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A la rapidité près de son allure, dit le professeur, dans sa clinique de > l'Hôtel-Dieu, cette espèce de phthisie aiguë, qu'il faut appeler phthisie rapide, présente les mêmes phénomènes durant la vie, et après la mort les mêmes lésions anatomiques que la phthisie ordinaire, dont la marche est généralement chronique. C'est la même maladie dont les manifestations par› courent leur évolution dans un temps beaucoup plus court qu'elles ne le font habituellement, de même que par opposition, dans d'autres cas, ces manifes⚫tations restent obscures, masquées par des accidents qui les font méconnaître; › c'est là la forme latente de la phthisie. Latente ou aiguë, régulière ou irré

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• gulière, c'est, je le répète, toujours la même maladie; mais il n'en est pas ⚫ ainsi de cette autre espèce de phthisie aiguë, que l'on désigne plus communé⚫ment sous le nom de phthisie galopante.

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Celle-ci a pour caractère anatomique la présence dans les poumons de granulations, d'un gris jaunâtre, demi-transparentes, criblant toute l'épais>seur du parenchyme, depuis le sommet de l'organe jusqu'à sa base; ce carac» tère spécifique, reconnu par des hommes d'une grande autorité, par Rokitansky, entre autres, n'est aujourd'hui contesté par personne; mais on est › loin d'être d'accord sur la nature de ces granulations. ›

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Tuberculose pulmonaire. - Des effets de l'acide arsénieux dans cette diathèse pathologique. Les effets physiologiques et thérapeutiques de l'arsenic ont donné lieu à des opinions contradictoires, et actuellement encore il est permis de se demander si cette substance ne jouit pas en thérapeutique, dans certains cas, d'une réputation usurpée et si bien réellement ceux qui en rapportent des succès dans la tuberculose pulmonaire, à la période de ramollissement, ont observé son influence sans prévention et ont convenablement fait dans ces états morbides les expériences qui justifieraient alors l'emploi de cet agent si actif. Si l'on s'en rapporte aux assertions de MM. Trousseau et Pidoux, insérées dans leur Traité de thérapeutique, l'usage de l'arsenic serait assez répandu dans quelques contrées de la Basse-Autriche et de la Styrie, surtout dans les montagnes qui les séparent de la Hongrie ; les paysans de ces contrées auraient selon eux l'habitude de manger de l'arsenic, qu'ils achètent à des herboristes ambulants, à des colporteurs, qui l'acquièrent de leur côté des ouvriers en verreries hongroises, des vétérinaires et des charlatans.

Les arsénicophages ont un double but; d'abord ils veulent se donner par > cette pratique dangereuse un air sain et frais, et puis un certain degré d'em• bonpoint.

Ce sont le plus souvent de jeunes paysans et paysannes qui ont recours à ⚫ cet expédient, par coquetterie et par désir de plaire; et il est en effet remarquable avec quel succès ils atteignent ce but, car ces jeunes toxicophages par excellence se distinguent par la fraîcheur de leur teint et par une › apparence de santé florissante.

Le second avantage que les arsénicophages veulent obtenir, c'est de se › rendre comme ils disent, plus volatils, c'est-à-dire de faciliter la respiration

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pendant la marche ascendante. A chaque longue excursion dans les montagnes, ils prennent un petit morceau d'arsenic qu'ils laissent fondre peu à » peu dans la bouche. L'effet en est surprenant; ils montent aisément les hau»teurs qu'ils ne sauraient gravir qu'avec la plus grande peine sans cette pratique. > La quantité d'arsenic avec laquelle commencent les toxicophages représente un petit morceau de la grandeur d'une lentille, ce qui équivaut à un peu > moins d'un demi-grain. Ils s'arrêtent à cette dose qu'ils avalent plusieurs fois par semaine, le matin à jeun, pendant assez longtemps, pour s'y habituer. Alors ils augmentent la quantité insensiblement, avec précaution, au fur et » à mesure que la dose habituelle refuse son effet (1). ·

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Plus loin en parlant de l'action thérapeutique de ce médicament, ils ajoutent : « Qu'on veuille bien se rappeler ici les observations faites sur les toxicophages, › et notamment la coutume établie chez certains montagnards, d'avaler un peu > d'arsenic pour se donner de l'haleine et du jarret, et comme ils disent, pour se rendre volatils, au moment où ils se disposent à faire une course dans les » montagnes. Qu'on n'oublie pas non plus cette pratique usitée chez les voitu»riers de ces mêmes pays, qui consiste à mêler de l'arsenic à l'avoine des chevaux, lorsqu'ils ont à faire une montée laborieuse.

