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l'unique moyen de soumettre ce peuple obstiné, prit le parti de la terminer par un coup décisif: il rassemblà donc une armée formidable, à la tête de laquelle il parut, le 6 de juillet, devant les murs de Gavre; déjà, le siége durait depuis six ou sept jours. Le commandant du château, qui se nommait Jean' Devos, voyant que le secours qu'il attendait de Gand, ne venait point, prit une résolution dictée par le désespoir: il prit avec lui six ou sept hommes déterminés et affidés, et, ayant choisi le moment le plus obscur de la nuit, il tomba inopinément sur les premiers qu'il rencontra dans les tranchées, et il les mit en désordre et en fuite; mais comme son projet était formé, au lieu de poursuivre les fuyards, il suivit le chemin de l'Escaut, qu'il passa à la nage avec ses compagnons, et prit la route de Gand, où tous arrivèrent sans obstacle et sans mauvaise rencontre il y assembla le peuple pour lui exposer la détresse où se trouvaient ses compagnons qui étaient assiégés dans Gavre, et il raconta le danger auquel il s'était exposé pour les sauver, en venant solliciter les secours qu'ils attendaient.

Mais ceux qui étaient restés au château de Ga- Id., ch. 28. vre, étonnés du brusque départ de leur commandant qui ne les en avait pas prévenus, commencèrent à murmurer; et, se croyant trahis et abandonnés, ils se rendirent à la discrétion du duc de Bourgogne. Tous ces malheureux furent impitoyablement pendus. Cette triste exécution eut lieu le 22 de juillet.

Tout le peuple de Gand, que cet acte de barbarie a rendu plus furieux, se répand comme un torrent dans les plaines de Gavre, en si grand nombre et en rangs si serrés, qu'à peine voyait-on le

jour entre les piques et les glaives. L'armée des Gantois avançait à grands pas, et déjà l'artillerie se faisait entendre; mais leur avant-garde ayant été assaillie et rompue par l'artillerie des Bourguignons, fut comme le signal de leur défaite. Le chevalier Jacques de Luxembourg, que le duc avait chargé de commander mille archers de pied, fondit sur les Gantois débandés, qui furent forcés de se précipiter dans l'Escaut, armés de leurs jaques, haubergeons, pansiers et hunettes ; et les archers, qui les avaient poursuivis, les tuaient, noyaient et assommaient comme bétes, sans merci et sans rançon. Le duc, en ce moment, s'avança avec sa troupe, faisant crier : Notre-Dame! Bourgogne! Une compagnie de Gantois, forte à-peu-près de deux mille hommes s'était retirée dans une prairie spacieuse, bordée d'une grosse haie d'épines, et ils se disposaient à se défendre en désespérés. Une troupe de nobles bourguignons, qui vint les y attaquer, fut très-durement accueillie. Le duc de Bourgogne, qui voyait les rebelles devant ses yeux, n'écoutant que le premier mouvement de son indignation, se précipita dans la prairie. Les Gantois, s'étant arrêtés, au premier aspect, comme saisis d'étonnement, devant le duc, dirigèrent leurs coups contre ce prince, dont le cheval reçut quatre blessures. Le comte de Charolois, accouru au secours de son père, fut blessé d'une pique au pied. Les archers, qui avaient poursuivi l'avant-garde des Gantois, vinrent dans cette prairie. La bataille y fut longue et opiniâtre; mais les Gantois, après avoir vigoureusement combattu, furent forcés de succomber, et ils furent tous tués sur la place.

Dès le lendemain, à la pointe du jour, le duc, son fils, et tous les seigneurs de sa suite, s'avancèrent sur Gand avec une contenance imposante. Le duc avait dépêché un héraut chargé de porter aux Gantois des lettres, par lesquelles il déclarait qu'il leur pardonnait, aux conditions déduites dans la sentence portée à Lille. Les Gantois, qui avaient fermé les portes de la ville vinrent recevoir à la barrière l'envoyé bourguignon, qui leur présenta les dépêches, qu'ils reçurent respectueusement: ils répondirent en peu de mots au héraut qu'ils remerciaient le duc de la grâce qu'il leur accordait par ses dépêches; qu'ils suppliaient leur seigneur, pour l'honneur de la passion de Notre-Seigneur, qu'il voulût se retirer pour cette nuit à Gavre, promettant que le lendemain ils se rendraient auprès du duc de telle manière qu'il serait satisfait.

