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de l'Aisne et de Villiers-en-Argonne, comme déjà ceux de Villeneuve-au-Châtelot, donnaient pour assesseurs au prévôt ou au maire nommé par le seigneur, à ce magistrat unique, seul admis par la coutume de Lorris, d'autres magistrats, ceux-ci électifs et connus sous deux noms, l'un d'origine latine juré, l'autre d'origne germanique échevin.

« Je leur accorde, » dit la charte de Villeneuveau-Châtelot, « le droit d'avoir six échevins qui admi>>nistreront les affaires communes de la ville et as>> sisteront mon prévôt dans ses plaids (237). »

Les chartes de la montagne au-delà de l'Aisne (523) et de Villiers-en-Argonne (694) réduisent de deux le nombre de ces fonctionnaires : « Il y aura » dans le village quatre jurés qui conserveront nos >> droits et ceux du village. »

Aucune de ces chartes ne dit, en termes formels, que ces échevins ou jurés fussent électifs; mais il va de soi qu'ils l'étaient, puisque le droit commun le voulait ainsi et que ces chartes ne font à ce droit aucune dérogation. D'ailleurs, après avoir parlé des quatre jurés, Blanche de Navarre, auteur de la charte de Villiers-en-Argonne, a soin d'ajouter immédiatement qu'à elle, à l'abbé et au couvent de SaintRemy de Reims appartiendra le choix du maire; son silence au sujet du mode de désignation des jurés est assez significatif pour ne pas avoir besoin de commentaire.

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Quand Thibaut IV, l'abbé et le couvent de Chatrices fondèrent un village sur la montagne de Pas

savant, ils placèrent à la tête de ce nouveau centre de population un corps de magistrature organisé de la même manière que sur la montagne au-delà de l'Aisne ou à Villiers-en-Argonne : un prévôt nommé par les seigneurs et quatre échevins électifs. Voici l'article de la charte émané de l'abbé :

<< Li prévos sera mis par nostre assent et li bor»jois de la vile metront quatre eschevins, li quel » jureront sor sainz au conmandemant lo roi et au >> notre amsamble qu'i garderont les droiz lo roi et >> les nos et ces de la vile; et par ces seront les » amandes jugiés et levées au droit de la vile; et >> chacun an remueront li borjois ces quatre esche» vins le jor de la saint Jehan Baptistre (2822). »

Mais cette charte n'est plus, en aucune de ses dispositions, imitée de celle de Lorris; elle reproduit presque entièrement la fameuse loi champenoise de Beaumont.

La loi de Beaumont a joui d'une grande popularité en Champagne, en Lorraine et dans le comté de Chiny à la fin du x1° siècle et pendant le x1 (a). Mais les populations qui l'ont obtenue de leurs seigneurs ne sont pas toujours parvenues à se faire accorder la totalité des libertés municipales que, par la charte primitive, Guillaume de Champagne avait conférées aux habitants de Beaumont-en-Argonne.

A Beaumont-en-Argonne, le maire, comme les échevins ou les jurés, était nommé chaque année par les habitants.

Ce corps électif était investi de l'autorité judiciaire,

(a) Voir notre tome II, p. cxxxvI-CXXXVIII.

sauf appel aux jurés de Bruyères, et il prononçait les amendes d'après un tarif beaucoup plus développé que celui de Lorris et complètement différent. Ainsi, dans un procès civil, le perdant payait 3 sous au lieu de 4 deniers. Une des dispositions les plus singulières de la loi de Beaumont est la peine infligée à toute femme qui, après avoir insulté une autre femme et été condamnée sur le témoignage de deux autres, aurait refusé de payer l'amende de 5 sous à laquelle ce, délit est tarifé : « Elle portera des pierres dans »sa chemise le dimanche à la procession. »

Une petite part des amendes était attribuée comme salaire au maire et aux jurés. Ainsi, celui qui aura traité un autre de menteur paiera 5 sous, dont 4 1/2 pour le seigneur et 6 deniers pour le maire. Celui qui dira à quelqu'un : Vous êtes hors la loi, paiera 10 sous, 6 pour le seigneur, 2 pour le plaignant, 1 pour le maire, 1 pour les jurés. La moitié des amendes attribuées au seigneur devait être versée dans une caisse particulière et employée aux fortifications de la ville; l'administration de cette caisse. appartenait à un conseil composé de trois personnes deux jurés désignés par les habitants et un sergent nommé par le seigneur.

