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prétexte pouvait-il alléguer pour en différer l'exé- | arbitre des affaires civiles, fut en outre investie cution? L'espoir qu'il mit assez soltement en la les colléges, du pouvoir de juger militairement quijustice du Directoire, ne tarda pas à être déçu. conque porterait atteinte à la tranquillité publique Celui-ci n'eut pas grande peine à trouver des pré- et aux propriétés. textes pour éluder la réception des deux députés génois, jusqu'au moment où la chute du gouvernement qu'ils représentaient, annula leur mission. Bonaparte, après avoir envoyé un de ses aides de camp prendre connaissance des choses, exigea du doge, pour préliminaires, l'élargissement de tous les Français compromis, le désarmement de la populace, et l'arrestation de tous les nobles provocateurs de la contre-révolution. On s'aperçut trop tard du mauvais choix de l'arbitre. Le petit conseil convoqué accorda, comme on s'y attend, la liberté des Français; promit d'effectuer le désarmement, et éluda le troisième article, en vertu duquel Faypoult requérait l'arrestation des deux inquisiteurs d'État et du patricien François-Marie Spinola.

Ceci se passait sans que l'on sût ce qu'arrêterait Bonaparte à Milan. Tous les regards se fixaient sur lui les membres de l'ancien gouvernement tremblaient d'être victimes d'une réaction démocratique; les négociants, les artistes, les artisans, craignaient que le médiateur ne fit de trop grandes concessions à la noblesse, dont la hauteur leur avait donné tant de sujets de plainte. C'est au milieu d'espérances et de vœux si contraires, que, le 8 juin, le doge reçut la convention arrêtée entre les députés du gouvernement, le général français et le ministre Faypoult.

Ce pacte singulier, où la république française paraissait comme médiatrice entre l'ancien gouvernement et le peuple génois, renfermait douze articles. Le premier reconnaissait que la souveraineté résidait dans la réunion de tous les citoyens : le pouvoir législatif devait être confié à deux con

Le ministre de France, feignant un vif mécontentement, demanda alors ses passe-ports. Le sénat tenta vainement de l'arrêter, en résignant le pou-seils représentatifs, composés, l'un de 300, l'autre voir, et chargeant trois de ses membres de faire à la constitution, de concert avec Bonaparte, toutes les réformes nécessitées par le changement du système politique de l'Italic. Cette nouvelle concession n'aboutit qu'à obtenir un délai de deux heures, pendant lequel l'arrestation des trois triciens désignés par Faypoult, fut décrétée. Nicolo Cattaneo, l'un deux, s'étant échappé de son hôtel où il était gardé à vue, fut saisi le lendemain dans le quartier de Portorio, où il s'efforçait de soulever la populace, en répandant de l'or. Cette circonstance qui aurait dû rassurer les démocrates, les alarma au point d'en faire émigrer un grand nombre à Milan et à Nice. Ce fut sous ces sinistres auspices que la députation chargée de conférer avec Bonaparte partit pour Milan, où Faypoult ne tarda pas à la suivre.

de 150 membres; le conseil exécutif, à un sénat de 12, présidé par le doge. Celui-ci et les sénateurs étaient à la nomination des deux conseils, Jusqu'à l'installation du nouveau gouvernement, l'autorité fut confiée à une commission de 22 membres, pa-présidée par le doge actuel.

Cependant, la réorganisation de la garde nationale, décrétée dès le principe de l'insurrection, s'opérant avec trop de lenteur, et les réformes promises dans l'administration, étant différées sous divers prétextes, les démocrates perdirent patience, et forcèrent, le 5 juin, le sénat à adjoindre cinq nouveaux députés à la junte provisoire, qui, déjà

Cette forme de gouvernement n'était point appropriée aux mœurs et aux localités du pays de Gênes. En effet, il n'était guère possible à cette petite république d'avoir une représentation de 450 membres non payés, sans substituer l'aristocratie de la richesse, la pire de toutes, à celle qu'on venait d'abattre. Mais Bonaparte s'en inquiétait peu : il regardait la Ligurie comme une annexe indispensable à la France, et, en faisant ces changements à sa constitution, il visait moins à améliorer son sort, qu'à la forcer de solliciter un jour sa réunion.

Quoi qu'il en soit, le lendemain, le petit conseil ratifia la convention de Montebello, à la pluralité de 57 voix contre 7. Dès ce moment, le petit conseil et les colléges cessèrent toutes fonctions, et laissèrent l'autorité au doge et à la commission provisoire.

