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Préparations de proto-iodure de fer, Un grand nombre de pharmaciens nous ayant manifesté le désir de leur faire connaître lės diverses préparations de proto-iodure de fer, ainsi que la préparation du caustique de Vienne, en cylindre, nous nous empressons d'y obtempérer. A l'époque où l'iode et ses composés commencèrent à être employés en médecine, on dut songer à l'iodure de fer, dont les éléments, doués chacun en particulier de propriétés remarquables, semblaient devoir former par leur union un précieux médicament; plusieurs médecins le prescrivirent donc. Mais le mode de préparation indiqué alors, dans les meilleurs ouvrages, et même dans le Codex français, fournissait un produit tellement altéré et impur, que son usage fut bientôt à peu près abandonné. L'iodure de fer du Codex français, en effet, au lieu d'être une combinaison exacte et définie d'iode et de fer, n'offrait qu'un mélange variable de sexquioxyde de fer, d'iode libre, de proto-iodure et de periodure de fer. L'imperfection de ce produit était la cause des résultats peu satisfaisants auxquels son emploi avait conduit et du véritable discrédit dans lequel il était tombé. Frappé de ces considérations, le docteur Dupasquier, de Lyon, les fit ressortir le premier dans un mémoire que le Journal de pharmacie a publié en 1841, Hindiqua en même temps le moyen d'obtenir du proto-iodure de fer pur, proposa diverses formules pour en faciliter l'usage en médecine, et en recommanda particuliè rement l'application au traitement de la phthisie pulmonaire. Plus tard M. Félix Boudet s'est occupé du même sujet sous le point de vue pharmaceutique et à publié les formules suivantes qui paraissent généralement adoptées aujourd'hui :

Solution officinale de proto-iodure de fer au dixième.

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Pr. lode pur.. 8,50 gr. Limaille de fer.. 4,00 Eau distillée.. 40,00 Sucre très-blanc. 55,00 Gomme arabique. 8,00 Versez l'iode avec 30 grammes d'eau distillée dans un ballon de verre ; ajoutez peu' à peu la limaille de fer, en ayant soin d'a giter sans cesse la liqueur; chauffez légè rement jusqu'à ce qu'elle soit devenue presque incolore; filtrez au-dessus d'une capsule de fer contenant le sucre concassé; lavez le filtre avec les 10 grammes d'eau réservés pour cet usage et que vous emploierez ensuite pour dissoudre la gomme; versez cette solution dans la capsule et chauffez pour obtenir 100 grammes d'un liquide incolore qui contiendra 10 grammes de proto-iodure de fer pur, et dont chaque gramme,

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Pr. Iode pur.

Limaille de fer.
Eau distillée
Miel blanc

8,50 gr.

4,00

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8,00

Gomme arabique.
Gomme adragante. 4,00

Poudre de guimauve. 6,00

Faites comme précédemment une solution de proto-iodure de fer dans laquelle vous dissoudrez le miel et la gomme arabique, évaporez dans une capsule de fer pour réduire le tout à 30 grammes, incorporez les poudres de guimauve et de gomme 'adragante, vous obtiendrez ainsi 40 grammes d'une masse qui représentera 10 grammes ou le 1/4 de son poids de proto-iodure de fer pur.

Cette masse doit être conservée dans un flacon bien bouché et garni de lycopode. On en fait ordinairement des pilules de 20 à 40 centigrammes; on peut sans difficulté l'associer à des extraits ou à d'autres médicaments.

Caustique de Vienne en cylindre.

On se procure de tubes de plomb de 1 à 2 mètres de long, ayant 6 millimètres à un centimètre de diamètre intérieur; quelques fois on en emploie de 15 à 48 millimètres de diamètre, que l'on coupe au moyen d'une corde attachée par ses deux extrémités à un point fixe, et enroulée autour du tube à l'endroit où on veut le couper. En opérant de cette manière, les parois du tube se trouvent rabattus vers le centre, et il ne reste plus qu'une étroite ouverture que l'on ferme facilement ensuite à l'aide d'un marteau et d'un mandrin introduit dans le tube. Cette opération doit être faite avec beaucoup de soins, car la plus légère fissure

dans les tubes les mettrait hors de service une fois qu'ils seraient remplis de caustique.

