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coloration bleue à laquelle donne naissance une quantité même impondérable de strych nine, en présence de ces matières, est, comme on sait, le signe le plus certain de la présence ou de l'absence de cette base, car le chlore que M. Pelletier a recommandé comme réactif spécifique sur la strychnine, agit d'une manière identique sur la vératrine, ainsi que l'expérience directe me l'a démontré.

La solution strychnique est-elle concentrée et ne contient-elle que peu d'acide tartrique, les bicarbonates y produisent immédiatement un précipité blanc affectant la forme cristalline, et la liqueur ne contient plus une trace de strychnine.

La brucine et les solutions des sels de cette base diffèrent complétement sous ce rapport des sels de strychnine; les bicarbonates alcalins n'y produisent pas le moindre trouble.

Les sels de quinine et de cinchonine peuvent également, à l'aide de ce moyen, être différenciés et séparés les uns des autres, la quinine n'étant pas précipitable en présence de l'acide tartrique, tandis que la cinchonine est précipitée par les deux bicarbonates alcalins.

Dans les solutions des sels de vératrine acidifiées par l'acide tartrique le bicarbonate sodique seul produit un précipité, le bicarbonate potassique n'en produit pas.

On voit donc qu'en faisant usage de la propriété que possède l'acide tartrique de masquer certaines bases pour les réactions des bicarbonates alcalins, on arrive à établir deux groupes d'alcaloïdes bien distincts dont le premier comprend ceux qui sont précipitables par le bicarbonate sodique et qui sont :

La cinchonine,
La narcotine,

La strychnine,

et la vératrine.

constamment masquée par l'acide tartrique, tandis que l'autre ne l'est point; l'emploi de ce moyen est donc précieux en ce qu'il permet de séparer bien nettement ces deux bases.

(Journal de pharmacie et de chimic, novembre 1845.)

Examen d'une urine verte; par M. Henri BRACONNOT, correspondant de l'Institut. Il y a environ vingt ans que M. le docteur Castara de Lunéville m'envoya, pour l'examiner, une urine qui tenait en suspension une matière très-divisée d'un bleu foncé qui la fit regarder comme du bleu de Prusse.

L'examen que je fis de cette substance me prouva qu'elle avait des caractères assez particuliers pour m'engager à lui donner le nom cyanourine. Je reconnus, en effet, que cette substance bleue était facilement altérable par un excès d'alcali, et que, sans pouvoir saturer les acides affaiblis, elle s'y dissolvait avec beaucoup de facilité en produisant des liqueurs transparentes brunâtres, qu'un excès un peu plus grand d'acide faisait passer au rouge vif (1). Je m'étais persuadé que cette matière n'était pas tellement rare dans certaines urines, qu'on ne la retrouvat quelquefois; cependant il ne parait pas que depuis l'époque où je l'ai fait connaître, elle ait été soumise à de nouvelles recherches. Dernièrement j'ai reçu du même M. Castara une autre urine rendue le matin par un de ses malades. Celle-ci a un aspect fort différent de celle dont je viens de parler. Elle n'offre aucun sédiment, elle est parfaitement transparente, d'une belle couleur vert d'émeraude. Son odeur est celle de l'urine récente, et, comme elle, rougit le papier bleu du tournesol. Un léger excès de potasse versée dans cette urine anéantit aussitôt sa couleur verte qui ne reparaît plus en ajoutant, avec précaution, un acide affaibli au mélange, qui n'of

Le deuxième, ceux qui sont masqués, fre plus que la couleur jaune normale de

c'est-à-dire

La quinine,
La morphine,
La brucine.

L'acide tartrique masque également la réaction de l'infusion de noix de galle pour toutes ces bases à l'exception de la cinchonine et de la strychnine, mais elle précipite abondamment les cinq autres, dès que l'acide a été neutralisé par l'ammoniaque; il est cependant à remarquer qu'un excès de cette dernière base redissout le tannate de brucine.

On voit de plus, et ce fait me paraît digne d'attention, que de deux bases qui se rencontrent dans la même plante, l'une est

l'urine.

