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rendu de l'épidémie de Vaux, mais comme cela n'offrirait qu'une répétition peutêtre fastidieuse de tout ce que je viens d'exposer, ma thérapeutique ayant été constamment établie sur les bases qu'on connaît, j'ai cru devoir m'arrêter ici... Puissent les autorités compétentes de l'Oise, la Société des sciences médicales et naturelles de Bruxelles, et les autres lecteurs de ces pages, trouver que j'ai convenablement rempli ma tâche, que j'ai pleinement acquitté la dette sacrée que je me suis imposée.

Du sulfate de quinine dans le traitement de l'épilepsie; par M. le Dr LowET. Melius est anceps remedium, quàm nullum.

L'épilepsie est une de ces maladies qui se jouent si souvent de tous les moyens que la médecine leur oppose, que bon nombre de médecins même daignent à peine s'en occuper. La pensée que le mal est au-dessus des ressources de l'art les domine tellement, que bien souvent, sans examen préalable, et presque toujours sans tentatives sérieuses de guérison, ils prononcent l'incurabilité et abandonnent les épileptiques à leur triste sort; ceux-ci se découragent, renoncent à demander les avis de la médecine, et restent en proie à toutes les horreurs du désespoir, jusqu'à ce qu'enfin les ravages du mal aient éteint en eux toute pensée, tout sentiment. Que cette opinion de la part des hommes de l'art est préjudiciable à bien des épileptiques, c'est une vérité que l'on a plus d'une fois signalée; qu'il existe en médecine des modificateurs puissants de l'économie auxquels on a attribué la guérison de l'épilepsie, les annales de la science en font foi; que, parmi ces modificateurs, le sulfate de quinine à haute dose et continué pendant longtemps, prendra rang, des faits positifs le démontrent; il est bien entendu que ce sel n'est pas un moyen spécifique, certain, infaillible, que toutes les fois que l'épilepsie est symptomatique, qu'elle est sous la dépendance d'une lésion matérielle du cerveau ou de ses annexes, ou de tout autre organe, de même que dans ces cas où l'économie est déjà minée par l'affection épileptique, où les atteintes portées à l'organisme se traduisent à l'extérieur par des désordres permanents de l'intelligence, ou de la motilité, il est bien entendu, dis-je, que dans toutes ces circonstances le sulfate de quinine reste impuissant. Ce n'est que lorsque l'épilepsie existe à l'état de simple névrose, que le médecin pourra donner avec confiance le sulfate de quinine; et dût-on encore admettre que, dans la majorité de ces cas, l'action de ce médicament fût nulle, toutefois dans une affection où tous les remèdes préconisés échouent si souvent, dans ce cas un moyen qui semble guérir quelquefois, qui paraît soulager plus souvent, ne devrait-il pas être essayé ? Fut-il même démontré que le sulfate de quinine n'éloigne les attaques épileptiques qu'une fois sur dix, qu'il ne procure la guérison qu'une fois sur vingt, le médecin ne devrait-il pas s'applaudir d'avoir ce moyen à sa disposition?

Assistant, en 1836, aux leçons cliniques de M. Piorry, alors médecin de l'HôtelDieu de Paris, je vis employer pour la première fois le sulfate de quinine à haute dose chez une jeune fille épileptique; l'amélioration notable, obtenue dans ce cas, et d'autres succès, que ce professeur nous cita, et qu'il crut devoir attribuer au même moyen, me déterminèrent à essayer ce médicament à la première occasion. Tout en faisant des essais, l'idée me vint que, pour que le sulfate de quinine fût de la plus grande efficacité possible dans l'épilepsie, il pût être non-seulement nécessaire de l'administrer à forte dose, mais encore important d'en continuer l'usage pendant un espace de temps indéterminé, mais en général assez long, lors même que les attaques paraissent être supprimées; et cela d'après cette con

sidération que toutes les fois que le médecin a affaire à des affections difficiles à modifier par les moyens thérapeutiques, il est assez heureux d'avoir à sa disposition un modificateur de quelque valeur, qu'alors l'économie sera prudemment (consideratis considerandis) soumise à son action bienfaisante, à titre de préservatif, lors même que la cure paraît déjà être définitive. Cette manière de voir me parut d'autant mieux fondée dans l'occurrence, que je pensai qu'il pouvait en être de l'action curative du sulfate de quinine dans l'épilepsie, comme il en est dans les fièvres intermittentes. Dans celles-ci, pour éviter les récidives, n'est-il pas de la plus haute importance d'insister sur l'usage du sulfate de quinine, lors même que l'accès est définitivement coupé, et cela pendant un espace de temps mesuré sur la durée de l'affection fébrile? Plus, si les récidives dans la classe des maladies à accès, sont tellement fréquentes, et en quelque sorte tellement inhérentes à la nature inconnue de ces affections, que l'habitude seule contractée par l'économie à être périodiquement affectée, joue parfois un certain rôle dans le retour de l'accès lui-même, cette tendance aux récidives ne réclame-telle pas la continuation du moyen modificateur de l'accès ?