Rien ne disait, dans la convention de Milan, que Bonaparte dût nommer les membres du gouvernement provisoire mais il n'était pas habitué à faire les choses à demi, et s'empressa de le composer de gens connus par leur engouement pour les doctrines démocratiques. Le 13 juin, le doge fut requis d'en convoquer les membres.

Quoiqu'il régnât de la fermentation parmi le bas peuple, dont partie se trouvait encore armée, cette révolution s'opéra avec calme, et le soir, les démocrates allèrent prendre au palais le livre d'or, qui fut brûlé sur la place de l'Aqua-Verde. Le lendemain, un décret du gouvernement provisoire abolit la noblesse et la féodalité; les armoiries furent brisées sur toutes les portes des hôtels, et, comme ces mouvements ne sont jamais exempts d'excès, des mains sacriléges osèrent briser les statues colossales de ces Doria qui avaient fait jadis l'honneur du nom génois.

Dès ce moment, la commission législative s'occupa sans relâche de préparer la constitution et les lois organiques. D'un autre côté, Bonaparte qui dans tous ces bouleversements ne songeait qu'à se procurer des auxiliaires, chargea le général Duphot d'organiser l'état militaire de ce pays, qui venait d'être fixé à 6,000 hommes sur le pied de paix, toutes armes comprises.

Cependant les oligarques, sentant qu'ils allaient être déchus pour jamais de leurs priviléges, travaillaient les gens simples et crédules des campagnes du Levant, en alarmant leurs consciences. Le comité contre-révolutionnaire, pour échapper à la police génoise, avait placé son siége à Pise, d'où émanaient toutes les instructions à ses agents. Le consul sarde à Gênes, favorisait ces menées, en faisant répandre une copie, falsifiée à Turin, de la prochaine constitution, dont un article portait expressément l'abolition de la religion catholique. En vain le gouvernement, prévenu de ces symptômes de troubles, envoya des prêtres rassurer les habitants; le zèle de ces nouveaux missionnaires échoua complétement. Le 3 septembre, le tocsin sonna dans la vallée de Bisagno, et toute la population virile, conduite par les curés et les syndics, se porta dans la plaine, où elle fut bientôt renforcée des habitants des villages voisins.

Le général Duphot, qui avait eu beaucoup de

peine à former des anciens corps de la république, six bataillons de ligne peu sûrs (puisqu'ils se composaient en grande partie de vagabonds), alla à la rencontre des rebelles, avec une colonne mobile de 15 à 1,800 hommes. Le combat ne dura pas longtemps; une partie des insurgés se retira sur Sarzano, le plus grand nombre dans la vallée de Polcevera. Mais ce succès fut trompeur; car, dans la nuit du 4 au 5 septembre, les paysans de cette vallée s'étant levés au nombre de 10 à 12,000, s'emparèrent du fort de l'Éperon et de la seconde enceinte de Gênes. Duphot qui comptait pouvoir dissiper ce second rassemblement comme le premier, fut forcé de rentrer en ville après une courte reconnaissance. Son retour causa la plus grande consternation à Gênes; et si les patriciens qui avaient fomenté l'insurrection, avaient su la diriger, nul doute qu'ils ne se fussent rendus maîtres de la ville mais personne n'ayant poussé la multitude plus avant, elle ouvrit l'oreille aux propositions que lui fit le gouvernement provisoire, par l'intermédiaire de l'archevêque. D'abord, elle ne demanda que l'exercice de la religion catholique mais, à mesure qu'elle s'aperçut de la faiblesse du gouvernement, elle devint plus exigeante; et, après vingt-quatre heures de pourparlers, elle insista sur le rétablissement de l'ancienne constitution. Dès lors, les conférences furent rompues, et la force dut en décider.

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Dans l'intervalle, Duphot, qui avait rassemblé environ 2,500 hommes de troupes régulières, s'était rendu maître de plusieurs points de la côte. Une partie des habitants de la rivière du Ponant, partisans du nouvel ordre de choses, étaient accourus au secours des Génois; et le danger de subir le sort d'une ville prise d'assant, réveillant les patriotes les plus tièdes, la garde nationale fournit 3 à 4,000 hommes qui, de concert avec les troupes de ligne sous la conduite de Duphot et de plusieurs autres officiers français, assaillirent les positions des insurgés, et les en chassèrent après un combat vigoureux, dans la matinée du 6.