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Guidé par ces indices, le docteur Koepl eut l'idée d'essayer si l'arsenic n'aurait pas quelque influence sur certains troubles des fonctions respiratoires. » Il donna en conséquence la liqueur de Fowler à quelques individus atteints d'asthme, et il déclare avoir obtenu de ce moyen des avantages marqués. ▾ Plus loin les mêmes auteurs ajoutent Nos essais ont été faits sur des > phthisiques et sur des malades atteints de catarrhe chronique du larynx chez les phthisiques, nous avons obtenu non pas des guérisons, mais tout au moins une suspension des accidents, fort extraordinaire dans une maladie dont rien ne retarde la marche fatale. »

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Suivant d'autres auteurs qui ont expérimenté l'acide arsénieux, ce médicament ne donnerait pas lieu au bout d'un certain temps à d'autres effets qu'à un embarras gastrique caractérisé par la fièvre, l'inappétence, la céphalalgie, la soif, la langue rouge et tous les signes enfin symptomatiques d'une inflammation du tube digestif. Si l'on augmente la dose, malgré ces accidents, on arrive à éprouver des envies de vomir et même des vomissements. Nous sommes d'autant plus porté à admettre plutôt l'opinion de ces derniers que nous avons pu expérimenter la chose sur nous-même, en prenant la liqueur de Fowler à la dose de dix gouttes par jour en commençant. Jamais nous n'avons pu dépasser vingt gouttes sans éprouver ces divers troubles du côté du tube digestif. De plus, nous avons vu prendre l'arsenic par doses progressives à quatre malades atteints de tuberculose pulmonaire bien confirmée et sans jamais observer aucune amélioration du côté de l'affection thoracique; chez tous les quatre par contre nous avons vu, à mesure que la dose d'acide arsénieux était augmentée,

(1) Voir dans notre tome XVIII, page 405, la communication de M. Koepl, relative à l'arsénicophagie.

survenir tous les symptômes qui dénotent une inflammation du tube digestif. L'acide arsénieux fut administré sous forme d'un liquide analogue au soluté de Boudin et préparé à la pharmacie de l'hôpital Saint-Pierre, de manière que chaque gramme de la liqueur renfermait un milligramme d'acide arsénieux.

La première malade chez laquelle l'acide arsénieux a été mis en usage, était une jeune fille de 21 ans, qui avait une caverne au sommet du poumon gauche et chez laquelle plusieurs médications antérieures n'avaient aucunement amélioré la maladie.

Le 11 octobre, il lui fut administré, dans une potion, 6 milligrammes d'acide arsénieux; puis, chaque jour on augmenta la dose de 1 milligramme. Le 15 octobre, vers cinq heures de l'après-midi, la malade fut examinée, elle avait pris ce jour-là 9 milligrammes d'acide arsénieux, et voici ce que nous observâmes, bien entendu qu'il était assez difficile, dans le cas présent, de faire la part du médicament et celle de la maladie. La langue était rouge; la malade manifestait de l'inappétence (lors de son entrée elle avait encore de l'appétit). Elle avait eu ce jour-là deux selles liquides (lors de son entrée, les selles étaient normales). Du côté de la poitrine, il n'y avait pas de modification; la toux était aussi fréquente, l'expectoration n'avait pas changé et l'on obtenait par l'auscultation les mêmes phénomènes stethoscopiques. Le pouls avait de la dureté et donnait trente pulsations au quart. La peau était chaude et sèche.