Les résultats que j'ai obtenus dans l'épilepsie par l'emploi du sulfate de quinine à haute dose, et en insistant sur l'usage du même médicament pendant un espace de temps indéterminé, mais eu général assez long, me paraissent être satisfaisants; je les livre en toute confiance à l'appréciation de mes confrères.

1re OBS. M. E...., âgée de dix ans, d'un tempérament nerveux, dont la famille n'a jamais compté d'épileptique, s'étant querellée avec un de ses frères, fut vivement réprimandée par ses parents; triste et morose pendant quelques jours, elle fut bientôt en proie à une attaque d'épilepsie, caractérisée par la perte subite de connaissance, des convulsions, l'écume à la bouche; aucun symptôme précurseur n'annonce l'attaque, aucune médication n'a été essayée. L'épilepsie date depuis huit mois; les attaques rares au début, n'ayant lieu que tous les 12 à 15 jours, se rapprochent et deviennent fréquentes au point d'avoir lieu tous les deux à trois jours, et parfois plusieurs fois dans la journée.

(10 grains de sulfate de quinine en poudre à prendre en trois doses dans la journée.) La même dose continuée pendant quatre jours, est momentanément supprimée à cause de la répugnance de la malade pour le médicament.

Pendant le courant de la première semaine, on a à noter une seule attaque.

A force d'instances, le sulfate de quinine à la même dose, est repris après trois jours d'intervalle; on le donne en pilules, deux le matin, deux le soir.

Plus d'attaque pendant cette deuxième semaine.

Le sulfate de quinine est employé à la même dose pendant la troisième semaine; une deuxième et dernière attaque a lieu.

L'usage du médicament est encore continué pendant trois semaines.

Durant ce temps, le sulfate de quinine a été supprimé toutes les fois que l'estomac parut difficilement le supporter, pour le reprendre ensuite après un repos de deux ou trois jours.

Remarques. Il est de fait que dès les premiers jours de l'usage du sulfate de quinine les attaques épileptiques, qui avaient lieu tous les deux ou trois jours et parfois plusieurs fois dans la journée, se sont éloignées d'abord, pour bientôt se supprimer définitivement chez cette jeune fille nerveuse, devenue épileptique par commotion morale (c'est au moins la seule cause présumable).

Depuis 1839, j'ai plusieurs fois revu cette malade; elle s'est constamment bien portée, sans ressentir les moindres atteintes du mal, qui l'avait tourmentée pendant huit mois, et dont les attaques répétées et de plus en plus fréquentes devaient, selon toutes les apparences, faire prochainement une victime. Y a-t-il ici simplement coïncidence d'une guérison provoquée par les seuls efforts de la

nature. Ou doit-elle être attribuée au sulfate de quinine? ou bien encore, les attaques devront-elles se répéter à l'avenir et n'être que momentanément supprimées? ce sont là des suppositions qu'il est permis de faire dans ce cas, comme dans tous les cas de médecine, mais en raisonnant d'après les hypothèses on en viendra nécessairement à la négation de toute médication, et force sera de soutenir, qu'en tout la nature seule guérit.

2e OBS. Pendant le courant de juin 1839, je fus demandé chez P..., âgé, de 29 ans, épileptique depuis nombre d'années, scrofuleux, ayant le membre pelvien gauche considérablement raccourci, par suite d'une coxalgie terminée par la luxation du fémur et une fausse articulation subséquente; du reste, des cicatrices caractéristiques et des engorgements glandulaires actuels indiquent l'état passé et présent de scrofules chez cet individu.

Les attaques épileptiques ont lieu tous les cinq ou six jours; d'autres fois elles sont plus fréquentes pendant quelques jours, mais alors un mois, six semaines se passent sans attaques. (24 grains de sulfate de quinine à prendre dans la journée en quatre fois.)

Pendant le courant de la première semaine, une seule et dernière attaque a lieu. Continuer la même dose de sulfate de quinine pendant deux mois.

! Chez ce malade, comme chez le plus grand nombre de ceux qui prennent pendant longtemps la quinine, on a pu observer une espèce de fièvre intermittente provoquée par cette substance; on a pu également noter quelques troubles nerveux du côté de l'encéphale, tels que des tintements d'oreilles, une diminution de l'ouïe, des éblouissements, des vertiges, de la céphalalgie. Ces accidents, de même que l'irritation de l'estomac produite dans ce viscère par l'ingestion du médicament, disparaissaient ordinairement par un repos de deux ou trois jours. J'ose, du reste, assurer qu'avec quelques précautions le sulfate de quinine peut être donné à forte dose, et pendant longtemps, avant qu'il soit rigoureusement contreindiqué.