Les tubes étant ainsi disposés, on les enfonce dans du grès ou de la terre humide, à 3 centimètres de distance l'un de l'autre et de telle sorte que leur extrémité ouverte dépasse très-légèrement le niveau du grès. On procède alors à la préparation du caustique de la manière suivante : dans une cuiller de fer à bec et à manche, on met 120 grammes de potasse caustique à la chaux, et on chauffe vivement jusqu'à ce que la cuiller soit portée à la température rouge obscur, et que la potasse soit en fusion parfaitement tranquille; on ajoute alors, en deux ou trois fois, 40 grammes de chaux vive en poudre fine, et on opère le mélange avec une tige de fer; en un instant la chaux se divise parfaitement dans la potasse, sans que la fluidité de celle-ci diminue sensible ment; on verse alors le caustique dans les tubes jusqu'à ce qu'ils soient entièrement remplis, et on les laisse refroidir. Si, au lieu d'attendre que la potasse soit arrivée à la fusion ignée pour y'ajouter la chaux, on l'ajoute de prime abord, l'opération est singulièrement gênée par la présence de cette poudre, qui rend l'ébullition de la matière tumultueuse, la fait monter par-dessus la cuiller, et retarde le moment où le mélange devient assez liquide pour être coulé sans difficulté.

Dès que les tubes sont refroidis, on régularise leur extrémité supérieure, et on rape toute leur surface, afin de diminuer autant que possible l'épaisseur de leurs parois en évitant bien de les percer; car s'ils présentaient la plus légère solution de continuité, ils seraient tout à fait perdus. La soudure des plombiers elle-même ne saurait servir à les réparer d'une manière durable.

Pour les conserver, on les enferme l'ou verture en bas dans des tubes de verre épais ou de cristal, bouchés, soit en liége, soit à l'émeri, et garnis au fond d'un lit de 1 à 2 centimètres de chaux vive en poudre, destinée à maintenir toujours à l'état sec la surface découverte du caustique; on interpose d'ailleurs un lit de coton entre le bouchon et le cylindre, afin de le maintenir fixe dans le tube.

Pour se servir de ce caustique, on en découvre la longueur que l'on désire, soit à l'extrémité, soit sur le côté, en entaillant le plomb avec un couteau. Ce caustique de Vienne solidifié en cylindres, est d'une application très-favorable au traitement des maladies du col de l'utérus.

Nouvelles des sciences.

Sous ce titre, nous rendrons compte, mais d'une manière succincte, de tous les faits nouveaux qui apparaîtront dans les sciences que nous cultivons, voulant ainsi mettre nos lecteurs au courant du mouvement scientis fique.

Dans la séance de l'Académie des sciences de Paris, du 9 décembre 1844, la découverte de deux nouveaux métaux est venue accroître la liste des corps simples; ces deux éléments ont été trouvés par M. Henri Rose dans les minerais du Cantal, avec lequel ils ont de si grands airs de famille que l'auteur de leur découverte les a nommés pelopium et niobium.

M. Pelouze a lu un mémoire sur l'acide lactique. Depuis le travail publié, il y a quelques années, par M. Pelouze, sur le même sujet, ce composé qui joue un si grand rôle dans les phénomènes de la vie animale et végétale, n'avait été l'objet d'aucune étude suivie. M. Pelouze a complété ses premières recherches en déterminant la composition de l'acide lactique et en observant ses réac tions principales. L'habile chimiste a distin gué nettement l'acide anhydre de ses divers composés avec l'eau. En le mettant en rapport avec l'ammoniaque, il a créé de toute pièce la lactamide. La lactine et le lactone, composés également intéressants sous le rapport théorique, ont aussi pris naissance entre les mains de M. Pelouze, qui indique dans son mémoire les réactions à l'aide desquelles on pourra reconnaître à coup sûr la présence de l'acide lactique, dans les cas nombreux où l'on a besoin de constater la présence de ce composé,

En mettant à profit les réactions dont nous venons de parler, deux élèves de M. Pelozue ont pu reconnaitre la présence de l'acide lactique dans le suc gastrique et faire, sur cet important produit, un travail qu'ils ont soumis à l'Académic.

Les auteurs ont mis hors de doute l'acidité du suc gastrique, laquelle est due, comme nous venons de le dire, à la présence de l'acide lactique, sans lequel il devient impropre à la digestion. MM. Bernard et Bareswil ont aussi constaté que les qualités digestives du suc gastrique étaient liées à la présence d'un autre élément qui n'est pas acide, et qui est décomposé par la chaleur.