Le 19 octobre, elle prit 15 milligrammes d'acide arsénieux, elle eut trois selles liquides; la langue était rouge, elle se plaignait d'inappétence et d'envies de vomir, ce qu'elle attribuait à sa potion, bien qu'elle ne sût pas qu'elle contint aucun agent actif et qu'elle ne lui fit éprouver aucune saveur désagréable en la prenant. Elle ressentait aussi une violente céphalalgie, le pouls était dur et donnait trente-trois pulsations au quart. A partir de ce jour, on diminua les doses d'arsenic; les phénomènes d'irritation du côté du tube digestif cessèrent complétement, et la malade sortit quelque temps après sans jamais avoir présenté d'amélioration du côté de l'affection pulmonaire.

A la même époque une autre jeune fille, âgée de vingt ans, et qui avait une caverne très-étendue au sommet du poumon gauche, fut soumise à la même médication; son expectoration était purulente, elle était en proie à l'insomnie par suite des douleurs qu'elle éprouvait dans le côté gauche et de la toux qui la tourmentait toute la nuit. M. Pigeolet débuta chez elle, le 11 octobre, par 5 milligrammes d'acide arsénieux. Ce jour-là, on avait constaté que la langue était recouverte d'un léger enduit blanchâtre, que la malade conservait encore un peu d'appétit. Le pouls donnait trente pulsations au quart, la peau était un peu chaude et couverte de sueur.

Le 13 octobre, elle était arrivée progressivement à prendre 9 milligrammes d'acide arsénieux. Ce jour-là, la langue de la malade était rouge, elle eut trois selles liquides, ce qui ne lui était pas arrivé précédemment; elle se plaignait d'une violente céphalalgie. Son point de côté et tous les autres symptômes de la tuberculose ne présentaient, du reste, aucun amendement. Le pouls offrait de la dureté et donnait trente-deux pulsations au quart; la peau était chaude et sèche.

Le 18 octobre, elle était arrivée à prendre 14 milligrammes d'acide arsénieux; elle se plaignait d'envies de vomir; la langue était rouge, le pouls dur donnait trente-trois pulsations au quart. La céphalalgie persistait toujours. On fut obligé, à partir de ce moment, de diminuer la dose d'acide arsénieux; les accidents du côté du tube digestif diminuèrent insensiblement, mais la tuberculose ne s'était pas amendée sous l'influence du médicament, lorsque la malade sortit de l'hôpital quelques jours après la cessation de son emploi.

Les mêmes accidents se manifestèrent chez une femme de 42 ans, qui avait une caverne au sommet de chaque poumon, et chez laquelle on débuta également par 5 milligrammes d'acide arsénieux. Le 16 octobre, elle en prenait 9 milligrammes; déjà il se manifestait des troubles du côté du tube digestif; la langue était rouge sur les bords et à la pointe; elle avait quatre selles liquides; la peau était chaude, sèche, le pouls donnait 56 pulsations au quart. Le 17 octobre, on était obligé également de diminuer la dose d'arsenic dont elle prenait 10 milligrammes, parce que la malade éprouvait des envies de vomir, de la diarrhée et des accès febriles plus violents que les jours précédents.

Enfin, un individu, âgé de 20 ans, qui portait des tubercules ramollis au sommet du poumon droit, fut pris de vomissements et de diarrhée, alors qu'il ne prenait encore que 9 milligrammes d'acide arsénieux; on avait également débuté chez lui par 5 milligrammes, et l'on n'avait augmenté la dose qu'insensiblement et avec beaucoup de précautions.

Comme on le voit, l'arsenic administré à ces quatre tuberculeux ne modifia pas avantageusement leur état, mais au bout d'un temps qui variait, cette médication donna lieu à une irritation gastro-intestinale. Certainement il n'y a pas de conclusion absolue à tirer de ces quatre observations, mais si l'on s'en rapportait, d'un autre côté, aux assertions des auteurs, on compterait sur des succès que la plupart du temps on ne pourrait pas obtenir. Il reste bien entendu à apprécier si, dans les cas où il y aurait tolérance, on ne serait pas plus heureux, en continuant plus longtemps l'usage de la médication. M. Pigeolet a fait des essais, à plusieurs époques, sur des tuberculeux arrivés à la période de ramollissement, et il n'a pas obtenu plus de succès de cette médication que dans cette dernière circonstance, et il a renoncé à soumettre à l'action de l'arsenic les affections pulmonaires tuberculeuses arrivées à la troisième période.

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divergence d'opinions sur la préférence à accorder à la méthode psychique ou somatique.

