à-dire l'Hiftoire de vos Anceftres, qui depuis un grand nombre de fiecles,ont rempli fucceffivement, fans aucune interruption le Trône où vous eftes affis aujourd'huy,& où de l'aveu de toute l'Europe, il eft de la derniere importance pour ce Royaume, que Dieu Vous maintienne pendant une longue fuite d'années, felon les vaux & les efperances de tous vos fujets.

Un fecond motif qui m'a encore plus fortement déterminé à apporter aux pieds de voftre Trône un travail de près de vingt ans : C'est le defir que noftre Compagnie a toûjours eu, de témoi gner publiquement & en toute occafion le très-respectueux dévouement qu'elle a pour vostre Perfonne facrée, & fa très-vive reconnoiffance pour la bonté dont Vous voulez bien l'honorer, en agréant fes fervices, & en la comblant de vos graces. Cette conftante bonte eft pour elle un grand éloge: elle luy a tenu lieu d'Apologie en bien des rencontres, & elle lui en fervira pour l'avecutant de temps qu'on fe fouviendra en France de l'Equité, du Difcernement, & de la profonde fageffe de LOUIS LE

nir,

GRAND.

Enfin, SIRE, lorsque j'ufe de la permiffion que vous m'avez accordée de vous dédier cet Ouvrage, je me fatisfais moimefme en particulier fur un point, en me donnant le plaifir de développer une pensée qui m'est souvent venue à l'esprit durant la compofition de cette Hiftoire; fçavoir, qu'entre les plus beaux Regnes qui y font contenus, il n'y en a pas un feul qui puisse estre mis en parallele avec le vostre, eu égard à un certain affemblage de chofes qui rendent les Regnes illuftres & mémorables, dont les unes ont fignalé un Regne, & les autres un autre ; mais que je n'ai trouvé rassemblées que dans le vostre feul.

Ce n'eft point là, SIRE, un éloge que je vous prépare : je Supplie, VOSTRE MAJESTE, de regarder ce que j'aDance comme une pure une fimple réfléxion d'un Hiftorien,qui

compare oe qu'il a lû avec ce qu'il a vú,& de me permettre d'en justifier la verité par des faits dont toute l'Europe a efté témoin. Cette comparaifon que je vais faire ne diminuera rien de la gloire du Regne de vos plus illuftres Prédeceffeurs, en relevant celle du voftre.

Il y a eu parmi eux des Conquérans: il s'y eft trouvé de grands Politiques. Il y en a eu qui fe font diftinguez par leur Religion & leur pieté. On en a vú s'appliquer à faire fleurir les beaux Arts dans l'Eftat,à y cultiver,& à y faciliter le Commerce,d'au tres à éternifer leur Mémoire par les Ouvrages publics, & à relever la majefté de leur Trône par la magnificence de leur Maifon & de leur Cour. Tous ces traits de grandeur que je rencontre, pour ainfi dire, épars çà là dans les Hiftoires dedivers Regnes, les écrivains qui feront l'Hiftoire du voftre, les y trou

veront tous réünis.

On y verra, comme dans ceux de Clovis, de Charlemagne, de Philippe Augufte, de Charles VII. des Conqueftes, des Batailles gagnées, des Villes forcées : des Conqueftes, dis-je, non pas dans un pays tel que l'ancienne Germanie, où une déroute de Barbares diffipez rendoit Charlemagne maistre d'une vafte eftenduë de Forefts & de Campagnes,& de quelques Bourgades paliffadées, où les Vaincus venoient lui rendre leurs hommages; mais dans des pays où l'ennemi difputoit le terrein pied à pied, & où chaque pas coûtoit une Victoire; des Batailles gagnées, non pas fur des peuples qui n'avoient pour guide à la guerre que leur seule férocité naturelle, aisée à déconcerter par l'arrangement & par les marches régulieres d'une Armée aguerrie: mais fur des troupes aufquelles les Nations les plus belliqueufes fournissoient à l'envi des Chefs les plus habiles & les plus experimentez des Villes forcées que la Nature & l'Art fembloient avoir rendues imprenables;& ce qui ne s'eftoit point vú dans ces premiers fiéclès de

*Edouard

III. Roy d'Angleterre,

la Monarchie Françoife, de larges & profondes rivieres paffées à la nage par des Armées à la vue d'un ennemi préparé; mais effrayé au feul afpect d'une telle bravoure, & vaincu auffi-toft qu'abordé. Que la rapidité de nos Héros d'autrefois auroit esté retardée, s'ils avoient eu des barrieres à franchir les unes fur les autres, telles que Mons, Valenciennes, Cambray, Saint Omer, Namur, Luxembourg, Philisbourg, & tant d'autres ! Une Victoire faifoit alors un Conquerant; mais aujourd'hui ce titre coûte beaucoup plus cher.

Si des Héros & des Conquérans nous paffons à ceux de nos Rois qui ont excellé dans l'Art de regner, noftre Hiftoire nous prefentera un modéle achevé de politique dans la perfonne de Charles V. furnommé le Sage, qui eftant monté fur un Trône. chancelant & ébranlé de tous coftez par deux Rois * qui avoient formé le deffein de le ren verfer, trouva avec le temps la раCharles le tience, & par fon habileté, le moyen de le raffermir, de conquede Navatte, rir fur ces deux dangereux ennemis, ce que la témérité de fon Prédeceffeur avoit perdu, de diffiper les factions, de réduire les factieux, & en reftablissant l'Autorité Royale dans tous fes droits, de la maintenir, & de la porter auffi loin qu'aucun des Rois qui l'avoient précedé.

Mauvais Roy

On ne peut, SIRE, fe repréfenter ces deux fituations fi différentes de ce grand Prince, qu'on ne fe reffouvienne de celle où vous fûtes durant voftre Minorité, & de celle oùVous vous establites peu à peu dès que vous commençâtes à gouvernerpar Vous-même, des mesures juftes, & des moyens que Vous employaftes pour cet effet, dont le plus général fut le talent de Vous attirer d'abord l'eftime & le respect de vos Sujets par une conduite où tout paroiffoit Grand Royal; talent qui n'est pas attaché à la Cou& ronne, mais à la fuperiorité du génie de celui qui la porte, mais talent aussi necessaire au Souverain, qu'il eft utile aux peuples,

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