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Enfin le 6 mai, les divisions Zoph et Froelich pas- | bien sur Plaisance; or, le premier point était fort sèrent le fleuve, et s'avancèrent par la route d'A- éloigné de Casal-Maggiore où les pontons français lexandrie, pour resserrer les républicains. Celle avaient été capturés. L'armée alliée avait employé d'Ott se porta sur le chemin de Parme, à l'effet ceux qu'elle possédait; et le plus court était d'y d'observer le corps de Montrichard, et de se lier suppléer par des barques du Pô : c'est ce qu'on fit avec Klénan, qui bloquait Ferrare, conjointement en effet pour rétablir le pont de Plaisance, puisavec plusieurs milliers d'insurgés. Ces deux géné-que 6 jours après son entrée à Milan, l'armée comraux eurent l'instruction de se diriger sur Bologne binée passa le fleuve. Laissons donc au lecteur le et Modène, pour épier le moment où l'armée de soin d'apprécier ces critiques par trop exagérées, Naples déboucherait de l'Apennin. et reprenons le fil des événements.

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Orci-Novi, Peschiera et Pizzighetone tombèrent, à cette époque, au pouvoir des Austro-Russes, qui trouvèrent dans Peschiera, un bel équipage de pont, 19 chaloupes canonnières et plus de 100 bouches à feu ; dans Pizzighetone, des magasins si considérables, que 30,000 hommes pouvaient en

trois forteresses donna le moyen à Kray de bloquer plus étroitement Mantoue et d'envoyer Hohenzollern assiéger le château de Milan.

Maître de toute la Lombardie, beaucoup plus tôt qu'on ne l'aurait présumé, Suwarow, s'il faut en croire quelques critiques sévères, n'aurait pas profité de l'avantage qu'il avait sur son adversaire. En effet, disent ses détracteurs, « sachant que l'armée française était réduite à 20,000 baïonnettes après le passage de l'Adda, ne devait-il pas lan-être alimentés pendant deux mois. La chute de ces »cer à sa poursuite un corps de 10 à 12,000 hom» mes, pour la harceler jusqu'au pied des Alpes, >> tandis qu'avec le gros de son armée il se serait » porté en diligence sur Tortone et Novi, pour lui » couper la retraite sur Gênes? Ses troupes, disponibles à son entrée à Milan, étaient de 41,000 hommes d'infanterie et de près de 7,000 chevaux, non compris les corps de Kray » et de Hohenzollern. Il avait donc plus de forces qu'il n'en fallait pour tenter cette double opéra

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Le corps de Wukassowich obtint tous les avantages qu'on pouvait attendre de sa faiblesse. Il inquiéta la marche du convoi d'équipages envoyé en France, s'empara des débouchés des Alpes; ainsi que des passages du Pô, vis-à-vis de Casale et de Ponte-Stura. Tout ce qui s'aventura sur la rive droite, fut tué ou pris. Ces succès ne balan

» tion. Et qu'on ne dise pas qu'il manquait d'équi-çaient pas, j'en conviens, ceux qu'on aurait obte

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Ces reproches faits à loisir ne manquent pas absolument de justesse; les Français, en se retirant par Pavie et Bufarola, avaient laissé la route de Vigevano faiblement couverte, et les alliés en s'y jetant avec le gros de leurs forces, eussent coupé pour toujours la colonne de Grenier d'avec celle de Victor. Mais, quand Suwarow fut instruit de cette particularité, le moment était déjà passé.

Quant au passage du Pô, il n'était pas facile de l'exécuter beaucoup plus promptement qu'on ne le fit. Arrivé le 30 avril à Milan, il fallait rétrograder sur Corte-Olona en face de Stradella, ou

nus, en poursuivant vivement et en forces l'armée française sur Turin et Alexandrie. Mais il reste à décider s'il était possible de faire mieux.

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Quoi qu'il en soit, cette armée, maintenant réorganisée, se trouvait répartie de la manière suivante la division Grenier, placée entre Alexandrie et Casale, gardait par des postes les bords du Pô, depuis l'embouchure du Tanaro jusqu'à Verrua. Celle de Victor avait repassé la Bormida, et se trouvait entre Alexandrie et cette rivière assez enflée dans ce moment pour ne pas offrir de gué dans cette partie. Le général Pérignon, avec les troupes liguriennes et la division Laboissière réduite à 2,500 hommes, occupait les débouchés sur Gênes. Les garnisons de Ceva, Coni, Fenestrelles et Suze, fermaient les passages des Alpes; un corps franc piémontais, commandé par un officier intelligent et dévoué, contenait les Barbets.

