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DE MÉDECINE.

DE CHIRURGIE ET DE PHARMACOLOGIE,

PUBLIÉ

Par la Société des Sciences Médicales et Naturelles

DE BRUXELLES,

SOUS LA DIRECTION

D'UN COMITÉ COMPOSÉ DE

MM. DIEUDONNÉ, D.-M., Membre du Conseil central de salubrité publique, Secrétaire de la Commission de statistique du Brabant, correspondant de l'Académie royale de médecine de Belgique, etc.;

JOLY, D.-M., Médecin légiste attaché au parquet de la Cour de justice, à
Bruxelles, Secrétaire du Conseil central de salubrité publique, etc.;

LEROY, Pharmacien, collaborateur au Journal de chimie médicale, de pharmacie
et de toxicologie de Paris, Membre de la Commission médicale de Bruxelles, du
Conseil central de salubrité publique, et de plusieurs Sociétés savantes nationales et
étrangères;

MOUREMANS, D.-M., Membre du Conseil central de salubrité publique et de
plusieurs Sociétés savantes;

NOLLET, Professeur de physique à l'École militaire, Membre et Secrétaire du
Comité pour les affaires industrielles au Ministère de l'Intérieur, etc.;
RIEKEN, D.-M., Médecin de S. M. le Roi des Belges, membre correspondant
de l'Académie royale de médecine de Belgique et de plusieurs Académies et
Sociétés savantes régnicoles et étrangères ;

Et de M. le Docteur J. R. MARINUS, Rédacteur principal, Secrétaire de la
Société, Médecin de l'hospice Pacheco, Membre de l'Académie royale de méde-
eine de Belgique et de plusieurs Sociétés savantes, nationales et étrangères, etc.

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DE MÉDECINE.

( JANVIER 1843.)

I.-MÉMOIRES ET OBSERVATIONS.

DU RHUMATISME, de ses symptômes, de son diagnostic différentiel, de sa nature et de son traitement prophylactique et curatif.— Mémoire auquel la Société des sciences médicales et naturelles de Bruxelles a décerné une médaille d'honneur au concours de 1843; par HENRI GINTRAC, ex-aide de clinique médicale et prosecteur à l'École préparatoire de médecine et de pharmacie de Bordeaux.

(Suite. Voir le cahier de septembre 1844, p. 439.)

III. INFLUENCE DU Rhumatisme sur les affections des prINCIPALES PARTies du SYSTÈME CIRCULATOIRE SANGUIN, ET SUR LA PRODUCTION DES DIVERS VICES ORGANIQUES.

J'aborde un terrain brûlant; des prétentions opposées, des discussions vives, ont partagé les médecins ou plutôt les disciples, en deux camps. Placé à distance des combattants, à portée de vérifier les moyens d'attaque et de défense, et tout à fait désintéressé dans la question, on se trouve en mesure d'émettre un avis, on doit toutefois le faire avec la réserve que réclame la prudence, et qu'imposent de grandes autorités.

M. Chomel disait dans sa thèse soutenue en 1813, avoir vu la péricardite succéder au rhumatisme (p. 56), et dans l'article péricardite du Dictionnaire des sciences médicales (en 21 vol., t. 16, 1826), que cette affection s'observait dans le cours du rhumatisme aigu. Il y aurait injustice à ne pas prendre acte de ces assertions, que M. Chomel ne donne pas comme nouvelles. parce que d'autres observateurs, Storck, Stoll, etc., paraissent avoir remarqué la même coïncidence (1).

M. Bouillaud étudiant avec soin les affections du cœur, reconnaît l'existence de la péricardite dans la moitié des individus affectés d'un violent rhumatisme articulaire aigu (2). Poursuivant ses recherches, il trouve une proportion bien supérieure puisqu'elle est de 8 sur 9 (3); dès lors il ne s'agit plus d'une coïncidence fortuite, mais d'un rapport presque constant, d'une règle, d'une loi.

Cette loi est en quelque sorte promulguée en 1836. L'année suivante, M. Bouillaud publie sa clinique médicale de l'hôpital de la Charité; il y rapporte 14 cas de rhumatisme articulaire aigu (4). Mais déjà la loi nouvelle semble déchue de sa

(1) Chomel et Requin, Rhumatisme, p. 190.

