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livres, tels que la médecine, l'astronomie, l'histoire, ou même à un seul ouvrage, dont ils recueillent à grands frais toutes les éditions; c'est ainsi que l'on a vu un fou qui avait conçu une passion extrême pour tous les livres d'astronomie, quoiqu'il ne sût pas un mot de cette science; il les achetait à tout prix, et les enfermait dans une cassette, pour ne plus leur laisser voir le jour. Un prince allemand a formé le projet de réunir toutes les éditions de la Bible: il en a déjà 8000, et il lui en manque encore 2000. Un anglais a 365 belles éditions d'Horace. On connaît encore un autre genre de bibliomanie, qui consiste à se procurer des éditions de luxe et à les faire relier avec tant de magnificence que l'on craint d'y toucher, et que l'on va emprunter à d'autres les ouvrages que l'on a chez soi, lorsqu'on veut les lire. On peut mettre au nombre des bibliomanes, chez les anciens, un nommé Epaphrodite de de Charonnée, grammairien, qui a vécu à Rome dans l'intervalle du règne de Néron à celui de Nerva, et qui possédait jusqu'à trente mille volumes, et un nommé Sammonicus Serenus, qui avait une bibliothèque composée de soixante-deux mille volumes.

BIBLIOPHILE. Ce titre convient à toutes les personnes qui aiment les livres ; le bibliographe, le bibliomane et le bibliotaphe paraissent y avoir le même droit; cependant je crois qu'il conviendrait mieux à l'amateur qui ne recherche les livres ni par état ni par passion; à celui qui, dirigé par le seul désir de s'instruire, aime et se procure les bons ouvrages qu'il croit les plus propres à composer une collection intéressante par le nombre et par la variété des articles. La philosophie, guidée par le goût, doit toujours déterminer le choix du bibliophile dans ses acquisitions. Entasser des livres sans discernement, n'est pas prouver qu'on les aime; ce n'est donc pas celui qui a le plus de

livres, mais celui qui possède les meilleurs, qui mérite le titre de bibliophile. Si le bibliomane est précieux relativement au commerce de la librairie, le bibliophile l'est bien davantage relativement au progrès des sciences et des arts; parce que, ne s'attachant qu'aux bons ouvrages, il rend nécessairement les auteurs plus circonspects, plus difficiles et plus soignés dans leurs productions. Il nous semble dono que le titre de bibliophile ne doit appartenir qu'à celui qui aime les livres comme on doit les aimer, et nullement à ceux qu'une aveugle passion égare dans les recherches qu'ils font des ouvrages qui, par une aveugle fantaisie, centuplent quelquefois de valeur.

BIBLIOPOLE. Celui qui fait le commerce des livres ; libraire, colporteur.

BIBLIOTAPHE. Ce nom, composé de deux mots grecs, signifie enterreur de livres. Il convient à ces bibliomanes ou bibliophiles qui n'achètent des livres que pour les enfouir et empêcher les autres d'en profiter : ils sont aux livres ce que les avares sont à l'argent ; il est impossible de jeter un coup d'œil sur leur trésor sans les alarmer. Malheureusement les bibliotaphes ne sont que trop communs; ils font le plus grand tort aux hommes studieux, qui sont privés des ressources qu'ils trouveraient chez ces Harpagons littéraires. On a comparé ces derniers au chien qui empêche le cheval de manger l'orge qu'il ne peut manger lui-même. Lucien, Ambroise Camaldule, Phiselphe et le père Lelong se sont plaints amèrement des bibliotaphes. Il est surprenant surtout que le père Lelong, qui était si doux, si honnête et toujours prêt à faire voir la bibliothèque de Sainte-Geneviève, qui lui était confiée, ait été exposé aux durs refus des hommes dont nous parlons dans cet article, et qui sont la peste des lettres, selon

en

l'expression d'un savant. Les bibliotaphes sont rares France. Gronovius mandait à Heinsius que Vincent Fabrice lui avait écrit de Paris que rien n'égalait la politesse obligeante avec laquelle les Français lui communiquaient leurs richesses littéraires. Il n'en était pas de même en Italie ; Vossius s'en plaint, et Montfaucon dit qu'un religieux augustin de Naples a été mis en pénitence pour lui avoir ouvert la bibliothèque de son couvent. A Rome, l'entrée des bibliothèques était très-difficile, ainsi que dans les autres villes ; et à Venise la bibliothèque de Saint-Marc était impénétrable. Menchen a déclamé, à juste titre, contre les bibliotapies, et a donné de très-bons conseils à ceux qui possèdent des bibliothèques, dans sa preface à la tête de de l'édition qu'il a donnée du Traité de Libris legen lis par Bartholin. Saldière était un vrai bibliotaphe; mais Pinelli, Peiresc, de Cordes, Gaignat, la Vallière, LamoignonMalsherbes, etc., etc. étaient des bibliophiles vraiment obligeans.