Le duc leur accorda leur requête, et dès le lendemain, en effet, l'abbé de S.-Bavon et le prieur des chartreux, accompagnés de plusieurs notables, vinrent trouver le duc, et déclarèrent que non-seulement ils se soumettaient aux conditions que le duc avait prescrites par les traités précédens, mais qu'ils se remettaient à sa discrétion. Les conditions du pardon et de la paix furent en conséquence rédigées par écrit, et le jour fixé pour l'exécution.

Ce fut donc le dernier jour du mois de juillet, que cette flétrissante cérémonie eut lieu. Le duc, décoré de toute son armure, et monté sur le cheval qui avait été blessé à la bataille de Gavre, sortit de Gand à la tête de son armée, qui marchait en ordre de bataille, bannières déployées, accompagné

du comte de Charolois, son fils, et d'un grand nombre de seigneurs du premier rang. Toute cette armée s'arrêta à une petite lieue de la ville, sur le grand chemin d'Audenarde. Le duc fit partager son armée en deux ailes, et les seigneurs qui l'escortaient, formaient le front devant la bannière et les enseignes du duc. Dès que l'armée fut rangée dans cet ordre imposant, le maréchal de Bourgogne amena le piteux cortége des Gantois, L'abbé de S.- Bavon et le prieur des chartreux marchaient les premiers, à pied, suivis de vingt-cinq échevins, conseillers et hoofmans, en chemise, tête et pieds nus, et de deux mille bourgeois, vêtus de robes noires, et déceints, également tête et pieds nus. Tous se mirent à genoux devant le duc, et l'abbé de S.-Bavon portant piteusement la parole, cria en pleurant: trois fois merci pour son peuple mal conseillé. La contenance des Gantois, pendant cette ignominieuse cérémonie, annonçait le repentir et la honte. Le duc leur répondit que, puisqu'ils demandaient merci, ils la trouveraient en lui; qu'ils lui soient bon sujets, et qu'il leur serait bon prince; et que jamais plus il ne se souviendrait de l'injure qu'ils lui avaient faite. Toutes les bannières des métiers de Gand furent apportées et remises au roi-d'armes de la toison d'or, qui les fit déposer dans un sac, et les fit porter au palais. Le duc en fit porter la moitié devant l'autel de Notre-Dame de Bourgogne, et l'autre moitié devant celui de Notre-Dame de Halle. La paix fut publiée à Gand: le peuple en témoigna sa satisfaction par des feux de joie, et le duc se retira à Lille.

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CHAPITRE VI.

Lovis, dauphin de France, est réfugié à Genappe: il succède à son père sous le nom de Louis XI, et force le duc Philippe à lui céder les villes qu'il possédait en Picardie. Le comte de Charolois, fils de Philippe entre dans la ligue du bien public. - Bataille de Montlhéry. Louis XI engage les Liégeois à prendre les armes contre le duc Philippe.- Bataille de Montenac. - Les Dinantois insultent le comte de Charolois : ce prince conclut la paix avec Louis XI, fond sur le pays de Liége, et force les Liégeois à recevoir des conditions humiliantes. Les Dinantois se détachent des Liégeois, et s'y rejoignent leur révolte et leurs cruautés. Siége de Dinant: la ville se rend à discrétion; elle est pillée et brûlée. - Cruelle exécution ordonnée par le duc Philippe. Liégeois donnent des otages. -Mort de Philippe-le-Bon.

:

Les

Louis, dauphin de France, esprit aussi dange- 1450,

reux, que mauvais coeur, fuyant la colère de son père, contre lequel il s'était révolté, était venu démander un asile au duc Philippe, qui le reçut avec autant de générosité, que de magnificence: il lui assigna pour demeure le château de Genappe, où il l'entretint, à ses frais, pendant cinq ans. Philippe envoya des députés au roi Charles VII, le , pour

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