L'eau de chaux versée dans cette urine y produit un précipité blanc de phosphate de chaux, tandis que la liqueur superstagnante neutre conserve sa belle couleur, laquelle disparaît par un excès d'eau de chaux.

Une petite quantité d'ammoniaque, ajoutée à la même urine, en sépare un précipité blanc et la liqueur conserve sa couleur verte; mais pour peu que l'ammoniaque soit en excès, la couleur verte disparait pour faire place au jaune citron, qui n'est plus rappelé au vert après la saturation de l'alcali par un acide.

(1) Voyez Annales de Chimie et de Physique, 2e série, t. 29, p. 252.

Un résultat semblable est obtenu en abandonnant pendant quelques jours à ellemême l'urine verte dont il s'agit; on la voit successivement passer de bas en haut à la couleur citrine en produisant un léger sédiment blanc tirant à peine au bleuâtre. Les acides sulfurique, chlorhydrique, nitrique, phosphorique, oxalique, affaiblis, changent la belle couleur de cette urine en un vert sale qui, au bout de quelque temps, devient rouge.

La dissolution d'alun n'altère point d'abord la couleur verte de cette urine, même en y ajoutant un peu d'ammoniaque pour précipiter une portion d'alumine qui paraît avec sa couleur blanche et la liqueur reste verte; mais elle finit, au bout de vingt-quatre heures, par perdre une couleur rougeâtre due à la réaction de l'acide de l'alun. Cette urine, concentrée par l'évaporation à une douce chaleur, perd en grande partie sa couleur verte et laisse un résidu qui devient rouge-brunâtre par suite de la concentration de l'acide libre de l'urine et de sa réaction sur la matière colorante. Ce résidu rouge-brun traité avec un peu de magnésie a laissé déposer un léger sédiment bleuâtre.

Quoique la matière colorante qui est particulière à cette urine s'y trouve en petite quantité, je crois néanmoins pouvoir conclure qu'elle est identique avec celle que j'ai fait connaître il y a longtemps sous le nom de cyanourine, puisque, comme cette dernière, elle bleuit avec les alcalis et rougit avec les acides. Je ne dois pourtant pas laisser ignorer que l'urine, dans son état naturel, renferme une matière peu connue, laquelle a aussi la propriété de rougir avec les acides affaiblis, après un contact plus ou moins prolongé. Il est presque inutile de faire observer que la couleur verte de l'urine que je viens d'examiner, résulte du mélange du jaune urinaire et du bleu de la cyanourine.

Au surplus cette urine verte m'a fourni les principaux éléments de l'urine à l'état normal, tel que l'urée et l'acide urique, tandis que ce dernier n'existait pas sensiblement dans l'urine bleue que j'ai examinée il y a vingt ans,

(Journ. de chimie med., novembre 1845.)

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d'exactitude qu'il semble comporter, car les vinaigres de vins et d'autres espèces renferment toujours soit des sels acides, soit des acides fixes qui saturent pour leur part une certaine quantité de sel alcalin. Or, en déduisant de la proportion de carbonate de soude employée à la saturation la quantité que sature réellement l'acide acétique contenu dans les vinaigres, on reconnait que le chiffre représentant cet acide pur est un peu trop élevé. C'est pour arriver à un résultat plus rigoureux que nous avons tenté divers essais qui permettront, nous le pensons, de se rapprocher de la vérité.

Le moyen que nous proposons ici est fort simple, il consiste à faire deux saturations successives par la même liqueur alcaline titrée, savoir: l'une sur un volume connu de vinaigre, l'autre sur le résidu de l'évaporation d'un volume égal de vinaigre. On conçoit aisément que la proportion d'alcali exigée pour saturer ce résidu de l'évaporation du vinaigre, étant soustraite de celle saturée par le vinaigre non évaporé, la différence représente exactement l'alcali saturé par l'acide acétique pur.

L'expérience suivante en offre un exemple concluant sur un échantillon de vinaigre du commerce qui nous avait été remis pour l'examiner.