Le 9 mai, la colonne autrichienne dirigée sur | pas indiquer le projet de forcer le passage sur un

Alexandrie, après avoir enfoncé les portes de Tor-
tone et rejeté la garnison dans la citadelle, alla
prendre position à Torre-di-Garofoldo. Le même
jour, la division Karaczay vint s'établir à San-Giu-
liano, et poussa quatre pulks de Cosaques, de Sale
à Novi. Le quartier général de Suwarow fut placé
dans Tortone, où il resta bloqué les deux jours
suivants, sous le feu de la citadelle. Il n'en sortit
homme à homme que le troisième jour, tant la fu- |
sillade des Français était périlleuse.

A cette époque, l'armée alliée fut encore gros-
sie par l'arrivée à Plaisance de la seconde colonne
du
corps
auxiliaire russe, composée de 6,000 fan-
tassins et 1,000 chevaux, sous les ordres du géné-
ral Forster.

L'armée française, si inférieure en nombre, ne pouvait se soutenir qu'en se resserrant dans sa position, et abandonnant au feu de l'insurrection tout le pays autour d'elle. La moitié du Piémont était en armes, ainsi que Lucques et la Toscane elle n'avait déjà plus de communications sûres avec la France; et pour s'en conserver avec les places fortes sur ses derrières, deux colonnes mobiles commandées par les adjudants généraux Seras et Freyssinet, couvraient le col de Tende, gardaient les ponts de Carignano et de Moncalieri, et dissipaient tous les rassemblements qui menaçaient Asti ou interceptaient la route de Turin. Ces deux faibles corps, toujours en marche, toujours, combattant, semblaient se multiplier par leur activité.

Sur ces entrefaites, Wukassowich descendit la rive gauche du Pô, vis-à-vis Casale, et le corps russe vint prendre position à Lomello, où il amena son équipage de pont. C'était, pour les Français le moment de manoeuvrer: Moreau après avoir laissé un rideau de troupes sur la Bormida et le Pô, et pourvu à la défense d'Alexandrie, réunit sous Valence ce que les généraux Grenier et Victor avaient de disponible. De là, il observa les démonstrations de l'ennemi, trop ostensibles pour ne

autre point: le général en chef supposant donc que ces démonstrations le long du Pô masquaient un grand mouvement vers le Tanaro ou la Bormida, fit rétrogader la division Victor sur Alexandrie, et plaça à tout événement celle de Grenier entre Valence et les hauteurs de Pezetti, avec des avantpostes au confluent du Tanaro et du Pô.

On ne sait si Suwarow avait envie de déposter les républicains par des manœuvres stratégiques, ou s'il voulait emporter la position de vive force; l'ordre fut donné à Wukassowich de canonner Casale, et à Rosenberg d'attaquer Valence, mais rien ne prouve que le maréchal ait ordonné à ce corps isolé de passer le Pô à la vue de toute l'armée française (1). C'était une entreprise d'autant plus hasardeuse, que la rive droite de ce fleuve, depuis le Tanaro jusqu'au delà de Valence, domine la rive opposée, qui est très-basse, marécageuse, praticable seulement sur des digues. Son lit, à la vérité, est parsemé d'iles; mais leur sol vaseux ne permet pas d'y faire d'établissement. Soit que Rosenberg eût mal saisi l'esprit des ordres qu'il avait soit qu'il se laissât entraîner par son ardeur belliqueuse, il résolut d'effectuer les premiers débarquements dans la plus grande île située visà-vis de Mugarone. De là, on espérait franchir à gué le bras qui la séparait de la rive droite, à la faveur des arbres et des buissons qui la couvraient.

reçus,

Dans la nuit du 11 au 12 mai, le général Tschubaroff parvint à y débarquer, à l'insu des Français, trois bataillons de grenadiers, deux compagnies de chasseurs et de l'artillerie, tandis que Rosenberg abordait à Borgo-Franco avec un autre bataillon bientôt appuyé par la brigade Dalheim.

Dès que les Cosaques virent un millier d'hommes établis sur la rive droite, ils passèrent le Pô à la nage. Leur exemple entraîna les troupes déposées dans l'ìle; en un clin d'œil, elles traversèrent dans l'eau jusqu'à la ceinture, le canal qui les séparait du village de Mugarone.

est tenté de le croire; car Suwarow resta de sa personne vers Tortone, et ce n'était pas son usage d'entreprendre une opération majeure sans y présider.

