Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

langue latine, avec ordre d'effacer de toutes les archives, de tous les écrits et de tous les monumens, les noms vulgaires. Les officiers de l'empereur, en exécution de cet édit, ramassèrent et brûlèrent tous les livres, priviléges, annales de la nation gauloise, afin d'anéantir le souvenir de sa gloire passée, de sa liberté ravie, et d'effacer, pour ainsi dire, les traces de son origine, et de son existence politique. Cette nation généreuse, irritée de tant de vexations et d'outrages, fit enfin éclater son désespoir. Les uns se soulevèrent, les autres se retirèrent auprès des Sicambres, leurs voisins, qui habitaient dans le comté de Zutphen et le duché de Clèves, et ils les invitèrent à embrasser leur querelle.

Ces peuples, réunis aux Tenchures et aux Usipètes, qui habitaient dans les mêmes pays, pour venger la cause de leurs voisins opprimés, passent le Rhin et ravagent les pays adjacens. Lollius, gouverneur des Gaules, à son arrivée, força les ennemis à reprendre le chemin de leur pays. Mais les Sicambres, revenus avec des troupes fraîches, chargèrent si furieusement les Romains, qu'ils parvinrent à rompre leur cavalerie et à tuer leur chef Lollius. Ce terrible événement, un des plus funestes de ce règne, détermina l'empereur à revenir dans les Gaules, où il fit un séjour de trois ans, pendant lequel il prit toutes les précautions et toutes les mesures nécessaires pour la sûreté de ces provinces il employa donc tout son temps et tous ses soins à régler définitivement l'état des Gaules: il acheva et il perfectionna l'ouvrage qu'il avait commencé pendant son premier voyage. L'expérience avait fait reconnaître, comme dans toutes les constitutions

nouvelles, des imperfections, il les rectifia; des vices et des abus, il les corrigea; des vides et des lacunes, il les remplit: il écouta les plaintes de la nation, qui, déjà mécontente de la domination romaine, était sur-tout indisposée pour les impoDio, lib. 54. sitions excessives dont elle était accablée. Les énormes concussions de l'intendant Licinius augmentaient encore leur affligeante détresse. Les taxes se payaient par mois: or, les mois Quintilis et Sextilis ayant été récemment nommés Julius et Au gustus, fournirent à Licinius le moyen de doubler les taxes. L'habile financier fit adroitement son profit de ce changement, en employant les noms anciens et les nouveaux, de sorte que de ces deux mois, il en fit quatre. Auguste, dans le premier mouvement, promit de punir ce ministre prévaricateur; mais Licinius connaissait le moyen de se justifier et de se sauver il découvrit aux yeux de l'empereur la masse énorme d'or et d'argent qu'il avait cachée dans sa maison, où il avait engagé le prince à se rendre. Seigneur, dit-il, c'est pour votre sûreté et pour votre service que j'ai amassé ces trésors; ils sont à votre disposi tion: les Gaulois s'en seraient servis contre vous; j'ai détruit leurs forces en leur étant leurs richesses: emportez cet argent; il vous était réservé. Ce tour d'adresse étourdit l'empereur, qui, considérant que ces richesses lui étaient destinées, trouva probablement qu'elles étaient juste, ment acquises.

Auguste, pour opposer une nouvelle barrière aux incursions des Germains et aux entreprises des Gaulois, établit des colonies dans les Gaules et

[ocr errors]

Gell., 16.

lib.

dans la Belgique, dont la frontière était la plus exposée. Ces villes furent désignées par l'ancien nom du peuple, auquel on ajouta le titre d'Augusta, en sous-entendant Colonia. Les trois villes de l'ancienne Belgique, connues sous cette dénomination, sont: Augusta Trevirorum, Trèves; Augusta Suessonum, Soissons; Augusta Veromanduorum, Saint-Quentin: il tâcha, en mêlant de cette manière les deux nations, d'accoutumer et de fa- Strabo, lib. çonner, en quelque sorte, les Belges et les Gaulois 4à la domination, aux mœurs et aux lois romaines. Cependant les différens peuples de la Belgique, en subissant la loi du vainqueur, en avaient éprouvé des traitemens différens. Les Ménapiens, les Morins et les Tongrois étaient considérés comme peuples conquis, et traités, pour ainsi dire, en esclaves. Les Bataves et les Nerviens, regardés comme frères, comme amis, étaient traités en peuples libres, du moins en apparence: ils étaient gouvernés par leurs propres magistrats, selon leurs lois et leurs usages: ils avaient un chef, qui, sans avoir le titre de roi, exerçait, sous celui de magistrat suprême, la souveraine autorité. Les Ubiens, regardés comme alliés du peuple romain, jouissaient de tous les droits attachés à ce titre.

