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un médecin qui retiendrait dans sa main, comme Fontenelle, les vérités qu'elle contient, serait indigne de la profession dont il s'honore.

La traduction que nous offrons au public est accompagnée de beaucoup de citations, non pas par indigence d'observations personnelles, mais nul n'est prophète en son pays, surtout en Belgique, et si nos propositions n'étaient soutenues d'aucun appui étranger, elles courraient le risque d'être rejetées avec dédain. En tous cas, la question que nous reproduisons n'est pas inopportune; les moyens de remédier à la qualité nuisible de l'air des hôpitaux et des prisons sont encore sujets à contestation.

Trois systèmes ont été mis à l'essai dans les hôpitaux de Paris.

Dans le premier système (Duvoir), le chauffage se fait à l'aide de l'eau chaude; pour le second (Thomas et Laurent), à l'aide de la vapeur; pour le troisième (Van Hecke), avec de l'air chaud seulement.

D'après les études faites par la commission d'examen, il paraît que les procédés de M. Van Hecke méritent jusqu'à ce jour la préférence. Cependant ces moyens d'aérage n'ont pas encore obtenu l'assentiment général, il semble que ces grands appareils à circulation d'eau, de vapeur ou d'air chaud ont leurs inconvénients, voire même leurs dangers. D'ailleurs, il en résulte un bien grave inconvénient, celui de nécessiter des dépenses considérables hors de toute proportion avec les ressources de la plupart des établissements de charité, inconvénient d'autant plus sensible qu'il est fort facile, à l'aide d'ouvertures placées vers les parties supérieures des salles et de cheminées d'appel, disposées vers les parties inférieures, de ventiler convenablement.

Dans son étude sur les hôpitaux de Paris, le docteur Husson manifeste le désir que l'administration ait à sa disposition un instrument facile à installer à peu près partout, sans grands frais, et permettant d'augmenter d'une manière très-notable la ventilation. Il paraît facile, dit-il, d'obtenir ce résultat au moyen d'un appareil de la forme d'un poële, renfermant un foyer à coke et muni d'une double enveloppe, disposé de telle sorte que l'air aspiré dans la salle par la partie inférieure, s'élève dans un conduit concentrique au tuyau de fumée et s'échappe ensuite dans l'atmosphère.

Les principes de ce système ressemblent beaucoup à ceux de l'auteur que nous traduisons; du reste, l'appareil proposé par M. Husson a été appliqué depuis plusieurs années, à l'hôpital Sainte-Élisabeth d'Anvers, par M. le docteur Van Haesendonck.

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Le système d'aération présumé l'un des meilleurs jusqu'à présent, dit M. le docteur Larrey, celui de Lariboisière, ne soustrait pas cependant ce bel hôpital aux complications morbides observées autre part : les érysipèles, les > affections diphthériques et les fièvres puerpérales... Si ingénieux que soient les différents systèmes de MM. Léon Duvoir, Leblanc, Thomas et Laurent, Van Hecke, Grouvelle et Chevalier, etc., etc., il ne semblent pas avoir jusqu'à › présent une influence sensible sur la diminution de la mortalité..., ils semblent disperser les miasmes sur place, sans les expulser ou sans les détruire.

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Quoi qu'il en soit du perfectionnement de la ventilation artificielle, l'aération naturelle par les fenêtres opposées des salles reste le moyen le plus > simple et le plus facile à employer en y joignant des ouvertures mobiles à leur partie supérieure ou des vasistas pour préserver les malades du contact direct de l'air. Cette disposition existe dans la plupart des hôpitaux de la » marine, dont le chauffage est généralement établi par de grandes cheminées, ⚫ si favorables en même temps à l'élimination des miasmes délétères qu'elles > attirent en les chassant au dehors, et à la récréation des malades, qui s'at> tristeraient de ne point voir la lumière du foyer.» (Notice sur l'hygiène des hôpitaux militaires, par le baron Larrey.)