III. VARIÉTÉS.

Nouvelle jonglerie magnétique ou l'onéiromancie dévoilée. M. Laurent et sa sibylle, ou appréciation de ses prétendues expériences occultes de psychologie appliquée à l'onéiromancie. — Le magné tisme animal, ce fluide que Mesmer faisait sortir d'un énorme baquet, au son de mélodieux pianos, et qui, selon lui, pénètre tous les corps comme l'électricité, excite, fait vivre les êtres organisés, s'équilibre, s'accumule en passant d'un corps dans un autre, et est susceptible de produire d'immenses modifications, des phénomènes extraordinaires dans l'organisation; le magnétisme animal, disons-nous, a fait son temps. M. Burdin, de l'Académie royale de médecine Paris aidant, l'a tué, définitivement tué (1), Un fait remarquable dans l'histoire de ce divertissant phénomène, c'est que les magnétiseurs, passés et présents, ont eu la sage prévoyance de se servir, pour leurs expériences, de femmes nerveuses. Cela est-il du à ce que, comme le disent MM. Burdin et Fréd. Dubois (d'Amiens), « les femmes perçoivent promptement, parce qu'elles sont ignorantes; répondent avec facilité, parce qu'elles sont légères; retiennent longtemps, parce qu'elles sont têtues? » Nous ne nous prononcerons pas sur ce point, mais nous dirons que les auteurs que nous venons de nommer pourraient bien avoir raison; ils auraient peut-être dù ajouter qu'étant plus impressionnables, plus rusées, les femmes qui se prêtent à ces jonglerics saisissent avec plus de promptitude et avec une facilité étonnante, le rôle qu'on leur fait jouer.

Nos lecteurs comprennent déjà que nous ne croyons aucunement à ces expériences que l'on donne en spectacle au public, toujours avide du merveilleux, et qui se laisse si facilement mystifier, N'allez pas croire, cependant, que nous rejetions le magnétisme comme phénomène physiologique; non, car il existe, bien que nous n'en connaissions ni l'essence ni la nature. Mais ce que nous nions (jusqu'à preuve irréfragable du contraire), c'est la vision sans le secours des yeux, par l'occiput, par la nuque, par l'épigastre, par le talon, à travers les masques d'argile et de taffetas gommé, les bandeaux

(1) On sait que M. Burdin avait institué un prix de 3,000 francs, à décerner par l'Académie de médecine de Paris, pour la personne magnétisée, endormie ou éveillée qui pourrait lire, les yeux ouverts et au grand jour, à tra

de velours, les foulards, les tissus de laine et de coton, à travers des boîtes dont l'œil pénétrant des somnambules percerait l'épaisseur; ce que nous nions, c'est cette lucidité médicale qui pénètre soi-disant dans la profondeur de nos organes pour en découvrir les altérations morbides et indiquer la médication qui convient à chacune d'elles; c'est cette clairvoyance sublime qui permettrait de voir à Bruxelles ce qui se passe à Paris ou à Saint-Pétersbourg; c'est, enfin, la transmission, à l'aide de passes magné tiques, de la pensée et des sensations. Les hommes de science ont fait bonne justice de ces artificieuses manœuvres en les qualifiant de jongleries analogues à celles des prétendus sorciers d'autrefois et qui sont aujourd'hui de la dépendance et de la juridiction des tribunaux de police correctionnelle.

Voilà, direz-vous, une bien singulière introduction pour arriver aux expériences occultes de M. Laurent, et je ne vois pas quelle analogie celles-ci ont avec le magnétisme. Vous allez le savoir, cher lecteur, et vous ne tarderez pas à vous convaincre que M. Laurent n'est pas plus sorcier que MM. Ricard, Perinor et autres magnétiseurs célèbres, voire même ce bon Curé dont la clairvoyance était telle, qu'il avait vu que son cerveau tenait à son estomac, variété anatomique jusqu'ici inconnue.

Qr, vous saurez que ce savantissime M. Laurent, qui a inventé l'onéiromancie, est, si nous avons bonne mémoire, l'un de ceux qui, en 1841, devaient à la demande de M. le docteur Frappart, qui, à cette époque, était, par conviction, nu des plus grands adeptes du magnétisme, rendre l'Académie royale de médecine de Paris témoin de la lucidité de leurs somnambules. Mais M. Laurent, sur qui M. Frappart comptait pour confondre les incrédules, ne tint point parole et resta en province où ik donnait des représentations avec Mlle Prudence. M. Frappart indigné, lui écrivit la lettre suivante :

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lettres que j'ai publiées sur votre somnambule Prudence, et je vois avec plaisir qu'ainsi que nous en étions convenus, on n'y a rien changé; mais j'éprouve quelque peine en lisant ce qui les précède et ce qui les suit. » Dans le premier cas, je dis : les réflexions que le Propagateur de l'Aube du 9 mai a mises en tête de mes lettres sont si pleines d'une bienveillance élogieuse, que leur reproduction de votre part est, à mes yeux, un genre de charlatanisme dont vous auriez dù vous dispenser, et contre lequel je proteste, parce que, hormis les habitants de Troyes, ces réflexions deviennent pour tout le monde un puff fait à l'avantage de votre bourse et de ma vanité.