(1) Les versions ne s'accordent pas sur ce point : quel-ral trop impétueux, se décida à passer à Bassignano. On ques officiers du maréchal m'ont affirmé qu'il n'avait voulu que faire des démonstrations entre Valence et Casale, pour décider Moreau à se rapprocher des Alpes, mais que Rosenberg, cédant aux sollicitations d'un géné

Conformément à leurs instructions, les avantpostes français se retirèrent en bon ordre par Pezzetti, vers la route d'Alexandrie à Valence, où ils prirent position derrière une large ravine appuyant leur gauche à la hauteur de San-Antonio, garnie d'artillerie.

A peine Moreau est-il informé que les Russes ont passé le Pô à Bassignano, qu'il rappelle en grande hâte le général Victor déjà arrivé près d'Alexandrie, et lui prescrit de venir par les hauteurs, tomber sur le point de passage de l'ennemi, afin de lui couper toute retraite. Il ordonne en même temps un changement de front à la division Grenier; la 63 demi-brigade reste en bataille à gauche de la route d'Alexandrie, derrière Valence, pour observer le corps russe qui, depuis le matin, menaçait cette ville.

La brigade Quesnel marche à l'ennemi, par la plaine, entre les montagnes et le Pô; le combat s'engage vers une heure après midi. Le village de Pezzetti, qui domine la position, est l'objet des efforts constants des Russes, le peu de troupes qui l'occupent, cèdent au nombre, après une vive résistance.

Dans ce moment, Moreau arrive sur le champ de bataille et dispose tout pour une nouvelle attaque. Le chef de brigade Gardanne, avec le 9° de chasseurs, culbute l'ennemi, et le chasse du village, tandis qu'au centre l'infanterie lui arrache, après un combat sanglant, une cassine dans laquelle il s'était déjà retranché. Cependant la division Victor débouche des hauteurs; plusieurs bataillons filent par la droite pour gagner le flanc gauche des Russes, et se déployer sur les hauteurs qui les débordent. Ceux-ci se forment alors en carrés, mais malgré leur bonne contenance, ils sont chargés avec succès, et acculés à Bassignano.

Dans cette situation difficile, Rosenberg et le grand-duc Constantin essayent en vain de s'y défendre la disproportion du nombre était trop grande, ils sont forcés dans le village, où le prince courut lui-même des dangers. Gardanne passe à gué un bras du Pô, et pousse les ennemis, jusque dans l'ile la plus prochaine.

(1) Ceci autorise encore à croire que le maréchal ne voulut pas tenter sérieusement le passage du Pô; car il

Ralliés enfin dans cette ile, les Russes ne sont pas encore sauvés : la corde du pont volant s'étant rompue, ils se voient, faute de bateaux, dans l'impossibilité de regagner la rive gauche du Pô, et demeurent exposés jusqu'à la nuit à la mitraille de plusieurs pièces; heureux encore qu'on n'ait pas dirigé plus d'artillerie sur ce point.

Telle fut l'issue de cette tentative, où Rosenberg perdit environ 1,500 hommes dont 700 prisonniers, 4 pièces de canon et beaucoup de bagages. Le général Tschubaroff y fut tué. De leur côté, les Français eurent 600 hommes hors de combat, au nombre desquels se trouva le général Quesnel. Il fut remplacé par Colli, qui donna pour la première fois dans les rangs français, des preuves de sa valeur et de sa capacité.

Immédiatement après cette affaire, Victor et Grenier prirent position en arrière de Bassignano, où ils restèrent les deux jours suivants. De son côté, Suwarow instruit de ce qui se passait dans l'île de Mugarone, avait poussé les divisions Forster et Froelich vers Sale, pour soutenir Rosenberg, en même temps que Karaczay se dirigerait sur Marengo, pour faire une diversion utile du côté d'Alexandrie (1); le maréchal ayant appris l'issue de la tentative et le retour des troupes de Rosenberg sur la gauche du Pô, rappela ces divisions, le 13 avril, par Mezzana-Corte: elles y passèrent le fleuve et se réunirent dans le camp de Garofoldo, où elles furent jointes le lendemain par celle de Kaim qui venait de réduire Pizzighetone.

Pendant que le général Moreau tenait ainsi tête à son adversaire, un rassemblement d'insurgés assaillit son grand parc à Asti, et s'en serait infailliblement emparé, si l'on ne s'était hâté de lui envoyer du secours.