« Cette question difficile est soumise actuellement à de nouvelles recherches > par une commission mixte, dans laquelle se trouvent plusieurs membres de › l'Académie des sciences. Il s'agit de la ventilation par aspiration, système › procédant de l'idée ancienne des cheminées d'appel et que le célèbre Percy semble avoir proposé le premier en le soumettant à l'appréciation du conseil › de santé des armées et au jugement de l'institut. » (Larrey.)

Nos lecteurs peuvent donc aisément comprendre que l'opuscule de Nahuys est digne encore de l'attention de ceux qui s'intéressent à l'hygiène publique, et que la question, dont la solution lui valut le prix, pourrait encore une fois être remise au concours.

QUELLE EST LA QUALITÉ NUISIBLE QUE L'AIR CONTRACTE DANS LES HÔPITAUX ET LES PRISONS, ET QUELS SONT LES MEILLEURS MOYENS D'Y REMÉDIER? Le plus grand des biens auquel l'homme puisse aspirer ici-bas, c'est la santé; présent inestimable, dont Dieu fit l'attribut principal de la vie. Ce n'est qu'en la possédant que la vie de l'homme est complète et qu'il lui est permis de jouir de toutes les délices capables de rendre son existence heureuse et agréable.

Si, donc, la possession d'un tel bien est d'un si grand prix, la perte en sera d'autant plus déplorable que le retour à la santé sera plus difficile, sinon impossible. Aussi n'est-il rien de plus digne de pitié que le spectacle de la maladie chez ceux de nos semblables qui, condamnés aux tortures de la misère, sont réduits à un dénuement complet, quand la charité publique ne leur vient en aide. Ils sont donc bien dignes d'éloges, les citoyens, dont le cœur s'émeut aux plaintes des pauvres, ceux qui s'ingénient de toutes façons pour les secourir et qui recherchent les meilleurs moyens de leur rendre la santé qu'ils ont perdue. Plus que tous les autres vous êtes dignes de la reconnaissance publique, trèssavants académiciens, quand, animés comme en ce moment d'un zèle remarquable, en faveur de vos frères souffrants, vous mettez au concours la solution d'un problème qui intéresse au plus haut degré la santé de la classe indigente.

Ce nouvel exemple d'humanité et de piété doit embraser d'une flamme non moins vive les cœurs de ceux qui trouvent dans la charité d'autant plus de plaisir qu'ils consacrent plus particulièrement leur temps et leurs efforts à la

conservation de la santé de leur prochain et à son rétablissement lorsqu'elle est dérangée.

C'est ce motif qui me fait entreprendre l'étude de la question que vous avez posée, et qui m'enhardit à vous soumettre les réflexions que m'ont suggérées une longue fréquentation des hôpitaux et les observations que j'y ai recueillies. Si le but que vous nous proposez est atteint, je m'en réjouirai franchement, non pour le vain motif d'une satisfaction personnelle, mais pour le soulagement qu'en pourront retirer les pauvres malades.

La question que vous soumettez aux concurrents se divise en deux parties: 1° Quelle est la qualité nuisible que l'air contracte dans les hôpitaux et les prisons? 20 Par quels moyens cette qualité nuisible de l'air peut-elle être corrigée ou détruite?

Nous suivrons cette division, en débutant par la première :

1re PARTIE.

Quelle est la qualité nuisible que contracte l'air dans les hôpitaux et les prisons?

Pour procéder avec ordre il faut considérer: 1° les causes susceptibles de produire l'infection; 2o en rechercher la nature véritablement nuisible et, celle-ci découverte, en démontrer les effets malfaisants dans les hôpitaux et les prisons.

1re SECTION.

Des causes propres à produire la qualité nuisible de l'air.

