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SCÈNE II.

CARIME.

Transports de ma fureur, amour, rage funeste,
Tyrans de la raison, où guidez-vous mes pas?
C'est assez déchirer mon cœur par vos combats;
Ah! du moins éteignez un feu que je déteste,

Par mes pleurs ou par mon trépas.
Mais je l'espère en vain, l'ingrat y régne encore:
Ses outrages cruels n'ont pu me dégager;
Je reconnois toujours, hélas ! que je l'adore,
Par mon ardeur à m'en venger.

Transports de ma fureur, etc.

Mais que servent ces pleurs?... Qu'elle pleure elle-même....

C'est ici le séjour des enfants du soleil,

Voilà de leur abord le superbe appareil;

Qu'y viens-je faire, hélas! dans ma fureur extrême?
Je viens leur livrer ce que j'aime,

Pour leur livrer ce que je hais!

Oses-tu l'espérer, infidéle Carime?

Les fils du ciel sont-ils faits pour le crime?

Ils détesteront tes forfaits.

Mais s'ils avoient aimé... s'ils ont des cœurs sensibles...
Ah! sans doute ils le sont, s'ils ont reçu le jour.

Le ciel peut-il former des cœurs inaccessibles
Aux tourments de l'amour?

SCÈNE III.

ALVAR, CARIME.

ALVAR.

Que vois-je? quel éclat! Ciel! comment tant de charmes

Se trouvent-ils en ces déserts ?
Que serviront ici la valeur et les armes ?
C'est à nous d'y porter les fers.

CARIME, en action de se prosterner.

Je suis encor, seigneur, dans l'ignorance

Des hommages qu'on doit...

ALVAR, la retenant.

J'en puis avoir reçus;

Mais où brille votre présence

C'est à vous seule qu'ils sont dus.

CARIME.

Quoi donç! refusez-vous, seigneur, qu'on vous adore? N'êtes-vous pas des dieux ?

ALVAR.

On ne doit adorer que vous seule en ces lieux;
Au titre de héros nous aspirons encore.

Mais daignez m'instruire à mon tour

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Vous séduisez le mien par un si doux langage,

Je n'en attendois

pas de tels en ce séjour.

ALVAR.

L'Amour veut, par mes soins, réparer en ce jour Ce qu'ici vos appas ont de désavantage :

Ces lieux grossiers ne sont pas faits pour vous; Daignez nous suivre en un climat plus doux. Avec tant d'appas en partage,

L'indifférence est un outrage

Que vous ne craindrez pas de nous.

CARIME.

Je ferai plus encore; et je veux que cette île
Avant la fin du jour reconnoisse vos lois.
Les peuples effrayés vont d'asile en asile
Chercher leur sûreté dans le fond de nos bois.
Le cacique lui-même en d'obscures retraites
A déposé ses biens les plus chéris.

Je connois les détours de ces routes secrètes.
Des otages si chers...

ALVAR.

Croyez-vous qu'à ce prix

Nos cœurs soient satisfaits d'emporter la victoire?
Notre valeur suffit pour nous la procurer.
Vos soins ne serviroient qu'à ternir notre gloire,
Sans la mieux assurer.

CARIME.

Ainsi tout se refuse à ma juste colère !

ALVAR.

Juste ciel! vous pleurez! ai-je pu vous déplaire?

Parlez, que falloit-il?...

CARIME.

Il falloit me venger.

ALVAR.

Quel indigne mortel a pu vous outrager?
Quel monstre a pu former ce dessein téméraire?

Le cacique.

CARIME.

ALVAR.

Il mourra : c'est fait de son destin. Tous moyens sont permis pour punir une offense. Pour courir à la gloire il n'est qu'un seul chemin, Il en est cent pour la vengeance.

Il faut venger vos pleurs et vos appas.

Mais mon zéle empressé n'est pas ici le maître:
Notre chef en ces lieux va bientôt reparoître ;
Je vais tout préparer pour marcher sur vos pas.
(Ensemble.)

Vengeance, Amour, unissez-vous,

Portez par-tout le ravage.

Quand vous animez le courage,

Rien ne résiste à vos coups.

ALVAR.

La colère en est plus ardente

Quand ce qu'on aime est outragé,

CARIME.

Quand l'amour en haine est changé,
La rage est cent fois plus puissante.

(Ensemble.)

Vengeance, Amour, unissez-vous, etc.

FIN DU SECOND ACTE.

ACTE TROISIÈME.

Le théâtre change, et représente les appartements du cacique.

SCÈNE I.

DIGIZÉ.

Tourments des tendres cœurs, terreurs, crainte fatale,
Tristes pressentiments, vous voilà donc remplis!
Funeste trahison d'une indigne rivale,
Noir's crimes de l'amour, restez-vous impunis?

Hélas! dans mon effroi timide,

Je ne soupçonnois pas, cher et fidèle époux,
De quelle main perfide

Te viendroient de si rudes coups.

Je connois trop ton cœur, le sort qui nous sépare
Terminera tes jours:

Et je n'attendrai pas qu'une main moins barbare
Des miens vienne trancher le cours.

Tourments des tendres cœurs, terreurs, crainte fatale,
Tristes pressentiments, etc.

Cacique redouté, quand cette heureuse rive
Retentissoit par-tout de tes faits glorieux,
Qui t'eût dit qu'on verroit ton épouse captive
Dans le palais de tes aïeux?

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