PERSONNAGES. LE CACIQUE de l'île de Guanahan, conquérant d'une partie des Antilles. DIGIZÉ, épouse du Cacique. CARIME, princesse américaine. COLOMB, chef de la flotte espagnole. LE GRAND-PRÊTRE des Américains. NOZIME, Américain. TROUPE DE SACRIFICATEURS AMÉRICAINS. TROUPE D'ESPAGNOLS et d'espagnoles de la flotte. TROUPE D'AMÉRICAINS et d'amÉRICAINES. La scène est dans l'île de Guanahan. DU NOUVEAU MONDE'. ACTE PREMIER. Le théâtre représente la forêt sacrée où les peuples de Guanahan venoient adorer leurs dieux. SCÈNE I LE CACIQUE, CARIME. LE CACIQUE. Seule en ces bois sacrés! eh! qu'y faisoit Carime? CARIME. Eh! quel autre que vous devroit le savoir mieux? LE CACIQUE. Loin de vous condamner, j'honore la vertu Cent présages affreux, troublant notre assurance, Composée à Lyon en 1740. Voyez Confessions, liv. vII. Rousseau avoit fait la musique du premier acte. Semblent du ciel annoncer le courroux; Si nos crimes ont pu mériter sa vengeance, Vos vœux l'éloigneront de nous En faveur de votre innocence. CARIME. Quel fruit espérez-vous de ces détours honteux? LE CACIQUE. Quoi! vous parlez d'amour en ces moments funestes ! L'amour échauffe-t-il des cœurs glacés d'effroi? CARIME. Quand l'amour est extrême, Que la froideur De ce qu'on aime? Si Digizé vous vantoit son ardeur, LE CACIQUE. Digizé m'appartient par des nœuds éternels; CARIME. L'amour et le devoir s'accordent rarement: Mais le devoir éteint la flamme. Si l'hymen a pour vous des attraits si charmants, Redoublez avec moi ses doux engagements: Mon cœur consent à ce partage: C'est un usage établi parmi nous. LE CACIQUE. Que me proposez-vous, Carime? quel langage! CARIME. Tu t'offenses, cruel, d'un langage si doux! Ah! si tes yeux ont plus de charmes, LE CACIQUE. Cessez de vains regrets, votre plainte est injuste: Carime, ainsi que vous, en cet asile auguste, CARIME. Quoi! barbare, au mépris tu joins enfin l'outrage! A mon amour trahi tu préfères ma rage; LE CACIQUE. Que son sort est à plaindre! Mais les fureurs n'obtiendront rien. Ses pleurs étoient bien plus à craindre. SCÈNE II. LE CACIQUE. Lieu terrible, lieu révéré, Séjour des dieux de cet empire, De ses sens effrayés dissipez ce délire ; Je me le cache en vain, moi-même je frissonne; Lieu terrible, lieu révéré, Séjour des dieux de cet empire, De ses sens effrayés dissipez ce délire; Mais quel est le sujet de ces craintes frivoles? Ou l'aspect effrayant d'un astre ensanglanté ? |