Depuis longtemps, ce fût un axiome dans l'art de guérir, qu'avant que d'entreprendre la cure d'une maladie, il faut en découvrir les causes. De la connaissance de celles-ci dépend, en effet, le succès de nos remèdes. Lorsque les causes du mal sont évidentes, il est permis d'augurer de la possibilité ou de l'impossibilité de la guérison, et de choisir les remèdes les plus efficaces pour obtenir le rétablissement de la santé; tout ce que nous prescrivons présente alors un cachet de sûreté, qui fait espérer qu'au cas où le succès ne cadrerait pas avec notre dessein, au moins les remèdes, conformes aux règles de l'art, ne causeront jamais aucun dommage au malade, quoique en apparence ils ne lui aient guère profité. Sans cette attention, nous marcherions en aveugles; car, si dans l'insouciance de l'étiologie nous nous appuyons uniquement sur les moyens de combattre les symptômes, notre conduite sera fatalement frappée d'incertitude et d'erreurs. Plus nous prescrirons alors de médicaments, plus souvent aussi nous nous écarterons de la source du mal, en nous laissant entrainer ainsi de méprises en méprises. Or ces égarements sont d'autant plus condamnables, que la vie et la santé du malade sont plus en péril; circonstance dont tout honnête homme doit éviter d'encourir le reproche. Si donc la connaissance des causes d'une maladie qui affecte un seul homme est d'une nécessité si grande, combien plus imperieuse ne le sera-t-elle pas dans l'occurrence d'une infection qui frappe une population presque entière, et cela avec d'autant plus de force que la scène se passe dans les hôpitaux chez des malades dont la santé est déjà minée par d'autres infirmités, et dans les prisons où les détenus

sont affaiblis par le remords de leurs crimes et par la crainte incessante des châtiments qu'ils ont mérités.

Telles sont les raisons qui me poussèrent à examiner, avec tout le zèle dont je suis capable, les causes qui rendent dans ces lieux la qualité de l'air si contraire à la guérison et à la convalescence des malades.

Ces causes peuvent être comparées à des ruisseaux qui se confondent dans un fleuve d'infections immense; pour arriver au desséchement du fleuve il importe d'en rechercher les sources, à l'effet de les tarir ou d'en détourner le cours (1).

Rien donc de plus naturel que de commencer par l'examen scrupuleusement attentif de la première partie du problème.

Comme les causes de cette infection diffèrent quelque peu dans les hôpitaux et dans les prisons, nous en traiterons séparément.

TITRE 1er. Des causes qui rendent l'air nuisible dans les hôpitaux. Elles sont nombreuses. On les divise en deux classes: causes efficientes, c'està-dire dont la présence détermine immédiatement l'infection; et adjuvantes, celles qui en favorisent le développement.

Causes efficientes. — 1o La transpiration des malades, surtout de ceux qui ont cette évacuation copieuse, colliquative, fétide; 2° les évacuations alvines, l'urine surtout de ceux qui ont la fièvre putride; 3o les ulcères fétides, sordides, gangréneux, les grandes suppurations; 4° les ordures répandues sur le sol, comme appareils, emplâtres, cataplasmes des blessés, crachats, urine, sang et les immondices ramassées au dehors, 5o un chauffage excessif, tel qu'on le voit dans quelques hôpitaux; 6° l'entassement d'un grand nombre de malades dans une même salle.

Causes adjuvantes.

1° L'emplacement des hôpitaux; 2o leur mode de construction; 5° le défaut ou l'insuffisance des mesures nécessaires à l'assainissement de l'hôpital.

CHAPITRE 1er. Des causes efficientes.

Transpiration des malades (2).—Personne n'ignore que le corps de l'homme est tout entier le siége d'une exsudation continue; et que, pendant l'état de santé, il s'en échappe, non pas seulement les particules aqueuses les plus ténues, mais aussi des molécules âcres, subtiles, superflues, oléo-salines, nuisibles à l'économie animale; il faut ajouter que cette évacuation surpasse en quantité la somme de toutes les autres, ainsi que l'ont démontré à l'évidence les expé

(1) Tout le monde est d'accord sur la nécessité de maintenir l'air dans un état de pureté et de procéder par conséquent à son libre, prompt et continuel renouvellement. Cependant, il faut bien l'avouer, il est peu de lieux publics où l'on se préoccupe du renouvellement de l'air. Les théâtres, les écoles, les salles de danse et gymnases, les casernes, les hôpitaux, restent plongés dans le méphitisme qui empoisonne et qui finit par tuer.

