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l'emportent sur l'amour du bien public, et com- | périssent ou se fondent peu à peu dans les intérêts

bien peu les partis tiennent compte des efforts qu'on fait pour les concilier!

Les opinions sont tellement partagées sur l'administration de Santhonax, qu'il serait peut-être hardi de prononcer. Flétri par les uns, du surnom odieux de Robespierre des Antilles, on lui fut redevable, selon d'autres, de l'expulsion des Anglais. On ne saurait nier que la liberté des noirs ne fournit à la métropole un moyen de recrutement formidable; mais en ébranlant tout le système colonial et en créant au centre des Antilles une puissance nuisible même à la France, ne causa-t-elle pas plus de mal que de bien? La solution affirmative de cette question, fondée sur l'expérience, et les bons résultats de la conduite contraire tenue à l'île de France, semblent réfuter victorieusement le régime de Santhonax. En admettant même que le Directoire n'entrevit d'autre moyen de défendre Saint-Domingue contre les Anglais et les colons émigrés, qu'en émancipant les poirs, on ne saurait nier qu'il commit une grande faute de confier cette mission délicate à un républicain exalté, que tant de malheureux propriétaires regardaient comme l'auteur de leur ruine. A cette faute, on ajouta celle de faire précéder ce commissaire par d'odieux décrets de proscription, de confiscation et de mort. Assimiler tous les colons réfugiés aux émigrés de Coblentz; confisquer pour 2 milliards de terres, dans le fol espoir de les vendre, était en effet un étrange moyen de ramener l'ordre et la tranquillité dans ces contrées. Là, plus que partout ailleurs, l'union et l'oubli devaient être les bases du système réparateur.

Cependant, par un bonheur inespéré, Saint-Domingue commençait à sortir un peu de ses ruines, bien que les mêmes éléments de discorde subsistassent toujours. Les colons de toutes les classes, ou les agents préposés à la régie de leurs plantations cherchaient au milieu des décombres, quelques moyens de se relever; cet éclair passager ne fut qu'un calme trompeur, pour la métropole comme pour les anciens colons.

Dans les grandes révolutions les individus se succèdent et disparaissent comme des ombres : les intérêts seuls restent aux prises, jusqu'à ce que, sapós enfin par l'inexorable main du temps, ils

opposés. Ce n'était pas sous le ciel brûlant de Saint-Domingue que les passions devaient prendre une marche différente; et les quatre factions qui s'y étaient formées, restaient en présence. Les hommes de couleur, toujours en proie à l'ambition et à une inquiète jalousie, se défiaient du général Lavaux et des blancs de toute condition. Ces démocrates d'une espèce toute particulière n'avaient embrassé la révolution avec tant d'ardeur ? que pour se placer de niveau avec les grands blancs; dès que la république menaça de les ruiner en émanicipant leur nègres, ou de les humilier en proclamant l'égalité de ceux-ci, ils devinrent ses plus dangereux ennemis, et frémirent de l'ascendant qu'on laissait prendre aux bandes de Toussaint. Vilatte, un des plus braves mulâtres, excité par son parti, crut saisir l'autorité suprême, en faisant arrêter au Cap le général Lavaux et l'ordonnateur de la colonie: tentative fatale, qui fournit de nouveaux aliments à l'anarchie, et dont une insurrection préparée en silence assura le succès momentané.

Le gouverneur ne tarda pas à être vengé. Toussaint, aussi habile que prompt à épouser les intérêts des blancs et ceux de la métropole, quand il jugeait pouvoir les faire tourner à son profit, ayant assemblé, avec la rapidité de l'éclair, 10,000 noirs sur les hauteurs du Cap, forca Vilatte à se réfugier dans les Mornes. Lavaux, dans les transports de sa reconnaissance, n'eut rien de plus pressé que de proclamer Toussaint son libérateur, et de partager l'autorité avec lui. L'influence du général noir se manifesta d'abord sous les plus heureux présages. Bien qu'il sacrifiât tout à l'ambition, il aspirait néanmoins à une puissance solide: avide de pouvoir pour lui, et de droits pour sa caste, mais convaincu que la foule devait rester attachée aux travaux de l'agriculture, il encourageait le retour des noirs à la discipline et au travail. Rigaud suivant le même système dans le Sud, en peu de temps les habitations se relevèrent; et Saint-Domingue, étonnée, se trouvait redevable à un mulâtre et à un vieil esclave, d'une administration qui contrastait avec les folies de ses anciens maîtres.