Les progrès rapides de l'insurrection, rendaient de jour en jour la position de l'armée française plus difficile. Son embarras s'accrut encore par la concentration de tant de forces ennemies dans le camp de Garofoldo. Moreau, conjecturant que le généralissime, inquiet de l'échec essuyé par le corps de Rosenberg, concentrait ses forces entre la Scrivia et la Bormida pour tenter une attaque dé

n'eût pas attendu d'apprendre l'échauffourée de l'ile pour envoyer deux divisions au secours de Rosenberg,

cisive, résolut de s'en assurer par une grande re- eût causé la perte. Cette considération l'emporta : connaissance. En conséquence, le 16 mai, il réu-les Austro-Russes profitèrent de cette incertitude

nit la division Grenier sur la Bormida, et ordonna à Victor de passer cette rivière, décidé à reconnaître lui-même ce qui pourrait se trouver dans la direction de Tortone.

Au même instant, Suwarow, par un motif tout contraire au projet qu'on lui supposait, levait son camp de San-Giuliano, dans l'intention d'aller passer le Pô près de Casa-Tinea, et de marcher ensuite sur la Sésia. Au point du jour, les républicains passent la Bormida sur un pont de bateaux construit pendant la nuit, débusquent les avantpostes autrichiens de Marengo, leur enlèvent 300 hommes, et les repoussent jusque dans la plaine de San-Giuliano.

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Le défilé de Marengo passé, l'artillerie, jointe au feu nourri d'un bataillon qui occupait la tête de pont, assura le passage de la Bormida, et l'on en fut quitte pour 4 à 500 hommes hors de combat.

Un événement qui n'avait rien de bien sérieux en lui-même, mais qui coïncidait avec l'affaire de Bassignano, altéra pour un instant la sécurité que donnait à Suwarow la situation de ses affaires; c'était la marche de Lecourbe sur Bellinzona, et l'avantage qu'il venait de remporter le 13 mai à Taverne sur le prince de Rohan, opération dont nous avons rendu compte au chapitre précédent. La seule importance que ce combat pût avoir, c'est qu'il eut lieu précisément en même temps que l'échauffourée de Bassignano, et avant que les succès des Autrichiens dans les Grisons, fussent connus.

A la vue de cette brusque irruption, Lusignan, commandant par intérim la division Frœlich, dirigea d'abord un millier d'hommes, avec de l'artillerie légère, au soutien de ses avant-postes. Mais, s'apercevant que les Français se disposaient à attaquer San-Giuliano, il prit sur lui de porter sa division en avant de ce village, et de l'y déployer. Heureusement le prince Bagration, qui venait de Novi pour se rendre à Cambio, et y passer le Pô, arriva sur le champ de bataille avec 5 bataillons et quelques centaines de Cosaques. Ce brave, toujours empressé de saisir l'occasion de combattre, se décide à soutenir Lusignan, sauf à regagner le temps perdu après l'affaire. En consé-effectivement, craignit de le voir déboucher sur quence, 12 bataillons, russes ou autrichiens, secondés de 30 bouches à feu et de 6 escadrons, s'avancent en bon ordre à la rencontre des répu

blicains.

Victor peu intimidé engagea l'action. A la gauche, le général Colli, après avoir d'abord fait plier les Russes, fut ramené par une charge vigoureuse de Bagration, appuyée par 2 bataillons de grenadiers hongrois. Les Autrichiens se maintinrent au centre avec un égal succès. La gauche, pressée un moment, fut soutenue à temps par Kaim. Moreau, craignant de trop s'engager, et voyant de nouvelles colonnes prêtes à soutenir Lusignan, donna l'ordre de la retraite. Les troupes de Victor, échauffées par leurs premiers succès, eurent peine à abandonner le champ de bataille: mais il y allait du salut de l'armée, dont le plus petit échec

L'apparition des Français à Lugano avait jeté l'alarme dans la Lombardie; et Suwarow supposant à Lecourbe plus de forces qu'il n'en avait

son flanc il ordonna donc au comte de Hohenzollern, occupé au siége du château de Milan, de partir en toute hâte avec la moitié de ses troupes, pour soutenir les brigades Rohan et Strauch. Le 14, celui-ci se mit en route avec 5 bataillons, arriva le 16 à Ponte-di-Trezza, et réunit, dans la journée du 17, les colonnes de ces deux généraux.

Sur ces entrefaites, Lecourbe inquiet des succès de l'ennemi dans les Grisons, sentit la nécessité de voler à la défense du Saint-Gothard, unique ligne de retraite qui lui restât désormais, et laissa à la brigade Loison le soin de garder les avenues du mont Cénère. Dès lors, Hohenzollern devait accabler ce détachement, par la même raison que Lecourbe avait battu isolément le prince de Rohan peu de jours auparavant.