⚫ Dans le second cas, je dis : qu'est-ce que cette annonce qui sent la banque à pleine gorge, et que je rencontre accolée à mes lettres de la manière suivante :

• MÉDECINE INTUITIVE. Homéopathique ou ordinaire, pour ⚫ toutes les maladies, par consultation ☐ somnambulique, au domicile de M. Lau⚫ rent, médecin.

» Prix de la première consultation, 10 fr. Les suivantes, 5 fr.

» Et vous placez cette annonce de marchand qui est vôtre à côté d'une œuvre de propagation qui est mienne? Est-ce à dire que vous me prenez pour une cuirasse der rière laquelle il vous semble commode de vous cacher? Oh! oh! je ne le souffrirai pas; je ne veux abriter ni patroner personne.

⚫ Vous avez donc oublié qu'un jour je vous disais : « Si vous restez dans votre rôle, vous trouverez en moi un excellent garçon toujours prêt à vous obliger, et même à se laisser manger la laine sur le dos ; mais si vous allez jusqu'à l'épiderme, c'està-dire, si jamais vous tentez de me faire servir à votre petit commerce, tant pis pour vous, je vous travaillerai les flancs. >>

» Vous avez donc également oublié une de mes lettres dans laquelle je vous ai plus particulièrement fait remarquer ce passage : « Je souhaite avec ardeur le succès de ce qu'il y a d'utile et de vrai dans ce qu'on nomme le magnétisme; mais je me suis toujours gardé et me garde soigneusement de m'intéresser à aucun magnétiseur : en d'autres termes, dans le magnétisme comme en tout, ce sont les choses, les faits et les principes que je soutiens, sans me soucier des hommes..., même de mes amis. Aussi, dispensé-je, messieurs les magnétiseurs et mesdames les somnambules de toute espèce de reconnaissance envers moi; ce n'est pas pour eux ni pour elles que je veille et que je frappe. »

Et cette leçon ne vous a point profité, M. Laurent? Cela me passe.

Quant au programme de vos séances,

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(Voir Gazette des hôpitaux, no 109, septembre 1841.)

Deux mois après avoir écrit cette lettre (le 17 septembre 1841), M. Frappart, répétant les expériences de MM. Peisse et Dechambre, constatait qu'il pouvait voir comme Mile Prudence, après s'être appliqué successivement sur les yeux le taffetas, l'argile et la bande, au bout d'un quart d'heure au plus. Et, à cette occasion, ce médecin consciencieux écrivait : « Si cette jeune personne (Mile Prudence) n'a trompé, ce qui ne serait pas un miracle, je lui vouerai une couronne de roses; mais si M. Laurent est son compère, pour lui sera la couronne d'épines, et je la lui enfoncerai jusqu'à la pulpe cérébrale....., pour servir d'exemple aux magnétiseurs à venir.» (Voir Gazette des hôpitaux, no 114, 24 septembre 1841.)

C'est encore le même M. Laurent dont le Journal des connaissances médicales(No de novembre 1841, p. 63) parle en ces termes:

« Mile Prudence, toujours en compagnie du docteur Laurent, a voulu donner une représentation au Congrès scientifiquede Lyon; cette faveur n'a été qu'à demi octroyée, c'est-à-dire, que les expériences de magnétisme ont été permises seulement avant l'ouverture des séances du Congrès. Des masses de terre glaise ont été appliquées sur les yeux, le front et la figure de Mlle Prudence; les contractions musculaires et la dessiccation de la terre glaise n'ont pas tardé à produire des fissures qui laissaient passer des rayons lumineux, ainsi que cela a été constaté maintes fois et dans différentes villes.

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» Le lendemain, une commission a été

choisie pour assister à de nouvelles expériences et dans un autre local. Cette commission se composait des docteurs Bonnet, chirurgien-major à l'Hôtel-Dieu de Lyon, Caffe, ancien chef de clinique à l'Hôtel-Dieu de Paris, Jourdan, professeur de zoologie à la Faculté des sciences de Lyon, et Munaret. Des bandelettes de taffetas d'Angleterre furent appliquées sur les paupières de Mile Prudence, un masque en plomb recouvrait son visage, l'orifice des narines était fermé, l'ouverture de la bouche seule était libre pour faciliter la respiration. MM. les commissaires, présumant que quelques rayons lumineux pouvaient pénétrer par l'ouverture labiale du masque en suivant les ailes du nez, prirent la précaution de déprimer légèrement la lèvre supérieure et de faire saillir la lèvre inférieure du masque, sans en prévenir le magnétiseur, l'expérience de la vision manqua.