Dans ces entrefaites, arriva l'expédition qui portait les commissaires, et qu'on avait prudemment divisée en deux convois, dont l'un mit à la voile

de Brest, et l'autre de Rochefort. Ces petites esca- | lui; aussi la lutte ne tarda pas à s'engager.

La seule garantie qu'on eût des bonnes intentions du Directoire, était tout entière dans le caractère de ses collègues; mais Roume fut délégué dans la partie espagnole; Giraud n'accepta pas une mission qu'il estimait au-dessus de ses forces; et Leblanc mourut, dit-on, empoisonné. Il ne restait donc que Raymond, sur l'esprit duquel Santhonax exerçait un empire absolu.

dres échappèrent aux croisières établies par l'amiral Parker devant le Cap, et y débarquèrent, comme par miracle, en même temps. Outre les agents du Directoire, elles avaient à bord 25,000 fusils pour compléter l'armement des noirs, 2,000 hommes de troupes européennes, et les généraux Desfourneaux et Rochambeau. Le dernier avait la mission spéciale de prendre possession de la partie espagnole. Le projet du ministre était d'augmenter les Le premier soin des commissaires fut de récomforces de la république, en remplissant de nègres penser dans Toussaint, le héros des noirs, le venles cadres de 12 régiments: puissance formidable, geur de Lavaux ; on l'éleva au grade de général de au moyen de laquelle on eût pu jeter l'épouvante division. Vilatte fut d'abord mis hors de la loi ; au sein des colonies de l'Angleterre, tout en se dé- mais on se contenta ensuite de demander son exil, barrassant de cette troupe mutine et dangereuse. pour l'exécution duquel il fallut encore recourir à Mais pour une telle entreprise, il fallait une escadre, la force. La guerre civile allait se rallumer, lorsque, et celle de Richery, destinée d'abord à cette opéra- par la fermeté et la prudence de Desfourneaux, tion, retenue maintenant à Cadix pour y vendre cette opération réussit sans effusion de sang : ses prises, laissa échapper l'occasion favorable (1). latte investi dans le fort de son nom et près d'y Ce contre-temps fut d'autant plus à regretter, être assiégé, consentit à se laisser conduire en que les Anglais, en proie au môle Saint-Nicolas à France, où il fut jeté dans les fers. une épidémie horrible, n'auraient pu opposer à Tandis que le Nord était soumis à l'autorité des tant de moyens réunis que des débris de régiments. commissaires par l'influence de Santhonax sur les Tout portait donc à penser qu'après les avoir ex-noirs, le Sud fut ébranlé par de nouvelles commopulsés de cette place importante, il ne serait pas impossible de ruiner leurs propres colonies et de leur enlever même la Jamaïque. A la vérité, le rôle que Toussaint joua depuis, a fait conjecturer, qu'il n'eût pas été aussi facile d'embarquer l'armée noire, qu'on le supposait cependant, comme l'expédition eût offert un appât à l'ambition de ses chefs, il n'était pas hors de toute probabilité qu'on réussit à les y déterminer.

Vi

tions. Rigaud exerçait un pouvoir si étendu sur ces contrées, qu'on l'accusa généralement d'être l'instigateur des nouveaux troubles, bien qu'il n'y parût pas ouvertement compromis.

Depuis la reddition du Port-au-Prince aux Anglais, on avait transféré aux Cayes le chef-lieu de la province du Sud : on voulut y établir une commission de gouvernement, subordonnée à celle du Cap. Cette mesure, toute simple en elle-même, s'exécuta d'abord sans opposition; mais lorsqu'on apprit que Pinchinat allait être arrêté, et que Desfourneaux prenait le commandement supérieur de l'éman-fourneaux la province, le mécontentement éclata de toutes parts, et les chefs mulâtres craignant de perdre leur influence, attisèrent le feu de la discorde. Une expédition contre les confédérés de la GrandeAnse et le camp Raymond, mal secondée par Rigaud, venant à échouer, produisit un effet contraire à celui qu'on s'en était promis, et hâta le soulèvement. En vain les délégués Kervessau, Rey (1) On a imprimé par erreur, au chapitre LIV, que les principaux meneurs. Le commandant de Saintet Leborgne, crurent le conjurer, en faisant saisir

D'ailleurs, la mission de Santhonax fut loin de ramener le calme dans la colonie. S'il fut reçu au Cap avec acclamation par les partisans de l'émancipation, les autres colons n'apprirent son retour qu'avec effroi. S'il faut en croire des écrivains sages et modérés, il n'eut pas assez d'empire sur lui, pour oublier l'affront que les mulâtres lui avaient fait essuyer au Port-au-Prince, en le forçant à se rembarquer; ceux-ci, de leur côté redoutant sa vengeance, se mirent en garde contre

l'escadre était destinée pour le cap de Bonne-Espérance;

c'était pour

le cap Français.

