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abois, sous le masque de la franchise républicaine. Effectivement Merlin ne tarda pas à se jouer de la misère publique, en afichant le luxe le plus marqué. C'est au château du Rainci, cette magnifique propriété de la maison d'Orléans, qu'il l'étala avec une impudence qui n'a pas d'exemple. Un nombre infini de voitures remplissait journellement les cours de ce château, et une table servie avec profusion y recevait un grand nombre de convives. Devenu propriétaire du Calvaire, il prodigue les trésors de la France, pour l'embellissement de cette maison. On cite à son sujet l'anecdote suivante: Avant la révolution, il s'était présenté au théâtre de la Montansier pour y jouer les troisièmes rôles dans la comédie; se trouvant un jour chez cette directrice, il lui dit : « Vous souvenez-vous, mademoi» selle, d'avoir refusé de me recevoir à votre théâtre pour jouer » dans la comédie? Eh bien! lui répondit la Montansier, » je vous ai refusé parce que vous étiez trop laid; je vous ai » rendu service, puisque vous avez depuis joué un des pre» miers rôles dans la tragédie révolutionnaire : vous y avez » gagné davantage, n'est-ce pas ? >>

N° VI.

LETTRE ADRESSÉE DE LYON A LA COMMUNE DE PARIS
PAR L'UN DE SES DÉLÉGUÉS.

Citoyens, mes collègues, je vous prie de m'envoyer deux exemplaires du journal intitulé: Le Père Duchêne; aucun abonné ici ne le reçoit sous le cachet de la commune de Paris; Je serai peut-être plus heureux; notre projet serait de le faire imprimer et répandre avec profusion, à Commune Affranchie

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et dans les environs, en punissant les coupables. En abattant toutes les maisons où habitaient les riches de cette orgueilleuse cité, nous voudrions aussi régénérer l'esprit des habitants, et ce n'est pas là l'ouvrage le plus facile. Tous les Lyonnais, accablés par la terreur, gardent le silence; mais les noms sacrés de patrie, de république, sont étrangers à leurs âmes: la presque totalité des négociants n'a considéré, dans la révolution, que son intérêt pécuniaire; dans les grands mouvements où cette cité s'est trouvée, elle n'a vu que le jeu de l'argent et des assignats. Il existe cependant des patriotes, des sans-culottes, mais en petit nombre, et la majorité de ce petit nombre est d'une ignorance extrême. La masse du peuple n'a presque aucun rapport avec celle des autres départements: ce ne sont pas les sans-culottes de Paris, remplis de courage et d'énergie, connaissant tout à la fois leurs droits et leurs devoirs. Il faudra disséminer tous ces Lyonnais dans divers points de la république et réduire cette cité, aujourd'hui de cent quarante mille âmes, à vingt-cinq mille âmes au plus.

Les représentants du peuple ont substitué, aux deux tribunaux révolutionnaires qu'ils avaient créés, un comité de cinq juges; cette mesure était indispensable: les deux tribunaux, sans cesse embarrassés par les formes, ne remplissaient pas les vœux du peuple; les prisonniers entassés dans les prisons, les exécutions partielles, ne faisaient plus que peu d'effet sur ce peuple; le comité des cinq juge sommairement, et sa justice est aussi éclairée qu'elle est prompte.

Le 14 frimaire, soixante de ces scélérats ont subi la peine due à leurs crimes par la fusillade.

Le 15 frimaire, deux cent huit ont subi le même sort.

Le 17 frimaire, on a acquitté soixante innocents avec autant d'éclat qu'on en donne à la punition des coupables.

Le 18, scixante-huit rebelles ont été fusillés, et huit guillotinés.

Le 19, treize ont été guillotinés.

Le 20, cinquante innocents ont été mis en liberté.

Le 21, la fusillade en a détruit en masse cinquante-trois. Sous peu de temps, les coupables de Lyon ne souilleront plus le sol de la république.

Nous faisons chaque jour des découvertes d'or et d'argent. Le total des matières d'or et d'argent trouvées dans les caves, jardins, etc., vous étonnera lorsqu'il vous sera connu.