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Remarques. Ce malheureux, rongé par le vice scrofuleux, en proie à l'une des plus affreuses maladies qui puissent accabler l'homme, présente le triste exemple d'un de ces êtres disgraciés, que la nature, dans son courroux, ne semble avoir tiré du néant, que pour les faire souffrir. Existerait-il une certaine filiation entre les grands maux? L'épilepsie pourrait-elle être produite par les scrofules ? Quoi qu'il en soit, il est positif que, depuis plus de cinq ans que le sulfate de quinine a été essayé chez ce malade, en quelque sorte en désespoir de cause, les attaques ont été supprimées. Faudra-t-il admettre que cette longue suppression se présente naturellement dans l'épilepsie, et qu'elle ne soit nullement due au sulfate de quinine? mais encore une fois ce n'est là qu'une hypothèse que la seule narration du fait renverse.

3. OBS. — Madame veuve ...., âgée de 36 ans, mère de quatre enfants, d'un tempérament sanguin, d'une forte constitution, ayant toujours joui d'une bonne santé, éprouva, sans cause connue, une première attaque d'épilepsie en 1841. Pendant le courant de la même année, les attaques se répétèrent cinq fois. Au mois de mars 1842, demandé pour lui donner mes soins, la malade me décrivit longuement les troubles qui, de temps en temps, se présentaient chez elle, et qu'elle crut devoir attribuer à des congestions cérébrales (coups de sang); elle m'assura, du reste, que cette opinion avait été admise par le médecin qui l'avait soignée avant moi. Les renseignements qu'elle me donna, et d'autres que je pus recueillir des personnes qui l'entouraient, me firent penser qu'elle se trompait sur la nature de son mal; mais le hasard voulut que, pendant une de mes visites, je fus témoin d'un de ces accès qu'elle éprouvait de temps à autre; c'était une attaque épileptique des mieux caractérisées.

La malade étant forte et sanguine et dans l'habitude de se faire saigner, je débutai par une forte saignée du bras; ne trouvant aucune contre-indication à l'administration du sulfate de quinine, je le prescrivis à la dose de 24 grains par jour, dussé-je même m'être trompé sur la nature du mal. L'usage de cette dose a été continué pendant trois mois, tout en ménageant la susceptibilité de l'estomac et en supprimant momentanément le médicament quand il était mal supporté. Pendant ce laps de temps, trois attaques ont eu lieu, la dernière le 24 mai 1842. Depuis cette époque, la malade a joui de la meilleure santé. Vu sa constitution forte et sanguine, et l'habitude qu'elle en a contractée, on la saigne ordinairement deux fois par année.

Remarques.

La suppression des attaques épileptiques ne datant que depuis à peu près vingt-quatre mois, sera-t-elle définitive? L'avenir l'apprendra; toutefois les différentes médications employées précédemment, n'ont produit aucun effet, et le résultat obtenu par le sulfate de quinine est satisfaisant. Si donc,-par anticipation, on admet (ce qui est loin d'être démontré) que la guérison ne sera que momentanée, il n'est pas moins vrai que l'emploi du sulfate de quinine est un moyen précieux contre l'épilepsie et qui vaut bien la peine d'être essayé. Cette dame, d'un tempérament sanguin, d'une forte constitution, est devenue épileptique pendant les premières années de son veuvage; ne pourrait-on pas se demander si les privations des plaisirs de l'amour n'ont pu modifier chez elle l'économie, au point de provoquer l'épilepsie? Et partant, si les moyens employés pour la combattre avaient échoué, on pouvait être autorisé à conseiller le mariage.

4e OBS. V..., âgé de 33 ans, est devenu épileptique il y a quinze ans ; il attribue son mal à l'impression qu'il ressentit à la vue d'une personne aux prises avec une attaque de cette maladie. (24 grains de sulfate de quinine à prendre dans la journée.) Cette dose est continuée pendant deux mois.

Amélioration notable pendant six mois; durant ce temps cinq attaques ont eu lieu.

Les accès devenant plus fréquents, le sulfate de quinine est repris et donné à la même dose pendant un mois. Nouvelle amélioration qui se soutient encore pendant huit mois.

Plus tard, la maladie a marché; des accès de manie sont survenus.

Le sulfate de quinine a encore été employé dans deux autres cas, ayant une grande analogie avec le précédent; les attaques épileptiques se sont manifestement éloignées pendant que les malades étaient sous l'influence de ce médicament, sans pouvoir toutefois être définitivement supprimées. Plus tard, ce médicament parut tout à fait inefficace; mais il est à remarquer que chez ces trois malades, l'épilepsie existait depuis nombre d'années, le faciès épileptique dénotant déjà ses désordres anciens et profonds; il n'est donc pas étonnant que les résultats n'aient pas été plus satisfaisants; aussi le sulfate de quinine n'a-t-il été administré que dans l'espoir de rendre les attaques moins fréquentes, et nullement dans la pensée de guérir des malades que l'expérience de tous les temps nous dit être incurables.