Mlle Prudence se plaignait en disant que le masque la blessait; M. Caffe déclara la modification qui avait été faite, on fut obligé de la faire disparaître, dès lors la lucidité revint. Plusieurs parties d'écarté furent gagnées à différents partners.

« Quelques personnes ayant appliqué le masque sur leur figure, entre autres les docteurs Jourdan, Caffe, Levrat fils, elles purent reconnaître la couleur et la figure des cartes. Les assistants restèrent dès lors convaincus que la lumière qui était nécessaire arrivait jusqu'aux yeux par l'ouverture labiale du masque de plomb.

» Mile Prudence ne devine pas avec promptitude, mais très-lentement, et après avoir, à plusieurs reprises, promené contre son masque, dans toutes les directions, au dessous du niveau de la bouche principalement l'objet qu'elle veut indiquer.

» Il est important de constater ici le refus de M. Laurent, qui ne voulut pas laisser appliquer un corps saillant, une bande de papier de quatre centimètres au dessous de la lèvre inférieure. Un officier d'artillerie, amateur présent à la séance, prétextant la fatigue de Mlle Prudence, semblait vouloir rendre les épreuves incomplètes, lorsque M. Caffe se vit contraint de lui imposer si lence et déposa un pari de 500 francs que trois autres spectateurs couvrirent par une somme de 2,000 francs, dans le cas où M. Laurent remplirait une des conditions suivantes, qui toutes furent successivement réfusées par M. Laurent:

« 1 Un voile doublé de taffetas ciré sera appliqué, on supprimera le masque et les bandelettes, les yeux seront complétement libres;

20 Liberté absolue des yeux et de la face, une simple feuille de papier opaque couvrirait la page ou seulement les trois

lignes destinées à être lués par la somnambule;

3. Si la prétendue somnambule voit à travers le plomb seulement et non à travers le papier, ce dernier sera remplacé par une feuille de plomb, composée du masque aplati. »>

» Ces propositions faites l'une après l'autre furent de même rejetées par M. Laurent, dont les jongleries sont aujourd'hui bien évidentes, mais non terminées, puisqu'il annonce des consultations au prix de 10 et de 5 francs, c'est-à-dire, que Milo Prudence verra très-clairement dans nos viscères, lorsqu'elle n'a pu lire à travers une simple feuille de papier. »

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Nous lisons dans le même journal (No de juin 1844, p. 288), l'article suivant, extrait de l'Echo du Nord :

« Un magnétiseur, M. Laurent, accom. pagné de Mile Prudence, sa somnambule, vient d'éprouver des déboires assez graves à Lille, où ils donnaient des représentations publiques. La somnambule, ayant les yeux recouverts d'un bandeau de taffetas, jouait aux cartes et aux dominos avec une lucidité remarquable. Quelques médecins qui assistaient à la séance examinèrent de près la sibylle, et découvrirent qu'il lui suffisait de quelques légers mouvements pour déplacer le bandeau, et qu'elle avait la précaution de se frotter le bord des paupières avec un peu d'huile.

>> De cette découverte, on passa à son application. Un des assistants se présenta, et après les précautions voulues, put nommier les cartes avec la plus grande facilité. M. Laurent, craignant de faire de trop nombreux prosélytes, quitta la ville le soir même. »

Tout autre que M. Laurent se voyant ainsi démasqué, eût renoncé pour jamais au magnétisme et à ses miracles; mais non, il n'en continua pas moins ses pérégrinations magnétiques. Nous ne dirons pas, comme le spirituel feuilletoniste de la Gazette des hôpitaux, que M. Laurent a manqué de prudence en cette occurrence, vu que Mile Prudence ne l'a jamais quitté. En homme habile, et pour arriver au but qu'il se proposait, il a bien vite changé ses batteries. Puisque le magnétisme est mort, s'est-il dit, faisons-le revivre sous une autre forme, et l'onéiromancie fut trouvée, absolument comme ces médecins à la mode qui, après avoir embrassé la doctrine de Broussais, se sont jetés corps et âme dans la médecine homéopatique, qu'ils ont ensuite abandonnée pour exploiter l'hydrosudopathie. Aussi les bons habitants de Bruxelles ont-ils été tout ébahis à l'annonce des expériences occultes de psychologie appliquées à l'onéiromancie. Et la foule de courir chaque soir au

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