N° VII.

NOMENCLATURE DES SUSPECTS, DRESSÉE PAR CHAUMETTE ET HÉBERT.

<< Sont suspects, ceux qui, dans les assemblées du peuple, arrêtent son énergie par des discours astucieux, des cris turbulents et des murmures;

>> Ceux qui, plus prudents, parlent mystérieusement des malheurs de la république, s'appitoient sur le sort du peuple, et sont toujours prêts à répandre de mauvaises nouvelles avec une douleur affectée;

>> Ceux qui ont changé de langage et de conduite suivant les événements; qui, muets sur les crimes des royalistes, des fédéralistes, déclament avec emphase contre les fautes légères des patriotes, et affectent, pour paraître républicains, une austérité, une sévérité étudiées qui se démentent, dès qu'il s'agit d'un modéré ou d'un aristocrate;

Ceux qui plaignent les fermiers et marchands avides contre lesquels la loi est obligée de prendre des mesures;

>> Ceux qui, ayant toujours les mots de liberté, république

et patrie sur les lèvres, fréquentent les ci-devant nobles, les prêtres contre-révolutionnaires, les aristocrates, les feuillants, les modérés, et s'intéressent à leur sort;

>> Ceux qui n'ont pris aucune part active dans tout ce qui intéresse la révolution, et qui, pour se disculper, font valoir le payement de leurs contributions, leurs dons patriotiques, leur service dans la garde nationale par remplacement ou autrement;

>> Ceux qui ont reçu avec indifférence la constitution républicaine, et ont fait part de leurs fausses craintes sur son établissement et sa durée ;

>> Ceux qui, n'ayant rien fait contre la liberté, n'ont aussi rien fait pour elle;

>> Ceux qui ne fréquentent pas leurs sections, et qui donnent pour excuse qu'ils ne savent pas parler et que leurs affaires les en empêchent;

>> Ceux qui parlent avec mépris des autorités constituées, des signes de la loi, des sociétés populaires et des défenseurs de la liberté ;

>> Ceux qui ont signé des pétitions contre-révolutionnaires, ont fréquenté des sociétés ou clubs anti-civiques;

>> Enfin, les partisans de Lafayette et les assassins qui se sont transportés au Champ-de-Mis (lorsqu'on déploya le drapeau rouge). >>

N° VIII.

NOTE SUR LA STATISTIQUE MILITAIRE.

Il est important de connaître la force RÉELLE des armées, qui seule peut faire juger la conduite des gouvernements et celle des généraux. Un gouvernement ordonne telle opération, qui, pour être couronnée de succès, exige une armée de cent mille hommes, mais sur le papier seulement; tandis que le nombre réellement disponible n'est que de 60,000 (cela s'est vu souvent). Le général disposant sur le papier de 100,000 hommes, mais n'en ayant que 60,000 en réalité, engage une affaire qui, pour réussir, exigerait 100,000 hommes. Il est battu. N'est-ce pas à la témérité qu'il faut attribuer sa défaite?

La plupart des statisticiens non militaires, même lorsqu'ils peuvent se procurer des états officiels, trompent souvent leurs lecteurs, parce qu'ils ne connaissent pas le sens des termes, qui diffère beaucoup dans les divers pays. Ainsi, en France, le mot effectif, signifie tout ce qui est soldé et entretenu aux frais de l'Etat, et comprend les hommes aux hôpitaux, en prison, en permission, en jugement; détachés dans les dépôts de convalescents, de chevaux blessés, ou pour le recrutement et`la remonte, etc.; tandis que par les mots présents sous les armes, on entend ce qui est réellement en ligne. Au contraire, en Allemagne, on désigne par l'expression état effectif (effectivstand), ce que nous nommons présent sous les armes. Il y a encore d'autres différences: ainsi, depuis le consulat, les états français comprennent même le train d'artillerie, celui des équipages, les infirmiers, etc., qu'on ne comptait pas sous la république; ce qui fait qu'un corps porté maintenant pour

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