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Les premiers pas de cette commission dans la | gistrats, et même de véritables autorités. Ce fut carrière épineuse de l'administration, furent mar- dans leur sein que se forgèrent toutes les accusaqués par l'inexpérience et l'injustice. Une première tions contre les fonctionnaires. On était sûr d'obtedivision de la république en départements, faite par nir un emploi, en se mettant à la tête d'un certain un Français qui avait aussi peu consulté les rap- nombre de patriotes ou soi-disant tels, et en cauports commerciaux et politiques du pays que les sant du scandale dans un club. Personne ne fut à convenances géographiques, étant devenue impra- l'abri du soupçon; et comme les accusations étaient ticable, on conserva partout les anciennes autori- le plus souvent sans fondement, elles étaient aussités, mais en chargeant des propagandistes imberbes tôt abandonnées que formées, quand les Français de surveiller leurs opérations, et de proposer les n'intervenaient pas dans les querelles. Le gouverréformes nécessaires aux institutions; les provinces nement crut remédier à ce mal, en créant une comfurent inondées de ces réformateurs de vingt ans. mission de censure pour examiner la conduite priQuand on voulut remédier au mal, il avait déjà vée et politique de tous les fonctionnaires; mais jeté de profondes racines; le lien social était presque cette institution manqua son but, et augmenta en rompu; les autorités provinciales n'avaient plus quelque façon le désordre. Bien que ses instructions de confiance dans l'autorité centrale; l'autorité fussent restreintes et spéciales, elle devint bientôt, centrale ne pouvait plus compter sur elles. contre l'intention de ses fondateurs, une magistrature qui reçut des pétitions et rendit des décrets.

L'organisation des municipalités, en confiant l'élection des officiers municipaux à un collége d'électeurs, nommé par le gouvernement, manqua entièrement son objet; au lieu d'ajouter aux droits du peuple, elle le dépouilla de ceux qu'il tenait de l'ancienne constitution. Que résulta-t-il de cette mesure? Les colléges électoraux détruisirent les élections populaires, et dégoûtèrent le peuple et les fonctionnaires choisis par les communes. Le gouvernement, attribuant aux hommes un vice provenant de la nature des choses, crut le corriger en abolissant les colléges électoraux, et leur substituant des commissaires-organisateurs, auxquels il accorda les facultés réservées d'abord à quelques électeurs. Le remède fut pire que le mal.

L'arrêté qui écarta des emplois publics, tous ceux qui avait servi le roi, ne fit pas moins d'ennemis à la république. Cette exclusion, aussi injuste qu'impolitique, dévoila les prétentions ambitieuses de la plus faible partie de la nation. En effet, les emplois publics devinrent la proie des intrigants affublés du masque du patriotisme on ne chercha plus ceux qui pouvaient être utiles à l'État, mais ceux qui affichèrent leur attachement aux nouvelles doctrines; et, dans cette subversion de principes, le charlatan le plus éhonté l'emporta sur l'homme vertueux et capable, qui est toujours modeste.

Ce malheur en entraîna un autre. Les clubs devinrent en quelque sorte arbitres du sort des ma

L'institution de la garde nationale fut frappé de mort à son origine. Il paraît néanmoins qu'il ne dépendait point de la commission du gouvernement de lui donner la perfection dont elle était susceptible: les Français, trop défiants, s'opposèrent constamment à sa formation. Qui croirait que la garde nationale de la capitale, ne se composait, sur une population de 400,000 âmes, que de quatre compagnies de 100 hommes chacune?

L'ombrage que prenaient les Français de tout ce qui pouvait opposer par la suite de la résistance à leurs desseins, paralysa également les efforts du gouvernement pour la réorganisation de l'armée. On licencia violemment, et avec trop de mépris, sans solde ni indemnité, les meilleurs régiments nationaux de l'armée royale, dont on eût pu former un corps de 20 à 25,000 hommes, qui, en partageant les fatigues et les dangers des Français, se serait promptement aguerri; on laissa ainsi une foule d'individus en butte aux séductions des malintentionnés; les Albanais mêmes, mercenaires qui venaient de se distinguer par une défense honorable, et dont on eût pu tirer d'excellents services en les traitant bien, furent réduits par cette mesure à se livrer au brigandage. Championnet, à la vérité, autorisa la formation de quatre nouvelles légions napolitaines, mais le mal produit par le licenciement était opéré; d'ailleurs, la négligence que l'on mit à les recruter, les entraves que l'on ap

mit à les habiller et à les instruire, attestent le peu d'envie que l'on avait de les voir sur un pied respectable. Cependant, le gouvernement, sans force pour contenir les malveillants et assurer l'exécution des lois suppliait en vain Macdonald d'autoriser la formation de 5 à 6,000 gendarmes, avec les milices des tribunaux de provinces et les armigeri (1) des barons; leur désarmement n'en fut pas moins ordonné, sans qu'on s'inquiétât de leur promoyens d'existence.