Auguste, après un séjour de trois ans dans les Gaules, revint à Rome, ayant laissé à Drusus que Livie, femme de l'empereur, avait eu de Tiberius Néro, son premier mari, le soin de terminer la guerre contre les Germains qui infestaient les Gaules. Ce jeune prince, âgé seulement de vingtcinq ans, après avoir réduit les Usipètes et les Tenchtres, marcha contre les Chérusques, les Suèves

AvantJ.-C.,

13.

et les Sicambres, qui avaient cimenté leur alliance par une espèce de pacte mutuel, par lequel ils s'étaient solennellement engagés à partager, avant leur départ, les dépouilles des ennemis. Les Chérusques s'étaient réservé les chevaux; les Suèves, l'or et l'argent; les Sicambres, les prisonniers; mais la fortune rompit tous ces arrangemens : leur projet eut une issue tout-à-fait contraire à celle qu'ils avaient espérée. Ces fiers ennemis, par une de ces vicissitudes si ordinaires dans les événemens humains furent battus, et Drusus emporta, partagea et vendit leurs cheleurs trésors et leurs hommes. Cette victoire mérita à Drusus le surnom de Germanicus, qui fut héréditaire à sa postérité. Mais je ne dois pas oublier, pour l'honneur de ma patrie, que c'étaient Epit. hiv., deux Belges, Sénectius et Anectius, Nerviens, qui, autant par leurs conseils que par leur bravoure, contribuèrent le plus efficacement au succès de cette fameuse expédition.

lib. 139.

vaux,

Drusus, pour assurer dans la suite la défense des Gaules contre les nouvelles entreprises que pourraient tenter les Germains, fit répartir des garnisons sur toute la frontière, le long de la Meuse, le long de l'Elbe, le long du Wéser: il fortifia toute la rive gauche du Rhin, depuis sa source, jusqu'à son embouchure, en faisant construire, sous sa direction, plus de cinquante forts, défendus par l'élite des troupes romaines: il tira du Rhin, audessous de la séparation du Wahal, ce beau canal qui communiquait du Rhin à l'Issel, connu sous le nom de Fossa Drusi, ou canal de Drusus. Cette dérivation des eaux du Rhin dans l'Issel, enfla tellement la rivière nommée Fleuvo, qu'elle

forma

forma un grand lac qui prit le nom de Flevo Lacus, lequel ayant été dans la suite fort aggrandi par la mer, est ce que les Hollandais nomment actuellemens Zuyder-Zée, c'est-à-dire, mer méridionale. Ce lac, dont le lit se retrécit vers son embouchure, redevient une rivière que les modernes nomment la Flie, dont les eaux se confondent avec celles de l'Océan le bras du milieu qui retint le nom de Rhin, fut tellement affaibli par cette saignée, que, se trouvant resserré dans un lit étroit, il ne porta plus à la mer qu'un faible tribut. Cette embouchure est actuellement comblée par les sables. Le but apparent de Drusus, en creusant ce canal, était de prévenir, par cet affaiblissement, les fortes inondations fréquemment occasionnées par les eaux trop abondantes de ce bras du milieu; mais il avait sans doute des vues plus étendues: il voulait probablement, par cette communication du Rhin à l'Océan, ouvrir le chemin de la Germanie aux Romains: il le leur fraya luimême : il entra avec une flotte, par cette nouvelle issue, dans l'Océan, où il s'empara d'une île renommée dans ce temps, appelée Byrchanis par Strabon, et Burcana, par Pline, qui ajoutent que les Romains avaient donné à cette île le nom de Fabaria, à cause d'une espèce de légume ressemblant à la fève, que ce sol produisait, pour ainsi dire, sans soin et sans culture. Cette île, malgré les changemens arrivés sur ce rivage entamé par la mer, a conservé son ancien nom, avec une légère altération. C'est l'île de Borkum, située à l'embouchure de l'Ems.

*

[ocr errors]

Drusus avait entrepris un autre ouvrage, qui

Tome I.

4

« VorigeDoorgaan »