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Gallia Christiana publient (1) comme preuve une charte émanée de la comtesse Ledgarde et de ses fils Hugues et Eudes. Cette opinion est reproduite d'une manière non moins affirmative dans l'Histoire généalogique du P. Anselme. Ce savant met au nombre des enfants de Robert le Fort, «Richilde, mariée à >> Richard, comte de Troyes, d'où vint Richard, >> archevêque de Bourges, qui siégeait en 956; » il renvoie à la chronique de Flodoard et au Gallia Christiana (2). Enfin, un des auteurs de l'Art de vérifier les dates, dans le chapitre consacré à la chronologie historique des ducs de France répète ce qu'avaient dit avant lui les deux Gallia Christiana, et le P. Anselme. Mais, considérant sans doute cette doctrine comme suffisamment établie, il n'essaie pas de la justifier. Examinons ce qu'elle a de vrai et de faux (3).

Il est incontestable que la mère de Richard, archevêque de Bourges, s'appelait Richilde, ce fait est démontré par la charte déjà citée de la comtesse Ledgarde et de ses deux fils (4). Mais cette charte ne nous dit pas le nom du mari de Richilde, elle nous apprend seulement une chose qui peut mettre sur la voie; c'est que Richard, archevêque de Bourges, était frère de Thibaut le Tricheur. Il serait donc permis de supposer que Thibaut le Tricheur et Richard, archevêque de Bourges, étaient fils du même père. Mais ce que nous savons de la généalogie de

(1) II, Instr., 8.

(2) Histoire généalogique, I, 68. (3) II, 245.

(4) Gall. Christ. nov., Instr., II, 8.

Thibaut le Tricheur est trop incomplet pour que nous puissions tirer de là une conséquence rigoureuse. Thibaut le Tricheur et Richard, quoique fils de la même mère, pouvaient être nés d'un père différent. Un des auteurs de l'Art de vérifier les dates a été plus hardi que nous. C'est celui qui a écrit la chronologie des comtes de Champagne et de Blois. Il donne pour mari à Richilde et pour père à Richard, archevêque de Bourges, non pas Richard, comte de Troyes, dont il n'admet pas l'existence, mais bien Gerlon, autrement dit Thibaut ou Thiébolt, comte de Chartres et de Tours, autre père hypothétique de Thibaut le Tricheur (1). C'est un démenti formel à celui de ses confrères qui avait écrit la chronologie historique des ducs de France. Nous examinerons plus loin la question de savoir comment s'appelait le père de Thibaut le Tricheur, le mari de Richilde: la seule chose dont nous ayons besoin de montrer ici la certitude, c'est que la charte en question n'établit pas l'existence de Richard, comte de Troyes.

Le P. Anselme renvoie à la chronique de Flodoard. Malheureusement, il n'indique pas le passage sur lequel il s'appuie. Nous croyons que c'est une phrase mal lue qui est relative non à Robert I**, dit le Fort, ni au prétendu Richard, comte de Troyes, mais à Robert II et à Richard le Justicier, duc de Bourgogne (2): Robertus igitur super Ma

(1) Art de vérifier les Dates, II, 611, 612.

(2) Richard fut duc de Bourgogne de 877 à 921; Art de vérifier les Dates, II, 492-493.

ternam fluvium Rodulfo, filio Richardi, genero suo, procedut obviam (1). Au lieu de genero suo, on aura lu generi sui, et, de cette manière, Richard sera devenu, au lieu de Raoul, gendre de Robert.

Du Bouchet, dans son Histoire de la Maison de Coligny (2), et André Duchesne, dans son Histoire de la Maison de Vergy (3), ont publié une pièce qui donne à ce système erroné une apparence de fondement. C'est une charte notice rappelant un jugement rendu en 896 par le comte Richard en faveur de l'abbaye de Montiéramey, dont les biens situés à Chaource avaient été usurpés par un certain Rainard. On peut supposer, et nous croyons que dès cette époque Chaource faisait partie du comté de Troyes. Ce qu'il y a de certain, c'est que ce petit bourg en dépendit plus tard. Richard était donc comte de Troyes? dira-t-on. Mais il suffit de jeter les yeux sur les souscriptions de cette notice pour reconnaître l'identité du comte Richard avec le duc de Bourgogne Richard le Justicier, père de Raoul, qui fut roi de France. La souscription de Richard est suivi de celle de Raoul son fils, Rodulfi, filii ejus. Si Richard, quoique duc, porte le titre de comte, c'est que souvent, à cette époque, les titres de duc et de comte sont employés indifféremment. Si Richard, duc de Bourgogne, rend un jugement relatif à Chaource, c'est que Chaource relevait du du

(1) Duchesne, II. 592 A.
(2) Preuves, p. 23.

(3) Preuves, p. 19-20.

ché de Bourgogne comme le diocèse de Langres tout entier dont Chaource faisait partie (1). La même argumentation peut s'appliquer aux autres chartes de Richard le Justicier dont on voudrait se servir pour prouver l'existence du prétendu Richard, comte de Troyes.

(1) Le comté de Langres ne fut détaché du duché de Bourgogne qu'en 1178. Gall. Christ. nov., IV, Instr., 187-188.

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