porta à leur armement, le peu de soin que l'on | de courage. La discussion du projet de loi fut trèsvive. Les feudataires soutenaient que la conquête était un droit, les républicains le niaient, et par un dilemme sans réplique, ils rétorquaient l'argument féodal. Si la force constitue le droit, disaient-ils, et que le vainqueur puisse dépouiller le vaincu, les barons réclament à tort une indemnité; car la nation ne reprend aujourd'hui sur eux que ce qu'ils ont acquis sur elle depuis plusieurs siècles. Il était difficile de concilier des prétentions si opposées la décision du gouvernement trancha la question en faveur du peuple contre les feudataires, en consacrant néanmoins le principe d'une juste indemnité.

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Les réformes religieuses suscitèrent en outre une foule d'ennemis puissants. Plus attaché aux cérémonies et aux fètes d'un culte qui favorise la paresse, qu'aux préceptes et à la morale de l'Évangile, le peuple napolitain s'indignait de la diminution de ses fètes et de l'abolition des pompes que les finances du clergé ne lui permettaient plus de soutenir.

Les règlements de police militaire contrariant toutes les habitudes du peuple, ne servirent de même qu'à le mécontenter; bientôt les entraves du commerce maritime paralysèrent tout le trafic intérieur, en augmentant la gêne que les cirscontances et la contribution de 25 millions, frappée par les Français, avaient jetée dans toutes les affaires; dès lors le mécontentement se changea en morne désespoir.

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Une disposition ordonnait que tous les procès existants entre les barons et les particuliers ou les communes, seraient jugés en faveur de ces derniers, par la raison, disait le décret, qu'il n'était pas supposable que, sans droit évident, les uns ni les autres cussent osé plaider contre leur seigneur. Ce décret souleva environ 5,000 familles puissantes leurs clameurs retentinrent jusqu'au fond du quartier général de Macdonald, qui ayant déjà tant d'ennemis sur les bras, crut devoir les apaiser en mettant son veto. Ainsi, la seule lui dont la prompte exécution eût été capable d'attacher le peuple des provinces au nouveau gouvernement, fut sacrifiée aux considérations de sûreté de l'armée française, et ne fit que soulever contre la république une classe d'invidus très-redoutables.

Tandis que le gouvernement républicain, contrarié par les Français, livré à son inexpérience, commettait tant de fautes, les royalistes faisaient, loin de la capitale et dans son sein, toutes les dispositions pour une prochaine levée de boucliers. Les provinces étaient inondées d'agents siciliens et

Cependant, au milieu de tant de faux pas dans l'administration, le gouvernement porta plusieurs lois utiles. L'abolition des fidéicommis, qui concentrent les biens dans les mains de quelques familles, causa d'autant plus de plaisir aux Napolitains, que toutes leurs richesses sont territoriales, et que la foule de substitutionnaires, et le grand nombre de couvents, menaçaient d'envahir toutes les propriétés. On doit aussi tenir compte à la commission lé-anglais. Deux aventuriers corses, Bocca Ciampe et gislative, de l'abolition des droits féodaux. La féodalité avait accumulé à Naples, une masse énorme de capitaux, de biens fonds, de prérogatives, de droits acquis, reçus, usurpés par diverses mains en plusieurs circonstances. Il ne suffisait pas d'étouf-ble dans les Abruzzes: un certain Mammone, avec fer ce monstre par une loi, mais bien de l'atteindre dans un labyrinthe, où il n'était pas aisé de pénétrer sans être armé d'autant de patience que

(1) Espèce de gardes féodales.

Cesare, groupaient autour d'eux tous les mécontents de la Basilicate; et, avec leurs bandes, tenaient Bari et Conversano étroitement bloqués; l'abbé Pronio fomentait une insurrection formida

une centaine de brigands, parcourait le comtat de Molise, pillant et rançonnant toutes les villes amies du nouvel ordre de choses; le Ciento n'était pas tranquille, le commodore Foote, avec une escadre anglaise renforcée de quelques bâtiments siciliens,