(2) Le docteur Kiel a démontré que dans l'espace de vingt-quatre heures, il sort du corps humain trente-neuf onces de vapeurs ou exhalaisons qui transsudent continuellement (Genette. Purification de l'air croupissant, 1767).

riences faites en Italie, en Angleterre et en Hollande par Sanctorius, Keilius et Gorterus.

Si dans l'état de santé, où toutes les humeurs sont intactes, cette fonction consiste dans l'élimination des matières inutiles et nuisibles, que ne sera-t-elle pas dans l'état de maladie? Le produit en sera plus ou moins pernicieux, suivant que la masse des humeurs sera plus ou moins altérée. Comme le résidu de la perspiration prend sa source dans les liquides qui circulent dans le corps, qu'elle en comprend les parties hétérogènes, incommodes, il s'ensuit que plus ces liquides seront altérés, âcres, corrompus, plus aussi sera pernicieuse la matière sécrétée dans l'office de la perspiration. Donc elle doit être d'une très-mauvaise nature, pendant la durée des maladies, où les humeurs revêtent un caractère prononcé de pourriture et d'acrimonie; car par l'effet de la décomposition des éléments qui constituent l'ensemble intime et proportionnel de ces humeurs, et d'où dépend leur bonne qualité, il se fait une décombinaison, en sorte que les parties huileuses mues dans un lieu chaud, trop vite ou trop lentement, perdent leur caractère inoffensif, se corrompent, s'atténuent, se volatilisent; et que les principes salins d'autre part s'exaltent et sont disposés à contracter l'alcalescence volatile.

L'atténuation, la dissolution des liquides qui entrent dans l'organisation animale, n'ont pas seulement pour effet d'accroître la quantité de la matière sécrétée, à tel point que la perspiration insensible devienne sensible, et qu'il semblerait que les malades se fondent en sueurs excessives, mais le caractère du produit de ces transpirations copieuses change au point qu'il devient fétide, pernicieux, contagieux, par la raison que les parties aqueuses de l'exsudation entraînent avec elles en grande proportion des matières grasses, corrompues, altérées, décomposées et des sels volatils. Nous observons de pareilles sueurs dans les maladies pestilentielles, épidémiques, malignes, putrides ou dans celles qui d'inflammatoires se transforment en fièvres putrides, vénériennes, hectiques et dans beaucoup d'autres encore (1).

Dans le cours de ces affections les sueurs sont souvent incommodes aux assistants, sont quelquefois intolérables aux malades eux-mêmes.

D'un caractère plus bénin, mais non pas inoffensif, paraissent aussi les (1) Quoique la fièvre d'hôpital ou de prison puisse différer en espèce de la véritable peste, on peut cependant la regarder comme une maladie du même genre, puisqu'elle provient d'une cause similaire et qu'elle est accompagnée de symptômes semblables. La fièvre pestilentielle qui paraît tous les ans à Constantinople et qui a tant de ressemblance avec celle de nos hôpitaux et de nos prisons ne s'appelle peste, comme l'a appris le docteur Mordach Makensie, qui a résidé trente ans en cette ville, que lorsqu'elle est accompagnée de bubons et de charbons et peut-être cela est-il la meilleure distinction qu'on puisse faire. On peut encore démontrer davantage la ressemblance de cette maladie avec une véritable peste par l'événement suivant :

On mit à bord des mêmes vaisseaux qui portaient les malades, un paquet de vieilles tentes qui leur servirent de couverture de lit. Ces tentes ayant besoin de réparation, on les mit entre les mains d'un ouvrier de Gand; il employa vingt-trois compagnons pour les mettre en état, mais ces infortunés se virent bientôt saisis de la maladie, qui en enleva dix-sept, quoiqu'ils n'eussent communiqué d'aucune autre manière avec les personnes qui en étaient attaquées.

PRINGLE.

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