En effet, attaquée le 18, à Taverne et Bironico,

par des forces si supérieures, cette brigade fut re- | qu'il avait le gros de l'armée alliée devant lui, et jetée sur Bellinzona, avec perte de 4 à 500 hom- que sa position n'était plus tenable. En effet, malmes. Hohenzollern, après avoir renforcé le prince gré l'activité de ses colonnes mobiles, les habitants de Rohan, l'établit dans une excellente position à excités par les proclamations du généralissime, la tête du lac Majeur, puis retourna en toute dili- s'insurgeaient de toutes parts sur ses derrières; le gence à Milan, où il poussa le siége du château corps de Wukassowich, posté à Verceil, menaçait avec une nouvelle vigueur. de passer le Pô entre Casale et Turin, et pouvait être soutenu dans cette opération par celui de Rosenberg, stationné dans les environs de Lomello. Mais si la prudence exigeait de se rapprocher de l'Apennin, les embarras semblaient aussi se multiplier par cette retraite. Le général en chef ne pouvait se dissimuler les dangers que courraient les corps intermédiaires qui devaient recueillir l'armée. de Naples, si Suwarow se portait sur Gênes ou en Toscane: malgré les inconvénients d'une retraite excentrique, il n'hésita pas à détacher Victor de la Bormida, avec 10 bataillons et 4 escadrons, sans artillerie ni bagages, pour renforcer Pérignon.

Le maréchal, convaincu par la tournure de l'affaire de San-Giuliano, qu'il fallait l'emploi de tous ses moyens pour déloger les Français du Piémont, n'avait pas attendu l'issue de cette expédition, pour se diriger sur Turin, où de grands intérêts réclamaient sa présence. On savait que l'ennemi y avait amoncelé d'immenses approvisionnements d'artillerie; d'ailleurs, l'occupation de cette capitale devait produire un grand effet sur l'opinion des peuples du Piémont, et donner les moyens de réorganiser ce pays, de manière à en obtenir un contingent et les vivres nécessaires pour la suite des opérations.

En conséquence, la division Schweikowsky passa le Pô sur des barques à Cambio, le 17 mai, et campa derrière la Sésia. Forster marcha à Ca-diTisma, où un pont de bateaux avait été jeté. Il y passa le fleuve ainsi que les divisions Kaim, Frolich et Zoph. Cette route, quoiqu'un peu plus longue, parut préférable, parce qu'on évitait les places d'Alexandrie et de Tortone, de même qu'un passage du Pô sous Turin, en face de l'ennemi; elle permettait d'ailleurs de se mettre en communication plus immédiate avec Bellegarde, et de soutenir les troupes chargées de l'attaque du SaintGothard et du Valais. Il est vrai qu'en prenant cette direction on semblait perdre de vue le point essentiel, celui de s'opposer à la jonction de Macdonald et de Moreau. Mais alors, l'armée de Naples était encore éloignée, et l'on espérait avoir le temps de déloger Moreau de l'Apennin avant son arrivée, si le mouvement sur Turin ne le décidait pas à regagner le col de Tende.

Cette campagne semblait être celle des événements fortuits. A l'instant même où le maréchal russe prenait la route de la Sésia, Moreau se décidait à marcher dans une direction tout opposée, en abandonnant un poste jugé désormais dangereux. La grande quantité d'artillerie que Lusignan et Bagration avaient fait jouer, l'autorisait à croire

Deux colonnes mobiles, commandées par le général Musnier et l'adjudant général Freyssinet, devancèrent le corps de bataille, pour nettoyer la route des bandes qui l'infestaient; les rebelles furent complétement défaits à San-Damiano et à Carmagnole, où ils essayèrent de tenir.

Après ces détachements, il ne resta à Moreau que 12 bataillons et 6 régiments de cavalerie, donnant tout au plus 8,000 combattants. Avec cette poignée d'hommes, il prit la détermination de se retirer sur Turin, puis à Coni, pour y attendre les secours qu'on lui annonçait de France par le col de Tende : le but de cette manœuvre était de se faire suivre par l'ennemi, afin de dégager l'armée de Naples, celle-ci étant d'ailleurs assez éloignée pour lui donner le temps de faire ce mouvement, avant l'époque marquée pour leur jonction.

En conséquence, les diverses colonnes se mirent en marche le 17 mai. Victor se dirigea sur la rivière de Gênes, en passant par Acqui, Spigno et Dégo les insurgés ayant tenté de l'arrêter dans ce dernier village, il fut livré aux flammes. Le 19, il se mit en communication avec les troupes de Pérignon, qui occupaient le col de la Bochetta et les débouchés du côté de Plaisance (1).

(1) Pérignon n'avait que 3 ou 4 bataillons français, le gros de sa troupe se composait de Liguriens.

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