La saturation faite au moyen d'une liqueur titrée contenant dans 100 centimètres cubes d'eau distillée 5 grammes de carbonate de soude pur et anhydre, ayant démontré qu'un décilitre de ce vinaigre exigeait 6gr., 50 de carbonate de soude sec, nous avons saturé par la même liqueur titrée le résidu laissé par l'évaporation à une douce chaleur, d'un décilitre du même vinaigre. Ce résidu n'a exigé pour sa saturation complète que Ogr., 55 de carbonate de soude sec.

Les 6gr., 50 de carbonate de soude employés pour saturer le premier décilitre, représentaient 7 gr., 22 d'acide acétique pur monohydraté, ou à 1 atome d'eau. En soustrayant de 6 gr., 50, 0 gr., 55, quantité de carbonate saturée par les acides fixes de vinaigre, il reste 5 gr., 95 pour la proportion de carbonate de soude sec saturé par l'acide acétique pur, ce qui représente, par conséquent, 6gr., 55 de cet acide dans un décilitre de ce vinaigre.

La différence entre ce dernier nombre et le premier est donc de 0 gr., 69 ou plus d'un demi-centième indiqué par la saturation seule.

Les considérations que nous venons d'exposer sur l'analyse des vinaigres trouvent naturellement leur application dans l'analyse des vins, ainsi que nous l'avons fait dans ces derniers temps. Dans les diverses questions proposées sur les qualités comparatives

des vins, il importe souvent de déterminer la proportion plus ou moins grande d'acides libres ou en partie combinés qu'ils contiennent tous; c'est encore par la saturation qu'il est permis à la chimie de répondre d'une manière positive. Parmi les acides libres que contiennent naturellement les vins, les uns sont tout formés et préexistaient lors de la fermentation alcoolique, les autres sont un produit de la fermentation acide qui la suit et qui peut se développer dans plusieurs conditions avec plus ou moins de rapidité. Dans une foule de cas il devient nécessaire de s'assurer si les acides que contiennent certains vins, comparativement à d'autres, existaient à l'époque où le vin a été fabriqué, ou s'ils sont le produit d'une altération à l'air qui les aura en partie transformés en vinaigre. Le moyen que nous avons employé plus haut permettra encore de résoudre cette seconde question; en effet, deux saturations successives, faites avec la liqueur alcaline titrée, sur une portion de vin, et sur le résidu de l'évaporation d'une même portion de ce liquide, feront connaître positivement la proportion d'acide acétique formé.

Tous les vins ordinaires, à part quelques exceptions, doivent contenir une petite quantité d'acide acétique, nous nous en sommes assurés sur un échantillon de vin de Bordeaux de bonne qualité. Ce vin exigeait par décilitre 11,5 de liqueur alcaline titrée. Le résidu de l'évaporation d'une même quantité de vin ne saturait que 10ce de la liqueur alcaline. La différence, qui est de 1,5, représente la proportion de liqueur alcaline saturée par la petite quantité d'acide acétique qui s'est vaporisée avec les autres produits volatils du vin. Or, la liqueur titrée renfermant 5 grammes de carbonate de soude anhydre dans 100 centimètres cubes, il y a donc 0gr.,075 dans un centimètre cube et demi (1,5) qui ont été employés à saturer l'extrait acide du vin. D'après les calculs faits dans la première partie de cette note, 0gr., 075 de carbonate de soude ont dû saturer 0 gr., 083 d'acide acétique pur concentré; donc cette proportion se trouvait naturellement dans le décilitre de vin soumis à l'expérience. Ce résultat, traduit en fraction ordinaire, indiquerait 8/10000 d'acide acétique dans ce vin, c'est-à-dire la centième partie environ de ce qu'on trouve dans les vins tout à fait acidifiés ou transformés en bons vinaigres.

Le mode d'expérimentation que nous venons de décrire a été suivi pour étudier sur le même vin le degré d'acidification qu'il était susceptible d'acquérir au bout d'un certain temps plus ou moins long, en présence de l'air atmosphérique et à une température de+15° 18° centigr.

Après huit jours d'exposition dans un flacon renfermant trois fois plus d'air atmosphérique en volume que de vin, la proportion d'acide acétique était trois fois plus grande qu'avant et s'élevait à 24/10000.

Après seize jours, cette quantité s'est trouvée de 40/10000, ou cinq fois plus grande que celle du vin non exposé à l'air.