après s'être emparé sans résistance des îles d'Is-hommes, avec lesquels il partit de Miletto, pour chia et de Procida, dont les Français n'avaient pas enlever Monteleone, ville riche et populeuse de la apprécié l'importance, bloquait étroitement le Calabre ultérieure, qui avait refusé de lui ouvrir golfe de Naples. Une expédition dirigée par le brave ses portes. A la vérité, l'impossibilité de tenir sur Caraccioli dut les reprendre, mais contrariée par pied un corps aussi nombreux, le força de le licenles vents, elle laissa à l'ennemi le temps de s'y éta- cier immédiatement après la prise de cette ville, blir solidement. et de ne garder auprès de lui qu'environ 3,000 vagabonds altérés de sang et de pillage; mais la victoire remportée lui donna un grand ascendant dans tout le royaume. Les communes, qui s'étaient déclarées en faveur du nouvel ordre de choses, tremblèrent de voir arriver le terrible cardinal: les autorités républicaines furent glacées d'effroi, et le cercle de puissance de la capitale se rétrécit de jour en jour.

En Calabre, le cardinal Ruffo, à qui Pie VI avait donné le chapeau pour se débarrasser d'un trésorier infidèle, travaillait plus efficacement encore à relever la cour de Naples; cet homme singulier, qui avait tous les travers du cardinal Saint-Severin n'a déployé d'autre qualité que l'énergie, quoi- | que l'habile historien de Naples semble le mettre en parallèle avec Ximénès (1). Plus connu, dit-on, par ses dissertations sur la tactique que par des sermons, le prélat guerrier ne tarda pas à devenir redoutable. Du Pizzo, où il était débarqué dans les premiers jours de février, il avait conçu le projet de tenter la contre-révolution, moins par reconnaissance envers celui qui l'avait accueilli après la disgrâce du pape, que par goût des entreprises hasardeuses: l'influence de son caractère eut bientôt réuni autour de lui 3 à 400 aventuriers. Cette bande, grossie de tous les criminels déportés dans les îles de Lipari, des milices des tribunaux provinciaux, des armigeri des barons, des anciens soldats que la république semblait dédaigner, fat surtout renforcée par une multitude de montagnards fa

natisés.

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Ruffo, dit l'historien que nous venons de citer (2): représenta à cette sauvage, mais brave popula» tion, la gloire qu'il y aurait à reconquérir pour » le roi l'héritage de ses pères. Tous se réunirent » à la voix de l'homme sacré, de l'envoyé de leur >> monarque; Ruffo se mit à leur tête, les >> sous l'étendard royal. Dans ces mêmes lieux où jadis les consuls, les préteurs de Rome antique >> conduisaient leurs légions victorienses, un prince » de l'Église guidait aux combats les descendants » des Brutiens et des Lucaniens ; et l'Europe apprit » avec quelque surprise qu'il y avait encore à la » fin du xvme siècle un prêtre qui commandait une >> armée. »>

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On sentit le besoin d'étouffer ces germes d'insurrection; mais comment y parvenir sans l'intervention des Français ? Il fallut donc s'entendre avec Macdonald, dont la faible armée, concentrée dans les environs de Naples, n'était pas capable de faire de gros détachements. Toutefois, comme ces expéditions intéressaient sa sûreté, il y consentit ; et, d'après le plan arrêté, le général Duhesme reçut l'ordre de réduire les insurrections de la Pouille, et de passer ensuite en Calabre, où une colonne mobile de troupes napolitaines devait marcher par la route directe de Naples à Cosenza.

On ignore ce qui motiva cette distribution de troupes. L'insurrection des Calabres étant la plus menaçante, tant par sa proximité de la Sicile, que par le caractère entreprenant de son chef; il semble que, s'il était absolument impossible d'envoyer en même temps des Français en Pouille et en Calabre, la prudence conseillait de détacher Duhesme d'abord dans cette dernière province, sauf ensuite à le faire revenir par la Pouille.

Quoi qu'il en soit, sa division, composée de 12 faibles bataillons et 8 escadrons non compris la légion napolitaine de Caraffa, partit d'Avelino et de Bénévent le 19 février, et arriva le 22 à Foggia, capitale de la Pouille, où Duhesme établit son quartier général.

Le 24 février, le général Forest conduisit sa brigade de Lucerna devant San-Severo, où Brous

Bientôt Ruffo eut ainsi rassemblé 15 à 18,000 sier le rejoignit le lendemain avec une partie de

(1)Mémoires historiques sur Naples,par le comte Orloff.

(2) Mémoires du comte Orloff, tome II, page 200.

la sienne. Les insurgés qui occupaient ce poste, en furent chassés, le 26, à la suite d'un combat trèsvif, et se retirèrent à Andria, dont ils furent délogés le 3 mars par Broussier. Pendant ce temps, Forest se porta sur Bari, assiégé depuis six semaines, dissipa les insurgés, et y entra en libérateur.