(2) Traité clinique des maladies du cœur.

(3) Nouvelles recherches sur le rhumatisme articulaire aigu, p. 27.

(4) Tome 2, p. 419.

presque universalité. En effet, 1o Les deux derniers cas présentent des exemples de récidives d'affection rhumatismale avec lésion organique du cœur ; celle-ci consistant en épaississement et induration des valvules, on peut bien admettre avec M. Bouillaud que ces lésions du cœur ont été des suites d'une ancienne endocardite. Mais cette assertion n'est point inattaquable, il aurait fallu pour avoir une certitude suffisante,assister au développement initial de l'affection, s'assurer de l'existence de l'endocardite et tout au moins ne conserver aucun doute sur l'origine toujours inflammatoire des indurations vasculaires. Mais enfin supposons qu'il y ait eu réellement ici lésion phlegmasique de la membrane interne du cœur. Voyons les autres faits. 2o Dans la 12e observation qui a pour sujet une fille de 16 ans, chlorotique, il est fait mention d'une hypertrophie du cœur par suite d'anciennes attaques de rhumatisme. Mais encore ici je demanderai si l'hypertrophie du cœur est le résultat positif d'une endocardite ou d'une péricardite; puis il me parait surprenant qu'avec une nouvelle attaque de rhumatisme articulaire suraigu il n'y ait que des signes d'hypertrophie et non ceux d'une péri ou endocardite. Cet exemple me paraît donc peu propre à confirmer la règle. 3o Dans la lle observation, de l'aveu de M. Bouillaud, point de coïncidence, de péricardite ou d'endocardite 4o Dans les ro, 2o, 6′′, 7, 8, 9e et 10e observations, cette coïncidence est signalée, mais en quels termes? un peu d'endocardite; cœur assez légèrement affecté; rien au cœur d'abord, puis légère endocardite ; endocardite très-légère, très-légère atteinte du cœur. Telles sont les propres expressions du savant auteur dont je cherche à peser les documents. Eh bien, il me semble que ces nuances si légères pour l'homme qui sait le mieux les découvrir, dont les sens sont si exercés, dont la perspicacité est si grande, se réduiraient à des proportions bien plus faibles encore pour un observa teur moins habile. En effet, ce sont des signes fugaces ou d'une bien faible valeur qu'un petit bruit de soufflet, une impulsion un peu forte du cœur, un léger tintement auriculo-métallique, des bruils vasculaires un peu secs, etc., phénomènes dont l'appréciation échappe souvent, et qui, ainsi que tous les observateurs l'ont constaté, apparaissent ou disparaissent selon les circonstances, selon les impressions morales, l'état de souffrance, la gêne de la respiration, les altérations du sang, l'abondance des saignées, etc. Il est très-positif que chez beaucoup de malades, avec une grande attention, on distingue un moment quelques-uns de ces bruits particuliers, et qu'un instant après on ne les retrouve plus. Il serait donc permis de considérer les sept cas ci-dessus indiqués comme douteux pour la généralité, ou comme l'appellerait peut-être M. Bouillaud, pour le commun des praticiens. 5o Il ne reste donc que les 30, 4 et 5e faits, que je m'empresse d'admettre avec et d'après M. Bouillaud, comme des coïncidences réelles de rhumatisme et de péricardite ou d'endo-péricardite. Mais remarquons que sur les 14 observations qui viennent d'être examinées, cette coïncidence proclamée comme constante ou presque constante, n'est clairement établie que dans ces trois cas. Or, une loi ne veut pas d'ambiguité, d'incertitude, elle ne doit pas se voir sans cesse menacée par des exceptions nombreuses qui tôt ou tard la dévoreraient.