Après vingt-quatre jours la proportion d'acide formé a été de 48/10000, c'est-à-dire double de celle contenue dans le vin après huit jours d'exposition à l'air.

Nous avons borné là ces essais que nous aurions pu continuer, mais les résultats que nous avons obtenus démontrent suffisamment de quelle utilité peuvent être ces expériences, soit pour résoudre une foule de questions journalières, soit pour étudier, si on le désirait, la marche de l'acidification naturelle des vins à l'air, et les meilleures conditions dans lesquelles cette fermentation particulière s'accomplit.

En publinnt aujourd'hui cette note nous pensons pouvoir être utile aux chimistes, pharmaciens ou experts qui auraient à traiter dans leurs travaux un sujet semblable à celui qui nous a occupé. (Ibid.)

Toxicologie.

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Note sur la présence du cuivre dans la thridace du commerce; par M. DEPAIRE, pharmacien à Bruxelles.· La présence du cuivre dans la thridace a déjà été signalée plusieurs fois par les praticiens. Il est déplorable, qu'après tant d'avis, le même abus existe toujours, et que le pharmacien, quelquefois obligé de tirer ses produits du commerce, ne puisse compter sur leur bonne préparation, lors même qu'ils portent le cachet des fabricants les plus recommandables.

En effet, tandis qu'on livre sans pitié à la sévérité des lois le cupide boulanger convaincu d'avoir introduit dans le pain un composé dout souvent il ignore l'action nuisible sur l'économie animale, on se contente d'attirer l'attention sur une substance médicamenteuse convertie en poison par la coupable négligence d'un homme éclairé et connaissant les effets funestes que produisent sur l'organisme les préparations cuivrées.

Il y a quelque temps, je me procurai chez les droguistes quatre espèces de thridace provenant de sources différentes: un seul de ces extraits était exempt de cuivre, les trois autres en contenaient des quantités trop considérables pour pouvoir être employés sans danger. Voici le procédé que je suivis pour arriver à cette conclusion: deux grains de chaque extrait sec furent dissous séparément dans quinze gouttes d'eau distillée, additionnées d'une goutte de chloride hydrique pur

étendue de son poids d'eau ; j'introduisis les mélanges dans des tubes de verre étroits, fermés par un bout, et j'y introduisis des aiguilles de fer, bien décapées, que j'indiquerai par les quatre premières lettres de l'alphabet.

Les aiguilles A, B, C, plongées dans leur tube respectif, se recouvrirent de cuivre après un laps de temps plus ou moins long; ainsi, tandis qu'après quatre minutes la partie immergée de A fut enduite d'une couche de cuivre, B ne parut subir le même effet qu'après trois quarts d'heure de contact; et C n'offrit le cuivre réduit qu'après six heures d'action. Tant qu'à l'aiguille D, quelque prolongé que fut le contact, il me fut impossible d'apercevoir la moindre coloration en rouge. Je lavai à l'eau distillée les aiguilles recouvertes de cuivre, et, après les avoir séchées, je fis tomber sur chacune d'elles une goutte d'ammoniaque liquide, qui ne tarda pas à devenir bleue par son exposition au soleil. Il est inutile de dire que j'opérai, de la même manière, sur l'eau et l'acide employés, afin de m'assurer de leur pureté.

Ce procédé est à la portée de tout le monde: il n'exige pas l'habitude des manipulations chimiques et donne des résultats aussi exacts que décisifs. Il ne permet pas de confondre le cuivre provenant d'une préparation défectueuse, avec le cuivre normal que l'on rencontre dans presque tous les extraits aqueux, lorsqu'on traite par les moyens connus, le charbon résultant de la combustion au moyen de l'acide nitrique et du chlorate potassique.

