DIX-SEPTIÈME SIÈCLE. Pendant le xvIe siècle, la langue avait pris des formes arrêtées, et acquis la plupart des qualités qui la caractérisent. Mais ces qualités étaient mêlées à beaucoup de défauts: on trouve dans la plupart des écrivains la licence et la grossièreté qui régnaient dans les mœurs, du mauvais goût, des sentiments exagérés, une affectation ridicule, et cette emphase espagnole dont Corneille lui-même ne sut pas toujours se défendre. Ce fut au dix-septième siècle que ces défauts disparurent pour faire place à la décence, au bon goût, au naturel, à l'élégance, à la politesse, et que la langue parvint à ce degré de perfection qui la fixa telle qu'elle existe. Pendant cette mémorable époque, les poëtes rivalisèrent de génie et de talent avec les prosateurs; et Molière, Corneille, La Fontaine, Racine et Boileau balancèrent la gloire de Bossuet, de Pascal, de Descartes, de Fénelon, de La Bruyère et de madame de Sévigné. RACAN. (1589-1670.) Honorat de Beuil, marquis de Racan, né à la Roche-Racan, en Tour raine, fut page de Henri IV, puis militaire. Il quitta le service avec le grade de maréchal de camp, et se livra aux lettres. Il a laissé des Mémoires sur la vie de Malherbe, son maître; des Bergeries, recueil d'idylles; des odes sacrées, tirées des psaumes, et des poésies diverses. Racan exprime avec grâce les petits détails; mais son style manque de force et de correction. On connaît les vers de Boileau : Malherbe d'un héros peut vanter les exploits; Stances sur la retraite. 1 Tircis, il faut songer à faire la retraite 1; 1 On dirait aujourd'hui faire retraite. Errer au gré des flots notre nef vagabonde; Le bien de la fortune est un bien périssable; Des palais de nos rois que les toits des bergers. Oh! bienheureux celui qui peut de sa mémoire Il laboure le champ que labouroit son père, Roi de ses passions, il a ce qu'il désire ; Et, sans porter envie à la pompe des princes, 1 Crois-moi, retirons-nous hors de la multitude, De ces palais dorés où tout le monde accourt; CORNEILLE. (1606-1684.) Pierre Corneille, fils d'un avocat anobli de Rouen, fut destiné au barreau; mais il préféra le théâtre. Il débuta par des comédies, bien supérieures pour la plupart à celles de ses contemporains. Molière avouait qu'il devait beaucoup au Men leur, la meilleure comédie de Corneille; cette pièce lui fit voir que c'était non dans l'intrigue, mais dans les mœurs et les caractères, qu'il fallait chercher la bonne comédie. C'est dans la scène tragique que Corneille devait s'élever à une hauteur dont le plus heureux de ses rivaux ne l'a pas fait descendre. Il créa la tragédie fr .nçaise; il lui donna un but moral, et la fit servir à élever l'âme de Tomme, en lui montrant sans cesse des objets grands et dignes d'admiration. Il peignit l'héroïsme sous toutes ses formes: l'héroïsme de l'amour et de l'honneur, dans le Cid; l'héroïsme de l'amour de la patrie, dans Horace; l'héroïsme de la clémence, dans Cinna; l'héroïsme de la religion et de la fidélité conjugale, dans Polyeucle; l'héroïsme de l'a 1 On dirait aujourd'hui: IL se contente. |