Voyons maintenant ce que nos propres observations nous ont appris. Dans lę rhumatisme aigu pyrétique, dans l'aigu apyrétique, dans le chronique, nous n'avons constaté aucune lésion coïncidante du cœur. Dans le rhumatisme aigu pyrétique intense, nous avons presque toujours trouvé les battements du cœur forts et tumultueux, mais nous n'avons point distingué, d'une manière suivie, ces bruits anormaux qui auraient pu servir de base au diagnostic d'une péricardite ou d'une endocardite Le cœur nous a paru prendre une part active à l'excitation générale, tout l'appareil circulatoire était vivement stimulé, le sang était modifié dans sa composition, il n'y avait point de phénomènes spéciaux d'une phlegmasie caractérisée, voilà pour la majorité des cas. Mais dans quelques faits particuliers įl

y a eu réellement des indices positifs d'inflammation des enveloppes du cœur. Indépendamment d'un sentiment d'oppression douloureuse et d'anxiété que le malade rapportait à la région précordiale, il y avait de l'irrégularité dans les mouvements du cœur, une matité assez étendue, un bruit de soufflet distinct, en un mot, des signes d'une lésion grave vers l'organe central de la circulation. J'ai vu cet état chez quelques individus au plus haut degré de l'affection rhumatismale. D'autres fois il s'est manifesté sans que celle-ci fût intense. Chez un malade la plus grande obscurité a régné sur le véritable état des organes. Voici ce fait en peu de mots.

36° OBS. — P. Bielle, âgé de 40 ans, marié, terrassier, régulièrement conformé, ayant la peau blanche et les cheveux roux, assez robuste, s'exposa le 17 avril 1840 à l'impression d'un air froid, pendant qu'il était en sueur; il éprouva bientôt après des douleurs vives dans les articulations tibio-tarsiennes et fémoro-tibiales, et en même temps dans tout le côté gauche du thorax, il y avait de la toux, et la respiration était gênée.

Entré le 1er juin à l'hôpital, il se plaint surtout d'une douleur étendue à la partie antérieure et gauche du thorax, il n'y a ni toux ni expectoration, la respiration est précipitée, la poitrine percutée sur les côtés résonne bien, la percussion est douloureuse à gauche, il n'y a point de matité anormale, le murmure respiratoire s'entend de ce côté, mais moins bien qu'à droite, les battements du cœur sont assez réguliers, obscurs, sans bruit de soufflet, le pouls est petit, fréquent, assez régulier, les lèvres ont une teinte violacée, la face est colorée, les voies digestives n'offrent rien d'anormal, excepté de l'anorexie et un enduit jaunâtre de la langue (4 ventouses scarifiées sur la région précordiale. — Orge. Lait).

Le 2, le malade n'est que peu soulagé (saignée au bras). Caillot consistant, couenne mince, moins de dyspnée.

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Les 3, 4 et 5, accès fébriles chaque soir (vésicatoire au bras. Ventouses scarifiées à l'épigastre).

Les 6, 7 et 8 (sulfate de quinine, 60, 50 et 40 centigrammes).

Le 9, persistance des mêmes symptômes, abdomen un peu tendu, épigastre douloureux (saignée du bras. Sérum abondant, caillot consistant, couenne jaunâtre épaisse).

Le 11, même état (demi-bain). Le soir oppression.

Le 12, demi-bain, amélioration, apyrexie, sueur la nuit.

Le 13, demi-bain, mieux, abdomen souple.

Le 18, il reste de la douleur à la partie inférieure gauche du thorax (un vésicatoire y est appliqué).

Le 19, la douleur a diminué.

Les 20 et 26, progrès, guérison.

Quel était le véritable siége, quel était le caractère essentiel de cette affection? y avait-il péricardite ou simple pleurodynie, affection rhumatismale ou fièvre intermittente larvée ? il est possible de soutenir ces diverses suppositions, un rhumalisme existait dès le principe, ce côté était douloureux, mais une pleurodynie Le produit pas une dyspnée aussi intense, une anxiété aussi pénible et les signes d'une gêne aussi prononcée dans la circulation du sang, et cependant nous n'avons entendu ni bruit de soufflet, ni tintement auriculo-métallique ni frottement et nous n'avons trouvé ni voussure, ni matité anormale dans la région du cœur. Faudrait-il conclure de l'absence de ces signes à la nullité de la péricardite ou de l'endocardite? Non sans doute, car, tous ceux qui ont vu beaucoup de malades et qui ont fait un grand nombre de nécropsies savent que souvent on rencontre des lésions dont aucun signe précis n'avait pendant la vie donné la présomption, et que parfois on ne trouve pas celles que les symptômes avaient fait

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