Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

Philippe le Bel fit tomber la Couronne de Navarre fur la tefte de fon Fils; & Vous, vous avez mis & foûtenu fur celle de voftre Petit-Fils la Couronne de la Monarchie de toute l'Espagne

des grands Eftats qui en dépendent dans les autres Parties du Monde. Non-feulement vous reffemblez à vos Prédeceffeurs par tous leurs beaux endroits, mais encore, fi j'ofe m'exprimer ainsi, c'est toûjours en grand que Vous nous les retracez.

Ce nouvel objet qui vient de se presenter à moy par occafion, ne me fera pas, tout éclatant qu'il eft, détourner encore "les yeux de celui que j'ai commencé à envisager, & que je regarde comme ce qu'il У a de plus grand dans voftre Regne, parce que c'est ce qui le fanctifie & ce qui le confacre.

се

Le même zele qui Vous a mis la foudre à la main pour exterminer dans voftre Royaume les anciennes erreurs, vous infpire encore cette vive application avec laquelle vous travaillez à y empêcher le progrez des nouvelles. Les Papes & les Affemblées du Clergé de France vous en ont fouvent félicité & remersié : & quiconque aime non-feulement l'Eglife, mais l'Estat doit fouhaiter que vous en venicz à bout avec un pareil fuc

cez.

Je ne puis encore paffer fous filence ce que tant d'autres ont celebré avant moi, mais qu'on ne peut trop exalter; d'autant qu'on y voit en même temps la Religion de VOSTRE & MAJESTE, & l'usage qu'elle a fçû faire de fon autorité Royale. Je parle de la dérestable fureur des Duels, que nul de vos Prédeceffeurs n'avoit pú venir à bout de reprimer, & dont vostre fermeté inébranlable fur un point dont vous aviez parfaitement compris l'importance, a délivré voftre Royaume. Ah, SIRE, quel titre en vostre faveur auprès de Dieu, pour obtenir un jour fes mifericordes! Combien d'ames par ce moyen avez-vous enlevé à l'ennemi de leur falut! Combien de vail

lans Hommes avez-vous confervé à la Parrie! De combien d'illuftres Familles avez-vous empêché la deftruction! & cela fans que vostre Justice ait efté contrainte de répandre de fang; car jamais Gouvernement n'a efté plus efficace, & en même temps moins fanguinaire que le Voftre. La seule apprehension d'encourir vostre disgrace a contenu la Noblesse de voftre Royaume: il ne vous en a cousté que de la fermeté en quatre ou cinq occafions où Vous vous eftes montré infléxible, parce qu'il y alloit de la gloire de Dieu, du falut de vos Sujets, & d'un grand intereft de voftre Eftat.

Mais que ne devons-nous point, SIRE,& que ne devezvous pas vous-même à cette vertu qu'il a plû à Dieu d'imprimer, d'enraciner fi profondément dans voftre cœur? Vous & Nous lui devons la confervation de voftre facrée Perfonne : C'est par elle seule que vous n'avez pas fuccombé aux terribles coups par lefquels la divine Providence a jugé à propos de vous éprouver dans ces derniers temps. Quelque force, quelque fermeté d'efprit

la nature vous ait données, elles n'auroient pú tenir contre la bonté & la tendresse de vostre cœur dans la perte de tant de teftes ficheres, fi la Religion ne fût venue au fecours, pour vous aider à faire à Dieu de tels facrifices qu'il a exigez de Vous les uns après les autres. Les derniers devenoient de plus en plus difficiles & douloureux, par ceux qui avoient précedé. C'eftoit de nouvelles playes qui renouvelloient les premieres que le temps n'avoit pas encore fermées : voftre Cour, voftre Royaume, toute l'Europe l'ont dit d'une commune voix, que c'est-là un des plus beaux triomphes que la Religion pût remporter fur le cœur d'un Roy Chrétien. Charlemagne fut mis autrefois à de pareilles épreuves; & Dien a voulu que les deux plus grands Princes qui ayent jamais esté affis fur le Trône de France, se ressemblassent encore par cet en

droit.

Il y a en cela, SIRE, quelque chofe de fi grand & de fi fingulier, que je daigne à peine pouffer plus loin le parallele que j'ai entrepris de faire entre voftre Regne & ceux de vos Prédeceffeurs. Après ce beau fpectacle de conftance & d'héroïsme Chrétien que vous avez donné à l'Univers, & que je lui remets devant les yeux, que pourrois-je lui prefenter qui ne fût infiniment au deffous?

Ainfi je ne m'étendrai point sur la magnificence de voftre Cour, à laquelle noftre Hiftoire ne nous fait rien voir de femblable dans les plus brillans Regnes de vos Anceftres, ni fur l'admiration que caufent aux Eftrangers, quand ils affiftent quelquefois aux revues des Troupes de voftre Maifon, les riches équipages &l'air guerrier de cette nombreuse garde, qui fait autant un ornement de voftre Cour, qu'elle en fait la fûreté. Avant vostre Regne, c'eftoit pour la plupart la garde domestique d'un Roy; mais depuis que vous l'avez formée, augmentée, disciplinée, on peut dire qu'elle est devenuë la garde & la gloire de tout le Royaume par fon nombre, par fa valeur, par les prodiges qu'on lui a vû faire à la guerre, où elle a toûjours efté la terreur des ennemis, dont les plus fieres Troupes n'ont jamais tenu devant elle.