Je m'abstiendrai de toute réflexion sur l'usage d'un tel médicament; chacun conçoit ce que son emploi présente de dangereux. On pourra remarquer que la thridace étant ordinairement administrée sous forme de sirop, l'action toxique du cuivre se trouve énervée par le sucre; j'objecterai, à cette observation, l'opinion d'Orfila qui, contrairement à ce que soutint M. Pastel, prouva, par des expériences qu'il est inutile de rapporter ici, « que le sucre n'est pas l'antidote du vert-de-gris, qu'il est utile seulement pour calmer l'irritation développée par ce poison, lorsque celui-ci a été préalablement expulsé par le vomissement. »

Note de la Rédaction. La note de notre confrère, M. Depaire, doit engager les pharmaciens à mettre tous leurs soins dans l'inspection des produits qu'ils sont quelquefois obligés de se procurer dans le commerce.

Quant à la présence du cuivre dans ces diverses thridaces du commerce, elle provenait bien certainement des vases de ce métal ayant servi à les préparer, au lieu d'avoir fait usage de ceux de faïence ou de porcelaine, comme il est prescrit.

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Expériences no 2.-Extrait alcoolique de belladone. Soixante centigrammes de cet extrait n'ont eu aucune influence sur une poule adulte. Deux grammes l'ont fatiguée beaucoup pendant quelques heures, à tel point que je la croyais empoisonnée; cependant, ces quelques heures écoulées, l'animal, qui, jusque-là, avait été en proie au genre de malaise produit par les 60 centigrammes de suc d'aconit réduit à consistance d'extrait, n'annonçait plus aucune fatigue et mangeait presque comme à l'ordinaire. Il n'a pas fallu moins de 4 grammes de cet extrait pour déterminer des accidents mortels, à peu près analogues à ceux qui ont coûté la vie au coq, avec cette différence qu'ils m'ont paru moins formidables, et qu'ils n'ont causé la mort qu'après quatre heures et demie de durée. L'état convulsif a eu moins de force, mais la roideur générale survenue dans les derniers moments a été à peu près la même. Les cris brusques que l'animal a fait entendre aussi par intervalles, m'ont paru occasionnés par une sorte de contraction spasmodique simulant une véritable strangulation.

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Expériences no 3.-Extrait alcoolique d'aconit. - Cet extrait, à la dose de deux grammes, n'a eu aucune influence sensible sur un lapin. L'animal aurait mangé tout aussi bien un quart d'heure après avoir avalé l'extrait que quelques heures plus tard. Quatre grammes, administrés quelques jours après, ont fatigué sensiblement le même lapin, qui a paru affaissé toute la journée, mais qui, cependant, sans avoir ses allures ordinaires, a mangé modérément de loin en loin. L'influence du poison s'est fait sentir durant toute la journée du lendemain, mais le surlendemain elle était nulle.

Une même quantité (4 grammes) de suc épaissi de la même plante a produit une perturbation générale, manifestée par un mouvement non interrompu des mâchoires, une sécrétion baveuse abondante, un changement continuel de position, des signes non équivoques de souffrance, l'impossibilité presque absolue de se tenir longtemps sur ses pattes, des secousses abdominales, des efforts pour rejeter le poison, le refus prolongé des aliments qu'on lui présentait, etc. Cet état de souffrance s'est soutenu pendant quarante-huit heures, temps après lequel le quadrupède a commencé à manger, sans avoir repris ses allures. Ce n'est que trois jours après l'ingestion de la substance véné

neuse que le rétablissement s'est complété, du moins en apparence.

L'extrait alcoolique des pharmacies, à la dose de 4 grammes, n'a pas produit, sur un autre lapin, un effet plus prononcé que pareille quantité d'extrait alcoolique recueilli ensuite des traitements éthériques. Les remarques ont été absolument les mêmes. Ainsi il y a eu identité d'action entre les deux extraits alcooliques.

D'après ce qui précède, c'est encore l'extrait de la plante fraîche, résultant de la concentration du suc à l'étuve, qui s'est montré le plus énergique.

Quoi qu'il en soit, je ne doute pas que 10 ou 12 grammes de l'un des trois extraits employés n'eussent déterminé la mort, les ravages causés par chacun d'eux, et surtout par le second, étant de nature à faire naître cette certitude, que d'autres faits justifieront pleinement.

Expériences no 4.—Extrait alcoolique de belladone. Deux grammes de cet extrait, représentant à peu près 16 grammes de plante sèche, ont été ingérés dans l'estomac d'un lapin. L'effet toxique a été à peu près complétement nul.

