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général en chef, le visage couvert de sang d'une légère blessure qu'il avait reçue au front, et qui n'était pas encore pansée, il lui dit : « Le j...-f... qui a fait battre la retraite nous fait manquer Toulon. » Les soldats qui venaient de perdre bon nombre de leurs camarades dans la retraite, témoignèrent leur mécontentement; ils parlaient hautement de se porter à des voies de fait contre le général en chef. « Quand cessera-t-on de nous envoyer des peintres et des médecins pour nous commander? » Huit jours après, Doppet fut envoyé à l'armée des Pyrénées où il signala son arrivée en faisant guillotiner grand nombre de généraux.

Il avait amené avec lui de Lyon le vieux général de division Duteil pour commander l'artillerie du siége; mais Napoléon avait une mission ad hoc du gouvernement; il fut maintenu dans le commandement. Il y avait dans l'artillerie deux généraux de ce nom; l'aîné, qui a long-temps commandé l'école d'Auxonne, était ún excellent officier d'artillerie; son école était renommée. En 1788, il distingua Napoléon alors lieutenant d'artillerie, et pressentit ses talents militaires. Ce général ne partageait pas l'opinion nationale: il était déjà fort âgé, mais bon Français; il refusa cependant d'émigrer, et resta à son poste: il commanda l'artillerie au

siége de Lyon, sous Kellermann; après la prise de cette ville, il ne put échapper au comité de surveillance de Collot-d'Herbois et de Fouché; il fut traduit au tribunal révolutionnaire et condamné à mort. Son jugement était motivé sur les retards qu'il avait mis à envoyer l'artillerie pour le siége de Toulon. C'est en vain qu'il produisit les lettres de remercîment que lui écrivait Napoléon, pour le bon ordre et l'activité qu'il avait mis dans l'envoi de ces convois.

Le général Duteil cadet était d'un caractère tout opposé, n'entendant rien à l'artillerie; c'était un bon-homme arrivé devant Toulon, il fut fort aise de se trouver débarrassé d'une fonction qui lui serait à charge, et que les circonstances rendaient bien chanceuse; il est depuis mort à Metz, commandant d'armes.

Le vœu du soldat fut enfin exaucé : le brave Dugommier prit, le 20 novembre, le commandement de l'armée; il avait quarante ans de service, c'était un des riches colons de la Martinique, officier retiré; au moment de la révolution, il se mit à la tête des patriotes et défendit la ville de Saint-Pierre; chassé de l'île, lorsque les Anglais y entrèrent, il perdit tous ses biens. Il était employé comme général de brigade à l'armée d'Italie, lorsque les Piémontais, voulant profiter de la diversion du siége

de Toulon, méditèrent de passer le Var et d'entrer en Provence; il les battit au camp de Gillette, ce qui les décida à reprendre leur ligne. Il avait toutes les qualités d'un vieux militaire, extrêmement brave de sa personne, il aimait les braves et en était aimé; il était bon, quoique vif, très actif, juste, avait le coup-d'œil militaire, le sang-froid et de l'opiniâtreté dans le combat.

§ VII.

L'armée de Lyon fut partagée entre les armées des Alpes, des Pyrénées et de Toulon. Ce secours ne fut pas aussi considérable qu'il aurait pu l'être; l'armée de siége, après l'avoir reçu, n'était encore que de 30,000 hommes sous les armes, de bonnes et mauvaises troupes. Le général Ohara, commandant en chef les coalisés, attendait un renfort de 12,000 hommes d'infanterie et 2,000 chevaux, il nour. rissait l'espoir de faire lever le siége, de s'emparer du parc d'Olioules, de tourner l'armée française d'Italie, de se joindre avec l'armée piémontaise, et d'établir ses quartiers d'hiver sur la Durance en s'emparant de toute la Provence. Cette province manquait de vivres, et quelques tentatives qu'eussent faites les négo

ciants de Marseille, l'occupation de Toulon par l'armée et la présence des escadres anglaise, espagnole et napolitaine dans la Méditerranée rendaient leurs efforts infructueux. Cette partie de la république n'espérait de salut que dans la prompte reddition de Toulon, et cependant depuis quatre mois que ce siége était commencé, on en était, disait-on, à canonner une redoute de campagne étrangère aux fortifications de la place; l'ennemi était paisible possesseur non-seulement de la ville et des forts, mais de tout l'espace compris entre la ville, la montagne du Faron et le fort de Malbosquet; tous les efforts des assiégeants étaient faits dans une direction opposée à la ville, ce qui excitait une désapprobation générale. On croyait que le siége n'était pas encore commencé, puisque la tranchée n'était pas encore ouverte contre les forts et les ouvrages de fortification permanente. Les autorités constituées qui résidaient à Marseille, ne connaissant les projets du siége de Toulon que par la commune renommée, alarmées de la disette qui allait en croissant, proposèrent à la convention de lever le siége, d'évacuer la Provence et de repasser la Durance. « Aujourd'hui, disaient-ils, nous sommes maîtres d'opérer la retraite avec ordre; plus tard nous serons obligés de la faire préci

pitamment et avec perte. Les ennemis maîtresde la Provence seront obligés de la nourrir, et au printemps l'armée bien reposée repassera la Durance, attaquera l'ennemi comme François Ier le fit contre Charles-Quint. » Cette lettre arriva à Paris peu de jours avant la nouvelle de la prise de Toulon, ce qui démontra assez combien le plan d'opérations qui a été suivi à ce siége, quoique si simple et si évident dans ses résultats, était peu compris.

Les batteries étaient disposées, tout était prêt pour attaquer le fort Murgrave; l'artillerie jugea convenable d'élever une batterie sur la hauteur des Arènes contre le fort Malbosquet, afin que le lendemain du jour où le Petit-Gibraltar serait pris, elle pût ouvrir son feu; on calculait que cette attaque, pendant la discussion du conseil de guerre que tiendraient les assiégés pour décider le parti à prendre, produirait un grand effet moral. Pour étonner, il fallait surprendre, et, par conséquent que l'ennemi ignorât l'existence de cette batterie; à cet effet elle avait été masquée d'un rideau de branches d'olivier, ce qui avait réussi; mais le 29 novembre, à quatre heures après midi, les représentants du peuple s'y rendirent : elle était armée de huit pièces de 24 et de quatre mortiers, elle avait reçu le nom de la Convention;

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