Pendant que ceci se passait sous les murs de Gènes, les habitants de Sarzano furent maintenus dans l'obéissance par le député Marc Federici. Ceux de Fontana-Buona s'étaient portés sur Chiavari, et se disposaient à venir renforcer les insurgés de la

Polcevera au nombre de 3 à 4,000 : mais la nou- | tation donnée par un directeur, Thugut, jaloux de velle de la défaite de ces derniers refroidit leur connaître les vues de ses adversaires, proposa de enthousiasme, et ils se retirèrent dans leurs foyers. régler, par des conventions secrètes, le sort de A la vérité, ils reprirent les armes quelques jours l'Italie et de l'Allemagne. Le Directoire, ne s'aperaprès, aux instigations des Durazzo, des Pallavicini, cevant pas du but de cette insinuation, développa des Spinola et des Doria; mais le général Duphot ses prétentions sans finesse. En vain Carnot et Barayant reçu quelques renforts de Tortone, dispersa thélemy auraient voulu qu'on ne s'écartât pas, dans les rebelles, en faisant parcourir le pays à des co- le traité définitif, des bases des préliminaires : leurs lonnes mobiles, qui prirent des otages parmi la représentations furent inutiles; il fallut plier sous noblesse, et livrèrent leurs prisonniers à une com- la majorité. Toutefois, Carnot trouva dans l'ammission militaire. bition de ses collègues l'occasion d'appuyer un projet, dont on trouve la première trace dans la correspondance de Bonaparte, et qui aurait pu faire passer une partie du commerce de l'Amérique entre les mains de la république. Le général en chef ayant assuré que Peschiera et Pizzighetone formeraient à peu de frais des boulevards suffisants pour la république cisalpine et balanceraient Mantoue, ce directeur proposa de renoncer à cette place, et de donner la Romagne au duc de Parme, en échange de la Louisiane et de la Floride que Charles IV aurait volontiers cédées à la France, pour procurer un établissement solide à l'infantduc. Cette heureuse idée méritait d'être appréciée : elle eût intéressé le roi d'Espagne aux affaires d'Italie; et la république y eût gagné des positions

Cet effort de l'oligarchie expirante fut le dernier. Le nouveau gouvernement génois fut installé et le ministre Faypoult, en entretenant adroitement l'équilibre entre les intrigues de l'aristocratie et l'exaltation des démocrates, maintint pendant plus de six mois, une tranquillité qu'il était bien difficile d'espérer après un tel bouleversement.

Il n'en fut pas tout à fait de même dans les États de Venise, où plusieurs insurrections éclatèrent encore, particulièrement dans l'arrondissement de Setlecommuni et de Luziara, où le général Belliard eut à combattre et à sévir contre de nombreuses troupes de paysans. La capitale même s'agitait, et un complot, ourdi par Spada, tendait à y exciter un soulèvement. Tandis que ces choses se passaient dans l'inté-militaires excellentes dans le golfe du Mexique. rieur de l'Italie, les négociations de Montebello, transférées à la fin de juin à Udine, se trainaient avec une lenteur désespérante. Le retour de M. de Merfeldt avait changé toutes les bases de la convention du 24 mai. L'Autriche persistait à vouloir deux congrès pour les affaires générales et la paix de l'Empire; elle se plaignait aussi des révolutions démocratiques de Venise et de Gènes, faites postérieurement aux préliminaires.

Le cabinet de Vienne, informé des trames ourdies en France par le parti royaliste pour s'emparer de l'autorité, sentit l'avantage qu'il pouvait en retirer en gagnant du temps. Si ce parti triomphait, il était probable qu'il serait plus coulant avec ses anciens alliés; sa chute, au contraire, devait renouveler, selon toute apparence, la guerre civile en France, et fournir l'occasion de reprendre la Lombardie qui sait même si l'on ne songea pas à reprendre Milan, après s'être fait céder Venise? En attendant, s'il faut s'en rapporter à l'interpré

Mais, différentes causes et surtout l'obstination que mit la majorité du Directoire à conserver Mantoue, firent échouer cette négociation avant qu'elle eût été sérieusement entamée.

Les mois de juillet et d'août se passèrent en échange de notes insignifiantes entre Clarke et Gallo. Le général en chef s'était rendu à Milan, en attendant qu'il plût aux ministres autrichiens de s'expliquer catégoriquement. Enfin, l'Empereur consentit à entamer des négociations séparées à Udine, mais il persista dans la limite de l'Oglio, et le maintien des stipulations de Leoben, se réservant de recourir à un congrès, si l'on ne tombait pas d'accord dans ces conférences particulières. Ces propositions démontraient par trop évidemment qu'il ne voulait que gagner du temps. Cependant, Bonaparte rejoignit Clarke à Passeriano, près d'Udine, où le général Merfeldt, le duc de Gallo et le baron de Degelman traitèrent de leur côté au nom de l'Empereur.