Il en a été absolument de même de deux grammes d'extrait pilulaire aqueux de belladone sèche.

Dans l'un et l'autre cas, le lapin a fait un accueil très-favorable aux aliments qui lui ont été présentés, et ses habitudes sont restées les mêmes.

A quelques jours de là, on essaie d'introduire dans l'estomac d'un lapin 12 grammes d'extrait alcoolique de belladone, retiré de la plante après le passage de l'éther, mais on ne peut guère lui en faire avaler que la moitié, les précautions nécessaires pour éviter cette perte n'ayant pas été assez bien prises. L'autre moitié est rejetée au dehors par cet animal, qui fait des efforts inouïs, dans tous les cas de ce genre, pour se soustraire à l'introduction du poison. Les signes qui caractérisent l'empoisonnement sont les suivants mouvement continuel des mâchoires, secousses précipitées et réitérées des deux pattes de devant, qu'il porte parfois vers le museau comme pour expulser l'agent mortifère qui le tourmente. Ce sentiment manifeste de malaise dure presque toute la journée. Sur le soir, ce désordre semble faire place à un peu de calme et, le lendemain matin, quelques aliments sont ingérés en petite quantité, bien que le malheureux animal soit encore tourmenté par intervalles. Quelques frémissements momentanés, quelques coups de dents portés contre les barreaux de sa cage, et de fréquents mouvements désordonnés dénoncent chez lui quelques souffrances passagères, qui se dis

sipent pourtant vers le déclin du jour pour ne plus se reproduire.

Il est présumable que l'animal aurait succombé, s'il avait reçu les 12 grammes d'extrait. C'est un fait que j'aurais été curieux de vérifier si j'avais eu à ma disposition une quantité suffisante de cet agent; mais malheureusement ma petite provision se trouvait à peu près épuisée; je me reposais assez d'ailleurs sur les expériences suivantes, pour n'être pas tenté d'en préparer une autre.

Expériences no 5. - Extrait alcoolique de ciguë. (Conium maculatum.) — Un lapin avale 6 grammes d'extrait de ciguë. Aussitôt après l'ingurgitation de ce toxique, des symptômes d'empoisonnement se déclarent: tels sont des contractions violentes des viscères abdominaux, mouvements brusques et saccadés, auxquels succèdent par moments un état de torpeur et de somnolence, une prostration très-prononcée, lorsque des signes certains de souffrance ne déterminent pas de l'agitation. Douze ou seize heures sont à peine écoulées, que l'animal rend des urines sanguinolentes, ou, pour mieux dire, du sang presque pur, translucide, d'une odeur fétide rappelant un peu celle de la ciguë, comme dans le cas où 10 grammes d'extrait éthérique de ciguê avaient été administrés à un lapin. (Voir les expériences no 7 de la première série.) La nuit écoulée, le lapin parait moins fatigué; cependant il ne mange pas de toute la journée, et il en est de même un jour plus tard, du moins le matin, car le soir il commence à recevoir quelque peu de nourriture. Le retour à la santé ne paraît à peu près complet que le quatrième jour de cette rude épreuve, si voisine de la mort.

12 grammes du même extrait de cigue fatiguent horriblement un autre lapin adulte, qui, pour le coup, paraît ne pas en rappeler. Ce sont les mêmes symptômes portés à un plus haut degré; aussi les accidents se succèdent-ils avec plus de rapidité. Les progrès sont tels, que la mort pamit de plus en plus imminente; cependant elle ne survient que sept heures après l'ingestion de la matière toxique, dont les effets sont cruels pour l'animal, qui succombe dans une agitation extrême. Il est pourtant à remarquer que M. Orfila, avec le conium maculatum, a causé rarement des accidents mortels, bien qu'il l'ait expérimenté sur un grand nombre d'animaux et à fortes doses.

Que pensera ce célèbre toxicologiste lorsque ce fait arrivera à sa connaissance? Il doutera peut-être de la véracité de mes assertions : cependant rien n'est plus positif que ce que je viens de rapporter, et ne prouve pas autre chose, sinon que mon extrait alcoolique de ciguë est aussi éner

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