Je laiffe tant d'Ouvrages publics, tant de Maifons Royales fi fuperbement bafties, fi délicatement ornées, fi richement meublées: tant de Villes, les unes fortifiées, les autres conftruites fur la mer

fur les frontieres ; Vous feul, je l'ofe dire, je le dis avec la plus exacte verité, Vous feul avez plus fait en cela, que tous vos Prédeceffeurs enfemble depuis la fondation de la Monar

chie.

La Capitale du Royaume augmentée, embellie, enrichie, policée, peuplée, renduë toute differente d'elle-même, & de ce qu'elle eftoit avant Vous, ce fomptueux édifice d'un fi grand gouft, qu'on y a ajoûté, pour figurer en quelque façon avec le Palais de nos

Rois, & prefenter en même-temps aux Eftrangers qui arrivent à Paris, deux des plus magnifiques objets qu'il y ait dans toute l'Europe; Monument qui n'a pû estre l'ouvrage que d'une charité Royale, où tant de gens de guerre joüiffent tranquillement de la recompenfe de leur valeur, & trouvent en même temps tous les moyens de leur falut. Philippe Augufte,un de vos Anceftres, dont le caractere approchoit le plus du coffre,avoit conçû un pareil deffein; mais il ne l'executa pas, comme Charlemagne avoit auffe formé, & même commencé celui de la communication des deux Mers: mais l'execution de ces deux nobles projets eftoit refervée au Regne de VOSTRE MAJESTE.

gene

Enfin, SIRE, il n'eft pas moins de notorieté publique, que fous nul Regne de vos Prédeceffeurs, & j'ofe dire encore d'aucun autre Roy ou d'aucun Empereur, on n'a vû les beaux Arts ralement portez à un fi haut point de perfection que fous le vostre. La Peinture, la Sculpture, l' Architecture ont retrouvé par vos foins, ce gouft pur, fimple & noble de la fçavante Antiquité; & cette fçavante Antiquité auroit elle-même de quoy admirer dans une infinité d'ouvrages de divers Arts, mille merveilles que la France a enfantées de noftre temps, où l'invention & l'habileté des Anciens n'arrivérent jamais.

Toutes les Sciences depuis les moindres jufqu'aux plus relevées, font parvenuës à un fi haut point, que la décadence en eft déformais plus à craindre, que la perfection à efperer. Il n'y a plus rien à defirer en France dans la compofition des Ouvrages d'efprit, & dans ceux où l'on traite des Sciences. La pureté du langage, finesse du tour, la délicateffe & la folidité des pensées, le naturel dans le ftyle, l'ordre, la methode, la clarté, tout cela fe trouve & fe fent, & eft loué & applaudi comme il le mérite, par tout où il Se rencontre.

La Poëfie, l'éloquence de la Chaire, & l'éloquence du Br

reau, ne montérent jamais plus haut. Dans la Medecine, l'Anatomie, la Chymie, la Physique, l'Aftronomie & dans les autres parties des Mathematiques, on a fait de nos jours des découvertes qu'on n'avoit pas feulement entrevues dans les fiecles passez ; & pour finir par un des endroits qui a le plus fignalé voftre Regne, l'Art Militaire foit fur la terre, foit fur la mer, n'a-t-il pas efté poussé jusqu'à la derniere perfection? n'a-t-il pas esté infiniment fécond en inventions & en prodiges? & n'est-ce pas par l'admiratoute l'Europe en conçut, que les Armées & les Flotes de France devinrent l'Ecole Militaire de toutes les Nations.

tion

que

Je Vous l'ai dit d'abord, SIRE, que ce n'eftoit point un élo– ge que je vous presentois, mais de fimples réfléxion's fur les Regnes de vos Prédeceffeurs & fur le vostre ; je crois avoir pleinement juftifié celle qui comprend toutes les autres: fçavoir, que parmi les Regnes qui fournissent la plus belle matiere à l'Histoire de France, il n'y en a pas un feul où l'on trouve rassemblées autant que dans le voftre, de ces chofes fingulieres & extraordinaires qui rendent un Regne memorable, & digne de l'admiration de l'apofterité. Mais de cette réfléxion historique, il en fuit naturellement une autre, c'est que tant de merveilles réunies dans un feul Regne, fuppofent neceffairement dans le Prince, un affemblage de Ver tus & de qualitez Royales, duquel il feroit difficile de cite beaucoup d'exemples.

Si Dieu veut confoler la France de la perte de tant de Princes dont il l'a affligée depuis deux ou trois années, il lui confervera VOSTRE MAJESTE, & laiffera voftre Royaume joüir long-temps d'un fi grand bien, qui feul peut le dédommager de tout le refte. C'est la grace pour laquelle je fais tous les jours des Vœux à l'Autel; & ces Vœux font l'unique moyen par lequel je puisse fatisfaire le zele que je me fens pour ma Patrie, & pour la facrée Perfonne de VOSTRE

« VorigeDoorgaan »