Sur ces entrefaites, Talleyrand ayant remplacé » pour ne s'occuper que d'un objet, celui d'arran

Charles Delacroix, signala son entrée au ministère en adressant de nouvelles instructions aux négociateurs français, qui, tout en affectant de s'en tenir aux bases de Leoben, cherchaient à rejeter les prétentions de l'Autriche loin de l'Italie, afin de les reporter en Allemagne ; combinaison assez sage, qui eût sauvé Venise et garanti la république lombarde d'un voisinage dangereux (1); ce système semblait d'autant plus convenable, que le roi de Prusse, par une déclaration solennelle, datée de Pyrmont, venait de consentir au principe des sécularisations. Mais dans le cas où ce changement n'eût pas été admis, on recommandait d'insister pour obtenir Mantoue, comme boulevard nécessaire à la sûreté de la république nais

sante.

Les plénipotentiaires français réclamèrent donc la Belgique, les provinces de l'Empire sur la rive gauche du Rhin, et la Lombardie y compris Mantoue. Ils offrirent en compensation les provinces vénitiennes sur la rive gauche de l'Adige, outre les deux évêchés de Passau et Saltzbourg.

Alors, le cabinet autrichien, loin de se contenter des indemnités promises à Leoben, demanda de son côté, non-seulement tous les États de terre ferme de Venise, mais aussi les îles Ioniennes et les trois légations, affectant de renoncer à toute indemnité en Allemagne.

Ces prétentions rendirent le Directoire plus exigeant à son tour. Il déclara que l'Isonzo formerait les limites de la république cisalpine et des États héréditaires de l'Empereur; ce qui eût restreint les indemnités de ce dernier à l'Istrie et à

la Dalmatie, en lui laissant néanmoins la faculté de chercher d'autres compensations en Allemagne. Dans ce contre-projet, la France se réservait les iles de Corfou, Céphalonie, Zante, Cérigo, Tine, etc., ainsi que Butrinto, Preveza, Larta et Vonizza, qui dépendaient de l'Albanie vénitienne.

Ainsi l'on n'avait jamais été plus loin de s'entendre, et comme l'observe le profond historien qui nous a retracé la chute de Venise : « Plus d'une fois dans le cours de ces négociations, les deux » partis semblèrent avoir oublié leurs inimitiés,

(1) Voyez Pièces justificatives du livre XII,

» ger leurs différends aux dépens d'autrui. Les >> abandons de territoires étrangers étaient propo» sés sans pudeur, acceptés sans remords: on of>> frait des provinces sur lesquelles on n'avait au>> cun droit; et la discussion se réduisait à des » calculs de statistique. C'était l'importance des acquisitions qu'on examinait, et non pas leur » légitimité. »

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Malgré cette facilité à prendre et à donner, on exigeait beaucoup pour soi, tout en prétendant mettre un frein à l'ambition des autres : et jamais on n'avait paru plus près d'une rupture; car le Directoire, loin de se désister de ses demandes, espéra obliger l'Autriche d'y souscrire, en hâtant l'organisation des pays conquis. La république transpadane fut réunie à la république cisalpine; et celle-ci eut un gouvernement modelé sur celui de la république française: un directoire de cinq membres exerça le pouvoir exécutif, et deux conseils devinrent dépositaires du pouvoir législatif. L'état militaire, fixé à 20,000 hommes, fut d'abord porté à 12,000, sur lesquels 6 à 8,000 entrèrent immédiatement en ligne. Ces mesures, auxquelles les directeurs français attachaient tant d'importance, n'auraient cependant point atteint leur objet, si, d'un côté, Bonaparte, piqué de n'avoir pas tous les secrets de la majorité du Directoire, n'avait négocié avec froideur, en attendant l'acceptation de la démission qu'il avait offerte; et que, de l'autre, la journée du 18 fructidor, en trompant les espérances du baron de Thugut, ne l'eût averti du danger d'une rupture.

Le cabinet de Saint-James, dans l'incertitude de ce qu'il pouvait espérer de celui de Vienne, se décida à envoyer de nouveau Malmesbury en France, pour y renouer des négociations. Il n'en fallait pas moins pour arracher l'Angleterre au péril qui la menaçait. Tout, dans ce moment, semblait conjurer sa perte la Russie renonçait à prendre une part active à la guerre; l'Autriche allait conclure sa paix séparée; la banque suspendait ses payements; les flottes anglaises s'insurgeaient, et Bonaparte causait autant d'effroi à la nouvelle Carthage, que Scipion à l'ancienne. Pitt ébranlé jugea enfin qu'il était temps de traiter avec la France. Malgré le caractère d'animosité