A côté de l'échevinage et du comité qui avait le maniement des fonds destinés aux fortifications, la loi de Beaumont avait institué une troisième compa gnie : c'était un conseil de quarante bourgeois, dont l'approbation paraît avoir été nécessaire pour donner aux actes administratifs de l'échevinage un caractère définitif. « Si, par la décision du maire, des jurés et de quarante discrets bourgeois, une me» sure a été prise pour l'honneur et l'utilité de la

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» ville, elle sera stable, et si quelqu'un contredit il >> paiera 12 deniers (a). »

La charte donnée par Blanche de Navarre à La Neuville-au-Pont est presque partout une copie littérale de la loi de Beaumont. Nous ne signalerons que trois différences. Quand on voudra faire casser un jugement de l'échevinage, il faudra porter l'appel non pas devant les jurés d'une autre localité, mais devant d'autres jurés du même village, sans doute devant ceux de l'année suivante. Le nombre des membres du conseil des quarante bourgeois est réduit à sept. Enfin, on ne retrouve pas dans cette charte l'article de la loi de Beaumont qui décide que la moitié du produit des amendes attribuée par le tarif au seigneur sera employée aux fortifications (535).

Cet article manque aussi dans les chartes de Blancheville, de Rochefort (b) et de Florent (1747), également imitées de celle de Beaumont. Le nombre des membres du conseil des quarante bourgeois y est, comme à La Neuville, prodigieusement réduit, car il est fixé à dix. Ce conseil est investi d'une autorité beaucoup plus grande qu'à Beaumont et à La Neuville. C'est à lui que sont portés les appels des jugements rendus par les échevins, et ses membres portent le titre de jurés, par opposition aux échevins, tandis que dans les chartes de Beaumont et de La Neuville, les termes de juré et d'échevin sont em

(a) Voir la loi Beaumont dans Teulet Layettes du Trésor des Charles, I, 134-137.

(b) Jolibois, La Haute-Marne, p. 63-65, 463.

ployés comme synonymes. Une autre circonstance digne de remarque, c'est c'est que le nombre des échevins, laissé indéterminé par les chartes de Beaumont et de La Neuville-au-Pont, est fixé à sept par les chartes de Blancheville, de Rochefort et de Florent (a).

La loi de Beaumont fut encore adoptée dans les domaines de nos comtes pour le village nouveau créé sur la montagne de Passavant. Mais nous avons déjà dit que dans cette localité le maire électif fut remplacé par un prévôt à la nomination des seigneurs; et, des trois conseils électifs qui existaient à Beaumont, un seul y fut maintenu : c'était un échevinage composé de quatre membres (2822).

Ce fut aussi la loi de Beaumont qui servit de modèle à la charte de Saint-Julien-sur-Rognon (2552); mais là tout conseil électif a disparu et l'on ne voit plus qu'un seul magistrat, un maire nommé par les seigneurs. Il est bien entendu que, dans ces deux dernières chartes, on ne trouve pas plus que dans celles de La Neuville et de Florent, la clause qui obligeait le seigneur à employer aux fortifications une partie du produit des amendes. Ainsi la charte de Saint-Julien-sur-Rognon, bien qu'étant, au point de vue du droit civil, du droit pénal et de diverses redevances, une imitation de la loi de Beaumont, nous ramène, au point de vue des libertés politiques et

(a) La charte donnée à La Villeneuve-au-Chêne par Jean de Durnay, en 1255, et imitée aussi de celle de Beaumont, prescrit de même l'élection de dix jurés et de sept échevins. Les jurés y reçoivent, comme à Blancheville, à Rochefort et à Florent, l'appel des jugements rendus par les échevins. (Vallet de Viriville, Arch. hist. de l'Aube, p. 363, art. 3; p. 564, art. 15).

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