Louis, l'un des plus dangereux, s'étant échappé

des mains de ses conducteurs, donna le signal de la révolte, s'empara des forts d'Islet et de la Tourelle; et, tirant le canon d'alarme, rassembla en un clin d'œil tous les noirs de la plaine des Cayes, sous les bannières des hommes de couleur. Les délégués, dans ce pressant danger, ont recours au général Rigaud, campé devant les Yrois : il accourt aux Cayes; alors ses partisans, enhardis par sa présence, qu'ils considèrent comme un renfort, font main basse sur les blancs. Les commissaires et le général Desfourneaux sont contraints à prendre la fuite les insurgés égorgent tout ce qui se présente à leurs coups, et plus de 200 victimes attestent leur implacable fureur.

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A part le massacre des Cayes et une entreprise contre Jérémie et le camp Raymond qui échoua, il ne s'exécuta aucune opération dans cette campagne, que Truguet espérait rendre décisive le temps s'écoula en funestes dissensions, et en calculs d'ambition personnelle. Les Anglais se maintinrent au Môle et au Port-au-Prince, avec la seule assistance des colons qui s'étaient si imprudemment jetés entre leurs bras, et que le Directoire venait de s'aliéner à jamais, en ordonnant la confiscation et la vente de leurs biens. Richery, appelé à une autre destination, ne parat point; et les 20,000 noirs armés, au lieu d'aller conquérir les colonies anglaises, ne servirent pas même à sauver les petites Antilles.

Gependant l'autorité de Rigaud, abrégea cette déplorable catastrophe, et ramena une espèce de calme dans la ville; mais comme il laissa ce for fait impuni, et n'en poursuivit point les auteurs, des soupçons de connivence planèrent sur sa tête: on l'accusa même de partager la haine vouée par son parti à la commission du gouvernement. Fier, impétueux, irascible, il ne déguisait point en effet la jalousie qui le dévorait depuis qu'on lui avait publiquement préféré Toussaint ; et son désespoir fut au comble, quand on voulut le réduire à obéir Les forces qu'Abercrombie avait conduites dans au général Desfourneaux. On craignait qu'il ne le- ces parages à la fin de 1795, lui assurèrent la suvât ouvertement l'étendard de le révolte, lorsque périorité sur tous les points : il reprit Sainte-Lucie le départ de Santhonax, nommé par la colonie à Goyrand; le général Wythe s'empara de Déméau conseil des Ginq-Gents, raffermit sa fidélité rary et de Berbice; Nichols soumit la Grenade et chancelante, et le rattacha à la France par l'ex-Saint-Vincent; enfin Hugues, relégué à la Guadepectative d'un avenir plus brillant. En effet, le loupe, eut peine à s'y défendre. commissaire Raymond restait le chef de la commission suprême, et ce fonctionnaire, mulâtre comme Rigaud, devant trouver en lui son principal appui, il était naturel de penser qu'il lui abandonnerait en retour une partie de son autorité.

Toussaint, de son côté, n'était pas resté oisif. Caressé par Santhonax qui lui promettait le commandement en chef des forces coloniales, il s'appliquait à en presser l'organisation. Chaque jour lui montrait d'une manière plus évidente, qu'à l'aide de ces puissants moyens, il deviendrait incessamment l'arbitre des destinées de Saint-Domingue: mais le besoin de s'étayer encore des commissaires, lui fit conserver des apparences de loyauté envers la république. Tout concourait à lui faciliter le rôle auquel il aspirait; car les blancs étant plus

Non moins heureux dans l'Océan austral, l'amiral Elphingston fit capituler dans la baie de Saldanha, l'escadre hollandaise de l'amiral Lucas, venue trop tard au secours du cap de Bonne-Espérance. Le général Stuart, maître de Colombo, acheva la conquête des établissements hollandais à Ceylan. Raynier soumit Banda et Amboine. Déjà Cochin et Malaca avaient passé sous la domination anglaise.

Des événements non moins importants se préparaient dans les mers d'Europe. L'alliance de Saint-Ildephonse semblait devoir former époque dans l'histoire de la marine française, et tout présageait qu'à la guerre de corsaires on allait substituer incessamment des opérations d'un intérêt majeur. Le premier résultat de cette alliance fut,

comme nous l'avons déjà dit, l'évacuation de la Corse, et la retraite de l'escadre de Jervis à Gibraltar et devant Cadix, où elle se trouvait en mesure d'opérer dans les deux mers. L'amiral Langara, sorti de ce dernier port, après avoir rallié l'escadre de Carthagène, vint mouiller à Toulon avec 20 vaisseaux. Son but était de s'y réunir à l'escadre française, et de la conduire sans doute à Brest, où toutes les forces des deux nations eussent probablement risqué un engagement général, dans l'intention de reprendre la supériorité sur l'Océan sans laquelle point d'indépendance maritime.

