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le Soissonnais l'abbaye de Saint-Médard de Soissons (1) et Château-Thierry (2). Ensuite Herbert avait eu du chef de sa femme une part dans la succession de Robert de France, le comté de Troyes, peut-être ceux de Meaux, de Melun et de Provins, que nous voyons depuis entre les mains de ses héritiers sans qu'aucun texte nous apprenne comment ils les avaient acquis (3).

Ces fiefs étaient séparés les uns des autres par de vastes espaces qui obéissaient à d'autres maîtres. Il fallait combler ces lacunes par des acquisitions nouvelles. Tel fut le but qu'Herbert se proposa, et qu'il atteignit en grande partie; se rendant ainsi digne du titre de comte de Champagne, qu'il ne porta pas, mais que lui donne un chroniqueur du x siè

(Chron. Frodoardi, ap. Duchesne, II, 599 C). Herbert perdit cette ville l'année suivante, où elle fut réunie au comté de Flandres (Chronique de Tournay, ap. D. Bouquet, VIII, 285), dont elle avait précédemmeut dépendu (Ann. Vedastini an. 892, 895, ap. D. Bouquet, VIII, 89, 91).

(1) Soissons, Aisne. Herbert Ier, comte de Vermandois, était abbé de Saint-Médard (Gall. Christ., IX, 413 A).

(2) Château-Thierry, Aisne. Il en sera plusieurs fois question dans la suite de ce récit; on y voit la preuve que cette ville appartenait à Herbert dès 923 (Chron. Frodoardi, ap. Duchesne, II, 593 B). Nous supposons qu'il la tenait de son père, autrement nous ne saurions pas comment il l'aurait acquise.

(3) Les auteurs de l'Art de vérifier les dates, II, 610, ont parfaitement établi qu'Herbert fut comte de Troyes. On a pu contester le témoignage de Raoul Glaber et d'Albéric qui lui donnent ce titre (Raoul Glaber, III, 9, ap. Duchesne, IV, 38 C, et D. Bouquet, X, 42 A; Albéric, an. 928, éd. Leibnitz, t. I, p. 266), mais on ne peut contester celui de la fille même d'Herbert, de Ledgarde, comtesse de Chartres (Gall. Christ, vetus, I, 159-160; Labbe,

cle (1). Ceux des possesseurs de nos grands fiefs qui ont agrandi leurs domaines ou leur pouvoir, et créé pour ainsi dire de petits états dans l'état, ont, par là, malgré leurs intentions purement égoïstes et quoique à leur insu, combattu pour la cause de la civilisation; ils ont réduit le nombre des acquisitions qu'a dû faire la royauté capétienne pour doter la France de son unité moderne et fonder ainsi une nation qui a produit tant de grandes choses.

Quand, à cette époque, un homme puissant voulait s'enrichir au détriment d'autrui, c'était d'ordinaire par les biens du clergé qu'il commençait. On craignait peu alors la principale arme de l'église, l'excommunication, qui, plus tard, devint entre ses mains un moyen d'action si puissant.

La situation et l'importance des possessions de

All. Chronol., I, 579; Gall. Christ. nov., II, Instr., col. 7; Cart. de S. Père de Chartres, I, 63). Meaux appartenait, en 962, à Robert, fils d'Herbert (Richer, III, 17, éd. Guadet, t. II, p. 18-19). Aucun texte ne nous dit qu'il se soit emparé de cette ville; et le dernier comte de Meaux que nous connaissions avant Robert est Teutbert, mort en combattant les Normands en 888 (Ann. Vedastini an. 888, ap. D. Bouquet, VIII, 87 C). Melun fut possédé par Thibaut-le-Tricheur, gendre d'Herbert (Richer, IV, 74, éd. Guadet, t. II, p. 254-255). On peut supposer que Thibaut l'avait hérité de son beau-père. Nous croyons établi que Provins appartint à Etienne, petit-fils d'Herbert, et les chroniqueurs ne nous apprennent pas qu'Etienne, son père ou son grand-père, se soit approprié cette ville par quelque moyen illégitime.

(1) Albéric, an. 920, 924, éd. Leibnitz, 1, 257, 260. - Ce qui donne une grande autorité à ces passages d'Albéric, c'est qu'ils sont extraits de la Chronique de Gui, chantre de la cathédrale de Châlons-sur-Marne, mort en 1203. (Cf. Alberici Chronicon an. 1203, éd. Leibnitz, II, 431).

l'église de Reims avaient, même avant la mort du roi Robert et la captivité de Charles, attiré les regards ambitieux d'Herbert. Quoique ces possessions ne comprissent point encore le comté de Reims, elles étaient assez étendues et assez riches pour donner à l'archevêque un rang élevé dans le baronnage français; on comptait parmi elles des forteresses qui sont aujourd'hui des villes, entre autres Épernay, qui passait alors pour avoir été donné à la cathédrale de Reims par saint Remy (1), Mézières, aujourd'hui chef-lieu du département des Ardennes (2), et Mouzon (3). Il faut y joindre deux localités qui ne sont plus aujourd'hui que de simples villages, mais dont l'une porte un nom historique, et qui toutes deux, au 1x° siècle, ont joui, comme forteresses, d'une certaine célébrité; Coucy (4) et Omont (5).

