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pas ajouté cette idée dans la définition de l'accompagnement. Il est à croire que si je l'y eusse ajoutée, il me l'eût reproché davantage, ou du moins avec plus de raison. Ce n'est pas sans répugnance que j'entre dans l'examen de cette addition qu'il exige: car, quoique le principe que je viens d'examiner ne soit pas en lui-même plus vrai que celui-ci, l'on doit beaucoup l'en distinguer, en ce que, si c'est une erreur, c'est au moins l'erreur d'un grand musicien qui s'égare à force de science. Mais ici je ne vois que des mots vides de sens, et je ne puis pas même supposer de la bonne foi dans l'auteur qui les ose donner au public comme un principe de l'art qu'il professe.

L'harmonie représente un corps sonore! Ce mot de corps sonore a un certain éclat scientifique; il annonce un physicien dans celui qui l'emploie : mais en musique, que signifie-t-il? Le musicien ne considère pas le corps sonore en lui-même, il ne le considère qu'en action. Or, qu'est-ce que le corps sonore en action? c'est le son: l'harmonie représente donc le son. Mais l'harmonie accompagne le son : le son n'a donc pas besoin qu'on le représente, puisqu'il est là. Si ce galimatias paroît risible, ce n'est pas ma faute assurément.

Mais ce n'est peut-être pas le son mélodieux que l'harmonie représente; c'est la collection des sons harmoniques qui l'accompagnent. Mais ces sons

ne sont que l'harmonie elle-même: l'harmonie représente donc l'harmonie, et l'accompagnement l'accompagnement.

Si l'harmonie ne représente ni le son mélodieux, ni ses harmoniques, que représente-t-elle donc? Le son fondamental et ses harmoniques, dans lesquels est compris le son mélodieux. Le son fondamental et ses harmoniques sont donc ce que M. Rameau appelle le corps sonore. Soit; mais

voyons.

Si l'harmonie doit représenter le corps sonore, la basse ne doit jamais contenir que des sons fondamentaux; car, à chaque renversement, le corps sonore ne rend point sur la basse l'harmonie renversée du son fondamental, mais l'harmonie directe du son renversé qui est à la basse, et qui, dans le corps sonore, devient ainsi fondamentale. Que M. Rameau prenne la peine de répondre à cette seule objection, mais qu'il y réponde clairement, et je lui donne gain de cause.

Jamais le son fondamental ni ses harmoniques, pris pour le corps sonore, ne donnent d'accord mineur; jamais ils ne donnent la dissonance : je parle dans le système de M. Rameau. L'harmonie et l'accompagnement sont pleins de tout cela, principalement dans sa pratique: donc l'harmonie et l'accompagnement ne peuvent représenter le

corps sonore.

Il faut qu'il y ait une différence inconcevable entre la manière de raisonner de cet auteur et la mienne; car voici les premières conséquences que son principe admis par supposition me suggère. Si l'accompagnement représente le corps soil ne doit fendre que les sons rendus par le corps sonore : or, ces sons ne forment que des accords parfaits; pourquoi donc hérisser l'accompagnement de dissonances?

nore,

Selon M. Rameau, les sons concomitants rendus par le corps sonore se bornent à deux, savoir, la tierce majeure et la quinte. Si l'accompagnement représente le corps sonore, il faut donc le simplifier.

L'instrument dont on accompagne est un corps sonore lui-même, dont chaque son est toujours accompagné de ses harmoniques naturels. Si donc l'accompagnement représente le corps sonore, on ne doit frapper que des unissons; car les harmoniques des harmoniques ne se trouvent point dans le corps sonore. En vérité, si ce principe que je combats m'étoit venu, et que je l'eusse trouvé solide, je m'en serois servi contre le système de M. Rameau, et je l'aurois cru renversé.

Mais donnons s'il se peut de la précision à ses idées; nous pourrons mieux en sentir la justesse ou la fausseté.

Pour concevoir son principe, il faut entendre

:

que le corps sonore est représenté par la basse et son accompagnement, de façon que la basse fondamentale représente le son générateur, et l'accompagnement ses productions harmoniques. Or, comme les sons harmoniques sont produits par la basse fondamentale, la basse fondamentale, à son tour, est produite par le concours des sons harmoniques. Ceci n'est pas un principe de système, c'est un fait d'expérience connu dans l'Italie depuis long-temps.

Il ne s'agit donc plus que de voir quelles conditions sont requises dans l'accompagnement pour représenter exactement les productions harmoniques du corps sonore, et fournir par leur concours la basse fondamentale qui leur convient.

Il est évident que la première et la plus essentielle de ces conditions est de produire, à chaque accord, un son fondamental unique: car si vous produisez deux sons fondamentaux, vous représentez deux corps sonores au lieu d'un; et vous avez duplicité d'harmonie, comme il a déja été observé par M. Serre.

Or, l'accord parfait, tierce majeure, est le seul qui ne donne qu'un son fondamental; tout autre accord le multiplie. Ceci n'a besoin de démonstration pour aucun théoricien ; et je me contenterai d'un exemple si simple, que, sans figure ni note, il puisse être entendu des lecteurs les moins ver

sés en musique, pourvu que les termes leur en soient connus.

Dans l'expérience dont je viens de parler, on trouve que la tierce majeure produit pour son fondamental l'octave du son grave, et que la tierce mineure produit la dixième majeure ; c'est-à-dire que cette tierce majeure ut mi vous donnera l'octave de l'ut pour son fondamental, et que cette tierce mineure mi sol vous donnera encore le même ut pour son fondamental. Ainsi tout cet accord entier ut mi sol ne vous donne qu'un son fondamental; car la quinte ut sol, qui donne l'unisson de sa note grave, peut être censée en donner l'octave: ou bien, en descendant ce sol à son octave, l'accord est un à la dernière rigueur; car le son fondamental de la sixte majeure sol mi est à la quinte du grave, et le son fondamental de la quarte sol ut est encore à la quinte du grave. De cette manière, l'harmonie est bien ordonnée et représente exactement le corps sonore. Mais au lieu de diviser harmoniquement la quinte en mettant la tierce majeure au grave et la mineure à l'aigu, transposons cet ordre en la divisant arithmétiquement, nous aurons cet accord parfait tierce mineure, ut mi bémol sol, et prenant d'autres notes pour plus de commodité, cet accord semblable, la ut mi.

Alors on trouve la dixième fa pour son fonda

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