Au même moment, une occasion séduisante s'offrit au Directoire d'utiliser ce qui lui restait de marine, pour frapper contre l'Angleterre un coup en quelque sorte décisif, et lui arracher l'Irlande, en soutenant par un corps d'armée nombreux, les catholiques unis prêts à se soulever.

Depuis que lord Cambden avait succédé à FitzWilliams, le système de modération et de justice suivi par ce dernier, fit place aux mesures les plus rigoureuses, et bientôt le régime militaire, les dragonades, réduisirent le peuple irlandais au désespoir. Mille petits soulèvements, aussitôt comprimés qu'annoncés, indiquaient néanmoins l'existence du volcan; il ne fallait qu'une étincelle pour provoquer son éruption. Les associations secrètes se multipliaient, et si elles n'avaient pas encore causé de révolution, il ne fallait l'attribuer qu'à la difficulté de s'entendre sur le but d'une levée de boucliers. La plupart, loin de vouloir une séparation complète de l'Angleterre, se fussent estimés heureux qu'elle consentit à une transaction réclamée par l'honneur et la justice. Les autres, sûrs qu'on n'en obtiendrait jamais que des concessions partielles et peu sincères, visaient à fonder une république entièrement séparée d'intérêts. Au milieu de cette divergence d'opinions, un comité de cinq membres, à la tête duquel figurait lord Édouard Fitz-Gérald, dirigeait les mouvements des insurgés unis, vers un but préalable qui était de secouer le joug des Anglais.

Les victoires des Français, en 1794, avaient ranimé les espérances de tous les Irlandais, courbés sous des lois d'exception. Ils espéraient que le Directoire, plus hardi et plus sage que Louis XIV, seconderait puissamment une entreprise qui devait

substituer, à Dublin, l'influenee française au jong de l'Angleterre. L'époque de la glorieuse invasion de la Lombardie et de la paix avec l'Espagne, parut, aux chefs de l'union, la plus propice pour tenter cette périlleuse entreprise. Wolfe-Tone et NapperTandy, chefs du parti républicain, vinrent promettre au Directoire un soulèvement général, s'il s'engageait à les soutenir avec une petite armée. Ils reçurent un accueil d'autant plus flatteur, que le gouvernement caressait en secret ce projet. Hoche, débarrassé de la guerre civile et jaloux de cueillir des lauriers plus purs, sollicitait en effet le Directoire d'utiliser sa valeur et son activité contre l'ennemi irréconciliable de la France. Le chemin de Londres, le plus court, est par Dublin! disait le sergent des gardes françaises, devenu politique et guerrier.

Le ministre Truguet, s'il faut en croire un écri vain estimable (1), n'approuvait pas seulement les projets de Hoche, mais donnait à son ardente imagination la direction convenable, et en modérait l'élan. On assure que le ministre, s'élevant aux conceptions les plus hardies, voulait que la moitié de la flotte, après avoir envoyé 10,000 hommes jusqu'aux rives du Shanon, partit aussitôt sous les ordres de Villaret-Joyeuse pour l'île de France, à l'effet d'y embarquer les bataillons de noirs dont l'organisation avait été prescrite, et de les conduire à Tippo-Saïb, qui n'attendait, pour secouer le joug de l'Angleterre, que la certitude d'être soutenu par la France. On eût remplacé ces vaisseaux dans la Manche par l'escadre de Richery à son retour d'Amérique, et par celle de Villeneuve, attendue de Toulon. Les forces navales portées ainsi à 20 vais seaux, eussent transporté en Irlande le reste de l'armée ; tandis que la première escadre eût cinglé vers les mers de l'Inde. Ce plan, dont l'exécution eût incontestablement tenu du prodige, bien qu'il parût soumis à mille chances contraires, n'en fait pas moins honneur à Truguet. Cependant, comme il offrait le grave inconvénient d'exposer la moitié de l'armée durant un mois entier aux coups de l'ennemi, Hoche tenait, avec raison, à partir avec ses forces réunies, persuadé que sans cela il se com promettrait en pure perte.

(1) Le capitaine Parisot.