En général on admet que là, où le dérangement mental est le résultat d'une altération matérielle morbide du cerveauet cela prétend-on est le cas le plus fréquent - la cure somatique doit avoir la préférence; la cure psychique aide alors et soutient en second lieu.

Que là, où le dérangement intellectuel est sympathique, sans altération permanente de l'organe pensant, la méthode psychique est indiquée en premier lieu. Toutefois, on pense que celle-ci opère moins efficacement si elle n'est pas secondée par la première. On assigne au traitement médical le premier rang; la cure morale n'est que secondaire. On reconnaît cependant l'influence toute-puissante de la méthode moralisatrice. Les modificateurs moraux ont donné d'excellents résultats; dans plusieurs asiles et notamment à Meerenbergh, ils reçoivent une fréquente application, suivie d'effets qui contribueront à en accréditer l'importance.

L'isolement est aussi indiqué comme première condition de traitement. C'est un précepte généralement admis et d'absolue nécessité. On comprend l'impression que doit produire sur un malade troublé d'esprit, le nouveau monde dans lequel il est placé, surtout lorsque dans ce milieu règne l'ordre, la discipline dans la manière de vivre; où il trouve bonne nourriture, mobilité, travail, surtout en plein air; où il est soustrait à toutes les influences nuisibles; où il reçoit des soins tendres et charitables; conditions d'existence qui diffèrent singulièrement de celles que le malade avait dans le monde; moyens qui constituent les principaux leviers d'une bonne médication et qui souvent seuls contribuent à rétablir le malade.

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Méthode moralisante. — Les aliénés sont les premiers membres de la société qui méritent le secours de la charité publique. Ils sont d'autant plus dignes de pitié qu'ils ignorent l'infortune qui les accable.

Les administrations, les familles ne sauraient donc veiller assez tôt à ce que ces malades soient placés dans des conditions propres à soulager leur sort.

Douceur et humanité sont les points principaux qui doivent être observés à leur égard.

A Meerenbergh, la moralisation est pratiquée sur un large pied. Là, le traitement est plutôt moral et hygiénique que médical. M. le docteur Evers affirme que les agents moraux sont le plus efficaces lorsque le

trouble mental est le résultat d'excès de boissons, de misère, de privations, de chagrins, de tracasseries domestiques. Pour obtenir de bons effets, il importe de différencier les cas. On ne peut prescrire une cure psychique uniforme; elle doit être réglée, modifiée d'après chaque cas particulier. Le no-restraint y est très-largement et très-efficacement mis en pratique. Les cellules, les bains, les douches, les travaux agricoles, remplacent avec avantage les moyens disciplinaires et coercitifs. Aucune influence morale, psychique et diététique n'y est négligée; les employés, à tous les degrés, y prêtent leur bienveillant concours.

La mission la plus difficile que le médecin aliéniste ait à remplir, est celle de moraliser les malades. A cet effet, il doit avoir une profonde connaissance de l'homme; it doit être doué d'un cœur charitable. Plus il est calme, plus il est doux en parlant, plus il produit de l'effet sur un malade irrité, furieux.

Les admonitions, les avertissements, la persuasion, les bons conseils sont les moyens moraux auxquels on a recours pour les ivrognes avant leur sortie de l'asile. Parfois on tâche de produire une impression morale vive.

On défend de parler du sujet du délire; on tâche de persuader le malade. On a généralement admis le principe de la vie en commun. On attache une grande importance à environner les aliénés d'objets qui peuvent les distraire, les égayer. Un régime doux et humain a été substitué au régime rigoureux et barbare des temps antérieurs. Aujourd'hui l'impression seule d'un asile suffit parfois pour amener la guérison.

Parmi les agents moralisateurs, on doit indiquer l'action religieuse. En Hollande elle est beaucoup mise en pratique et produit de bons effets, chez les malades des différentes sectes catholiques, protestants et israélites. Plus de la moitié des aliénés assiste aux offices divins.

Dans tous les asiles néerlandais, on a établi et on entretient régulièrement des exercices religieux pour les diverses communions. Les aliénistes les plus distingués reconnaissent l'influence salutaire de la religion sur le moral. On observe que

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