BIBLIOTHÉCAIRE. On appelle ainsi celui qui est chargé de la classification, du soin et de la conservation d'une bibliothèque. Les fonctions du bibliothécaire sont d'autant plus importantes, que ses connaissances devraient être, pour ainsi dire, universelles. Tout ce que nous avons dit du bibliographe s'applique au bibliothécaire. Il doit être parfaitement au fait de l'histoire littéraire et du mécanisme de l'art typographique ; cette dernière partie surtout lui est essentielle pour décider du format, du caractère et de l'impression de certaines éditions du 15e siècle et du commencement du 16e (1) : il doit connaître aussi les arts dépen

(1) Chaque imprimeur avait alors sa fonderie et ses poinçons, qu'il retouchait ou gravait de nouveau lorsqu'il n'en était pas content; et alors il supprimait son nom et souvent l'année dans les premières édi

dant de la typographie, tels que le dessin, la peinture et la gravure tant sur bois que sur cuivre, pour bien juger du mérite des miniatures et des figures qui se rencontrent si souvent, soit dans les manuscrits, soit dans les imprimés. Il doit sayoir donner une description exacte d'un ouvrage rare et curieux; en rendre fidèlement le titre, la date, le nom de la ville, de l'imprimeur et de l'auteur, qu'il faut quelquefois chercher à la tête ou à la fin d'une dédicace, dans la préface, dans le privilège, dans des acrostiches, devises, etc. Il doit compter les feuillets qui précèdent le corps de l'ouvrage, en désigner l'emploi ; indiquer si le livre est imprimé à longue lignes ou par colonnes; si le caractère en est gros ou menu, romain, gothique, demi-gothique ou italique; annoncer si les chiffres, les réclames et les signatures s'y trouvent; vérifier et compter les feuillets et les figures; annoncer les index, tables ou répertoires et registres des signatures. Le bibliothécaire doit s'appliquer aussi à connaitre les écritures des différens siècles, pour apprendre à déchiffrer les manuscrits qui lui sont confiés. L'étude des médailles et celle des manuscrits se prêtent un mutuel secours : il doit donc les cultiver l'un et l'autre. Les

tions dont il était mécontent. La maladresse de quelques ouvriers a fait regarder, comme sortant du berceau de l'art, des éditions sans date, imprimées grossièrement au commencement du 16e siècle. Une date ancienne, placée, par la friponnerie de quelques imprimeurs, sur des éditions bien postérieures à cette date, induit souvent en erreur. Des imprimeurs, aussi inconstans qu'ignorans, passaient d'Allemagne en Italie, d'Italie en Espagne et ailleurs, se fixaient pendant quelques années dans des châteaux ou des monastères à présent inconnus, laissaient par tout des monumens informes de leur art, et, par ce manège, ont singulièrement embarrassé les bibliographes. Des noms synonymes de ville, une même date pour différentes éditions, des titres variés de mille manières, des feuillets réimprimés a la fin ou au commencement d'un livre, des chiffres adroitement grattés, n'ont pas peu contribué à mille erreurs qu'il est quelque fois impossible de rectifier.

trésors de la littérature ancienne doivent être son domaine, ainsi que ceux de la littérature moderne; enfin, après avoir acquis la connaissance des livres, il doit se faire une méthode facile et lumineuse pour leur classification, et il faut que cette méthode découle de l'origine et de la filiation des connaissances humaines, des liaisons et des rapports qu'elles ont entre elles; il faut qu'elle soit simple, claire, et qu'au premier coup d'oeil, elle offre un résultat qui ne fatigue point l'esprit et qui plaise à l'imagination. Le bibliothécaire doit être exempt de toute espèce de préjugés religieux et politiques. « Il n'est, selon l'expression d'un auteur moderne, le prêtre d'aucun culte, le ministre d'aucune secte ; le chef d'aucune faction; l'initié d'aucune coterie; l'adepte ou le candidat d'aucune académie ; le partisan idolâtre d'aucun systéme. » Le même auteur trace ainsi les devoirs du bibliohtécaire. « Il se doit au public, et surtout à la foule des vrais amateurs, qui trouveront en lui une bibliothèque parlante, qui tireront plus de secours de sa vaste et complaisante érudition, que de ses registres d'ordre, de ses tables alphabétiques, de ses séries numérotées. Il se doit à une jeunesse curieuse et avide d'instruction, pour qui il sera un guide sûr et affable, qui les conduira vers les sources les plus pures et les plus abordables. Il doit être pour les professeurs des différentes écoles de son département, un collègue utile, un ami éclairé, un conseil permanent, qui, de concert avec eux, travaillera au succès de l'instruction publique. Il se doit surtout à la prospérité de son département, dont toutes les richesses, toutes les ressources lui seront connues et presque familières (1). Voyons maintenant quels sont les bibliothécaires les plus connus, tant chez les anciens que chez les modernes. Le premier est Demetrius

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(1) Le citoyen Parent l'aîné, Essai sur la Bibliographie et sur les talens du Bibliothécaire, pag. 51,

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