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qu'avait pris la guerre, il ne lui parut point si difficile de poser les bases d'une négociation. l'Angleterre, en rendant la moitié des colonies qu'elle avait conquises sur la France et ses alliés, donnait une preuve de modération, et conservait encore assez d'ascendant pour ressaisir à la première occasion la suprématie à laquelle elle aspirait. De son côté, le Directoire, s'il était raisonnable, devait s'estimer heureux de sauver l'édifice colonial qui menaçait ruine, et d'obtenir le temps de se créer une marine. En conséquence, le ministre de Georges III se décida à demander de nouveaux passe-ports pour lord Malmesbury; et, après les formalités d'usage, ce rusé négociateur arriva en effet à Lille, le 4 juillet; le Directoire nomma, pour conférer avec lui, l'ex-directeur Letourneur, Maret et Pleville-Lepeley.

La discussion s'engagea sous de meilleurs augures que l'année précédente; car il n'y fut pas question des objets débattus avec si peu de succès, à Paris, par le ministre Charles Delacroix. Comment l'Angleterre aurait-elle pu, en effet, exiger la restitution de la Belgique, quand la république venait d'en obtenir la cession de la part de l'Empereur? Les propositions faites cette fois par le cabinet de Saint-James, étaient de nature à mériter le plus mûr examen. Affectant de ne traiter que les affaires des puissances maritimes, il ne fit nullement mention des conquêtes de la France: seulement, l'Angleterre réclamait, à titre de compensation, l'île de la Trinité récemment conquise sur les Espagnols et le poste important du cap de Bonne-Espérance. C'était beaucoup, sans doute; mais l'Angleterre restituait les deux tiers de ce qu'elle occupait par le droit de la guerre, et cet abandon prouvait de la modération.

pas positivement détruit dans le traité proposé. Cette clause, trop générale, était susceptible d'engendrer mille difficultés. Par exemple, la Belgique, cédée à l'Autriche en vertu du traité d'Utrecht, n'étant pas spécialement reconnue à la France par l'Angleterre, celle-ci pouvait lui en contester un jour la possession. Il eût été plus naturel de stipuler clairement les articles de ces anciens traités dont on entendait maintenir la valeur; pure formalité de rédaction, si les deux parties eussent été de bonne foi.

Le Directoire prolongea durant tout le mois d'août d'inutiles débats, sous prétexte de consulter l'Espagne et la Hollande relativement aux cessions demandées. Rewbell, qu'aucun scrupule ne retenait, quand il était question de vexer ses alliés, en affecta beaucoup, lorsqu'il disputa, en leur nom, des établissements dont il projetait de les dépouiller. Carnot voulait qu'on exigeât de la cour de Madrid et de la république batave, des secours proportionnés aux chances auxquels on s'exposerait, en continuant la guerre uniquement dans leur intérêt. La demande fut faite pour la forme, quand de nouveaux incidents mirent un obstacle invincible à la paix maritime.

Dans ces entrefaites, le Portugal fit aussi quelques tentatives pour se rapprocher de la France. Soumis à l'influence anglaise, le cabinet de Lisbonne n'avait point profité des ouvertures que l'Espagne lui avait menagées par le traité de Bâle; et une sorte d'état hostile s'était prolongé jusqu'alors avec la république. Le prince de la Paix, cédant aux sollicitations du Directoire, fit approcher des troupes des frontières d'Estramadure pour le décider à la paix. Soit que le prince du Brésil redoutât de voir ses intérêts froissés par le rapprochement des deux puissances appelées à décider de son sort, soit qu'il voulût prévenir un plus grand mal en s'assurant des intentions du Direc

La grande différence entre ces ouvertures et celles du mois de novembre précédent, résultait sans doute autant des revers qui venaient de forcer l'Autriche à une paix séparée, que des change-toire, il envoya à Paris le chevalier d'Aranjo. Ce ments survenus dans les relations avec la Russie ministre y signa, le 10 août, un traité, sur la sindepuis l'avènement de Paul Ier au trône. Un seul cérité duquel on n'a pas été fixé jusqu'à présent. article de ces propositions, le deuxième, présen- Il cédait à la France une partie de la Guyane portait quelque chose de louche et de fallacieux, en tugaise, et devait rendre le cabinet de Lisbonne au rappelant les traités de Riswick, de Nimègue, d'U-système de neutralité, en annulant les stipulations trecht, d'Aix-la-Chapelle, de Versailles, et leur honteuses de celui de 1703. Nous verrons plus donnant pleine vigueur pour tout ce qui ne serait tard les obstacles qui s'opposèrent à son exécution.

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