L'activité des colonnes françaises donna peu de relâche aux insurgés, ils furent forcés de lever le blocus de Conversano; et à peu de jours de là, ils essuyèrent une nouvelle défaite aux environs de Casa-Massima. Partout où ils osèrent tenir en rase campagne, ils furent battus et dispersés. Bien convaincus de leur infériorité, ils coururent se réfugier à Trani, boulevard d'autant plus sûr, qu'environné d'une bonne chemise en maçonnerie avec fossé, il est encore défendu du côté de la mer par un fortin qui ferme l'entrée du port.

Duhesme, informé de cette circonstance, chargea le général Broussier de réduire cette ville. Ce dernier partit donc de Barletta le 31 mars, sur trois colonnes. La première, composée de la légion de Caraffa et de 3 pièces de gros calibre, suivit la route directe et vint camper sous les murs de Trani. La seconde, consistant en 4 bataillons et 2 escadrons français et 4 pièces de 4, passa par Andria et poussa ses avant-postes à portée de fusil des remparts. La troisième, formée d'un bataillon de grenadiers, d'une demi-brigade, de 100 chevaux et d'un obusier, prit à Andria la route de Biceglia et vint appuyer sa droite à la mer, pour être protégée par une escadrille de 8 chaloupes canonnières qui longeait la côte.

Cette journée se passa en escarmouches. Moitié des insurgés se sauvèrent sur des embarcations, pendant qu'on établissait des batteries, en sorte qu'il ne resta dans la ville qu'environ 5 à 6,000 hommes. Certes, il n'en fallait pas davantage pour la défendre, si un homme de tête les avait dirigés; mais il ne s'en trouva point, quoique d'ailleurs plusieurs officiers de génie et d'artillerie, envoyés de Sicile, y eussent débarqué la veille. Ainsi, les Français n'eurent à vaincre que des efforts mal combinés de rage et de désespoir.

ment où les grenadiers, munis d'échelles et soutenus de la 7° légère, déboucheraient d'un chemin creux vers le fossé.

L'attaque eut lieu ainsi qu'elle avait été prescrite; mais le feu des remparts arrêta tout court les grenadiers républicains. Cependant, les chasseurs de la 7° légère s'étant glissés dans l'eau jusqu'à la ceinture au pied du fortin, la garnison saisie de terreur s'enfuit dans des embarcations, on se réfugia dans les maisons voisines du port.

Cette diversion inattendue, en appelant l'attention des assiégés, permit aux grenadiers de déboucher, d'escalader les murs, et de pénétrer enfin dans la ville, dont ils coururent démurer les portes pour procurer l'entrée aux autres colonnes. Cependant, comme il partait des maisons un feu trèsvif, Broussier fit enfoncer les portes de cinq cu six, et monter sur leurs terrasses des détachemer ts, qui en chassèrent les insurgés, et paralysèrent l'artillerie braquée dans les rues. Ce fut alors que le massacre commença. Les assiégés, épouvantés, ne songent plus qu'à regagner 60 ou 80 barques mouillées dans le port; mais les Français, maîtres des rues adjacentes, font un feu violent sur elles, et la flottille républicaine se prépare à leur donner la chasse. Le convoi se sauve à toutes voiles à Biceglia: douze embarcations sont jetées à la côte vers Molfetta où un bataillon et un escadron de dragons les abordent, et font main basse sur leurs équipages. Bari, à la suite de cette sanglante action, fut livré au pillage, on y trouva de l'artillerie et beaucoup de munitions. Après cette victoire, le gouvernement crut qu'il était débarrassé, mais il se trompa pour rétablir la tranquillité en Pouille, il eût fallu y laisser une division française bien disciplinée, chose alors impossible. D'ailleurs, Duhesme se rendit aussi odieux aux républicains qu'à l'ennemi, en rançonnant les villes amies; Bari et Conversano, entre autres, furent imposées à des contributions que les insurgés n'auraient sans doute pas exigées.

L'expédition de Calabre n'obtint pas même les résultats éphémères de celle de Duhesme. Elle deD'après la reconnaissance de la place, faite vait être dirigée par le général Pignatelli; mais le 31, Broussier résolut de tenter l'escalade duelle fut confiée à un certain Schipani, auquel on côté de Biceglia, et de ne faire jouer l'artillerie ne donna pas plus de 1,200 hommes. Ce nombre, des attaques du centre et de la gauche qu'au mo- à la vérité, était peu inférieur aux bandes qu'il