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(1) Voir le testament apocryphe de saint Remy, ap. Varin, Archives administratives de la ville de Reims, I, 6. Cf. Flodoard, Historia ecclesiæ Remensis, I, 18, p. 85. Epernay avait été fortifié par l'archevêque Foulques, mort en l'année 900, et par Hervée, son successeur, mort en 922 (Flodoard, Historia ecclesiæ Remensis, IV, 8 et 12, p. 637, 648). On sait qu'Epernay est aujourd'hui un des chefs-lieux d'arrondissement du département de la Marne.

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(2) Flodoard, Historia ecclesiæ Remensis, IV, 16, p. 652 (Chronicon an. 920, ap. Duchesne, II, 590; Richer, I, 19, éd. Guadet, t. I, p. 46, 49).

(3) Mouzon, Ardennes, arrondissement de Sedan. L'archevêque Hervée en avait réparé les remparts (Flodoard, Hist. eccl. Rem., IV, 13, p. 648).

(4) Coucy-le-Château, Aisne, arrondissement de Laon. - Coucy fut fortifié par l'archevêque Hervée (Flodoard, Historia ecclesiæ Remensis, IV, 13, p. 648).

(5) Omont, Ardennes, arrondissement de Mézières, avait été

L'archevêque de Reims était alors un certain Séulfe, qui, comme il arrive ordinairement, avait peu de sympathies pour tout ce qui tenait à son prédécesseur. Ce dernier avait laissé un frère nommé Eudes et un neveu nommé Hervée, qui tenaient en fief quelques biens de l'église de Reims; Séulfe voulut leur faire un procès, des accusateurs se présentèrent et les provoquèrent en duel, eux ne comparurent pas; alors l'archevêque recourut à la force, il fit alliance avec Herbert, et, grâce à son aide, les dépouilla de leurs biens et de la liberté. Eudes et Hervée, prisonniers d'Herbert, furent enfermés, l'un dans une forteresse de ce dernier, l'autre à Paris. Le bruit public était que Séulfe n'avait obtenu ce concours d'Herbert qu'en faisant avec lui un traité secret. Les conseillers de Séulfe avaient, dit-on, de l'aveu de ce prélat, pris l'engagement de faire élire archevêque de Reims après le décès du titulaire un fils d'Herbert, Hugues, alors âgé d'environ deux ans (1). Pour exécuter cette convention, il fallait deux choses: la mort de Séulfe, et elle ne devait pas tarder, l'assentiment de l'autorité royale, et depuis la trahison de Saint-Quentin, grâce à son auguste captif, Herbert put compter se faire assez craindre pour exiger de Raoul cet assentiment.

Mais, pour le moment, il y avait des affaires plus pressantes, les Normands, qui, jusqu'à la conquête

fortifié par l'archevêque Foulques (Flodoard, Historia ecclesiæ Remensis, IV, 8, p. 637).

(1) Flodoard, Historia ecclesiæ Remensis, IV, 18, 35, p. 654, 682. Ces évènements se passaient quelque temps avant la mort du roi Robert.

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de l'Angleterre, furent habituellement de si fidèles soutiens de l'autorité royale, avaient pris les armes pour venger ou délivrer le roi prisonnier; ils avaient passé l'Oise et pénétré jusqu'en Artois; heureux de trouver dans leur dévouement un prétexte de brigandage, ils dévastaient le pays (1). Le roi Raoul, accompagné d'Herbert, partit de Bourgogne, se rendit à Compiègne, et de là, passant l'Epte, il entra en Normandie. C'était une diversion qui pouvait produire de grands résultats ; mais, avant que Raoul eût rien fait d'important, on vit arriver dans son camp les envoyés de plusieurs barons lorrains qui l'invitèrent à venir sur la frontière de leur pays pour recevoir la soumission de ces partisans jadis si zélés du malheureux Charles. Raoul, joyeux, se rendit immédiatement à Mouzon, et il se borna à laisser sur les bords de l'Epte un corps d'observation. Herbert le commandait avec Hugues le Grand, son beau-frère. Les Normands, continuèrent leurs dévastations, Herbert y répondit en saccageant leur pays, et les contraignit à une suspension d'armes (2). L'année suivante, 924, Raoul récompensa ce service en lui donnant Péronne, et la suspension d'armes se changea en un traité de paix définitif qui fut négocié par Herbert, de concert avec Hugues, son beau-frère, et avec l'archevêque Séulfe; le roi Raoul abandonnait aux Normands le Mans et Bayeux (3).

Le duc de Normandie Rollon, qui n'avait pas

(1) Le duc de Normandie était alors Rollon.

(2) Chronicon Flodoardi, ap. Duchesne, II, 593 BC, 594 A.
(3) Chronicon Flodoardi an. 924, ap. Duchesne, II, 594-595.

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