Quoique Truguet et Hoche différassent en ce blique mise naguère au ban de l'Europe : elle penpoint, ils mirent beaucoup d'harmonie et de zèle sait, de plus, que la remise des colonies françaises dans les préparatifs de l'expédition; rien de ce qui et hollandaises qu'elle venait de conquérir, serait pouvait en assurer le succès, ne fut oublié par eux. un équivalent complet de la restitution des PaysSurmontant les nombreux obstacles que la pénurie Bas à l'Empereur. Toutes les combinaisons du des finances élevait à chaque pas, le ministre re- traité d'Utrecht se reproduisirent dans les notes quiert sur toute la côte les matelots classés et les en- du plénipotentiaire du cabinet de Saint-James: il voie à Brest; les approvisionnements se forment ne voulait laisser à la France ni le port d'Anvers avec célérité; les troupes se rassemblent, et font ni une population aussi riche, aussi industrieuse et tous les apprêts pour monter à bord. Malheureuse- aussi brave que celle de la Belgique. En effet, ce ment, une funeste mésintelligence éclata entre Hoche n'était pas seulement ce surcroît de puissance poet l'amiral Villaret-Joyeuse, qui, loin de partager sitive, qui effrayait Pitt; il devait craindre que la les brillantes illusions de ses collègues, n'entrevoyait république, maîtresse des bouches de l'Escaut et qu'une nouvelle défaite dans l'expédition d'Irlande, des portes de Breda, ne dominât définitivement en et eût préféré emmener directement dans l'Inde Hollande. Le Directoire pouvait opposer à ces artoutes les forces navales qu'on y destinait. L'événe- guments, que la France se trouvait dans une attiment prouva qu'il avait raison; cependant Hoche, tude plus imposante qu'en 1709, et ne signerait soutenu par Truguet, n'eut pas de peine à l'em-point une paix plus onéreuse que celle qui termina porter; et le Directoire donna le commandement la guerre de la succession. A cette époque pourde la flotte à Morard de Galles. Ces débats causèrent un retard dont on s'aperçut moins, parce qu'on attendait l'arrivée des escadres de Villeneuve et de Richery.

Dans cet intervalle, Hoche toujours ingénieux pour tromper l'ennemi, fit rédiger avec un secret affecté des proclamations aux Portugais, et parvint à les faire passer en Angleterre, par les agents mêmes de cette puissance; tandis que tout se préparait à Angers et à Brest, pour la véritable destination. Le ministère anglais se méfia de la ruse instruit de ce qui se passait en Irlande, il craignit, avec quelque raison, d'y voir flotter l'étendard tricolore, devenu le ralliement des intérêts les plus puissants. C'est, dit-on, pour éclaircir ce mystère qui l'intéressait de si près, que Pitt envoya lord Malmesbury à Paris. Nous ne saurions affirmer ni contester le fait; mais il est notoire que la conduite du ministère britannique, dans cette circonstance n'annonce point qu'il désirât la paix. L'alliance qu'il négociat an même instant avec Catherine, pour fournir à l'Autriche un corps auxiliaire de 60,000 hommes, donne même à croire qu'il était plus éloigné que jamais de renoncer à ses projets.

Il était ainsi bien difficile de concilier tant d'intérêts froissés et de haines exaspérées. L'Angleterre croyait faire beaucoup, en reconnaissant une répu

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tant, Louis XIV, en compensation de la cession des Pays-Bas à la maison d'Autriche, avait placé un prince de sa famille sur le trône d'Espagne. D'ailleurs, depuis le traité d'Utrecht, l'Angleterre avait fait dans l'Inde des progrès inouïs. Trois aut tres puissances s'étaient considérablement agrandies par le partage de la Pologne. Ainsi, la république seule, pour prix de ses victoires, eût été rejetée au-dessous de son ancien état relatif, dès qu'on persistait à la réduire au statu quo de 1792, en ne lui laissant qu'une marine détruite et des colonies bouleversées.

Le Directoire, influencé par Rewbell, dénatura la bonté de sa cause, en prétendant imposer à la Grande-Bretagne par les formes d'une diplomatic révolutionnaire. Il voulait que l'Angleterre commencât par restituer tout ce qu'elle avait pris à la France et à ses alliés dans les deux Indes, sous prétexte que les lois constitutionnelles ne permettaient d'aliéner aucune portion du territoire de la république, et que les traités avec ses alliés stipulaient la garantie de toutes leurs possessions. Puis, par une application outrée des mêmes maximes, il refusait de rendre à l'Empereur des provinces. réunies par les derniers décrets, comme si un acte de réunion suffisait pour donner le droit de possession aux yeux d'une puissance tierce.

Ce fut, selon toute apparence, pour lever ces

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