devait rencontrer jusqu'à Cosenza, où environ 6,000 patriotes déjà réunis, se proposaient de tenir tête à l'armée de Ruffo. Cependant, vu l'âpreté des lieux à parcourir et le caractère des habitants, il convenait, à défaut de moyens, de choisir un autre chef qu'un saltimbanque déjà décrié dans | Naples. Schipani, comme un autre Santerre dans la Vendée, triompha à Rocca-di-Aspide, à Sicigliano, où il n'y avait pas ombre d'insurgés; mais il fut défait devant Castelluccia, méchant bourg perché sur la cime d'une montagne à droite de la route de Naples à Reggio, où Sciarpa s'était retiré avec un millier de mécontents. On pouvait le tourner, et poursuivre sans inquiétude la marche sur Cosenza; mais Schipani crut qu'il y allait de son honneur de l'emporter. Prévenues de ses intentions, toutes les petites villes voisines s'empressèrent de lui faire des offres de service. En peu d'instants il eût pu porter sa colonne mobile à 4,000 hommes ; mais il voulut avoir la gloire d'enlever seul Castelluccia. Vainement on lui représenta les risques d'une escalade, la facilité de réduire ce poste par un blocus de quelques jours, ou bien encore de le faire tomber, en construisant une batterie sur le sommet d'une montagne qui le domine; il fit toutes les dispositions pour l'escalade. Sciarpa, intimidé de ces préparatifs, entra en pour parlers, et proposa de se rendre, à condition que la colonne républicaine n'entrerait pas à Castelluccia, et que sa bande serait admise à la solde du gouvernement. Schipani rejeta ces offres avec hauteur; et, des menaces, passa aux effets. L'assaut échoua, pour avoir été mal conduit.

De la confiance la plus présomptueuse, Schipani tomba dans le découragement, il n'osa poursuivre sa route; et, bientôt après, le gouvernement l'envoya contre les insurgés de Sarno. Cette expédition lui fut plus facile. Ceux-ci lui cédèrent le poste sans combat, mais pour y revenir immédiatement après son départ, jusqu'à ce qu'enfin une colonne mobile française eût mis leur refuge à feu et à sang.

L'échec essuyé par Schipani, les progrès des insurrections partielles, enhardirent Ruffo, et fortifièrent les espérances de la cour de Palerme. Jusqu'alors, elle avait peu compté sur les efforts du cardinal pour le relèvement du trône : c'était

TOME III.

un enfant perdu qu'elle avait jeté en Calabre, prête à le désavouer en cas de nécessité. Elle crut pouvoir le reconnaître sans rougir; il fut nommé vicaire général du royaume, et investi, en cette qualité, de tous les pouvoirs judiciaires, civils et militaires. Le roi lui écrivit, de sa main, les lettres les plus pressantes; promit de lui envoyer bientôt des officiers généraux et des troupes. Mais la réputation du cardinal était telle, qu'aucun général, de ceux qui avaient suivi la cour en Sicile, ne se soucia de servir sous ses ordres. D'un autre côté, il n'existait en Sicile que les régiments nécessaires pour maintenir la tranquillité dans cette île. Pourtant, après de longs efforts, on parvint à débarquer en Calabre quelques bataillons avec de l'artillerie, en attendant que les cours de Londres et de Pétersbourg, vivement requises par le cabinet de Palerme, pussent fournir les secours stipulés par les derniers traités.

Le nouveau vicaire général n'eut pas plus tôt reçu ces renforts, qu'il se dirigea sur Catanzaro qui fut forcée, après trois jours de résistance, à lui ouvrir ses portes. De là, il détacha un de ses lieutenants sur Cosenza, capitale de la Calabre citérieure. Cette ville, devenue le refuge de tous les habitants de la province ultérieure, qui avaient été forcés d'abandonner leurs foyers pour se soustraire à la réaction royale, comptait 6 à 7,000 hommes en armes. Mais ici, comme partout ailleurs, il y avait division d'opinions; la populace, qui ne voit et n'agit que d'après l'impulsion de ceux qui la dirigent habituellement, était très-attachée à l'ancien gouvernement, qui l'avait toujours écrasée. Pour surcroît de malheur, la commission exécutive avait nommé pour commander sur ce point, Chiara, ancien officier dévoué au roi. Le lieutenant de Ruffo, en arrivant devant Cosenza, présenta la bataille, et, bien que tous les gardes nationaux brûlassent d'en venir aux mains, leur chef, qui avait l'avantage de la position, ordonna la retraite. Au même moment, la populace de Cosenza se révolta, et mit ainsi les républicains entre deux feux. Ils rentrèrent néanmoins dans la ville, dont ils défendirent les accès plusieurs jours, avec le courage du désespoir. Les gardes nationales de Rossano et de la Paula, accourues à leur secours, et obligées de battre en retraite, furent bientôt

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