5e OBS. A..., âgé de 20 ans, d'un tempérament lymphatico-nerveux, n'ayant jamais connu d'épileptique dans sa famille, l'est devenu, il y a trois ans, sans pouvoir assigner la cause de son mal. Aucun symptôme précurseur n'annonce l'attaque; les accès ont lieu tous les dix ou quinze jours; ils sont plus fréquents la nuit que le jour. L'épilepsie paraît exister à l'état de névrose, sans la moindre complication. Du reste, le malade est inquiet sur son état ; il se croit incurable; les assurances positives d'une guérison certaine lui sont données. Le sulfate de quinine est prescrit à la dose de 24 grains, à prendre dans la journée. Cette dose est continuée pendant trois mois, toutefois avec des alternatives de suppression.

Cette médication n'améliore en rien l'état du malade; différents autres moyens sont essayés, mais inutilement.

Remarques. — Dans ce cas, le sulfate de quinine fut impuissant, bien que, selon toutes les apparences, on eût pu fonder sur son emploi quelque espoir; les autres moyens que l'on a employés n'ont pas été plus efficaces. Cette ténacité extrême ne pourrait-elle pas être en partie attribuée aux dispositions morales de l'individu? Une seule pensée paraissait l'occuper, l'incurabilité de son mal; s'il est vrai que l'épilepsie, en tant que névrose, ne consiste que dans une altération du mécanisme de l'innervation, on conçoit tout de suite que devant cette triste préoccupation, tous les moyens ont dû échouer.

Somme toute, sept épileptiques ont été traités par le sulfate de quinine à haute dose, et en insistant longtemps sur l'usage du même médicament, trois parmi ceux-ci me paraissent devoir leur guérison à cette méthode de traitement; chez trois autres, l'amélioration n'a été que momentanée; chez le septième, aucun effet curatif appréciable n'a été obtenu. Ces résultats sont-ils assez satisfaisants pour qu'on se donne la peine d'essayer cette médication? C'est une question que je soumets à l'appréciation de mes confrères (1).

Observation de pseudo-croup chez un enfant de cinq ans, traitement par le tartrate de potasse et d'antimoine, guérison. Fait communiqué par le docteur PIGEOLET, membre titulaire et bibliothécaire de la Société.

Au mois d'avril dernier nous fûmes appelé près d'une jeune fille de cinq ans, atteinte d'une grande difficulté de respirer; d'une constitution assez bonne, elle jouissait d'ordinaire d'une santé excellente, mais elle était disposée au coryza. Cinq jours avant, elle avait accusé un abattement général, elle éternuait souvent, des larmes coulaient de ses joues, il y avait augmentation de chaleur à la peau ; elle était restée au lit de sa propre volonté et avait refusé toute nourriture; mais le lendemain elle se leva, un peu mieux disposée et prit quelque nourriture. Le seul symptôme que l'on remarqua fut un certain degré de gène dans la respiration avec production d'un bruit particulier, un souffle que l'on entendait à distance pendant l'inspiration; une toux sèche assez fréquente et brève eut lieu également. Les trois jours suivants la toux se manifesta par quintes, la gène de la respiration augmenta, le souffle se faisait avec bruissement et seulement alors les parents inquiets reclamèrent les secours de la médecine, ce qu'ils n'avaient tardé de faire qu'à cause de leur position peu moyennée. Lorsque nous visitâmes la malade pour la première fois, c'était vers neuf heures du matin : le pouls assez vibrant donnait cent pulsations par minute, la peau était moite et l'enfant n'accusait de douleur qu'au col dont les glandes lymphatiques étaient tuméfiées; la respiration était fréquente, l'inspiration assez longue se faisait comme à travers un tube rétréci et recouvert de mucosités épaisses mises en vibration; pendant l'inspiration surtout, l'oreille percevait le même bruit le long des grosses bronches; la langue était chargée d'un enduit jaunâtre, mais humide ainsi que le fond de la bouche dont la couleur était rendue bleuâtre par une injection veineuse assez prononcée; le timbre de la voix était normal, ce qui indiquait que si la trachée était malade, le larynx au moins ne prenait point part à l'affection. Quelques quintes de toux eurent lieu en notre présence: assez prolongées, elles étaient

(1) Voyez le rapport qui a été fait sur ce travail à la Société des sciences médicales et naturelles de Bruxelles, inséré dans le cahier de mars 1845, page 212 de notre journal. (Note de la Rédaction.)

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