Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

cadre de seize vaisseaux de guerre et cent transports sur lesquels étaient embarqués 10,000 hommes, était mouillé en rade de Toulon. Les opinions étaient partagées sur la destination de cet armement, lorsque le conventionnel Letourneur, de la Manche, arriva avec des pouvoirs extraordinaires, et fit connaître que l'intention du comité de salut public était d'occuper Rome, pour punir cette cour des insultes qu'elle commettait tous les jours, et venger le sang de Basseville. Basseville, agent français auprès du pape, avait arboré la cocarde tricolore, ainsi que les artistes de l'école de Rome qui siégeaient à l'académie. Grand nombre d'émigrés français, qui étaient dans cette capitale, agitaient le peuple. Le 3 janvier 1793, la canaille assaillit à la promenade la voiture de Basseville à coups de pierres; son cocher change de direction et le ramène à son hôtel; les portes sont enfoncées, Basseville reçoit un coup de baïonnette dans le bas-ventre; en chemise, tenant ses entrailles dans les mains, il est traîné dans la rue et enfin déposé dans un corps-de-garde sur un lit de camp où il expira le lendemain.

Azara, ambassadeur d'Espagne qui s'était entremis pour protéger les artistes français, courut lui-même des dangers. Cet attentat avait indigné toute la France; le moment était arrivé

d'en tirer vengeance, de débarquer à l'embouchure du Tibre, de s'emparer de Rome, où on avait de nombreux partisans. Un conseil de . fut réuni à Toulon dans le courant de guerre février 1795, pour aviser aux moyens d'exécution du projet. Napoléon fut d'opinion que cette expédition compromettrait l'armée d'Italie et se terminerait elle-même par un désastre; que si cependant on la voulait entreprendre, il fallait en même temps surprendre le mont Argentare, Orbitello, et la place de Civita-Vecchia, et y débarquer l'armée; mais 10,000 hommes lui paraissaient une force trop faible pour tenter un pareil coup de main: il était d'ailleurs impossible de le faire sans cavalerie; il fallait au moins embarquer 1,500 chevaux de chasseurs ou de hussards, ce qui, avec 500 chevaux d'artillerie et d'état-major, formerait une augmentation considérable au convoi. L'armée, à peine débarquée, aurait à combattre 25 ou 30,000 Napolitains, dont 5,000 de bonne cavalerie; elle aurait aussi à craindre une division autrichienne qui accourrait de la Lombardie; elle ne pouvait pas compter sur des partisans à Rome, puisque cette opération ne pourrait pas être de longue durée, et qu'après avoir vengé le sang de Basseville et mis la ville à contribution, il faudrait songer à se rembarquer; que, maî

tre de la mer, cette opération était hasardeuse entreprise avec 10,000 hommes seulement; mais que sans être maître de la mer, ce serait conduire ce corps d'armée à une destruction certaine; qu'il fallait donc que l'escadre française sortît seule, qu'elle battît l'escadre anglaise, la chassât de la Méditerranée; qu'alors le convoi prendrait la mer; qu'après avoir débarqué l'armée, l'escadre et le convoi se porteraient devant Naples pour inquiéter cette cour et l'obliger à garder ses forces à sa propre défense. Le représentant du peuple fut d'autant plus mécontent de la désapprobation formelle que donnait à ses projets le général d'artillerie, qu'il entraînait l'avis de tous les officiers généraux. Les marins déclarèrent qu'il était dangereux pour le salut de l'escadre que le convoi sortît en pleine mer, tant qu'une flotte ennemie croiserait dans ces parages. Il fut résolu que le contre-amiral Martin sortirait seul pour donner chasse aux Anglais.

Il appareilla le 1er mars; arrivé près de SaintFlorent, il captura un vaisseau anglais de 74, le Berwick, qui sortait de cette rade. Les escadres française et anglaise se signalèrent le 8 dans le canal de Livourne; à l'aspect de l'ennemi, la résolution de Letourneur faiblit, il ordonna la retraite; l'armée anglaise donna

chasse à son tour. Le 13, les deux escadres étaient par le travers du cap Noli, rivière de Gênes; le Mercure de 74 et le vaisseau à trois ponts le Sans-Culotte se séparèrent dans la nuit. Le lendemain, à la pointe du jour, le vaisseau le Ça-Ira de 74, qui avait été démâté par un abordage avec le vaisseau la Victoire, tomba sous le vent; le Censeur lui donna la remorque. Les deux armées étaient égales en nombre, mais non en force; l'escadre française de quinze vaisseaux était réduite à treize dont aucun de trois ponts; l'escadre anglaise l'escadre anglaise de treize vaisseaux en avait quatre à trois ponts; l'escadre française continua sa retraite, mais elle ne put éviter deux engagements; le Censeur et le ÇaIra se battirent contre un vaisseau à trois ponts et deux vaisseaux de 74 anglais. Le Tonnant, le Duquesne et la Victoire furent engagés toute la journée; le reste de la ligne française ne le fut pas. Le Censeur et le Ça-Ira furent pris après une vive résistance. L'escadre mouilla aux îles d'Hières, où le Sans-Culotte et le Mercure la rallièrent. Le Ça-Ira coula en rade de la Spezzia. Le vaisseau anglais à trois ponts l'Illustrious, coula et se perdit par suite du combat. Ainsi des deux côtés, la perte fut de deux vaisseaux. Cet engagement fut le premier de cette guerre, qui eut lieu dans la Méditerranée

entre les deux nations. Si l'escadre française se fût battue en ligne dans le canal de Livourne, il est à penser qu'elle aurait soutenu l'honneur du pavillon.

Mais cet événement était fort heureux pour la république : si on avait eu des succès, que les vaisseaux anglais se fussent retirés à Gibraltar, on eût fait sortir le convoi. Cette expédition, sans but raisonnable et mal calculée, ne pouvait avoir que l'issue la plus funeste. Les troupes débarquèrent et se rendirent à Nice. où elles furent très-utiles, deux mois après, pour défendre cette frontière contre les attaques du général autrichien Devins. Cet armement coûta quelques millions au trésor, mais il ne fut pas sans procurer de grands avantages. Le grand-duc de Toscane reconnut la république et envoya comme ambassadeur à Paris le comte Carletti, que la convention reçut le 14 mars 1795. La république de Venise, qui s'était refusée à entrer dans la coalition et avait

reçu un agent français, fut stimulée par l'armement d'une escadre française, et envoya pour ambassadeur le noble Quirini; sa nomination est du 14 mars; Gênes se raffermit dans ses dispositions de neutralité; le roi de Naples était entré dans la coalition aussitôt que l'escadre anglaise et espagnole avaient dominé dans la

« VorigeDoorgaan »